Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Pau
Thématique : Expertise technique et mission complémentaire : enjeux et responsabilités.
→ RésuméContexte de l’affaireLe litige concerne un bail à construction signé le 3 mai 2011 entre le groupement foncier agricole (GFA) du [Adresse 12] et la société Fonroches serres, représentée par la SASU Reden serres. Ce bail portait sur une parcelle de terrain à [Localité 14], où la SASU Reden serres a entrepris la construction de trois serres agricoles équipées d’une installation photovoltaïque, pour un coût d’environ 13 300 000 euros. Construction et sous-traitanceLa SASU Reden serres a confié la construction des serres à la société Fonroche énergies renouvelables, représentée par la SAS Reden solar, avec une assurance fournie par la SA AXA France IARD. La SAS Horconex, sous-traitante assurée par la SA Generali, a également participé à la construction. Une assurance dommages-ouvrage a été souscrite par la SASU Reden serres. Problèmes rencontrésÀ partir de mars 2018, des problèmes sont survenus avec de nombreuses vitres des serres qui se sont cassées ou fendues. Une expertise amiable a été demandée par AXA France IARD, mais n’a pas abouti. En conséquence, le juge des référés a ordonné une expertise judiciaire le 18 mars 2021, qui a été réalisée par un expert désigné. Décisions judiciairesLe 19 janvier 2022, la cour d’appel de Pau a confirmé l’ordonnance ordonnant une expertise et a condamné la SASU Reden serres à remplacer les vitrages cassés et à effectuer des travaux pour assurer la sécurité des lieux. En mars 2024, l’expert a demandé un honoraire complémentaire pour une mission d’assistance technique, ce qui a été contesté par la SASU Reden serres. Appel et contestationsLa SAS Horconex et la SA Generali ont interjeté appel de l’ordonnance, contestant la légitimité de la mission complémentaire du sapiteur et d’autres décisions. Ils ont demandé l’infirmation de l’ordonnance en ce qui concerne la mission du sapiteur et la date limite pour les mises en cause. Arguments des partiesLes appelantes soutiennent que la mission du sapiteur empiète sur les droits de la défense et que le principe du contradictoire n’a pas été respecté. Elles demandent également une prorogation du délai pour le dépôt du rapport d’expertise. En revanche, les intimés, dont la SASU Reden serres, soutiennent que la mission du sapiteur est nécessaire pour avancer dans l’expertise et que le principe du contradictoire a été respecté. Décision de la courLa cour a confirmé l’ordonnance en toutes ses dispositions, y compris la mission du sapiteur et la prorogation du délai pour le dépôt du rapport d’expertise au 30 juin 2025. Elle a également rejeté les demandes d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et a condamné les appelantes aux dépens d’appel. |
CF/RP
Numéro 25/00324
COUR D’APPEL DE PAU
1ère Chambre
ARRÊT DU 29/01/2025
Dossier :
N° RG 24/01533
N° Portalis DBVV-V-B7I-I3PO
Nature affaire :
Autres demandes relatives à un contrat de réalisation de travaux de construction
Affaire :
S.A. GENERALI IARD
S.A.S. HORCONEX
C/
[W] [H]
[L] [K]
Société DEKRA INDUSTRIAL
S.C.E.A. BIO-DIX
S.A.S.U. REDEN SERRES
S.A.R.L. ALPILLES HYGIENE
Compagnie AXA FRANCE IARD
S.A.S. REDEN SOLAR
Société INTVEN KASSENBOUW EN STAALCONSTRUCTIES BV
Société AMA XL INSURANCE COMPAGNY SE
Grosse délivrée le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R Ê T
prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 29 Janvier 2025, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l’audience publique tenue le 18 Décembre 2024, devant :
Madame FAURE, Présidente, magistrate chargée du rapport,
assistée de Madame HAUGUEL, greffière présente à l’appel des causes,
Madame FAURE, en application de l’article 805 du code de procédure civile et à défaut d’opposition a tenu l’audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :
Madame FAURE, Présidente
Madame de FRAMOND, Conseillère
Madame BLANCHARD, Conseillère
qui en ont délibéré conformément à la loi.
