Cour d’appel de Reims, 29 janvier 2025, RG n° 23/01785
Cour d’appel de Reims, 29 janvier 2025, RG n° 23/01785

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Reims

Thématique : Harcèlement et inaptitude : un licenciement contesté

Résumé

Embauche et plainte pour harcèlement

La SARL DP [Localité 3] a embauché Madame [X] [K] en tant qu’employée polyvalente le 7 février 2020. Le 19 mai 2020, elle a déposé une plainte contre le gérant de l’entreprise pour harcèlement sexuel.

Sanctions disciplinaires et arrêt de travail

Entre juillet 2020 et janvier 2021, Madame [X] [K] a été convoquée à cinq entretiens préalables à sanction disciplinaire, et un avertissement lui a été notifié le 21 décembre 2020. Elle a été placée en arrêt de travail à partir du 8 janvier 2021.

Avis d’inaptitude et licenciement

Le 23 avril 2021, le médecin du travail a déclaré Madame [X] [K] inapte à tout reclassement. Le 21 mai 2021, la SARL DP [Localité 3] a licencié Madame [X] [K] pour inaptitude.

Demande en justice

Le 20 mai 2022, Madame [X] [K] a saisi le conseil de prud’hommes d’Épernay, demandant la nullité de son licenciement et des indemnités pour harcèlement sexuel et moral.

Jugement du conseil de prud’hommes

Le 16 octobre 2023, le conseil de prud’hommes a jugé que Madame [X] [K] était recevable et fondée dans ses demandes, a reconnu le harcèlement sexuel et moral, a déclaré le licenciement nul, et a condamné la SARL DP [Localité 3] à verser plusieurs indemnités.

Appel de la SARL DP

Le 14 novembre 2023, la SARL DP [Localité 3] a interjeté appel du jugement. Dans ses écritures du 16 janvier 2024, elle a demandé l’infirmation du jugement et le déboutement de Madame [X] [K].

Réponse de Madame [X] [K] à l’appel

Dans ses écritures du 16 avril 2024, Madame [X] [K] a demandé la confirmation du jugement, sauf pour certaines indemnités, et a formulé des demandes supplémentaires concernant les documents de fin de contrat.

Arguments sur le harcèlement sexuel

La SARL DP [Localité 3] a contesté la caractérisation du harcèlement sexuel, tandis que Madame [X] [K] a fourni des éléments prouvant des comportements inappropriés de la part du gérant.

Arguments sur le harcèlement moral

La SARL DP a également contesté les allégations de harcèlement moral, mais Madame [X] [K] a soutenu que les convocations à des entretiens étaient liées à sa plainte et ont contribué à un climat de travail toxique.

Nullité du licenciement

La SARL DP a demandé l’infirmation de la nullité du licenciement, mais Madame [X] [K] a soutenu que son inaptitude était liée aux actes de harcèlement subis.

Conséquences financières du licenciement

Le jugement a confirmé certaines indemnités dues à Madame [X] [K], tout en infirmant d’autres, notamment concernant l’indemnité compensatrice de congés payés.

Documents de fin de contrat

La cour a ordonné à la SARL DP de remettre à Madame [X] [K] ses documents de fin de contrat, sans astreinte.

Dépens et indemnité de procédure

La SARL DP a été condamnée aux dépens d’appel, tandis que Madame [X] [K] a été déboutée de sa demande d’indemnité de procédure.

Arrêt n°

du 29/01/2025

N° RG 23/01785

MLB/FJ

Formule exécutoire le :

à :

COUR D’APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 29 janvier 2025

APPELANTE :

d’un jugement rendu le 16 octobre 2023 par le Conseil de Prud’hommes d’EPERNAY, section Commerce (n° F 22/00033)

SARL DP [Localité 3]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par la SCP LE NUE-LEROY-PLAGNE, avocats au barreau de CHALONS EN CHAMPAGNE

INTIMÉE :

Madame [X] [K]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

(bénéficie d’une aide juridictionnelle totale numéro 2024-000502 du 31/01/2024 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de REIMS)

Représentée par Me Louis-Stanislas RAFFIN de la SELARL RAFFIN ASSOCIES, avocat au barreau de REIMS

DÉBATS :

En audience publique, en application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 2 décembre 2024, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur François MÉLIN, président de chambre, et Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller, chargés du rapport, qui en ont rendu compte à la cour dans son délibéré ; elle a été mise en délibéré au 29 janvier 2025.

