Cour d’appel de Rennes, 14 janvier 2025, RG n° 25/00024
Cour d’appel de Rennes, 14 janvier 2025, RG n° 25/00024

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Rennes

Thématique : Prolongation de la rétention administrative : conditions et enjeux de l’ordre public.

Résumé

Contexte de l’affaire

Monsieur [L] [M], de nationalité tunisienne, a été placé en rétention administrative par le Préfet d’Ille-et-Vilaine en raison d’une obligation de quitter le territoire français. Cette décision a été notifiée le 3 juin 2024, suivie d’une assignation à résidence. En novembre 2024, il a été placé en rétention pour une durée initiale de quatre jours, en raison de son statut d’étranger sans domicile en France et de son comportement jugé menaçant pour l’ordre public.

Prolongations de la rétention

La rétention de Monsieur [L] [M] a été prolongée à plusieurs reprises par le tribunal judiciaire de Rennes. Après un premier rejet de son recours en annulation, le magistrat a ordonné des prolongations successives, d’abord de 26 jours, puis de 30 jours, et enfin de 15 jours, en raison de la nécessité de préparer son éloignement et des éléments de menace à l’ordre public liés à ses antécédents judiciaires.

Appel de la décision

Le 13 janvier 2025, Monsieur [L] [M] a formé appel de l’ordonnance du 12 janvier 2025, contestant la légitimité de la prolongation de sa rétention. Il a soutenu que le Préfet n’avait pas respecté son obligation de diligence et que les conditions pour une nouvelle prolongation n’étaient pas réunies, arguant qu’il n’avait pas fait obstruction à l’éloignement.

Arguments des parties

Le procureur général a recommandé la confirmation de la décision de prolongation, tandis que l’avocat de Monsieur [L] [M] a contesté la recevabilité de la requête en raison de l’absence de pièces justificatives. De son côté, le représentant de la Préfecture a souligné que le comportement de l’intéressé représentait une menace pour l’ordre public, citant des antécédents de conduite dangereuse.

Décision du tribunal

Le tribunal a jugé que l’appel était recevable et a confirmé l’ordonnance de prolongation de la rétention. Il a estimé que les conditions pour une nouvelle prolongation étaient remplies, notamment en raison de la menace à l’ordre public représentée par Monsieur [L] [M]. La décision a également rejeté la demande d’aide juridictionnelle formulée par l’intéressé.

Conclusion

La prolongation de la rétention administrative de Monsieur [L] [M] a été validée par le tribunal, qui a considéré que les éléments présentés justifiaient cette mesure. La décision a été notifiée aux parties concernées, avec la possibilité d’un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la notification.

COUR D’APPEL DE RENNES

N° 25/13

N° RG 25/00024 – N° Portalis DBVL-V-B7J-VRK3

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

O R D O N N A N C E

articles L 741-10 et suivants du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile

Nous, Sébastien PLANTADE, conseiller à la cour d’appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les articles L.741-10 et suivants du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, assisté de Eric LOISELEUR, greffier placé,

Statuant sur l’appel formé le 13 Janvier 2025 à 14h34 par la CIMADE pour :

M. [L] [M]

né le 23 Juin 1995 à [Localité 3] (TUNISIE)

de nationalité Tunisienne

ayant pour avocat Me Constance FLECK, avocat au barreau de RENNES

d’une ordonnance rendue le 12 Janvier 2025 à 17h05 notifiée à 17h34 par le magistrat en charge des rétentions administratives du Tribunal judiciaire de RENNES qui a et ordonné la prolongation du maintien de M. [L] [M] dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire pour une durée maximale de quinze jours à compter du 12 Janvier 2025 à 24h00;

En l’absence de représentant de la PREFECTURE D’ILLE ET VILAINE, dûment convoqué, ayant adressé des observations le 14 Janvier 2025, lesquelles ont été mises à disposition des parties,

En l’absence du procureur général régulièrement avisé, Monsieur FICHOT, avocat général, ayant fait connaître son avis par écrit déposé le 13 Janvier 2025 lequel a été mis à disposition des parties.

