Cour d’appel de Paris, 3 mars 2020
Cour d’appel de Paris, 3 mars 2020

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Paris

Thématique : Droit sur le patronyme Taittinger

Résumé

Dans l’affaire Taittinger, les juges ont confirmé que Virginie Taittinger pouvait utiliser son nom de famille pour lancer son propre champagne, même après la cession du groupe en 2005. Bien que son patronyme ait facilité son entrée sur le marché, cet avantage découle de son héritage et de son expérience, et non de la renommée de la marque Taittinger. La clause de cession ne lui interdisait pas d’exploiter son nom, car le mandat donné à son père ne contenait aucune restriction à cet égard. Ainsi, Virginie Taittinger a le droit d’utiliser son patronyme dans le cadre de son activité professionnelle.

En l’absence de cession de droits, au sein d’une entreprise familiale (champagne Taittinger), chaque membre est en droit d’utiliser le patronyme commun. En l’absence de cession du patronyme, toute cession de l’entreprise familiale n’emporte pas interdiction d’exploiter leur patronyme par les autres membres de la famille.

Affaire Taittinger

Les
juges ont de nouveau tranché: postérieurement à la cession du groupe Taittinger
en 2005, Virginie Taittinger a été jugé en droit d’exploiter son nom de famille
pour lancer son propre champagne dénommé «Virginie Taittinger ».

Si
le nom de famille Taittinger a été certainement un atout dans le lancement de
son champagne et l’a dispensée en partie des investissements qui auraient
incombé à un concurrent inconnu, cet avantage a trouvé sa cause exclusive dans
sa naissance et ses activités passées et non dans la captation de la renommée
de la marque ‘ Taittinger’ ou des investissements opérés pour valoriser cette
marque.

Virginie
Taittinger est en droit, dans
le cadre de la promotion de sa nouvelle activité professionnelle, de mettre en
avant à la fois son nom patronymique, son origine familiale et son expérience
passée. Cette communication est légitime, sauf à priver Virginie
Taittinger de la possibilité d’user de son nom de famille
dans le cadre de son activité et d’évoquer son parcours professionnel. La référence
en cause est faite à une personne et non à une marque.

Cession du groupe et de la marque Taittinger

Le cessionnaire du groupe Taittinger
a fait valoir sans
succès que Virginie Taittinger avait engagé sa responsabilité du fait
de la violation délibérée et récurrente des stipulations de l’article 10-4-2 de
la convention du 21 juillet 2005 par l’emploi, au profit de sa société, du nom
de famille Taittinger
à des fins commerciales pour la vente et la promotion de vins de champagne. La
clause de l’acte de cession qui est une clause de garantie d’éviction du fait
personnel du vendeur, n’a pas été jugée opposable à Virginie
Taittinger. Le mandat
donné par cette dernière à son père était un mandat spécial, limité à la vente
des titres du groupe et ne donnait pas pouvoir au mandataire ou
sous-mandataires de s’engager en son nom et pour son compte dans une convention
lui interdisant d’utiliser son nom pour exercer une activité dans le domaine du
champagne.

Mandat de cession

L’article 1987 du code civil
dispose que le mandat est ‘ou spécial et pour une affaire ou certaines affaires
seulement, ou général et pour toutes les affaires du mandant’. Il résulte des
articles 1988 et 1989 du même code que le mandat conçu en termes généraux
n’embrasse que les actes d’administration, que s’il s’agit d’aliéner ou
d’hypothéquer, ou de quelque autre acte de propriété, le mandat doit être
exprès et que le mandataire ne peut rien faire au-delà de ce qui est porté dans
son mandat.

En l’espèce, si le mandat de
vente donné par Virginie Taittinger à son père visait expressément
la vente de ses titres (non pactés), c’est en des termes très généraux qu’il
autorisait au surplus le mandataire à souscrire à ‘tout engagement ou garantie,
et plus généralement faire le nécessaire selon ce qu’il jugera utile ou
approprié’ en vue de la réalisation de la cession ou consécutivement à celle-ci.
Le mandat en ce qu’il portait sur des actes autres que la vente des titres
proprement dite, non précisément définis, était un mandat général et, de ce
fait, n’emportait pas le pouvoir pour le mandataire, ou les sous-mandataires,
de consentir une interdiction ou une limitation de l’usage par le mandant de son
nom de famille, constitutives d’actes de disposition.

Le mandat donné par Virginie Taittinger à son père ne contenait aucune disposition, expresse ou implicite, relative à la restriction de l’usage de son nom patronymique telle qu’elle résulte de l’acte de cession. Cette restriction était d’autant plus considérable que Virginie Taittinger, qui a le droit, comme tout individu, de faire usage de son nom patronymique en toutes occasions, avait, au jour de la cession, une compétence et une expérience professionnelles acquises quasi exclusivement dans le domaine du champagne et au service des sociétés du groupe. Il a été exclu qu’elle ait accepté, prévu ou même seulement envisagé que son père consentirait à la stipulation d’une telle clause. Télécharger la décision

 

 


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon