Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Paris
Thématique : Indemnisation des préjudices liés à une détention provisoire injustifiée
→ RésuméContexte de la requêteM. [U] [O], de nationalité algérienne, a été mis en examen pour assassinat le 17 mars 2017 et placé en détention provisoire. Il a été libéré sous contrôle judiciaire le 3 juillet 2018, et acquitté le 5 novembre 2021. Le 4 mai 2022, il a déposé une requête pour obtenir une indemnisation pour sa détention. Demandes d’indemnisationDans sa requête, M. [O] a sollicité plusieurs compensations, incluant 70 572,55 euros pour perte de revenus, 9 000 euros pour préjudice de retraite, 14 160 euros pour frais de défense, 85 000 euros pour préjudice moral, et 5 000 euros selon l’article 700 du code de procédure civile. En réplique, il a ajusté ses demandes à 60 031,35 euros pour perte de revenus et 7 336 euros pour préjudice de retraite. Réponses des partiesL’agent judiciaire de l’État a contesté les montants demandés, proposant des sommes inférieures pour le préjudice matériel et moral. Le Ministère Public a plaidé pour l’irrecevabilité de la requête, mais a également reconnu la recevabilité subsidiaire pour une détention de 473 jours. Recevabilité de la requêteLa requête a été jugée recevable, car M. [O] a respecté le délai de six mois pour demander réparation après sa décision d’acquittement. Les conditions de la détention n’ont pas été considérées comme des cas d’exclusion selon le code de procédure pénale. Évaluation du préjudice moralM. [O] a décrit l’impact de sa détention sur sa famille, notamment l’isolement de ses enfants et la dégradation de sa santé. L’agent judiciaire a proposé une indemnisation de 25 000 euros, tandis que le Ministère Public a reconnu le choc psychologique dû à l’incarcération. Finalement, une somme de 38 000 euros a été allouée pour le préjudice moral. Évaluation du préjudice matérielConcernant la perte de revenus, M. [O] a demandé 60 031,35 euros, mais l’agent judiciaire a proposé 24 222,06 euros, correspondant à la perte de salaire durant la détention. Le tribunal a retenu cette dernière somme. Pour le préjudice de retraite, une indemnisation de 778,30 euros a été accordée pour la période de détention. Frais d’avocat et décision finaleM. [O] a demandé 14 160 euros pour les frais d’avocat, qui ont été jugés justifiés. En outre, une somme de 2 000 euros a été allouée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. La requête a été partiellement accueillie, et les autres demandes ont été rejetées. |
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Chambre 1-5DP
RÉPARATION DES DÉTENTIONS PROVISOIRES
DÉCISION DU 06 Janvier 2025
(n° , 2 pages)
N°de répertoire général : N° RG 22/09644 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CF2XK
Décision contradictoire en premier ressort ;
Nous, Jean-Paul BESSON, Premier Président de chambre, à la cour d’appel, agissant par délégation du premier président, assisté de Victoria RENARD, Greffière, lors des débats et de [W] [N], Greffière stagiaire, lors de la mise à disposition avons rendu la décision suivante :
Statuant sur la requête déposée le 04 Mai 2022 par M. [U] [O]
né le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 6] (ALGERIE), élisant domicile au cabinet de Me Jean-David SCEMAMA – [Adresse 2] ;
non comparant
Représenté par Me Jean-David SCEMAMA, avocat au barreau de PARIS,
Vu les pièces jointes à cette requête ;
Vu les conclusions de l’Agent Judiciaire de l’Etat, notifiées par lettre recommandée avec avis de réception ;
Vu les conclusions du procureur général notifiées par lettre recommandée avec avis de réception ;
Vu les lettres recommandées avec avis de réception par lesquelles a été notifiée aux parties la date de l’audience fixée au 04 Novembre 2024 ;
Entendu Me Jean-David SCEMAMA représentant M. [U] [O],
Entendu Me Hadrien MONMONT, avocat au barreau de PARIS substituant Me Renaud LE GUNEHEC, avocat au barreau de PARIS, avocat représentant l’Agent Judiciaire de l’Etat,
Entendue Madame , Substitute Générale,
Les débats ayant eu lieu en audience publique, le conseil du requérant ayant eu la parole en dernier ;
Vu les articles 149, 149-1, 149-2, 149-3, 149-4, 150 et R.26 à R40-7 du Code de Procédure Pénale ;
* * *
M. [U] [O], né le [Date naissance 1] 1963, de nationalité algérienne, a été mis en examen du chef d’assassinat le 17 mars 2017 par un juge d’instruction du tribunal de grande instance de Créteil. Par ordonnance du juge des libertés et de la détention de la même juridiction, il a été placé en détention provisoire à la maison d’arrêt de [Localité 4] le même jour.
