Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Paris
Thématique : Souvenirs à touristes : l’association à une marque impossible ?
→ RésuméLes objets-souvenirs posent un défi particulier en matière de protection par le droit des marques. En effet, les touristes, souvent étrangers, ne sont pas toujours en mesure d’identifier l’origine d’un produit. Ainsi, la fonction principale de la marque, qui est de relier une société à ses produits, est compromise. Par ailleurs, la protection par le droit d’auteur est limitée, notamment pour des objets comme les boîtes à musique, dont la forme est souvent dictée par des impératifs fonctionnels. En conséquence, la concurrence déloyale et le parasitisme ne sont pas retenus, car la liberté du commerce prime dans ce contexte.
|
Statut particulier des objets-souvenir
C’est acquis, les touristes ne sont pas d’ici et, conséquence intéressante en droit des marques, tous ne sont donc pas aptes à identifier l’origine d’un produit aussi commun qu’un objet souvenir. Précisément, la fonction principale de la marque est de permettre de faire le lien entre une société et ses produits. Comme illustré par cette affaire, l’objet-souvenir n’est pas le candidat idéal à une protection efficace par le droit des marques.
Boîtes à musique souvenir : la contrefaçon exclue
Une société qui a pour activité principale la création de jeux et de jouets n’a pu obtenir de protection par les droits d’auteur, sur une boîte à musique à manivelle ronde en papier cartonné. Concernant ces boîtes à musique souvenirs, les juges ont considéré que l’approche visuelle était souvent similaire dans la conception et la clientèle ciblée est identique, à savoir le touriste qui ne peut être trompé sur l’origine d’un produit dont il ignore tout, uniquement guidé par des choix esthétiques.
Question de la forme et des fonctionnalités
Par ailleurs, la protection conférée par le droit d’auteur ne peut s’appliquer à la forme d’une oeuvre qu’à la condition que la forme ne soit pas entièrement dictée par sa fonction, et suppose que l’auteur ait été animé, dans la conception de l’oeuvre arguée de contrefaçon, du souci de donner à celle-ci une valeur nouvelle dans le domaine de l’agrément et séparable du caractère fonctionnel de l’objet envisagé.
Si effectivement, la forme de la boîte à musique n’était pas dictée par des impératifs techniques ou utilitaires, la combinaison de ses caractéristiques (choix des formes, proportions, dimensions, ouvertures, matières, inscriptions et couleurs adoptées) ne conférait pas à la boîte une originalité suffisante.
Parasitisme et concurrence déloyale
Le parasitisme, notamment par la vente de boîtes similaires dans les mêmes circuits de distribution (les boutiques de souvenirs et de cadeaux), n’a pas non plus été retenu. La concurrence déloyale doit être appréciée au regard du principe de la liberté du commerce qui implique qu’un signe qui ne fait pas l’objet de droits privatifs puisse être librement reproduit sous certaines conditions tenant à l’absence de faute par la création d’un risque de confusion dans l’esprit de la clientèle sur l’origine du produit, circonstance attentatoire à l’exercice paisible et loyal du commerce. A ce titre, une pratique commerciale trompeuse à l’égard d’un consommateur constitue un acte de concurrence déloyale entre concurrents.
L’appréciation de la faute au regard du risque de confusion doit résulter d’une approche concrète et circonstanciée des faits de la cause prenant en compte notamment le caractère plus ou moins servile, systématique ou répétitif de la reproduction ou de l’imitation, l’ancienneté d’usage, l’originalité et la notoriété de la prestation copiée.
Le parasitisme, qui s’apprécie dans le même cadre que la concurrence déloyale dont il est une déclinaison mais dont la constitution est toutefois indifférente au risque de confusion, consiste dans le fait pour une personne physique ou morale de profiter volontairement et déloyalement sans bourse délier des investissements, d’un savoir-faire ou d’un travail intellectuel d’autrui produisant une valeur économique individualisée et générant un avantage concurrentiel.
En l’occurrence, il a été jugé que le fait que la commercialisation des boites à musique se fasse auprès de distributeurs spécialisés dans les ventes de souvenirs et de cadeaux est inévitable compte tenu de son activité concurrentielle sans pour autant que ce fait puisse être considéré avec l’évidence requise en référé comme fautif.
Laisser un commentaire