Cour d’appel de Paris, 31 janvier 2025, RG n° 21/03342
Cour d’appel de Paris, 31 janvier 2025, RG n° 21/03342

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Paris

Thématique : Validité des contraintes de recouvrement de cotisations sociales en l’absence de détermination préalable du revenu imposable.

Résumé

Contexte de l’affaire

Le 31 octobre 2018, M. [H] [C] a formé opposition à deux contraintes émises par l’URSSAF-sécurité sociale des indépendants, datées du 11 octobre 2018. La première contrainte s’élevait à 28 485 euros, tandis que la seconde atteignait 30 253,49 euros. Ces montants correspondaient à des cotisations et majorations de retard pour les années 2014 à 2018.

Jugement du tribunal

Le tribunal a rendu son jugement le 11 mars 2021, déclarant les oppositions de M. [H] [C] recevables. Il a validé la contrainte du 11 octobre 2018 pour un montant de 13 713,51 euros et a condamné M. [H] [C] à payer cette somme à l’URSSAF. De plus, la contrainte pour un montant de 28 338 euros a également été validée, entraînant une condamnation supplémentaire pour M. [H] [C]. Le tribunal a débouté M. [H] [C] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile et a condamné ce dernier aux dépens.

Appel de l’URSSAF

L’URSSAF de [Localité 4] a interjeté appel du jugement, demandant à la cour de constater la validité de la contrainte et de réformer le jugement en ce qui concerne les montants dus. L’URSSAF a soutenu que les cotisations avaient été calculées conformément à la législation en vigueur et que la contrainte était régulière tant sur le fond que sur la forme.

Arguments de M. [H] [C]

M. [H] [C] a contesté l’appel de l’URSSAF, arguant que l’instance était périmée et que l’URSSAF ne justifiait pas d’une créance réelle. Il a demandé l’annulation des contraintes et a, subsidiairement, demandé la confirmation du jugement initial. Il a également sollicité des frais au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Questions de péremption d’instance

Concernant la péremption d’instance, l’URSSAF a affirmé avoir manifesté sa volonté de poursuivre l’instance, tandis que M. [H] [C] a soutenu que le délai de deux ans s’était écoulé sans action de l’URSSAF. La cour a finalement écarté le moyen de péremption, considérant que le délai n’avait pas commencé à courir avant la première audience fixée par le greffe.

Nullité des contraintes et mises en demeure

L’URSSAF a soutenu que les contraintes et mises en demeure respectaient les obligations légales en précisant la nature, le montant et la période des cotisations. M. [H] [C] a répliqué que les contraintes étaient nulles en raison de l’absence de mention des revenus servant de base au calcul. La cour a jugé que les mises en demeure permettaient au cotisant de connaître ses obligations, et a donc écarté les moyens de nullité.

Sommes dues et régularisation

L’URSSAF a expliqué que les cotisations étaient calculées sur les revenus professionnels et que des majorations de retard avaient été appliquées en cas de non-paiement. M. [H] [C] a contesté le montant des cotisations, affirmant qu’elles avaient été réclamées deux fois pour la même période. La cour a rappelé que les cotisations devaient être exigibles et que la régularisation devait se faire sur la base des revenus connus.

Décision de la cour

La cour a infirmé le jugement du tribunal judiciaire d’Auxerre, déclarant qu’il n’y avait pas lieu de valider les contraintes émises par l’URSSAF. Elle a rejeté les demandes de l’URSSAF et a également débouté M. [H] [C] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile. L’URSSAF a été condamnée aux dépens.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 13

ARRÊT DU 31 Janvier 2025

(n° , 8 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : S N° RG 21/03342 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDP3R

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 11 Mars 2021 par le Pole social du TJ d’AUXERRE RG n° 18/00314

APPELANTE

URSSAF DE [Localité 4] SECURITE SOCIALE DES INDEPENDANTS

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par M. [M] [Y] en vertu d’un pouvoir général

INTIME

Monsieur [H] [C]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

non comparant, non représenté, ayant pour conseil Me Gaelle CHIMAY, avocat au barreau d’AUXERRE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 02 Décembre 2024, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant M. Raoul CARBONARO, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M Raoul CARBONARO, président de chambre

M Gilles REVELLES, conseiller

Mme Sophie COUPET, conseillère

Greffier : Mme Fatma DEVECI, lors des débats

ARRET :

– REPUTE CONTRADICTOIRE

– prononcé

par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

-signé par M. Raoul CARBONARO, président de chambre et par Mme Fatma DEVECI, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l’appel interjeté par l’URSSAF de [Localité 4] (l’URSSAF) d’un jugement rendu le 11 mars 2021 par le tribunal judiciaire d’Auxerre dans un litige l’opposant à M. [H] [C] (le cotisant).

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Les circonstances de la cause ayant été correctement rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de préciser que le 31 octobre 2018, M. [H] [C] a formé opposition à deux contraintes délivrées par l’URSSAF-sécurité sociale des indépendants le 11 octobre 2018 et signifiées le 22 octobre 2018, la première pour un montant de 28 485 euros correspondant aux cotisations et majorations de retard réclamées au titre des régularisations 2014, 2015, 2016, 2017 et des premier et deuxième trimestres 2018, et la seconde pour un montant de 30 253,49 euros correspondant aux cotisations et majorations de retard réclamées au titre de la régularisation 2015 et des mois de juin, août, septembre, octobre, novembre et décembre 2016.

