Type de juridiction : Cour d’Appel
Juridiction : Cour d’Appel de Paris
Thématique : Affaire « on est pas couché »
→ RésuméL’affaire de diffamation impliquant Caroline Fourest et Aymeric Caron remonte à 2015, lorsque la journaliste a été condamnée pour avoir remis en question les déclarations de Rabia Bentot, une victime d’agression. Suite à cette condamnation, l’avocat de Bentot a également poursuivi Fourest pour des propos jugés diffamatoires, l’accusant d’avoir mené une campagne de dénigrement. La journaliste a pu invoquer la bonne foi, arguant que ses écrits touchaient à des sujets d’intérêt général, notamment le droit d’accès aux médias et le fonctionnement de la justice. Cette défense a été jugée pertinente dans le cadre de l’affaire.
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Imputation de diffamation
L’affaire remonte à 2015 lors de l’émission de Laurent Ruquier où Aymeric Caron avait fait état d’une condamnation pour diffamation de l’essayiste-journaliste Caroline Fourest. La journaliste avait émis des doutes sur la véracité des affirmations de Rabia Bentot, une femme voilée victime d’une agression. En dépit des précautions d’usage, la journaliste avait été condamnée pour diffamation devant le TGI de Paris. L’affaire s’est poursuivie, mais cette fois avec l’avocat de Rabia Bentot, qui a poursuivi à son tour la journaliste pour diffamation.
Liberté de ton et d’action de l’avocat
La journaliste a été poursuivie en diffamation publique en raison de propos tenus sur Internet imputant à l’avocat de Rabia Bentot « d’avoir mené une folle campagne contre elle pour la discréditer en premier lieu, puis d’avoir tenté de l’intimider en utilisant ses clients pour engager des plaintes contre elle (la défenderesse) afin de lui interdire de s’exprimer ». Ce dernier s’était prononcé publiquement (sur les réseaux sociaux sur l’affaire).
L’avocat était fondé à faire valoir que les propos en cause constituaient un fait précis susceptible de faire sans difficulté, l’objet d’un débat probatoire. En effet l’entreprise, qui consiste à instrumentaliser la justice en déposant des plaintes nécessairement dépourvues de fondement dans la seule intention d’empêcher la libre expression est une imputation diffamatoire suffisamment précise pour faire l’objet d’un débat contradictoire. L’intimidation d’une personne par ce procédé peut se démontrer par emploi des voies de droit des articles 91 et 472 du code de procédure pénale.
Bonne foi de la journaliste
La journaliste a bénéficié de l’exception de bonne foi. L’auteur d’un écrit diffamatoire peut invoquer le bénéfice de la bonne foi pour obtenir sa mise hors de cause lorsque, comme au cas d’espèce, cet écrit comprend un fait diffamatoire selon l’article 29 alinéa 1 de la loi du 29 juillet 1881. Les critères de la bonne foi s’apprécient différemment selon le genre de l’écrit en cause, la qualité de l’auteur de l’écrit et l’intérêt du public.
En l’occurrence, était bien en cause un sujet d’intérêt général à un double titre, à savoir i) les critères pouvant légitimer une interdiction de paraître dans une émission, ce qui équivaut à la remise en cause du droit d’accès au média de l’auteur d’un livre et ii) le fonctionnement de l’autorité judiciaire. La journaliste disposait donc d’une base factuelle suffisante pour qualifier le comportement de l’avocat. Par ailleurs, le propos incriminé était la réplique en des termes empreints de vivacité envers l’avocat qui avait le choix personnel de participer à une polémique qui ne le visait en rien.
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