Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Paris
Thématique : Régularisation des créances salariales et prescription des demandes
→ RésuméContexte de l’affaireLe 1er septembre 2009, une société de santé a engagé une salariée, dont le contrat de travail a été transféré le 9 juillet 2013 à une autre société dans le cadre d’un plan de cession. Les relations contractuelles étaient régies par une convention collective nationale. Notification de paiement des arriérésLe 28 mars 2018, la société a informé son personnel de la mise en œuvre d’un plan de paiement provisoire sur 24 mois concernant des arriérés de prime de fin d’année, suite à un arrêt de la cour d’appel de Paris. Demande de la salariéeLe 31 mai 2018, la salariée a saisi le conseil de prud’hommes pour réclamer diverses sommes à titre de rappels de salaire et de dommages-intérêts. La date de sortie des effectifs de la salariée est fixée au 7 août 2023. Jugement du conseil de prud’hommesLe 4 juin 2021, le conseil de prud’hommes a rejeté la fin de non-recevoir soulevée par la société et a condamné celle-ci à verser à la salariée plusieurs sommes, avec intérêts, pour des rappels de salaire et des dommages-intérêts. Appel de la sociétéLa société a interjeté appel de ce jugement le 23 juillet 2021. Les liquidateurs judiciaires de la société sont intervenus dans la procédure d’appel. Procédure de redressement judiciaireLe 15 juin 2023, la société a été placée en redressement judiciaire, puis en liquidation judiciaire le 19 juillet 2023, avec désignation de liquidateurs judiciaires. Arguments des liquidateurs judiciairesDans leurs conclusions, les liquidateurs ont demandé l’infirmation du jugement, arguant que les demandes de la salariée étaient prescrites pour la période antérieure au 31 mai 2015 et que la société avait régularisé les paiements dus. Réponse de la salariéeLa salariée a contesté les arguments des liquidateurs, demandant la confirmation du jugement initial et la reconnaissance de ses créances au passif de la liquidation judiciaire. Examen des demandes de la salariéeLa cour a examiné les demandes de la salariée concernant la prime de fin d’année, le complément différentiel de salaire, et les dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail. Décision de la courLa cour a infirmé le jugement en ce qui concerne les sommes dues à la salariée, fixant sa créance au passif de la société à 6 001,01 euros pour la prime de fin d’année, tout en déboutant la salariée de ses autres demandes. ConclusionLa cour a ordonné la capitalisation des intérêts et a statué sur les dépens, tout en confirmant certaines décisions du jugement initial. Les sommes allouées à la salariée seront garanties par l’AGS dans les limites légales. |
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 3
ARRET DU 05 FEVRIER 2025
(n° , 1 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/06645 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CEDFG
Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 Juin 2021 -Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de BOBIGNY – RG n° 18/01603
APPELANTE
SAS VAUBAN SANTE, placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Bobigny le 19 juillet 2023
INTIMEE
Madame [N] [L]
[Adresse 3]
[Localité 6]
Représentée par Me Anne-sophie CARLUS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0028
PARTIES INTERVENANTES
Maître [B] [K],
ès qualités de liquidateur judiciaire de la société ‘VAUBAN SANTE’
[Adresse 7]
[Localité 5]
Représenté par Me Laurent RIQUELME, avocat au barreau de PARIS, toque : D0295
SELARL ASTEREN
prise en la personne de Maître [E] [X], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société ‘VAUBAN SANTE’
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentée par Me Laurent RIQUELME, avocat au barreau de PARIS, toque : D0295
Association AGS CGEA IDF EST,
prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Anne-france DE HARTINGH, avocat au barreau de PARIS, toque:R1861
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 21 octobre 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Christophe BACONNIER, président de chambre exerçant des fonctions judiciaires, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Christophe BACONNIER, président de chambre, rédacteur
Véronique MARMORAT, présidente de chambre
Marie-Lisette SAUTRON, présidente de chambre
Greffier, lors des débats : Madame Laetitia PRADIGNAC
ARRET :
– contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Christophe BACONNIER, président de chambre assisté de Camille BESSON, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
RAPPEL DES FAITS ET PROCEDURE
Le 1er septembre 2009, la société Polyclinique Vauban 2020 a engagé Mme [N] [L] et son contrat de travail a été transféré le 9 juillet 2013 au sein de la société Vauban santé (SAS) dans le cadre d’un plan de cession arrêté par le tribunal de commerce de Bobigny.
Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale de l’hospitalisation privée du 18 avril 2002.