dans l’affaire opposant :
APPELANTES :
S.A. GENERALI IARD
assureur de HORCONEX
Société anonyme au capital de 94 630 300,00 €, imatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 552 062 663 dont le siège social est [Adresse 1]
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
représentée par Maître Thomas GACHIE de la SELARL THOMAS GACHIE, avocat au barreau de MONT-DE-MARSAN, et de Maître Jérôme GRANDMAIRE de la SELARL LEGABAT, avocat au barreau de PARIS
S.A.S. HORCONEX
Société par actions simplifiée au capital de 50.000,00 €, immatriculée au RCS de PARIS sous le n° 381 098 300 dont le siège social est [Adresse 5]
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
représentée par Maître Thomas GACHIE de la SELARL THOMAS GACHIE, avocat au barreau de MONT-DE-MARSAN, et de Maître Jérôme GRANDMAIRE de la SELARL LEGABAT, avocat au barreau de PARIS
INTIMES :
Monsieur [W] [H]
né le 28 Décembre 1957 à [Localité 16] (75)
de nationalité Française
[Adresse 7]
[Localité 11]
représentée par Maître François PIAULT, avocat au barreau de PAU, et assistée de Maître Thomas RIVIERE, avocat au barreau de BORDEAUX
Monsieur [L] [K]
[Adresse 17]
[Localité 8]
assigné
Société DEKRA INDUSTRIAL
[Adresse 15]
[Localité 10]
assignée
S.C.E.A. BIO-DIX
immatriculée au RCS de MONT DE MARSAN sous le n° 532 939 519,
dont le siège social est [Adresse 4]
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège
représentée par Maître François PIAULT, avocat au barreau de PAU, et assistée de Maître Thomas RIVIERE, avocat au barreau de BORDEAUX
S.A.S.U. REDEN SERRES
société par actions simplifiées unipersonnelle
immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés d’Agen sous le numéro 523 422 996,
dont le siège social est sis [Adresse 20] prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
représentée par Maître Vincent LIGNEY de la SELARL DUALE-LIGNEY-
BOURDALLE, avocat au barreau de PAU, et assistée de Maître MENEGHETTI de la SELARL MENEGHETTI AVOCATS, avocat au barreau de PARIS
S.A.R.L. ALPILLES HYGIENE
SARL unipersonnelle, immatriculée au RCS de TARASCON sous le N° 507 890 879
dont le siège social est [Adresse 18]
représentée par Maître Sophie CREPIN de la SELARL LX PAU-TOULOUSE, avocat au barreau de PAU, et assistée de Maître Jean-Marc ZANATI de la SELAS COMOLET-ZANATI AVOCATS, avocat au barreau de PARIS
La Compagnie AXA FRANCE IARD
prise en qualité d’assureur Dommages-ouvrage et d’assureur de la Société REDEN SOLAR
S.A. au capital de 214 799 090,00 €, immatriculée au RCS de NANTERRE sous le N° 722 057 460
dont le siège social est [Adresse 2]
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
représentée par Maître Olivier LABAT de la SCP COUDEVYLLE/LABAT/BERNAL, avocat au barreau de PAU, et assistée de Maître Marin RIVIERE, avocat au barreau de BORDEAUX
S.A.S. REDEN SOLAR
prise en la personne de son représentant légal domicilié audit siège
[Adresse 21]
[Localité 6]
représentée par Maître Stéphanie SOPENA, avocat au barreau de PAU, et assistée de Maître Thomas FERRANT de la SELARL CABINET FERRANT, avocat au barreau de BORDEAUX
Société INTVEN KASSENBOUW EN STAALCONSTRUCTIES BV
[Adresse 19]
[Localité 3]
assignée
Société AMA XL INSURANCE COMPAGNY SE
[Adresse 9]
[Localité 13] IRLANDE
assignée
sur appel de la décision
en date du 14 MAI 2024
rendue par le Juge chargé du contrôle des Expertises du Tribunal Judiciaire de MONT DE MARSAN
RG numéro : 21/00030
EXPOSE DU LITIGE
Par acte notarié du 3 mai 2011, le groupement foncier agricole (GFA) du [Adresse 12], aux droits duquel vient Monsieur [W] [H], a donné à bail à construction à la société Fonroches serres, aux droits de laquelle vient la SASU Reden serres, une parcelle de terrain située à [Localité 14] (40).
