Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Paris
Thématique : Rupture de contrat et indemnités : enjeux d’une relation professionnelle complexe
→ RésuméEngagement et Promotion de M. [P]M. [Y] [P] a été engagé par la société Climat bains en tant que compagnon professionnel à compter du 2 mai 2017, et a été promu chef de chantier le 22 novembre 2017. Les relations de travail étaient régies par la convention collective nationale du bâtiment, et l’entreprise comptait au moins onze salariés au moment de la rupture du contrat. Licenciement de M. [P]Le 3 janvier 2019, M. [P] a été convoqué à un entretien préalable, et a été licencié pour cause réelle et sérieuse par lettre datée du 28 janvier 2019, après une ancienneté de 1 an et 8 mois. M. [P] a contesté ce licenciement et a saisi le conseil de prud’hommes de Paris le 13 décembre 2019. Demandes de M. [P]M. [P] a formulé plusieurs demandes, incluant des indemnités pour déplacements, congés payés, heures supplémentaires, licenciement sans cause réelle et sérieuse, et travail dissimulé. Il a également demandé la remise de documents sociaux tels que des bulletins de paie. Réponse de la société Climat bainsLa société Climat bains a demandé la condamnation de M. [P] à rembourser une avance sur frais et a réclamé des frais irrépétibles. Le conseil de prud’hommes a rendu un jugement le 1er juin 2021, déboutant M. [P] de ses demandes et faisant droit aux demandes reconventionnelles de l’employeur. Appel de M. [P]M. [P] a interjeté appel du jugement le 30 novembre 2021, sauf en ce qui concerne le surplus des demandes reconventionnelles. Le 19 septembre 2023, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de liquidation judiciaire pour la société Climat bains. Arguments des Parties en AppelM. [P] a demandé l’infirmation du jugement et a inscrit plusieurs sommes au passif de la société, tandis que la société GEMMJ, mandataire judiciaire, a demandé le rejet de certaines demandes de M. [P] et la confirmation du jugement initial. Indemnités de Grand DéplacementM. [P] a soutenu que l’employeur ne l’avait pas intégralement défrayé pour ses déplacements, tandis que l’employeur a affirmé que les indemnités versées étaient supérieures aux montants dus. Le tribunal a constaté que M. [P] avait droit à des indemnités supplémentaires. Indemnité de Temps de TrajetM. [P] a demandé une indemnité pour le temps de trajet, que l’employeur a contestée comme étant irrecevable. Le tribunal a jugé que cette demande était fondée et a accordé l’indemnité correspondante. Heures SupplémentairesM. [P] a affirmé avoir effectué des heures supplémentaires non rémunérées, tandis que l’employeur a contesté cette affirmation. Le tribunal a jugé que M. [P] avait suffisamment justifié ses heures supplémentaires. Travail DissimuléM. [P] a soutenu que l’employeur avait dissimulé des heures de travail. L’employeur a nié cette accusation, et le tribunal a conclu qu’il n’y avait pas suffisamment de preuves pour établir l’intention dissimulatrice. Rupture du Contrat de TravailLe licenciement de M. [P] a été justifié par des insuffisances professionnelles et un comportement nuisible à l’image de l’entreprise. Cependant, le tribunal a jugé que les griefs étaient trop vagues et que l’absence de M. [P] était justifiée. Décision du TribunalLe tribunal a infirmé le jugement initial concernant le licenciement, le déclarant sans cause réelle et sérieuse, et a accordé à M. [P] des indemnités pour les frais de déplacement, le temps de trajet, les heures supplémentaires, et le licenciement. Les demandes reconventionnelles de l’employeur ont été partiellement confirmées. ConclusionLe tribunal a ordonné la remise des documents de fin de contrat à M. [P] et a déclaré que les condamnations seraient opposables à l’AGS. Les frais irrépétibles et les dépens ont été mis à la charge de l’employeur. |
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 3
ARRET DU 29 JANVIER 2025
(n° , 10 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/09805 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CEXKZ
Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 Juin 2021 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – RG n° F19/11014
APPELANT
Monsieur [Y] [P]
Né le 25 Juin 1963 à [Localité 11]
[Adresse 3]’
[Localité 4]
Représenté par Me Daniel RAVEZ, avocat au barreau de PARIS, toque : B1024
INTIMEE
S.A.R.L. CLIMAT BAINS
N° SIRET : 479 894 594
[Adresse 5]
[Localité 7]
Représentée par Me Laurence TARQUINY CHARPENTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : D0542
PARTIES INTERVENANTES
Association AGS CGEA IDF OUEST, prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 1]
[Localité 8]
Non représentée, l’assignation en intervention forcée ayant été signifiée par exploit d’huissier le 16 février 2024 à personne morale
S.A.S. GEMMJ, prise en la personne de Me [V] [F], es-qualité de mandataire judiciaire liquidateur de la SARL CLIMAT BAINS
[Adresse 2]
[Localité 6]
Représentée par Me Laurence TARQUINY CHARPENTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : D0542
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 10 Décembre 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Marie-Lisette SAUTRON, Présidente
Mme Véronique MARMORAT, Présidente
M. Christophe BACONNIER, Président
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Madame Marie-Lisette SAUTRON dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Madame Laetitia PRADIGNAC
ARRET :
– Réputé contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Marie-Lisette SAUTRON, Présidente de chambre et par Laetitia PRADIGNAC, Greffière, présent lors de la mise à disposition.
RAPPEL DES FAITS ET PROCÉDURE
La société Climat bains a engagé M. [Y] [P] par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 2 mai 2017 en qualité de compagnon professionnel, lequel a été promu chef de chantier à compter du 22 novembre 2017.
Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale du bâtiment.
La société Climat bains occupait à titre habituel au moins onze salariés lors de la rupture des relations contractuelles.
Sa rémunération mensuelle brute moyenne s’élevait en dernier lieu à la somme de 2 900 euros, outre une indemnité de grand déplacement de 20 euros par jour.
Par lettre notifiée le 3 janvier 2019, M. [P] a été convoqué à un entretien préalable fixé au 14 janvier.
M. [P] a ensuite été licencié pour cause réelle et sérieuse par lettre notifiée le 28 janvier 2019.
A la date de présentation de la lettre recommandée notifiant le licenciement, M. [Y] [P] avait une ancienneté de 1 an et 8 mois.
Le 13 décembre 2019, M. [P] a saisi le conseil de prud’hommes de Paris de demandes tendant à :
– faire condamner l’employeur à lui payer, avec intérêts, les sommes suivantes :
. 10 000 euros à titre d’indemnité de déplacement,
. 1 000 euros de congés payés afférents,
. 176,19 euros à titre de remboursement de frais,
. 6 000 euros à titre d’heures supplémentaires,
. 600 euros à titre de congés payés afférents,
. 10 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
. 20 898 euros au titre du travail dissimulé,
– faire condamner sous astreinte l’employeur à lui remettre des bulletins de paie et l’attestation destinée au Pôle Emploi.
La société Climat bains a demandé reconventionnellement la condamnation du salarié à lui payer 500 euros au titre de remboursement de frais et 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par jugement contradictoire rendu le 01 juin2021, auquel la cour se réfère pour l’exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le conseil de prud’hommes de Paris a débouté le salarié de l’ensemble de ses demandes, l’a condamné aux dépens et a fait droit aux demandes reconventionnelles de l’employeur, dans la limite de 1 200 euros pour ce qui concerne les frais irrépétibles.
M. [P] a relevé appel de ce jugement par déclaration transmise par voie électronique le 30 novembre 2021, en chaque chef de son dispositif, sauf en ce qu’il a débouté l’employeur du surplus de ses demandes reconventionnelles.
Par jugement du 19 septembre 2023 le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de liquidation judiciaire concernant la SARL Climat bains.
