Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Reims
Thématique : Conflit autour de la rémunération et des obligations contractuelles dans le secteur des services : enjeux de la notification et de la convocation.
→ RésuméM. [Y] [W], serveur chez Safran depuis le 1er octobre 2023, n’a jamais perçu de salaire, ce qui l’a conduit à saisir le conseil de prud’hommes de Troyes. Le 28 mai 2024, ce dernier a jugé ses réclamations fondées, condamnant Safran à verser 5 332,60 euros pour les salaires dus et 533,60 euros pour les congés payés. En appel, Safran a contesté cette décision, arguant d’une absence de convocation. La cour a finalement annulé l’ordonnance, établissant que la convocation avait été envoyée mais non réclamée, et a rejeté les demandes des deux parties concernant les dépens.
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Arrêt n° 648
du 27/11/2024
N° RG 24/00943 – N° Portalis DBVQ-V-B7I-FQDR
FM / ACH
Formule exécutoire le :
27/11/24
à :
– PETERSON
– FAALI
COUR D’APPEL DE REIMS
CHAMBRE SOCIALE
Arrêt du 27 novembre 2024
APPELANTE :
d’une décision rendue le 28 mai 2024 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de TROYES, section REFERE (n° R 24/00026)
S.A.S. SAFRAN
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée par Me Frank PETERSON, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉ :
Monsieur [Y] [W]
[Adresse 2]
[Localité 1]
Représenté par Me Raphaël FAALI, avocat au barreau de PARIS
DÉBATS :
En audience publique, en application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 14 octobre 2024, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur François MÉLIN, Président de chambre, chargé du rapport, qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré ; elle a été mise en délibéré au 27 novembre 2024.
COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :
M. François MELIN, président
Madame Isabelle FALEUR, conseillère
Monsieur Olivier JULIEN, conseiller
GREFFIER lors des débats :
Madame Allison CORNU-HARROIS, greffière
ARRÊT :
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, et signé par M. François MELIN, président, et Madame Allison CORNU-HARROIS, greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
* * * * *
Soutenant avoir été embauchée par la société Safran le 1er octobre 2023 en qualité de serveur et n’avoir jamais été payée par la suite, M. [Y] [W] a saisi le conseil de prud’hommes de Troyes en référé, en demandant notamment la condamnation de la société Safran à lui payer des salaires.
Par une ordonnance du 28 mai 2024, le conseil a :
Dit M. [Y] [W] recevable et bien fondé en ses réclamations,
Condamné la société Safran à payer les sommes suivantes : 5 332, 6 euros bruts à titre de salaire d’octobre 2023 à avril 2024 ; 533, 60 euros bruts à titre de congés payés afférents,
Dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de chaque échéance exigible,
Ordonné à la société Safran de remettre les bulletins de paie de décembre 2023 à avril 2024 sous astreinte de 50, 00 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la notification de la présente décision, astreinte que le conseil se réserve le droit de liquider,
Condamné la société Safran à payer la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamné la société Safran aux entiers dépens.
La société Safran a formé appel.
Par des conclusions remises au greffe le 23 juillet 2024, la société Safran demande à la cour de :
Déclarer recevable et bien fondée son appel.
En conséquence,
A titre principal annuler l’ordonnance,
A titre subsidiaire, infirmer l’ordonnance entreprise,
Y faisant droit,
Et statuant à nouveau,
– Condamner la société Safran au paiement des sommes suivantes :
Rappel de salaire d’octobre et novembre 2023 : 1 865,38 €
Congés payés y afférents : 186, 54 €
Condamner M. [Y] [W] aux entiers dépens y compris ceux dus au titre d’une éventuelle exécution par voie légale en application des articles 10 et 11 des décrets du 12 décembre 1996 et du 08 mars 2001 relatifs à la tarification des actes d’Huissiers de justice.
La condamner également au paiement d’une somme de 2 400 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile.
Par des conclusions remises au greffe le 17 septembre 2024, M. [Y] [W] demande à la cour de :
dire bien jugé, mal appelé,
Sans avoir égard aux fins, conclusions de la société Safran,
la débouter de toutes ses demandes
confirmer en conséquence, en toutes ses dispositions, l’ordonnance rendue par le Conseil de prud’hommes de Troyes du 28 mai 2024 en ce qu’elle a condamné la Société Safran au paiement de la somme de 5. 332,60 € au titre des salaires impayés du mois d’octobre 2023 au mois d’avril 2024 et la somme de 533,30 € au titre des congés payés sur les salaires impayés du mois d’octobre 2023 au mois d’avril et ce avec intérêts légaux à compter de chaque échéance éligible ;
confirmer également la décision entreprise en ce qu’elle a ordonné à la société Safran de remettre les bulletins de paie de décembre 2023 à avril 2024 sous astreinte de 50€ par jour de retard à compter du 15ème jour suivant notification de la décision, astreinte que le Conseil se réserve le droit de liquider et au paiement de la somme de 1 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile et en tous les frais et dépens ;
condamner enfin la Société Safran au paiement de 3500 euros, en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
la condamner en tous les frais et dépens.
MOTIFS
Sur la nullité de l’ordonnance:
La société Safran demande à la cour de prononcer la nullité de l’ordonnance car le conseil a statué alors pourtant qu’elle n’a pas reçu la convocation.
M. [Y] [W] répond que le conseil a bien adressé une convocation à la société Safran.
Dans ce cadre, la cour relève que l’ordonnance indique que les parties ont été convoquées le 25 avril 2024 à l’audience du 21 mai 2024 et que « le 21 mai 2024, après l’audience, le Greffe est destinataire du retour de la convocation par courrier recommandé adressé à la SAS Safran avec la mention Pli avisé et non réclamé ».
Or, conformément à l’article 670-1 du code de procédure civile, en cas de retour au greffe du conseil de prud’hommes de la lettre de convocation dont l’avis de réception n’a pas été signé par son destinataire ou par une personne munie d’un pouvoir à cet effet, le greffier doit inviter le demandeur à procéder par voie de signification par commissaire de justice. Cette obligation s’impose lorsque la lettre n’a pas été réclamée (Civ. 2e, 14 juin 2018, n° 17-21.149).
L’ordonnance doit donc être annulée, étant précisé que l’effet dévolutif de l’appel n’opère pas en l’espèce en l’absence de convocation régulière du défendeur devant le conseil.
Sur l’article 700 du code de procédure civile :
La demande formée par la société Safran au titre de l’article 700 du code de procédure civile est rejetée pour des motifs pris de l’équité.
La demande formée par M. [Y] [W] est également rejetée.
Sur les dépens :
Les dépens sont mis à la charge du Trésor public.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Annule l’ordonnance du conseil de prud’hommes de Troyes du 28 mai 2024 (RG R 24/00026) ;
Rejette les demandes formées par les parties au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Met les dépens à la charge du Trésor public.
La Greffière Le Président
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