Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Paris
Thématique : Responsabilité des Hébergeurs : Cas Dailymotion et Retrait de Contenus Illicites
→ RésuméLa responsabilité des hébergeurs, illustrée par le cas de Dailymotion, souligne l’importance d’un retrait rapide des contenus illicites. Malgré son statut d’hébergeur, Dailymotion a été condamnée pour avoir tardé à retirer des séquences du film « SHEITAN », signalées comme contrefaisantes. Les juges ont constaté un manquement aux obligations de promptitude, entraînant une indemnisation de 15.000 euros pour les coproducteurs. La loi n°2004-575, qui encadre la responsabilité des hébergeurs, stipule qu’ils ne peuvent être tenus responsables que s’ils ne réagissent pas rapidement après avoir eu connaissance de contenus illicites. Ce cas illustre les enjeux de la protection des droits d’auteur en ligne.
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Les sociétés 120 FILMS et LA CHAUVE-SOURIS, coproductrices du film cinématographique SHEITAN distribué en salles et commercialisé sous format DVD ont fait constater par un agent assermenté de l’ALPA (association de lutte contre la piraterie audiovisuelle), que la saisie du mot-clé SHEITAN dans le moteur de recherche du site de partage de vidéos exploité par la société DAILYMOTION (SA) à l’adresse www.dailymotion.com donnait accès à 5 séquences du film, par visionnage en Streaming. Bien que la société DAILYMOTION ait bénéficié le statut favorable d’hébergeur, sa responsabilité a été engagée au titre de son retard excessif à retirer l’œuvre audiovisuelle SHEITAN.
Dailymotion, un hébergeur
Les juges ont admis la société DAILYMOTION au statut de fournisseur d’hébergement au sens de la loi n°2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique (dite LCEN) et subséquemment, au régime spécial de responsabilité conféré par ce statut. La société DAILY MOTION a cependant manqué à ses obligations en s’abstenant de retirer promptement des contenus dont le caractère attentatoire à des droits de propriété intellectuelle lui avait été signalé dès le 10 janvier 2008 par la signification d’une ordonnance sur requête. La responsabilité de la société DAILYMOTION a également été retenue aux motifs que ces contenus vidéo ont été retirés, en négligeant d’effectuer les diligences de nature à leur interdire un nouvel accès aux mêmes contenus. La société DAILYMOTION a été condamnée à payer aux coproducteurs la somme de 15.000 euros à titre de dommages-intérêts outre la somme de 2.500 euros par application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.
Agir promptement pour retirer des contenus illicites
La société DAILYMOTION avait laissé s’écouler un délai de plus de trois mois entre la date à laquelle elle a eu effectivement connaissance des contenus contrefaisants et la date à laquelle elle a procédé au retrait de ces contenus. Elle a ainsi manqué à l’obligation de prompt retrait qui incombe au prestataire de stockage.
Responsabilité des hébergeurs
La LCEN opère, au sein des services de communication au public en ligne, une distinction entre le service fournisseur d’hébergement, défini à l’article 6- I-2 comme assurant même à titre gratuit, pour mise à disposition du public par des services de communication au public en ligne, le stockage de signaux, d’écrits, d’images, de sons ou de messages de toute nature fournis par des destinataires de ces services et le service éditeur, le critère de discrimination résidant dans la capacité du service à procéder à un choix sur les contenus mis en ligne. La société DAILYMOTION répondait bien à la définition du fournisseur d’hébergement, dès lors qu’il met à la disposition du public un service de stockage de contenus audiovisuels (en l’espèce des vidéogrammes personnels) fournis par les destinataires de ce service, sans avoir le pouvoir de sélectionner ces contenus.
L’article 6-I-5 de la LCEN précise que la connaissance des faits litigieux est présumée acquise par les Hébergeurs lorsqu’il leur est notifié les éléments suivants :
– la date de la notification ;
– si le notifiant est une personne physique : ses nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance ; si le requérant est une personne morale : sa forme, sa dénomination, son siège social et l’organe qui la représente légalement ;
– les nom et domicile du destinataire ou, s’il s’agit d’une personne morale, sa dénomination et son siège social ;
– la description des faits litigieux et leur localisation précise ;
– les motifs pour lesquels le contenu doit être retiré, comprenant la mention des dispositions légales et des justifications de faits ;
– la copie de la correspondance adressée à l’auteur ou à l’éditeur des informations ou activités litigieuses demandant leur interruption, leur retrait ou leur modification, ou la justification de ce que l’auteur ou l’éditeur n’a pu être contacté.
Par ces dispositions, la LCEN a entendu, sous réserve de mesures particulières édictées en considération de l’intérêt général attaché à la répression de l’apologie des crimes contre l’humanité, de l’incitation à la haine raciale, de la pornographie enfantine, de l’incitation à la violence et des atteintes à la dignité humaine, conférer au fournisseur d’hébergement un régime spécial de responsabilité qui repose sur le principe selon lequel il ne saurait être réputé avoir a priori connaissance du caractère illicite des contenus fournis par les utilisateurs ni soumis à une obligation générale de contrôle préalable de ces contenus en sorte que sa responsabilité ne sera engagée que dans l’hypothèse où, ayant eu connaissance de la présence d’un contenu illicite sur la plate-forme d’hébergement, il n’aurait pas agi promptement aux fins de le retirer ou d’en interdire l’accès.
Une signification faite à un hébergeur, tout comme une notification de contenus illicites, peut réunir l’ensemble des éléments d’information prescrits par l’article 6-I-5 de la LCEN et permettre à l’hébergeur d’identifier parfaitement et de localiser aisément les contenus qui lui sont signalés comme attentatoires à des droits de propriété intellectuelle.
Mots clés : Responsabilite des hebergeurs
Thème : Responsabilite des hebergeurs
A propos de cette jurisprudence : juridiction : Cour d’appel de Paris | 9 mai 2012 | Pays : France
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