Par arrêt du 03 juillet 2018, la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris a remis en liberté M. [O] et l’a placé sous contrôle judiciaire.
Par arrêt du 05 novembre 2021, la cour d’assises du Val-de-Marne a acquitté M. [O] des faits pour lesquels il était poursuivi. Cette décision est devenue définitive à son égard comme en atteste le certificat de non pourvoi du 11septembre 2024.
Le 04 mai 2022, M. [O] a adressé une requête au premier président de la cour d’appel de Paris en vue d’être indemnisé de sa détention provisoire en application de l’article 149 du code de procédure pénale et sollicite dans celle-ci, de :
– Déclarer recevable et bien fondée la demande d’indemnisation
– Allouer à M. [O] au titre de la perte e revenus la somme de 70 572,55 euros
– Allouer à M. [O] au titre du préjudice de retraite la somme de 9 000 euros
– Allouer à Mme [O] au titre du préjudice matériel une somme de 14 160 euros TTC correspondant au montant des frais de défense relatifs au contentieux de la détention
– Allouer à M. [O] la somme de 85 000 euros en réparation de son préjudice moral
– Allouer à M. [O] la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions en réplique et récapitulatives n°1 déposées le 12 octobre 2024 et soutenues oralement lors de l’audience de plaidoiries du 04 novembre 2024, M. [O] demande au premier président de :
– Déclarer recevable et bien fondée sa demande indemnitaire
– Lui allouer au titre de la perte de revenus la somme de 60 031,35 euros
– Lui allouer au titre du préjudice de retraite la somme de 7 336 euros
– Lui allouer au titre du préjudice matériel une somme de 14 160 euros TTC correspondant au montant des frais de défense relatifs au contentieux de la détention
– Lui allouer la somme de 85 000 euros en réparation de son préjudice moral
– Lui allouer la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions en défense, notifiées par RPVA et déposées le 04 novembre 2024, développées oralement, l’agent judiciaire de l’Etat demande au premier président de :
– Ramener à de plus justes proportions la demande formulée au titre du préjudice matériel qui ne saurait excéder la somme de 39 160,36 euros
– Ramener à de plus justes proportions la demande formulée au titre du préjudice moral qui ne saurait excéder la somme de 25 000 euros
– Statuer ce que de droit s’agissant de la demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.
Le Ministère Public, dans ses dernières conclusions notifiées le 21 août 2024 et reprises oralement à l’audience, conclut :
A titre principal
– A l’irrecevabilité de la requête
A titre subsidiaire
– A la recevabilité de la requête pour une détention provisoire de 473 jours ;
– A la réparation du préjudice moral dans les conditions indiquées ;
– A la réparation du préjudice matériel dans les conditions indiquées.
PAR CES MOTIFS
Déclarons la requête de M. [U] [O] recevable ;
Lui allons les sommes suivantes :
– 38 000 euros en réparation de son préjudice moral ;
– 14 160 euros TTC au titre de ses frais de défense ;
– 778,30 euros au titre de la perte de chance d’obtenir des points retraite ;
– 24 222,06 euros au titre de la perte de revenus ;
– 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Déboutons M. [U] [O] du surplus de ses demandes ;
Laissons les dépens à la charge de l’Etat
Décision rendue le 06 Janvier 2025 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
LA GREFFI’RE LE MAGISTRAT DÉLÉGUÉ
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