Cour d’appel de Paris, 27 septembre 2017
Cour d’appel de Paris, 27 septembre 2017

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Paris

Thématique : Détournement de l’image d’une personne

Résumé

La Cour d’appel de Paris a confirmé le détournement de l’image d’une institutrice, dont les photographies, prises pour un reportage sur la scolarisation, ont été utilisées hors de leur contexte. Diffusées par l’AFP, ces images ont illustré des sujets variés, souvent dévalorisants, sans l’accord de l’institutrice. Bien que Le Point ait fait appel de sa condamnation, la cour a jugé que l’utilisation de l’image était illégitime, ne respectant pas le droit à l’image protégé par l’article 9 du Code civil. Les clichés, sans lien avec les sujets abordés, ont ainsi porté atteinte à la dignité de la personne représentée.

Détournement de l’image d’une personne confirmé

La Cour d’appel de Paris a confirmé le détournement de l’image d‘une institutrice qui avait autorisé un journaliste de l’AFP à réaliser une enquête photographique sur la scolarisation des enfants de sa classe. Les clichés photographiques ont été diffusés par l’AFP à ses abonnés qui les ont, pour certains, repris mais détourné de leur contexte. Des clichés avaient ainsi été reproduits pour illustrer des sujets aussi divers que variés («L’incroyable erreur d’une prof qui diffuse par erreur un film X à ses élèves » ; « Barbecue halal à l’école » ;  «Pourquoi l‘Education Nationale a tant de mal à se reformer» …). Ces utilisations étant étrangères à l’autorisation donnée, l’institutrice a obtenu la condamnation d’un pool de titres de presse au titre du détournement de son image.

Appel infructueux du Point

Parmi les titres condamnés, Le Point a fait appel, sans succès, de sa condamnation.  Le magazine n’associait pas l’image de l’institutrice à des sujets aussi dévalorisants que ceux ayant donné lieu aux autres condamnations prononcées mais néanmoins, la polémique relative au sexisme supposée du terme  » école maternelle  » restait sans relation avec le reportage auquel l’institutrice avait accepté de participer, lui-même exempt d’aspect autre que sa pratique scolaire. La photographie en cause avait donc bien été détournée de son objet originel, sans l’accord de l’intéressée et de surcroît associée au terme dévalorisant de  » sexiste  » dans un titre qui est la première accroche d’un lectorat qui ne prendra pas forcément connaissance du contenu exact de l’information.

Finalité de la cession de droit à l’image

En application de l’article 9 du Code civil, toute personne, quelle que soit sa notoriété, ou son absence de notoriété, dispose d’un droit exclusif sur son image, attribut de la personnalité, et sur l’utilisation qui en est faite, qui lui permet, en principe, de s’opposer à la diffusion de son image sans son autorisation, laquelle peut être implicite, et d’obtenir réparation du préjudice qui lui aurait été causé de ce fait.

Ce droit peut cependant céder devant les nécessités de la liberté d’expression lorsque la diffusion des images est légitime au regard de ces nécessités, l’appréciation de cette légitimité étant fonction d’un ensemble de circonstances tenant essentiellement à la personne qui se plaint de l’atteinte à ce droit protégé par l’article 9 du Code civil, notamment sa qualité et son comportement antérieur, et à l’objet de la publication en cause – son contenu, sa forme, l’absence de malveillance et d’atteinte à la dignité de la personne, ainsi que sa participation à un débat d’intérêt général – ; dans ce cas cependant il doit être pris en compte la qualité de l’information délivrée ; que ces critères sont conformes aux stipulations des articles 8 et 10 de la convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales.

Les organes de presse disposent de la liberté d’illustrer un sujet d’actualité ou d’intérêt général dès lors que le cliché en cause ne porte pas atteinte à la dignité de la personne, mais c’est à la condition préalable que la personne représentée présente un lien suffisant avec le sujet d’actualité ou d’intérêt général évoqué. Or, les clichés litigieux, étaient sans aucun lien avec les sujets abordés, la seule circonstance que les clichés la représentent dans l’exercice de son métier d’institutrice dans une salle de classe, ne pouvant rendre légitime l’utilisation, sans son autorisation, de son image afin d’illustrer quelque sujet que ce soit ayant un lien plus ou moins ténu avec l’enseignement scolaire.

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