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Monsieur François MÉLIN, président

Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller

Madame Isabelle FALEUR, conseiller

GREFFIER lors des débats :

Monsieur Francis JOLLY, greffier

ARRÊT :

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, et signé par Monsieur François MÉLIN, président, et Monsieur Francis JOLLY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

Suivant contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel du 7 février 2020, la SARL DP [Localité 3] a embauché Madame [X] [K] en qualité d’employée polyvalente.

Le 19 mai 2020, Madame [X] [K] a déposé plainte à l’encontre du gérant de la SARL DP [Localité 3] pour des faits de harcèlement sexuel.

Entre le mois de juillet 2020 et le mois de janvier 2021, Madame [X] [K] a été convoquée à 5 entretiens préalables à sanction disciplinaire. Le 21 décembre 2020, la SARL DP [Localité 3] lui a notifié un avertissement.

Madame [X] [K] a été placée en arrêt de travail continu à compter du 8 janvier 2021.

Le 23 avril 2021, le médecin du travail a rendu un avis d’inaptitude et a indiqué que l’état de santé de la salariée faisait obstacle à tout reclassement dans un emploi.

Le 21 mai 2021, la SARL DP [Localité 3] a notifié à Madame [X] [K] son licenciement pour inaptitude et impossibilité de la reclasser.

Soutenant notamment avoir été victime de harcèlement sexuel et de harcèlement moral à l’origine de son inaptitude, Madame [X] [K] a saisi le conseil de prud’hommes d’Épernay le 20 mai 2022 d’une demande tendant, à titre principal, à voir prononcer la nullité de son licenciement et, à titre subsidiaire, à un licenciement sans cause réelle et sérieuse, outre des demandes en paiement à caractère indemnitaire et salarial.

Par jugement en date du 16 octobre 2003, le conseil de prud’hommes a :

– dit Madame [X] [K] recevable et bien fondée en ses demandes,

– dit que Madame [X] [K] a subi un harcèlement sexuel et moral de la part du gérant de la SARL DP [Localité 3],

– dit que la SARL DP [Localité 3] a concouru à l’inaptitude de Madame [X] [K],

– dit que le licenciement de Madame [X] [K] par la SARL DP [Localité 3] intervenu le 21 mai 2021 est nul,

– condamné la SARL DP [Localité 3] à payer à Madame [X] [K] les sommes de :

. 8527,56 euros nets à titre de dommages-intérêts pour harcèlement sexuel,

. 8527,56 euros nets à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral,

. 4263,78 euros nets à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul,

. 710,63 euros bruts au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés,

. 71,06 euros bruts au titre des congés payés y afférents,

– rappelé l’exécution provisoire de droit de l’article R.1454-28 du code du travail s’agissant de l’indemnité compensatrice de congés payés et congés payés y afférents,

– prononcé l’exécution provisoire du jugement à intervenir en vertu de l’article 515 du code de procédure civile sur les dommages-intérêts pour licenciement nul, et pour préjudice moral et sexuel,

– condamné la SARL DP [Localité 3] aux dépens,

– débouté la SARL DP [Localité 3] de l’ensemble de ses demandes.

Le 14 novembre 2023, la SARL DP [Localité 3] a formé une déclaration d’appel.