Par assignations du 16 février 2024, le mandataire liquidateur et l’AGS ont été appelés en la cause.
L’ordonnance de clôture a été rendue à la date du 15 octobre 2024.
L’affaire a été appelée à l’audience du 10 décembre 2024.
EXPOSE DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 4 mars 2024, auxquelles la cour se réfère expressément pour l’exposé des moyens, M. [Y] [P] demande à la cour :
– d’infirmer le jugement en ce qu’il l’a débouté de toutes ses demandes et en ce qu’il l’a condamné au paiement de 500 euros à titre de remboursement d’avances sur frais de novembre 2017, et au paiement de 1 200 euros au titre des frais irrépétibles ;
– d’inscrire au passif de la SAS Climat bains, avec intérêts, les sommes suivantes :
. 4 184 euros à titre d’indemnités grand déplacement (logement et petit déjeuner),
. 1 316,48 euros à titre d’indemnité grand déplacement (indemnité repas),
. 497,12 euros à titre d’indemnité grand déplacement (temps de trajet),
. 49,71 euros à titre de congés payés afférents,
. 5 321,57 euros à titre d’heures supplémentaires,
. 532,15 euros à titre de congés payés afférents,
. 10 000 euros à titre de licenciement sans cause réelle et sérieuse,
. 20 898 euros pour dissimulation d’emploi salarié,
. 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– d’ordonner sous astreinte la remise des documents sociaux et notamment des bulletins de paie conformes et l’attestation Pôle emploi ;
– de dire la décision opposable à l’AGS »
Par ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 30 avril 2024, auxquelles la cour se réfère expressément pour l’exposé des moyens, la société GEMMJ, en qualité de mandataire judiciaire de la société Climat bains, demande à la cour :
in limine litis,
– de rejeter la demande formée pour la première fois en cause d’appel, concernant la demande d’indemnité de temps de trajets lors des déplacements professionnels à [Localité 9] pour être irrecevable ;
– de confirmer le jugement en toutes ses dispositions ;
subsidiairement, si par impossible, la cour devait juger le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,
– de faire application du barème légal d’indemnisation ;
– de condamner M. [P] au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– de condamner le salarié appelant aux dépens d’instance, notamment ceux comprenant le recouvrement forcé des sommes allouées.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, réputé contradictoire, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi,
Confirme le jugement rendu le 7 avril 2021 par le conseil de prud’hommes de Paris en ce qu’il a débouté le salarié de sa demande au titre du travail dissimulé et en ce qu’il a condamné le salarié au remboursement de l’avance sur frais ;
Infirme le surplus,
statuant à nouveau, dans la limite des chefs d’infirmation et y ajoutant,
Juge sans cause réelle et sérieuse le licenciement ;
Déclare recvable l’indemnité de temps de trajet ;
Fixe ainsi qu’il suit les créances de M. [P] au passif de la liquidation judiciaire de la SAS Climat bains :
. 5 500,48 euros à titre d’indemnités grand déplacement,
. 497,12 euros à titre d’indemnité temps de trajet pour grand déplacement,
. 49,71 euros à titre de congés payés afférents,
. 5 321,57 euros à titre d’heures supplémentaires,
. 532,15 euros à titre de congés payés afférents,
. 5 500 euros à titre de licenciement sans cause réelle et sérieuse,
. 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Dit que les indemnité de grand déplacement et de trajet, les congés payés afférents, les heures supplémentaires avec congés payés afférents porteront intérêts au taux légal à compter du 5 septembre 2019 jusqu’au 19 septembre 2023 ;
Ordonne sans astreinte la remise d’un bulletin de paie et d’une attestation France travail conformes au présent arrêt ;
Dit que le présent arrêt est commun et opposable à l’AGS qui devra garantir les condamnations dans les limites et conditions légales et réglementaires ;
Fixe les dépens de première instance et d’appel au passif de la SAS Climat bains.
Le greffier La présidente
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