Par courrier du 28 mars 2018, la société Vauban santé a informé l’ensemble du personnel concerné de la mise en ‘uvre d’un plan de paiement provisoire sur 24 mois d’arriérés de prime de fin d’année (PFA) afférents aux trois dernières années suite à l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 1er février 2018.
Le 31 mai 2018, Mme [L] a saisi le conseil de prud’hommes de Bobigny aux fins de réclamer au principal diverses sommes à titre de rappels de salaire et de dommages-intérêts.
La date de sortie des effectifs de Mme [L] est le 7 août 2023.
Par jugement rendu en formation de départage le 4 juin 2021, auquel la cour se réfère pour l’exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le conseil de prud’hommes a rendu la décision suivante :
« REJETTE la fin de non-recevoir soulevée par la VAUBAN SANTE SAS et tirée de la prescription de la demande au titre de la prime de fin d’année formée par Madame [N] [L] pour la période antérieure au 31 mai 2015 ;
CONDAMNE la VAUBAN SANTE SAS à payer à Madame [N] [L] les sommes suivantes :
avec intérêts au taux légal à compter du 10 octobre 2018 :
– 6 001,01 euros à titre de rappel de prime de fin d’année ;
– 4 813,04 euros à titre de rappel de complément différentiel de salaire ;
– 481,30 euros au titre des congés payés afférents au complément différentiel de salaire ;
– 401,09 euros au titre de la prime de fin d’année sur complément différentiel de salaire ;
avec intérêts au taux légal à compter du jugement :
– 1 500 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;
ORDONNE la capitalisation annuelle des intérêts ;
CONDAMNE la VAUBAN SANTE SAS à payer à Madame [N] [L] de 1 500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
DEBOUTE la VAUBAN SANTE SAS de sa demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNE la VAUBAN SANTE SAS aux dépens.
ORDONNE l’exécution provisoire. »
La société Vauban Santé a relevé appel de ce jugement par déclaration transmise par voie électronique le 23 juillet 2021.
La constitution d’intimée de Mme [L] a été transmise par voie électronique le 20 octobre 2021.
La société Vauban santé a fait l’objet d’un jugement rendu par le tribunal de commerce de Bobigny le 15 juin 2023 qui a ouvert une procédure de redressement judiciaire.
Selon un jugement par le tribunal de commerce de Bobigny rendu le 19 juillet 2023, cette procédure a été convertie en liquidation judiciaire et le tribunal a désigné Maître [B] [K] ainsi que la SELARL Asteren, prise en la personne de Maître [E] [X], ès qualités de liquidateurs judiciaires.
Maître [B] [K] et la SELARL Asteren, prise en la personne de Maître [E] [X], ès qualités de liquidateurs judiciaires de la société Vauban santé sont intervenus volontairement dans le cadre de la présente procédure d’appel.
L’AGS, CGEA d’Île-de-France Est a constitué avocat le 16 juillet 2024 et est intervenue volontairement dans le cadre de la présente procédure d’appel.
Par ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 2 août 2024, auxquelles la cour se réfère expressément pour l’exposé des moyens, Maître [B] [K] et la SELARL Asteren, prise en la personne de Maître [E] [X], ès qualités de liquidateurs judiciaires de la société Vauban santé demandent à la cour de :
« INFIRMER le jugement rendu par le Conseil de Prud’hommes de Bobigny le 4 juin 2021,
PRONONCER l’irrecevabilité des prétentions de Mme [L] au titre de la période antérieure au 31 mai 2015 au titre de leur prescription,
CONSTATER que la société VAUBAN SANTE a dûment procédé aux régularisations mensuelles effectuées depuis le mois d’avril 2018 correspondant aux rappels de salaire dus pour la Prime de Fin d’Année au profit de Mme [L] , et subséquemment que Mme [L] est remplie de ses droits à ce titre,
DEBOUTER Mme [L] de toutes ses demandes,
CONDAMNER Mme [L] au paiement à Maître [B] [K] et la SELARL ASTEREN, prise en la personne de Maître [E] [X], ès qualités de liquidateurs judiciaires de la société VAUBAN SANTE d’une somme de 1.500,00 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNER Mme [L] aux entiers dépens. »
Par ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 7 octobre 2024, auxquelles la cour se réfère expressément pour l’exposé des moyens, Mme [L] demande à la cour de :
« JUGER mal fondée en son appel la société VAUBAN SANTE SAS, représentée par ses mandataires liquidateurs ;
En conséquence,
LA DEBOUTER de l’intégralité de ses demandes ;
CONFIRMER le jugement déféré en son principe, et FIXER au passif de la liquidation judiciaire de la société VAUBAN SANTE SAS les créances suivantes au profit de Madame
[N] [L] :
avec intérêts à taux légal à compter du 10 octobre 2018 jusqu’au 15 juin 2023 et capitalisation des intérêts :