La SASU Reden serres a ainsi entrepris la construction sur cette parcelle de trois bâtiments à usage de serres agricoles équipées d’une installation photovoltaïque, pour un coût d’environ 13 300 000 euros.
Par acte notarié des 13 et 25 mai 2011, la SASU Reden serres a donné à bail rural à long terme à la SCEA Bio-dix la parcelle comprenant les serres en l’état futur d’achèvement.
Selon un marché du 31 mars 2011, la SASU Reden serres a confié la construction des serres à la société Fonroche énergies renouvelables, aux droits de laquelle vient la SAS Reden solar, assurée par la SA AXA France IARD.
La SAS Horconex, assurée auprès de la SA Generali, est intervenue à la demande de la SAS Reden solar, comme sous-traitant, pour la construction des serres.
Une assurance dommages-ouvrage a été souscrite par la SASU Reden serres auprès de la SA AXA France IARD.
La réception des travaux entre la SASU Reden serres et la SAS Reden solar est intervenue le 16 mars 2012.
Dans le cadre d’un contrat de prestation d’entretien de serres photovoltaïques du 19 octobre 2016, la SAS Reden serres a confié à la SARL Alpilles hygiène le nettoyage des toits des serres parties en verre et en modules photovoltaïques.
A compter de mars 2018, de nombreuses vitres de serres se sont cassées ou fendues.
Une expertise amiable a été diligentée par la SA AXA France IARD, mais n’a pas abouti.
Par ordonnance du 18 mars 2021, le juge des référés du tribunal judiciaire de Mont-De-Marsan a fait droit à la demande de M. [H] et de la SCEA Bio-dix de voir ordonner une expertise judiciaire, et a désigné M. [F] pour y procéder, ensuite remplacé par M. [K].
L’expertise a été rendue commune et opposable aux différents intervenants à l’opération par ordonnance du 7 octobre 2021.
Par arrêt du 19 janvier 2022, la cour d’appel de Pau a confirmé l’ordonnance en ce qu’elle a ordonné une expertise, et a condamné la SASU Reden serres à procéder à la dépose et au remplacement des vitrages cassés et à tous travaux de nature à assurer la sécurité et l’étanchéité des lieux, sous astreinte, ce qui avait été refusé par le premier juge.
Le 21 mars 2024, l’expert a sollicité du juge chargé du contrôle des expertises la consignation d’un honoraire complémentaire au bénéfice du bureau d’études Etudes Alde, l’un de ses sapiteurs, souhaitant qu’il continue à l’assister avec pour mission de :
– définir et dimensionner les ouvrages de renforcement améliorant la stabilisation de la charpente métallique des trois serres,
– fournir le dossier technique des ouvrages de renforcement en vue de la consultation des entreprises : plans et cadre DPGF vierge,
– donner son avis sur la conformité des offres reçues au dossier technique.
Par conclusions du 12 avril 2024, la SASU Reden serres a sollicité une audience sur incident du fait de son opposition au complément de mission sollicité par l’expert et qu’il entendait confier à un sapiteur.
Par ordonnance contradictoire du 14 mai 2024, le juge chargé du contrôle des expertises a :
– autorisé M. [K] à recourir au cabinet Etudes Alde pour mission complémentaire en termes de chiffrage des solutions réparatoires,
– autorisé par ordonnance distincte la consignation supplémentaire à hauteur de 10 740 euros correspondant à la proposition d’honoraires du cabinet Etudes Alde du 27 février 2014,
– ordonné à la société Horconex et à son assureur Generali de procéder aux mises en cause des sociétés [X] et [J] avant le 15 juin 2024 devant la juridiction compétente,
– dit que M. [K] devra déposer son pré-rapport avant le 31 octobre 2024, terme actuel de sa mission,
– débouté les parties du surplus de leurs demandes.
