Type de juridiction : Cour d’Appel
Juridiction : Cour d’Appel de Paris
Thématique : D8 condamnée pour atteinte à l’image d’une société
→ RésuméL’univers graphique des sociétés, incluant leur charte graphique et leur nom commercial, est protégé contre le risque de confusion, même si le tiers n’est pas un concurrent. Dans l’affaire D8, un documentaire a utilisé le nom fictif « LA CUISINE DE SOPHIE » pour infiltrer des usines au Vietnam, ce qui a porté atteinte à l’image de la société GENDREAU. Bien que l’usage du nom n’ait pas constitué une contrefaçon de marque, la reprise servile des éléments d’identification de GENDREAU a créé un risque d’association avec des pratiques douteuses, entraînant un préjudice évalué à 25 000 € en dommages et intérêts.
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L’univers graphique des sociétés (charte graphique, nom commercial, conditionnements …) est protégé en cas de risque de confusion entretenu par un tiers y compris lorsque ce tiers n’est pas un concurrent de la société.
Affaire D8
Un documentaire acheté par D8 présentait une enquête menée
pendant un an sur certains aspects de l’industrie alimentaire, dont les
techniques de fabrication de produits préparés, en évoquant notamment la
traçabilité de leurs composants, parmi lesquels la pulpe de poisson. Afin de
s’introduire dans des usines de fabrication de ce type de produits au Vietnam,
où aucune autorisation de tournage ne leur avait été délivrée, les journalistes
se sont présentés comme les dirigeants d’une société française «LA
CUISINE DE SOPHIE» au nom de laquelle une brochure commerciale, un site
internet et une page Facebook avaient, à cette fin, été constitués.
Risque de confusion
Les produits en cause présentaient les mêmes
caractéristiques que ceux de la société GENDREAU vendus en supermarchés et
hypermarchés dans toute la France sous la marque ‘LA CUISINE D’OCEANE’. Cette
appellation fictive et les éléments s’y rapportant (documents, plaquettes,
packagings et intitulé des produits) ont été considérés comme portant atteinte
à l’image de la société GENDREAU.
Absence de contrefaçon de marque
A noter que les conditions d’un usage constitutif d’une
contrefaçon de marque n’étaient pas remplies en l’espèce, le signe litigieux ‘LA CUISINE DE SOPHIE’,
représenté sur une documentation commerciale réalisée pour les besoins de
l’émission ‘Qu’allons-nous bientôt manger », n’a pas été utilisé pour
identifier l’origine d’un produit et afin d’obtenir un avantage économique,
même si cet usage est intervenu dans le cadre de l’activité commerciale de la
société C8, mais pour permettre la réalisation du tournage et accéder à des
informations sur la composition de certains plats cuisinés. Par ailleurs, faute
d’originalité, les logos, visuels et emballages revendiqués par la société
GENDREAU n’ont pas bénéficié de la protection du droit d’auteur.
Image des sociétés
En revanche, l’émission a porté atteinte à l’image de la société GENDREAU du fait de la reprise servile du personnage du logo figurant sur ses produits, des intitulés de deux plats comme de leur emballage dont les formes, couleurs et illustrations ont été reproduites à l’identique, une telle reprise des éléments d’identification de la société GENDREAU conduisant le téléspectateur, bien qu’avisé du procédé employé, à associer les produits distribués sous la marque ‘LA CUISINE D’OCEANE’ aux pratiques dénoncées dans l’émission et à percevoir ces produits comme des exemples de plats contenant des ingrédients d’origine douteuse. Le risque d’association était d’autant plus réel que la société GENDREAU avait, en janvier 2016, soit deux mois avant la diffusion du reportage litigieux, engagé une campagne publicitaire sur la chaîne D8 portant sur les produits distribués sous sa marque ‘LA CUISINE D’OCEANE’. Les juges ont également écarté l’argumentation de la société C8 qui faisait valoir qu’elle n’était pas producteur de l’émission mais seulement diffuseur, en retenant qu’elle n’ignorait ni le contenu de l’émission ni les conséquences susceptibles de s’attacher à l’imitation d’une marque qui avait fait précédemment l’objet d’une campagne publicitaire sur sa propre antenne. Ces appropriations, qui ont incontestablement permis la réalisation d’économies, sont constitutives d’actes de parasitisme, les logo, marque, recettes, emballages et visuels de la société GENDREAU constituant une valeur économique dont il a été indûment tiré profit, sans bourse délier, indépendamment du préjudice résultant de l’atteinte qui a été portée à l’image de cette société (25 000 € à titre de dommages et intérêts). Télécharger la décision
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