– 6.001,01 euros bruts à titre de rappel de primes de fin d’année,
– 6.838,66 euros bruts à titre de rappel de complément différentiel de salaire,
– 683,87 euros bruts au titre des congés payés incidents,
– 569,89 euros bruts au titre de la prime de fin d’année sur complément différentiel de salaire ;
avec intérêts au taux légal à compter du 4 juin 2021 et jusqu’au 15 juin 2023 et capitalisation des intérêts, la somme de 1.500 euros nets à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;
la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Y ajoutant,
CONDAMNER in solidum Maître [K] et Maître [X], ès qualités de mandataires liquidateurs de la société VAUBAN SANTE SAS à verser à Madame [L] la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
STATUER ce que de droit quant aux dépens. »
Par ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 7 octobre 2024, auxquelles la cour se réfère expressément pour l’exposé des moyens, l’AGS, CGEA d’Île-de-France Est demande à la cour de :
« JUGER L’AGS recevable et bien fondée en ses demandes, moyens et prétentions dont son appel incident et y faisant droit :
INFIRMER le jugement entrepris en toutes ses dispositions
PRONONCER l’irrecevabilité des prétentions de Madame [L] au titre de la période antérieure au 31 mai 2015 au titre de la prescription
DEBOUTER Madame [L] de toutes ses demandes, moyens et prétentions.
SUR LA GARANTIE
Juger, Ordonner et inscrire au dispositif de la décision à intervenir qu’en tout état de cause, la garantie prévue aux dispositions de l’article L 3253-6 du code du travail ne peut concerner que les seules sommes dues en exécution du contrat de travail au sens et dans les limites et conditions des articles L 3253-6 et suivants dont l’article L 3253-8 du code du travail, les astreintes, dommages et intérêts, indemnités, mettant en ‘uvre la responsabilité de droit commun de l’employeur ou article 700 étant ainsi exclus de la garantie.
Juger et inscrire au dispositif de la décision à intervenir qu’en tout état de cause la garantie de l’AGS ne pourra excéder, toutes créances confondues, l’un des trois plafonds fixés, en vertu des dispositions des articles L 3253-17 et D 3253-5 du code du travail.
Statuer ce que de droit quant aux frais d’instance sans qu’ils puissent être mis à la charge de l’AGS. »
L’ordonnance de clôture a été rendue à la date du 15 octobre 2024.
L’affaire a été appelée à l’audience du 24 octobre 2024.
PAR CES MOTIFS
La cour,
INFIRME le jugement mais seulement en ce qu’il a condamné la société Vauban santé à payer à Mme [L] les sommes de :
– 6 001,01 euros au titre des primes de fin d’année,
– 4 813,04 euros au titre du complément différentiel de salaire,
– 481,30 euros au titre des congés payés afférents,
– 401,09 euros au titre de la prime de fin d’année incidente,
– 1 500 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,
– 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Et statuant à nouveau sur les chefs infirmés :
FIXE la créance de Mme [L] au passif de la société Vauban santé à la somme de 6001,01 euros au titre des primes de fin d’année.
DÉBOUTE Mme [L] de ses demandes relatives au complément différentiel de salaire, aux congés payés afférents et à la prime de fin d’année incidente.
DÉBOUTE Mme [L] de sa demande relative aux dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail.
DÉBOUTE Mme [L] de sa demande relative à l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance.
CONFIRME le jugement déféré pour le surplus.
Y ajoutant,
DIT que la créance salariale allouée à Mme [L] est assortie des intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la société Vauban santé de la convocation devant le bureau de conciliation jusqu’à la date du jugement d’ouverture de la procédure de redressement judiciaire, le 15 juin 2023.
ORDONNE la capitalisation des intérêts et dit qu’elle s’opérera par année entière en application de l’article 1343-2 du code civil.
DÉCLARE le présent arrêt commun à l’AGS, CGEA d’Île-de-France Est.
DIT que les sommes allouées à Mme [L] seront garanties par l’AGS, CGEA d’Île-de-France Est dans les limites légales du plafond applicable à la date de la rupture.
DÉBOUTE Maître [B] [K] et la SELARL Asteren, prise en la personne de Maître [E] [X], ès qualités de liquidateurs judiciaires de la société Vauban santé et Mme [L] de leurs demandes antagonistes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples et contraires.
CONDAMNE Maître [B] [K] et la SELARL Asteren, prise en la personne de Maître [E] [X], ès qualités de liquidateurs judiciaires de la société Vauban santé aux dépens de la procédure d’appel.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT
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