En présence de [L] [M], assisté de Me Constance FLECK, avocat,

Après avoir entendu en audience publique le 14 Janvier 2025 à 10H00 l’appelant assisté de M. [W] [R], interprète en langue arabe, ayant préalablement prêté serment et son avocat en leurs observations,

Avons mis l’affaire en délibéré et ce jour, avons statué comme suit :

Monsieur [L] [M] a fait l’objet d’un arrêté du Préfet d’Ille-et-Vilaine en date du 03 juin 2024, notifié le 04 juin 2024, portant obligation d’avoir à quitter le territoire français sans délai.

Le 13 novembre 2024, Monsieur [L] [M] s’est vu notifier par le Préfet d’Ille-et-Vilaine une décision de placement en rétention administrative, au centre de rétention administrative (CRA) de [Localité 2] pour une durée de quatre jours. A l’appui de sa décision, le Préfet a retenu que faisant l’objet d’une obligation de quitter sans délai le territoire français par arrêté préfectoral du 03 juin 2024, ayant fait l’objet d’une décision portant assignation à résidence par arrêté notifié le 04 juin 2024, Monsieur [L] [M] déclarait être célibataire, sans enfant à charge, indiquait avoir de la famille en Tunisie et non en France, ne démontrant pas avoir noué en France des liens dont l’intensité serait exclusive de tous autres qu’il conservait dans son pays d’origine, de sorte que la mesure opposée ne portait pas une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale au sens des dispositions de l’article 8 de la convention européenne de sauvegardes des droits de l’homme et des libertés fondamentales, tandis que l’intéressé ne faisait état d’aucun problème de santé, ne produisait aucun élément de nature à considérer que son éloignement du territoire portât une atteinte grave à sa santé et n’invoquait aucun élément de nature à établir une vulnérabilité ou un handicap quelconque qui fissent obstacle à un placement en rétention. Il a été ajouté que l’intéressé était dépourvu de tout document d’identité ou de voyage valide, ne justifiait d’aucun domicile en France, ayant déclaré être hébergé par un ami depuis deux jours sans en attester, qu’il avait déclaré refuser de retourner dans son pays d’origine, qu’il n’avait pas déféré à la mesure d’éloignement notifiée le 04 juin 2024, était connu pour plusieurs faits délictueux, notamment des délits routiers commis entre 2023 et 2024, avait de nouveau été placé en garde à vue pour des délits routiers, de sorte que la multiplicité des faits et leur fréquence étaient constitutifs d’un comportement représentant une menace à l’ordre public. Le Préfet en avait conclu que Monsieur [L] [M] ne présentait pas de garanties de représentation effectives suffisantes propres à prévenir le risque de fuite.

Par requête du 14 novembre 2024, Monsieur [L] [M] a contesté l’arrêté de placement en rétention administrative. Par requête motivée en date du 16 novembre 2024, reçue le 17 novembre 2024 à 18h 09 au greffe du tribunal judiciaire de Rennes, le représentant du préfet d’Ille-et-Vilaine a saisi le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Rennes d’une demande de prolongation pour une durée de 26 jours de la rétention administrative de Monsieur [L] [M].

Par ordonnance rendue le 18 novembre 2024, le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Rennes a rejeté le recours en annulation de l’arrêté de placement en rétention administrative et ordonné la prolongation du maintien de Monsieur [L] [M] en rétention dans les locaux non pénitentiaires pour un délai maximum de 26 jours. Cette décision a été confirmée par la Cour d’Appel de Rennes le 20 novembre 2024.

Par requête motivée en date du 12 décembre 2024, reçue le 12 décembre 2024 à 14 h 32 au greffe du tribunal de Rennes, le représentant du préfet d’Ille-et-Vilaine a saisi le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Rennes d’une nouvelle demande de prolongation pour une durée de 30 jours de la rétention administrative de Monsieur [L] [M].