Par jugement en date du 11 mars 2021, le tribunal :

déclare les oppositions formées par M. [H] [C] recevables en la forme ;

au fond, valide la contrainte du 11 octobre 2018 pour un montant de 13 713,51 euros ;

condamne en conséquence M. [H] [C] à payer à l’URSSAF [Localité 4] la somme de 13 713,51 euros dont 12 786,51 euros de cotisations et 927 euros de majorations de retard au titre de la régularisation 2015, octobre 2016, novembre 2016 et de décembre 2016 ;

valide la contrainte du 11 octobre 2018 pour un montant de 28 338 euros ;

condamne en conséquence M. [H] [C] à payer à l’URSSAF [Localité 4] la somme de 28 338 euros dont 26 075 euros de cotisations et 2 263 euros de majorations de retard au titre des régularisations 2014, 2016, 2017 et 2018 et des premier et deuxième trimestres 2018 ;

déboute M. [H] [C] de sa demande formée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

condamne M. [H] [C] aux dépens de l’instance, en ceux compris les frais de signification des contraintes.

Le tribunal a jugé régulière les contraintes qui faisaient référence à des mises en demeure qui permettaient au cotisant d’avoir connaissance de la nature des cotisations réclamées, de leur montant avec leur détail, qu’il s’agisse de cotisations ou de majorations de retard, ainsi que les périodes concernées, précisant qu’aucun texte n’imposait à la caisse de justifier dans la contrainte ou la mise en demeure des modalités de leur calcul. S’agissant des montants réclamés, le tribunal a retenu que la contestation du redressement fiscal avait donné lieu à un rejet définitif prononcé par le tribunal administratif de Dijon, les bases de calcul pour l’année 2014 devant être retenues telles que l’URSSAF les a prises en compte. Néanmoins, il a estimé que les régularisations pour l’année 2015 avaient été appelées à deux reprises et les a donc déduites.

Le jugement a été notifié par lettre recommandée avec demande d’accusé de réception remise le 15 mars 2021 à l’URSSAF [Localité 4] qui en a interjeté appel par lettre recommandée avec demande d’accusé de réception adressée le 26 mars 2021.

Par conclusions écrites n° 2 visées et développées oralement à l’audience par son représentant, l’URSSAF de [Localité 4] demande à la cour de :

constater que la contrainte est fondée en son principe ;

constater que les cotisations ont été calculées conformément à la législation en vigueur ;

constater que la contrainte est régulière tant sur le fond que sur la forme ;

en conséquence,

réformer le jugement rendu par le tribunal judiciaire d’Auxerre le 11 mars 2021 en ce qu’il valide la contrainte 2016111323 du 11 octobre 2018 pour un montant diminué de 13 713,51 euros et condamner en conséquence M. [H] [C] à payer à l’URSSAF de [Localité 4] la somme de 13 713,51 euros dont 12 786,51 euros de cotisations et 927 euros de majorations de retard au titre de la régularisation 2015, d’octobre 2016, de novembre 2016 et de décembre 2016 ;

valider la contrainte 2016111323 du 11 octobre 2018 pour son entier montant de 30 253,49 euros ;

condamner M. [H] [C] au paiement de ladite contrainte pour son entier montant de 30 253,49 euros ;

condamner M. [H] [C] aux dépens ;

établir et adresser à l’URSSAF de [Localité 4], [Adresse 2], une décision revêtue de la formule exécutoire.

Par conclusions écrites visées et développées oralement à l’audience par son avocat, M. [H] [C] demande à la cour de :

juger l’instance périmée et constater son extinction ;

subsidiairement,

juger l’URSSAF mal fondée en son appel ;

juger que l’URSSAF ne justifie pas d’une créance réelle, certaine et liquide, du calcul des cotisations et de l’imputation des règlements ;

infirmer le jugement déféré ;

et statuant à nouveau, annuler purement et simplement les contraintes n° 26700000163024558320180210641888 et n° 26700000163245583201161113231888 en date du 11 octobre 2018 émises à l’encontre de M. [H] [C] et les dire nulles et de nul effet ;

plus subsidiairement, confirmer le jugement déféré ;

condamner l’URSSAF à verser à M. [H] [C] une somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Pour un exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour renvoie à leurs conclusions écrites visées par le greffe à l’audience du 2 décembre 2024 qu’elles ont respectivement soutenues oralement.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

DÉCLARE recevable l’appel de l’URSSAF de [Localité 4] ;

REJETTE le moyen tiré de la péremption d’instance ;

INFIRME le jugement rendu le 11 mars 2021 par le tribunal judiciaire d’Auxerre ;

STATUANT À NOUVEAU,

DIT n’y avoir lieu de valider les contraintes n° 26700000163024558320180210641888 et n° 26700000163245583201161113231888 en date du 11 octobre 2018 émises à l’encontre de M. [H] [C] par l’URSSAF de [Localité 4] ;

DÉBOUTE l’URSSAF de [Localité 4] de ses demandes ;

DÉBOUTE M. [H] [C] de sa demande formée en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE l’URSSAF de [Localité 4] aux dépens.

La présidente Le président

 


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