Cour d’Appel de Paris, 2 octobre 2018
Cour d’Appel de Paris, 2 octobre 2018

Type de juridiction : Cour d’Appel

Juridiction : Cour d’Appel de Paris

Thématique : Produits contrefaisants sur Téléshopping ?

Résumé

Le diffuseur audiovisuel doit garantir l’éviction du producteur d’une émission de téléshopping, surtout en cas de contrefaçon. Une société chinoise a constaté que son modèle d’appareil de cuisson, « Tarte révolution », était commercialisé par Home Shopping, filiale du Groupe M6. Cependant, le modèle n’a pas été jugé original au regard du droit d’auteur, car ses caractéristiques étaient principalement dictées par sa fonction. L’originalité, reflet de la personnalité de l’auteur, n’a pas été établie, entraînant le rejet des demandes en contrefaçon. Les choix esthétiques doivent donc se distinguer des aspects fonctionnels pour bénéficier de la protection.

Prévoir une garantie d’éviction

Le diffuseur audiovisuel a tout intérêt à prévoir une garantie d’éviction à la charge du producteur d’une émission de téléshopping (qui lui-même pourra être garanti par l’annonceur). Une société chinoise qui a pour activité la production et la vente de produits électroménagers a constaté qu’un modèle d’appareil de cuisson électrique, similaire au sien (« Tarte révolution »), avait été présenté à la vente par la société Home Shopping, filiale du Groupe M6.

Appréciation de la contrefaçon

Le modèle en cause n’a pas été considéré comme suffisamment original pour être éligible à la protection du droit d’auteur. L’article L.112-1 du code de la propriété intellectuelle protège par le droit d’auteur toutes les oeuvres de l’esprit, quels qu’en soient le genre, la forme d’expression, le mérite ou la destination, pourvu qu’elles soient des créations originales ; selon l’article L.112-2 10°, les oeuvres des arts appliqués sont considérés comme oeuvres de l’esprit.

Il se déduit de ces dispositions le principe de la protection d’une oeuvre sans formalité et du seul fait de la création d’une forme originale ; cependant, lorsque cette protection est contestée, l’originalité d’une oeuvre doit être explicitée par celui qui s’en prétend l’auteur, seule ce dernier étant à même d’identifier les éléments traduisant sa personnalité.

L’originalité d’une oeuvre est l’expression de la personnalité de son auteur, traduisant l’existence d’un parti-pris esthétique et de choix arbitraires donnant à l’oeuvre une physionomie propre reflétant l’empreinte de la personnalité de l’auteur.

L’importance du fonctionnel

En matière d’oeuvres des arts appliqués, les choix effectués parmi plusieurs possibilités techniques pour parvenir à un produit utilitaire ne sont pas, par principe, exclusifs de partis-pris esthétiques et de choix arbitraires. L’originalité doit être déterminée en fonction de l’aspect d’ensemble produit par l’agencement des différents éléments propres au modèle en cause et non de l’examen de chacun d’eux pris individuellement.  Cependant, la protection par le droit d’auteur ne peut s’appliquer à la forme d’une oeuvre relevant des arts appliqués qu’à la condition que cette dernière ne soit pas entièrement dictée par sa fonction. En l’occurrence, les caractéristiques invoquées par la société concernant le dessus de l’appareil étaient commandées par la fonction du produit qui est de confectionner, notamment, des crêpes, des pizzas ou des tartes de forme généralement ronde ; la relative compacité de l’appareil, comme son centre plat, était nécessaire afin de permettre un moindre encombrement dans une cuisine ; la poignée rectangulaire disposée de face, sur le devant, et de forme avantageuse permettait une manipulation aisée de l’appareil ; la forme bombée du chanfrein (arête) ne traduisait, quant à elle, aucun parti-pris esthétique ou choix créatif reflétant l’empreinte de la personnalité de l’auteur, apparaissant banale au vu des exemples d’appareils de cuisson commercialisés antérieurement. Bref, les caractéristiques esthétiques revendiquées répondaient à des aspects fonctionnels. L’originalité de l’appareil n’étant pas établie, la société a été déboutée de ses demandes en contrefaçon fondées sur le droit d’auteur.

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