Pour motiver sa décision, le juge a retenu :
– que le juge des référés a donné pour mission à l’expert de donner tous éléments permettant de déterminer les solutions réparatoires à mettre en oeuvre, leur coût et leur durée, et l’a autorisé de manière générale à recourir à des sapiteurs si besoin,
– que si l’expert peut recevoir des devis des parties et les utiliser pour définir le coût prévisible des réparations, rien ne lui interdit au regard du libellé de sa mission générale de recourir lui-même à des sachants ou des sapiteurs pour calculer le coût des réparations, alors qu’il lui appartient de soumettre ces solutions au contradictoire des parties qui peuvent également transmettre des devis à son appréciation,
– que l’expert a défini, dans ses derniers travaux, les travaux réparatoires à envisager, soit une reprise de stabilité de la structure et un calage des vitrages, et a indiqué qu’à partir de ces solutions, il convenait de procéder à une étude dédiée et à un chiffrage, selon une mission définie dans la demande de complément de provision, de sorte qu’il a bien respecté les termes de sa mission, en conservant le contrôle des opérations,
– qu’aucun manquement de l’expert au principe du contradictoire n’est démontré, de même que l’absence de débat sur les causes techniques des désordres, de sorte que la tenue d’une réunion plénière contradictoire n’est pas justifiée.
Par déclaration du 28 mai 2024 (RG n° 24/01533), la SAS Horconex et la SA Generali IARD ont relevé appel, critiquant l’ordonnance en toutes ses dispositions.
Suivant avis de fixation adressé par le greffe de la cour, l’affaire a été fixée selon les modalités prévues aux articles 905 et suivants du code de procédure civile.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 11 octobre 2024, la SAS Horconex et son assureur, la SA Generali IARD, appelantes, entendent voir la cour :
– déclarer recevables et par suite bien fondées l’ensemble des demandes présentées,
Ainsi,
– infirmer l’ordonnance en ce qu’elle a autorisé M. [K] à recourir au cabinet Etudes Alde pour une mission complémentaire en termes de chiffrage des solutions réparatoires et en ce qu’elle a autorisé par ordonnance distincte la consignation supplémentaire à hauteur de 10 740 euros correspondant à la proposition d’honoraires du cabinet Etudes Alde du 27 février 2024,
Et statuant à nouveau sur ce point,
– écarter la demande présentée par l’expert judiciaire au titre du complément de mission tel que sollicité du cabinet Etudes Alde,
– infirmer l’ordonnance en ce qu’elle leur a ordonné de mettre en cause [X] et [J] avant le 15 juin 2024,
Et statuant à nouveau,
– juger qu’elles vont procéder aux mises en cause des sociétés [X] et [J] dans les meilleurs délais,
– infirmer l’ordonnance en ce qu’elle a dit que Monsieur [K] devrait déposer son rapport avant le 31 octobre 2024, terme actuel de sa mission,
Et statuant à nouveau,
– ordonner en l’état une prorogation de délai concernant la mission de l’expert judiciaire au 30 juin 2025 compte tenu des mises en cause à venir,
– infirmer l’ordonnance en ce qu’elle a débouté les parties de leurs surplus de demandes,
Et statuant à nouveau,
– rappeler à l’expert judiciaire dans le cadre de la poursuite de l’expertise qu’il doit en toutes circonstances respecter le principe du contradictoire et que toutes les conclusions visées par ses sapiteurs devront s’appuyer à terme sur des constats reconnus par tous comme contradictoires et non sur les constats contestés d’une partie,
– enjoindre à l’expert Judiciaire d’éclaircir la question des différents réglages susceptibles d’être apportés sur la machine de nettoyage Alpilles hygiène en faisant appel à tous sachants dont la société Van der way,
– enjoindre à l’expert judiciaire d’organiser une réunion plénière pour débattre des notes ou rapports techniques jusqu’à ce jour établis, qu’ils émanent de lui ou de ses sapiteurs,
Enfin,
– débouter les intimés de toutes demandes qui seraient contraires aux leurs,
– débouter les intimés de leurs demandes au titre des frais irrépétibles,
– condamner tous succombants aux entiers dépens de la procédure en appel dont distraction au profit de Maître Gachié.
