Cour d’appel de Reims, 20 mars 2018
Cour d’appel de Reims, 20 mars 2018

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Reims

Thématique : « Absorption » des délits de presse

Résumé

La nullité d’une assignation en diffamation peut résulter d’une double qualification des faits. Dans une affaire récente, une société a vu son action jugée irrecevable car l’assignation ne distinguait pas clairement entre injure et diffamation. Selon l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881, une assignation doit préciser le fait incriminé et ne peut retenir simultanément ces deux qualifications pour un même fait. La société a tenté d’invoquer l’absorption du délit d’injure par celui de diffamation, mais cette approche a échoué, car tous les faits étaient qualifiés de diffamatoires sans distinction.

Nullité d’une assignation

La rédaction d‘une assignation en diffamation est affaire de spécialiste. Une nouvelle fois, une société a été jugée irrecevable à agir en diffamation / injure, la juridiction ayant prononcé la nullité de l’assignation délivrée.  La société avait été mise en cause par le journal « L’Est Eclair » pour des faits d’escroquerie présumée.

Article 53 de la loi du 29 juillet 1881

Selon l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881, l’assignation doit, à peine de nullité, préciser et qualifier le fait incriminé et énoncer le texte de loi applicable. Est nulle une assignation retenant pour le même fait la double qualification d’injure et de diffamation. En l’espèce, l’assignation visait globalement les articles 29 et 32 de la loi du 29 juillet 1881 en indiquant dans le dispositif de cette assignation que les écrits du journal étaient à la fois diffamatoires et injurieux.

L’assignation ne distinguait, ni dans ses motifs, ni dans son dispositif, ceux des faits qui devraient recevoir la qualification d’injure et ceux qui devaient être considérés comme des imputations diffamatoires. Au contraire, dans les motifs de l’assignation, les extraits du texte de l’article étaient tous qualifiés comme portant atteinte à l’honneur, à la considération et à la réputation de la société, ce qui permettait de les envisager uniquement sous l’angle de la diffamation. A défaut d’avoir fait cette ventilation entre les deux qualifications suivant les allégations relevées, l’assignation était frappée de nullité, un fait unique ne pouvant être à la fois qualifié d’injure et de diffamation.

Question de « l’absorption »

La société, consciente d’avoir procéder à une double qualification pour les mêmes faits, a invoqué en vain l’absorption du délit d’injure par celui de diffamation. Cette absorption implique l’obligation de n’invoquer que la qualification de diffamation, sans autoriser la double qualification pour le même fait.  La double qualification d’injure et de diffamation est possible seulement lorsqu’il résulte de l’analyse de l’article de presse litigieux que les termes injurieux ne se réfèrent pas aux faits visés par les imputations diffamatoires, ce qui n’était pas possible en l’occurrence puisque tous les faits relevés par la société étaient qualifiés de diffamatoires dans les motifs de son assignation. Au surplus, alors que la société qualifiait l’article de presse litigieux d’injurieux, elle ne visait pas l’article 33 de la loi du 29 juillet 1881 (sanctions applicables au délit d’injure).

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