Par ordonnance rendue le 13 décembre 2024, le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Rennes a ordonné la prolongation du maintien de Monsieur [L] [M] en rétention dans les locaux non pénitentiaires pour un délai maximum de 30 jours.

Par requête motivée en date du 11 décembre 2024, reçue le 11 janvier 2025 à 16h 29 au greffe du tribunal judiciaire de Rennes, le représentant du Préfet d’Ille-et-Vilaine a saisi le tribunal judiciaire de Rennes d’une demande de prolongation pour une durée de 15 jours de la rétention administrative de Monsieur [L] [M].

Par ordonnance rendue le 12 janvier 2025, le magistrat du siège du Tribunal judiciaire de Rennes a ordonné la prolongation du maintien de Monsieur [L] [M] en rétention dans les locaux non pénitentiaires pour un délai maximum de 15 jours.

Par déclaration reçue au greffe de la Cour d’Appel de Rennes le 13 janvier 2025 à 14h 34, Monsieur [L] [M] a formé appel de cette ordonnance.

L’appelant fait valoir, au soutien de sa demande d’infirmation de la décision entreprise, que le Préfet a failli dans on obligation de diligence et que les conditions propres à une troisième prolongation de la rétention administrative n’étaient pas réunies, faute d’obstruction de sa part et en l’absence de réponse depuis deux mois des autorités consulaires saisies, ajoutant que son comportement ne pouvait constituer une menace à l’ordre public, s’agissant que d’une seule condamnation à une peine d’emprisonnement avec sursis.

Le procureur général, suivant avis écrit du 13 janvier 2025, sollicite la confirmation de la décision entreprise.

Comparant à l’audience, Monsieur [L] [M] indique souhaiter retrouver sa liberté, être pour la première fois au centre de rétention, ce qui le bloque dans sa demande de renouvellement de son titre de séjour, ne pas avoir d’antécédents judiciaires, être fatigué, avoir des allergies, des rendez-vous médicaux et déclare disposer d’un passeport valide qui se trouverait à [Localité 1]. Il précise qu’il travaillait régulièrement auparavant dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée. Son conseil soutient tout d’abord que le requête est irrecevable, faute de joindre la copie actualisée du registre portant la mention de la décision du juge de première instance du 12 janvier 2025, que le critère de la menace pour l’ordre public ne peut être établi faute de pièces jointes permettant d’apprécier la menace alléguée, alors que le condamnation visée n’est pas versée parmi les pièces d’autant plus que son client n’avait pas une conduite dangereuse, se trouvant sur une aire de stationnement, et ajoute qu’en l’état, il n’existe pas de perspectives raisonnables d’éloignement de l’intéressé à bref délai. Il est en outre formé une demande sur le fondement des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 sur l’aide juridictionnelle.

Le représentant de la Préfecture d’Ille-et-Vilaine, non comparant à l’audience, demande aux termes de son mémoire en réponse, confirmation de la décision entreprise, faisant observer que la menace à l’ordre public est caractérisée du fait de la condamnation du 13 novembre 2024, de l’interpellation de l’intéressé au mois de juin 2024 alors qu’il était en possession de produits stupéfiants et du non-respect d’une assignation à résidence, que les diligences consulaires sont en cours auprès des autorités tunisiennes saisies et que les perspectives d’éloignement existent.

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement,

Déclarons l’appel recevable,

Confirmons l’ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Rennes en date du 12 janvier 2025,

Rejetons la demande titre de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l’aide juridictionnelle,

Laissons les dépens à la charge du trésor public,

Fait à Rennes, le 14 Janvier 2025 à 12h00

LE GREFFIER, PAR DÉLÉGATION, LE CONSEILLER,

Notification de la présente ordonnance a été faite ce jour à [L] [M], à son avocat et au préfet

Le Greffier,

Cette ordonnance est susceptible d’un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.

Communication de la présente ordonnance a été faite ce même jour au procureur général.

Le Greffier

 


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