Au soutien de leurs prétentions, elles font valoir, au visa des articles 145 et 245 du code de procédure civile :
– que la mission complémentaire du bureau d’études Etudes Alde n’est pas légitime, en ce qu’elle a pour objet la définition et le dimensionnement des ouvrages de renforcement améliorant la stabilisation de la charpente des trois serres, la fourniture du dossier technique des ouvrages de renforcement en vue de la consultation des entreprises et un avis sur la conformité des offres reçues au dossier technique, ce qui correspond à une mission de maîtrise d’oeuvre (conception) et de prescription, ce qui est interdit à l’expert et au sapiteur, qui doivent uniquement se prononcer sur les solutions proposées par les parties,
– qu’il en résulte que la mission confiée au sapiteur heurte les droits de la défense, le sapiteur Etudes Alde étant à la fois juge des solutions qui lui sont présentées, et partie, proposant lui-même des solutions techniques,
– qu’il n’appartenait pas au juge chargé du contrôle des expertises de fixer un cadre procédural aux mises en cause sur lesquelles il ne dispose d’aucun pouvoir d’appréciation ; qu’elles ne sont pas en mesure de garantir les dates imposées pour la mise en cause de parties puisque celle-ci dépend également des dates que la juridiction de référés leur impose, mais qu’elles ont en tout état de cause réussi à mettre en cause les sociétés [X] et [J] dans les délais requis,
– que les sapiteurs de l’expert, et notamment la société Etudes Alde n’ont pas respecté le principe du contradictoire, dès lors que la seule convocation des parties aux accédits techniques n’est pas suffisante pour rendre les constats du BET contradictoires, que les parties n’ont pu avoir aucun échange avec la BET Alde, qui souhaite valider des constats émanant de l’une des parties sans les faire lui-même,
– que le juge n’a pas motivé le rejet de leur demande tendant à obtenir des éclaircissements sur la question des réglages susceptibles d’être apportés à la machine de nettoyage de la SARL Alpilles Hygiène, alors que les tests ont été réalisés sans que cette dernière ne fasse état de toutes les modalités de réglages de sa machine, qui peuvent pourtant influencer les conclusions de l’expert,
– que la tenue d’une réunion plénière pour discuter notamment des rapports des sapiteurs s’impose dès lors qu’aucune analyse technique n’a été réalisée par l’expert avant février 2024, et qu’il est d’usage que le sapiteur s’explique devant les parties du rapport technique qu’il a établi aux fins de respecter le principe du contradictoire, puisqu’en l’espèce, les ouvrages de la SAS Horconex ont été examinés et critiqués sans qu’elle n’ait pu s’exprimer,
– que l’allongement du délai d’expertise ne préjudicie pas à ce stade à M. [H] et à la SCEA Bio-dix, et qu’elles ne sont pas à l’origine du temps de l’expertise judiciaire, rien ne pouvant leur être reproché en ce sens alors que M. [H] et la SCEA Bio-dix étaient en mesure de saisir un maître d’oeuvre pour faire des propositions réparatoires et ainsi accélérer le chiffrage de l’expert en leur qualité de demandeurs à l’expertise,
– que la situation de la SASU Reden serres, condamnée à procéder à la dépose et au remplacement des vitrages cassés ou fissurés et à tous travaux de nature à assurer la sécurité et l’étanchéité du bâtiment, ne doit pas leur préjudicier et conduire à s’affranchir des principes élémentaires de l’expertise judiciaire,
– que la date du 31 octobre 2024 n’a pas été tenue par l’expert qui a lui-même sollicité un report du délai pour remettre son rapport au 30 juin 2025,
– que leurs demandes d’explications sur les réglages de la machine de la SARL Alpilles hygiène et de respect du contradictoire ne sont pas nouvelles en cause d’appel, mais avaient bien été présentées devant le premier juge.