Dans ses écritures du 16 janvier 2024, la SARL DP [Localité 3] demande à la cour d’infirmer le jugement et par conséquent de débouter Madame [X] [K] de l’ensemble de ses demandes au titre du harcèlement sexuel, du harcèlement moral et du licenciement nul. À titre subsidiaire, elle lui demande de fixer les indemnités en fonction du préjudice subi et justifié par Madame [X] [K] et de condamner cette dernière à lui payer la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Dans ses écritures en date du 16 avril 2024, Madame [X] [K] demande à la cour de confirmer le jugement sauf en ce qu’il a condamné la SARL DP [Localité 3] à lui payer la somme de 710,63 euros bruts au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés et 71,06 euros bruts au titre des congés payés y afférents,

et, statuant à nouveau, de :

– condamner la SARL DP [Localité 3] à lui payer la somme de 710,63 euros bruts au titre de l’indemnité compensatrice de préavis et celle de 71,06 euros bruts au titre des congés payés y afférents,

– condamner la SARL DP [Localité 3] à lui remettre ses documents de fin de contrat rectifiés, attestation pôle emploi, certificat de travail, solde de tout compte, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à l’expiration d’un délai de huit jours suivant la signification de l’arrêt à intervenir,

à titre subsidiaire, si la cour venait à infirmer le jugement déféré sur le harcèlement ayant concouru à l’inaptitude et sur la nullité du licenciement,

– juger qu’elle a subi un harcèlement moral de la part du gérant de la SARL DP [Localité 3],

en conséquence :

– juger que la SARL DP [Localité 3] a concouru à la survenance de son inaptitude,

– juger que son licenciement pour inaptitude intervenu le 21 mai 2021 est nul,

et par référence à un salaire moyen mensuel brut de 710,63 euros :

– condamner la SARL DP [Localité 3] à lui payer la somme de 8527,56 euros nets à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral,

– condamner la SARL DP [Localité 3] à lui payer la somme de 4263,78 euros nets à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul,

– condamner la SARL DP [Localité 3] à lui payer la somme de 710,63 euros bruts au titre de l’indemnité compensatrice de préavis, outre la somme de 71,06 euros bruts au titre des congés payés afférents,

à titre infiniment subsidiaire :

– juger que la SARL DP [Localité 3] a concouru à la survenance de son inaptitude,

en conséquence,

– juger que son licenciement pour inaptitude intervenu le 21 mai 2021 est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

et par référence à un salaire moyen mensuel brut de 710,63 euros :

– condamner la SARL DP [Localité 3] à lui payer la somme de 4263,78 euros nets à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– condamner la SARL DP [Localité 3] à lui payer la somme de 710,63 euros bruts au titre de l’indemnité compensatrice de préavis, outre la somme de 71,06 euros bruts au titre des congés payés afférents,

– condamner la SARL DP [Localité 3] à lui payer la somme de 8527,56 euros nets à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral,

statuant à nouveau,

– condamner la SARL DP [Localité 3] à lui payer la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouter la SARL DP [Localité 3] de l’ensemble de ses demandes,

– condamner la SARL DP [Localité 3] aux dépens.

Par ces motifs :

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Confirme le jugement déféré sauf du chef des dommages-intérêts pour harcèlement sexuel, sauf du chef des dommages-intérêts pour harcèlement moral et sauf du chef de l’indemnité compensatrice de congés payés et de congés payés y afférents ;

L’infirme de ces chefs ;

Statuant à nouveau dans cette limite et y ajoutant :

Condamne la SARL DP [Localité 3] à payer à Madame [X] [K] les sommes de :

– 3000 euros à titre de dommages-intérêts pour harcèlement sexuel ;

– 4000 euros à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral ;

– 710,63 euros bruts au titre de l’indemnité compensatrice de préavis ;

– 71,06 euros bruts au titre des congés payés y afférents ;

Dit que les condamnations sont prononcées sous déduction des éventuelles cotisations sociales salariales applicables ;

Enjoint à la SARL DP [Localité 3] de remettre à Madame [X] [K] son certificat de travail, son attestation Pôle Emploi et son solde de tout compte conformes à la présente décision ;

Déboute Madame [X] [K] de sa demande d’astreinte ;

Déboute la SARL DP [Localité 3] et Madame [X] [K] de leur demande d’indemnité de procédure ;

Condamne la SARL DP [Localité 3] aux dépens d’appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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