Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Paris
Thématique : Contrat de mannequin : quel tribunal compétent ?
→ RésuméL’action pour violation d’une clause d’exclusivité d’un mannequin, initiée par une agence, relève de la compétence du Tribunal de commerce. En effet, la juridiction prud’homale, bien que compétente pour les différends liés aux contrats de travail, ne s’applique pas aux actions en concurrence déloyale. L’agence fonde son action non seulement sur la violation de la clause d’exclusivité, mais aussi sur la méconnaissance des mandats de représentation. Les contrats régissant la profession de mannequin sont encadrés par des dispositions spécifiques du code du travail, garantissant ainsi une protection adéquate des droits des mannequins.
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L’action pour violation d’une clause d’exclusivité d’un mannequin (action en concurrence déloyale) initiée par une agence de mannequins, relève bien de la compétence du Tribunal de commerce et non de la juridiction prudhommale.
Compétence exclusive
La compétence exclusive conférée au conseil des prud’hommes
pour connaître de tout différend pouvant s’élever à l’occasion d’un contrat de
travail ne permet pas de proroger sa compétence à l’examen d’une action en
concurrence déloyale entre l’employeur présumé et le tiers complice de la
violation par le salarié d’une clause d’un contrat de travail, s’agissant d’une
juridiction d’exception.
En outre, l’agence de mannequins ne fondait pas seulement
son action en concurrence déloyale sur la violation de la clause d’exclusivité
stipulée dans les conventions de collaboration qu’elle a conclues avec son mannequin
mais aussi sur la méconnaissance de cette clause contenue dans les mandats de
représentation conclus avec celles-ci et dont la qualification de mandat civil
n’était pas contestée.
Contractualiser avec un mannequin
Pour rappel, l’exercice de la profession de mannequin et des
agences de mannequins est régi par des dispositions d’ordre public et
spécifiques du code du travail, soit les articles L. 7123-5 et suivants et R.
7123-1 et suivants, issus de la loi n° 90-603 du 12 juillet 1990 relative aux
agences de mannequins et à la protection des enfants et adultes exerçant la
profession de mannequin et du décret d’application n° 92-962 du 9 septembre
1992, répondant à la volonté protectrice du législateur.
L’exercice de ces professions s’organise autour de trois
contrats : le contrat cadre ou convention de collaboration, régissant les
relations entre le mannequin et l’agence de mannequins, le contrat de mise à
disposition conclu entre l’agence de mannequins et l’utilisateur au profit
duquel la prestation du mannequin est réalisée et, enfin, le contrat de travail
soumis aux dispositions des articles L. 7123-1 et suivants du code du travail
dans le cadre de chaque prestation / mission confiée au mannequin.
Le contrat cadre ou convention de collaboration constitue un
contrat de travail spécifique ainsi qu’il résulte notamment des articles L.
7123-5, L. 7123-17, R 7123-1 et encore des articles L. 7123-3, aux termes
duquel tout contrat par lequel une personne s’assure, moyennant rémunération,
le concours d’un mannequin est présumé être un contrat de travail et L. 7123-4
qui dispose ‘La présomption de l’existence d’un contrat de travail subsiste
quels que soient le mode et le montant de la rémunération ainsi que la
qualification donnée au contrat par les parties. Elle n’est pas non plus
détruite par la preuve que le mannequin conserve une entière liberté d’action
pour l’exécution de son travail de présentation.’
La convention collective nationale des mannequins adultes et
mannequins enfants de moins de 16 ans employés par les agences de mannequins du
22 juin 2004, négociée entre les représentants des mannequins et les
représentants des agences de mannequins, prévoit expressément la faculté
d’encadrer la relation entre les mannequins étrangers et leurs agences dans le cadre
d’une convention de collaboration dont elle précise le contenu à son annexe III.
Il est d’usage que les conventions de collaboration conclues
par l’agence et son mannequin prévoient notamment des obligations spécifiques
concernant l’apparence physique du mannequin ou les conditions dans lesquelles
il doit procéder aux castings d’usage et aux missions proposées, elles
stipulent également les conditions de rémunération des mannequins, salaire et
indemnité compensatrice de congés payés ; en application de la présomption de
l’article L. 7123-3 du code du travail, ces conventions de collaboration, qui
placent les mannequins dans une relation de subordination pendant une durée
ininterrompue d’un an renouvelable tacitement, doivent être qualifiées de contrats
de travail à durée indéterminée.
Compétence du Tribunal de commerce
Selon l’article 873 du code de procédure civile, le président du tribunal de commerce peut, dans les limites de la compétence de ce tribunal et même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. Le dommage imminent s’entend du dommage qui n’est pas encore réalisé mais qui se produira sûrement si la situation présente doit se perpétuer et le trouble manifestement illicite résulte de toute perturbation résultant d’un fait qui, directement ou indirectement, constitue une violation évidente de la règle de droit. Il s’ensuit, pour que la mesure sollicitée soit prononcée, qu’il doit nécessairement être constaté, à la date à laquelle le juge statue et avec l’évidence qui s’impose à la juridiction des référés, l’imminence d’un dommage ou la méconnaissance d’un droit sur le point de se réaliser et dont la survenance et la réalité sont certaines. Téléchargez la décision
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