Par conclusions notifiées le 24 juillet 2024, M. [W] [H] et la SCEA Bio-dix, intimés, demandent à la cour de :
– confirmer la décision entreprise,
– rejeter l’appel de la SA Generali IARD,
– condamner la SA Generali IARD à leur payer une somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens d’appel, dont distraction pour ces derniers au profit de Maître Rivière, en vertu des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Au soutien de leurs demandes, ils font valoir que, depuis l’ouverture de l’expertise en 2021, aucune des parties professionnelles et leurs assureurs n’ont désigné de leur propre chef les techniciens, architectes ou maître d’oeuvre pour concevoir la méthode de réparation, de sorte qu’ils ont été contraints de cesser le pan de leur activité concerné par l’expertise, de mettre un terme à plusieurs emplois et de subir un préjudice qui s’aggrave d’année en année.
La décision de l’expert de diligenter un maître d’oeuvre pour déterminer la solution réparatoire est donc nécessaire et utile pour aller au terme de l’expertise, et pallier la carence des parties concernées ou à tout le moins leur absence de décision.
Dans ses conclusions notifiées le 31 juillet 2024, la SASU Reden serres, intimée, demande à la cour de :
– confirmer l’ordonnance en ce qu’elle a autorisé la mission complémentaire du sapiteur Etudes Alde et la consignation supplémentaire s’y rapportant,
En conséquence,
– débouter les sociétés Generali et Horconex de leurs prétentions à cet égard,
– déclarer irrecevables les demandes de réformation sur le délai fixé par l’ordonnance critiquée pour mettre en cause d’autres parties dans les opérations d’expertise,
En conséquence,
– confirmer l’ordonnance en ce qu’elle avait fixé au 15 juin 2024 la date limite pour opérer tout nouvel appel en cause,
– prendre acte qu’elle s’en rapporte à justice sur les demandes d’injonction à l’encontre de l’expert,
– confirmer l’ordonnance critiquée en ce qu’elle a fixé la date du dépôt du rapport au 31 octobre 2024,
– débouter les sociétés Horconex et Generali de toutes autres demandes, fins et conclusions,
En tout état de cause,
– condamner tout succombant à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens dont distraction au profit de la SELARL DLB avocats conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir, au visa de l’article 170 du code de procédure civile :
– que le sapiteur Etudes Alde doit continuer et achever sa mission dans les plus brefs délais afin de pouvoir donner à l’expert, aux parties et au tribunal les éléments utiles pour se prononcer sur les solutions réparatoires nécessaires,
– que le terme de l’expertise est primordial pour les parties, et notamment pour elle, qui a été condamnée sous astreinte à sécuriser les lieux et remplacer les vitrages cassés alors que la cause des désordres n’est pas connue et l’expertise toujours en cours, et pour la SCEA Bio-dix qui envisage une nouvelle plantation sous les serres litigieuses,
– que la mission complémentaire donnée au bureau d’études ne correspond pas à celle d’une maîtrise d’oeuvre dès lors qu’elle n’est cantonnée qu’aux besoins de l’expert judiciaire, au regard des prérogatives délimitées dans l’ordonnance l’ayant désigné, et n’a pour objet que de définir de manière technique un cadre pour l’intervention des futures sociétés qui établiront la conception et opéreront l’exécution des réparations,
– que la mission donnée au sapiteur est indispensable à l’accomplissement de la mission de l’expert, dont l’ordonnance qui l’a désigné lui demandait de donner au juge tous les éléments permettant de déterminer et d’apprécier les solutions réparatoires à mettre en ‘uvre, leur coût et leur durée,
– que la SAS Horconex et son assureur ont d’ores et déjà opéré les appels en cause prévus par l’ordonnance dont appel.
Dans ses conclusions notifiées le 31 juillet 2024, la SAS Reden solar, intimée, demande à la cour de :
– confirmer l’ordonnance dans toutes ses dispositions,
– débouter la société Horconex et la société Generali de l’intégralité de leurs demandes, fins et prétentions,
En tout état de cause,
– condamner solidairement les sociétés Horconex et Generali à lui verser une somme de 3 000 euros au titre des frais de justice.
