Cour d’Appel de Paris, 4 juillet 2017
Cour d’Appel de Paris, 4 juillet 2017

Type de juridiction : Cour d’Appel

Juridiction : Cour d’Appel de Paris

Thématique : Requalification de CDD d’usage | Affaire Endemol

Résumé

La pérennité des émissions audiovisuelles soulève des questions sur l’utilisation des CDD d’usage. Dans le cas de l’émission « Les 12 coups de midi », plus de 500 CDD d’une assistante de production ont été requalifiés en CDI, illustrant un recours abusif aux contrats temporaires. Selon la législation, un CDD ne doit pas pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale de l’entreprise. Le juge doit vérifier que les CDD successifs sont justifiés par des raisons objectives et que l’emploi est réellement temporaire. Dans ce cas, la durée et la nature de l’emploi ont conduit à une requalification en CDI.

Pérennité des émissions audiovisuelles : 500 CDD d’usages requalifiés

Attention aux émissions audiovisuelles devenues pérennes : la société Endemol a vu les nombreux CDD d’usage (plus de 500) d’une assistante de production adjointe de l’émission « Les 12 coups de midi », recrutée sous le statut d’intermittent non cadre niveau VI, être requalifiés en un CDI.

Recours abusifs aux CDD d’usage

Il est désormais acquis qu’un contrat de travail à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise. Un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire notamment lorsqu’il s’agit d’emplois à caractère saisonnier ou pour lesquels, dans certains secteurs d’activité définis par décret ou par convention ou accord collectif de travail étendu, il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois.

En application du 3° de l’article L. 1242-2, les secteurs d’activité dans lesquels des contrats à durée déterminée peuvent être conclus pour les emplois pour lesquels il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois comprennent notamment : « 6° Les spectacles, l’action culturelle, l’audiovisuel, la production cinématographique, l’édition phonographique ».

Le recours au CDD d’usage sous le contrôle du juge

Il appartient au juge de vérifier que la succession de CDD d’usage intervient dans l’un des secteurs d’activités définis par décret, qu’il existe dans ce secteur un usage permettant de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée pour l’emploi considéré, mais aussi que le recours à l’utilisation de contrats successifs est justifié par des raisons objectives qui s’entendent de l’existence d’éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi. Le  secteur de l’audiovisuel est mentionné dans l’article D 1242-1 comme constituant l’un des secteurs d’activité pouvant permettre la conclusion de CDDU, ce qui est confirmé par la convention collective applicable en ce qui concerne « les emplois des catégories B et C de la présente convention, qui se rapportent directement à la conception, la fabrication et au contenu même des programmes » (Titre V article V2.2).

Assistant de production en CDD d’usage

L’emploi d’assistant de production adjoint est classé non cadre niveau 6, il appartient à la catégorie B regroupant les filières A à I, liées à la conception, la production et la réalisation des productions.  La convention collective prévoit que les emplois de catégorie B peuvent faire l’objet d’un CDD d’usage. Toutefois, dans l’affaire soumise, l’analyse concrète du travail réalisé par l’assistante de production a fait apparaître que celle-ci a participé exclusivement à la réalisation d’une seule émission quotidienne, qui était produite 365 jours par an, « Les 12 coups de midi », ce pendant près de quatre années. Cette durée démontrait le succès non démenti et la pérennité certaine de cette émission, l’aléa invoqué par l’employeur étant dès lors très limité alors même que l’émission est toujours diffusée. Cet emploi ne pouvait dès lors être qualifié de temporaire.  Dès lors que la salariée n’a plus signé de contrats, l’employeur avait nécessairement procédé à un licenciement « verbal » qui ne respectait pas la procédure légale. La rupture a donc été qualifiée de licenciement sans cause réelle et sérieuse.

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