Au soutien de ses demandes, elle fait valoir :
– que la mission confiée au sapiteur n’est pas une mission de maîtrise d’oeuvre mais d’étude structure complémentaire compte tenu des désordres relevés, et est nécessaire afin de déterminer le cadre dans lequel les maîtres d’oeuvre qui seront missionnés par les parties devront concevoir et exécuter, sur des questions très techniques,
– qu’elle n’a pas constaté d’atteinte au principe du contradictoire à son encontre dans le cadre de l’expertise, et que la demande de la SAS Horconex et de son assureur démontrent leur volonté de remettre en cause les résultats de l’expertise, et notamment les tests de la machine de la SARL Alpilles hygiène réalisés lors d’une réunion qui n’a eu lieu qu’après un débat ayant donné lieu à des méthodes explicitées et validées par les parties, et alors qu’il n’est pas démontré qu’il y aurait eu des erreurs et des oublis à l’occasion des tests,
– que l’expert a indiqué qu’il organiserait une réunion plénière technique contradictoire en fin d’expertise, de sorte que cette demande est sans objet.
Dans ses conclusions notifiées le 29 juillet 2024, la SA AXA France IARD, en qualité d’assureur dommages-ouvrage et d’assureur de la SAS Reden solar, intimée, entend voir la cour :
– statuer ce que de droit sur les prétentions développées par la SA Generali IARD et la SAS Horconex,
– rejeter toutes demandes, fins et conclusions à son encontre,
– laisser les dépens à la charge des parties succombantes.
Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir :
– que la proposition du cabinet Etudes Alde semble correspondre au lancement d’une mission de maîtrise d’oeuvre, qui apparaît prématurée en l’absence de conclusions fermes sur la cause des désordres,
– que les chiffrages doivent être soumis par les parties à l’appréciation de l’expert judiciaire éventuellement assisté de son sapiteur,
– qu’il est utile que les difficultés soulevées par la société Horconex et son assureur puissent être débattues et purgées en expertise afin de disposer d’un rapport exploitable.
Par conclusions notifiées le 26 juillet 2024, la SARL Alpilles hygiène, intimée, demande à la cour de :
– confirmer l’ordonnance en ce qu’elle a autorisé M. [K] à recourir au cabinet Etudes Alde pour mission complémentaire en termes de chiffrage des solutions réparatoires,
– confirmer l’ordonnance en ce qu’elle a autorisé, par ordonnance distincte, la consignation supplémentaire à hauteur de 10 740 euros correspondant à la proposition d’honoraires du cabinet Etudes Alde du 27 février 2014,
– confirmer l’ordonnance en ce qu’elle a ordonné à la société Horconex et à son assureur Generali de procéder aux mises en cause des sociétés [X] et [J] avant le 15 juin 2024 devant la juridiction compétente,
– confirmer l’ordonnance en ce qu’elle a dit que M. [K] devra déposer son pré-rapport avant le 31 octobre 2024, terme actuel de sa mission,
– confirmer l’ordonnance en ce qu’elle a débouté les parties du surplus de leurs demandes,
– déclarer les appelantes irrecevables en leur demande nouvelle faite à la cour de rappeler à l’expert judiciaire, dans le cadre de la poursuite de l’expertise, qu’il doit en toutes circonstances respecter le principe du contradictoire et que toutes les conclusions visées par ses sapiteurs devront s’appuyer à terme sur des constats reconnus par tous comme contradictoires et non sur les constats contestés d’une partie,
– déclarer les appelantes irrecevables en leur demande nouvelle faite à la cour d’enjoindre à l’expert judiciaire d’éclaircir la question des différents réglages susceptibles d’être apportés sur la machine de nettoyage utilisée par Alpilles Hygiène en faisant appel à tous sachants dont la société Van der way,
En tout état de cause,
– débouter les appelantes de leur demande d’infirmation de l’ordonnance en ce qu’elle a autorisé Monsieur [K] à recourir au cabinet Etudes Alde pour mission complémentaire en termes de chiffrage des solutions réparatoires,
– débouter les appelantes de leur demande d’infirmation de l’ordonnance en ce qu’elle a autorisé par ordonnance distincte la consignation supplémentaire à hauteur de 10 740 euros correspondant à la proposition d’honoraires du cabinet Etudes Alde du 27 février 2014,
– débouter les appelantes de leur demande d’infirmation de l’ordonnance en ce qu’elle a ordonné à la société Horconex et à son assureur Generali de procéder aux mises en cause des sociétés [X] et [J] avant le 15 juin 2024 devant la juridiction compétente,
– débouter les appelantes de leur demande d’infirmation de l’ordonnance en ce qu’elle a dit que M. [K] devra déposer son pré-rapport avant le 31 octobre 2024, terme actuel de sa mission,
– débouter les appelantes de leur demande d’infirmation de l’ordonnance en ce qu’elle a débouté les parties du surplus de leurs demandes dont notamment l’organisation d’une réunion plénière relative aux causes du sinistre,
– condamner toute partie succombante aux dépens lesquels pourront être recouvrés par Maître Crépin dans les conditions prescrites par l’article 699 du code de procédure civile.
Au soutien de ses demandes, elle fait valoir :
– qu’il incombe à l’expert, à la lecture de sa mission, de donner au tribunal tous éléments permettant de déterminer les solutions réparatoires aux désordres, et qu’il a ainsi pris position sur ces solutions dans sa note du 8 février 2024, consistant en la reprise de la stabilité de la structure, et la nécessité de procéder aux calages des vitrages, de sorte qu’il n’a pas délégué sa mission au sapiteur,
– que le concours du BET se justifie par le fait qu’il dispose des informations et données techniques pour l’analyse des mesures et relevés réalisés lors de la journée test, et ne constitue pas une mission de maîtrise d’oeuvre, ni une substitution de l’expert aux parties, celles-ci étant recevables à présenter leurs solutions réparatoires et à les faire chiffrer,
– que la SAS Horconex et son assureur sont seuls responsables de la tardiveté des mises en cause des sociétés [X] et [J],
– qu’ils ne fournissent aucun argument au soutien de leur demande de report de la date du dépôt du rapport d’expertise,
– que les demandes relatives au respect du contradictoire et à l’éclaircissement des réglages possibles de la machine de nettoyage n’ont pas été soumises au premier juge et sont donc irrecevables,
– qu’en tout état de cause, le principe du contradictoire a été respecté par l’expert et ses sapiteurs, les appelantes ayant été destinataires de l’ensemble des documents établis par eux, ayant été dûment convoquées à l’ensemble des réunions programmées et destinataires des notes expertales, de sorte que les griefs des appelantes résultent en réalité de leur insatisfaction au regard des conclusions expertales,
– qu’elle a toujours été transparente et disponible pour procéder aux réglages demandés notamment lors de la journée test, ce que l’expert a reconnu, de sorte que la demande des appelantes de ce chef est inutile,
– que les mesures et analyses réalisées par les sapiteurs suite à la journée de test les ont d’ailleurs conduits à écarter le lien de causalité entre l’opération de nettoyage et le sinistre,
– que la tenue d’une réunion sur les causes techniques n’est pas utile, les parties ayant eu l’occasion de s’exprimer dans le respect du contradictoire sur la note expertale du 8 février 2024, de sorte que le débat technique a lieu, d’autant que l’expert répond systématiquement aux dires des parties.
M. [K], la société Intven Kassenbouw en staalconstructies BV, la société AMA XL insurance company SE et la société Dekra industrial n’ont pas constitué avocat.
L’affaire a été retenue à l’audience du 18 décembre 2024 pour y être plaidée.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant publiquement, par arrêt rendu par défaut et en dernier ressort,
Confirme l’ordonnance déférée en toutes ses dispositions soumises à la cour,
y ajoutant :
Dit que le dépôt du rapport d’expertise de M. [K] est prorogé au 30 juin 2025,
Dit n’y avoir lieu à une indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SAS Horconex et la SA Generali aux dépens d’appel.
Le présent arrêt a été signé par Madame FAURE, Présidente, et par Madame HAUGUEL, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,
Sylvie HAUGUEL Caroline FAURE
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