Cour d’appel de Paris, 17 janvier 2025, RG n° 23/01782
Cour d’appel de Paris, 17 janvier 2025, RG n° 23/01782

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Paris

Thématique : Dissimulation d’informations essentielles lors d’une transaction immobilière : enjeux et conséquences.

Résumé

Faits et procédure

Les consorts [K]-[Z] ont promis de vendre un appartement aux époux [J] par acte authentique le 15 février 2018, avec une vente réalisée le 30 mai 2018 pour un montant de 1.030.000 €. En mars 2020, les époux [J] ont mis en demeure les consorts [K]-[Z] de verser 50.000 € pour indemniser un préjudice lié à la dissimulation d’informations sur des désordres affectant l’immeuble. Les époux [J] ont ensuite assigné les consorts [K]-[Z] et la S.A.S Vaneau devant le tribunal judiciaire de Paris, invoquant le dol et la garantie des vices cachés.

Jugement du tribunal judiciaire

Le tribunal judiciaire de Paris, par jugement du 9 novembre 2022, a débouté les époux [J] de leurs demandes d’indemnisation pour préjudice matériel, trouble de jouissance et préjudice moral. Il a également condamné les époux [J] à verser des indemnités aux consorts [K]-[Z] et à la S.A.S Vaneau au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Les époux [J] ont interjeté appel de cette décision le 16 janvier 2023.

Prétentions des parties

Les époux [J] demandent à la cour d’infirmer le jugement du 9 novembre 2022 et de condamner les consorts [K]-[Z] et la S.A.S Vaneau à verser des dommages et intérêts pour préjudice matériel, moral et de jouissance. Ils soutiennent que les vendeurs ont dissimulé des informations essentielles concernant des désordres affectant l’immeuble. Les consorts [K]-[Z] et la S.A.S Vaneau, quant à eux, demandent la confirmation du jugement et le déboutement des demandes des époux [J].

Motivation de la cour

La cour examine la réticence dolosive des vendeurs concernant des désordres structurels affectant l’immeuble. Les époux [J] allèguent que les vendeurs ont dissimulé des informations sur des désordres graves, ce qui a vicié leur consentement. La cour constate que les désordres étaient antérieurs à la vente et que les vendeurs avaient connaissance de ces problèmes, mais n’ont pas informé les époux [J]. La cour conclut que les consorts [K]-[Z] ont commis une réticence dolosive engageant leur responsabilité envers les époux [J].

Décision de la cour

La cour infirme le jugement du tribunal judiciaire de Paris en ce qui concerne les demandes des époux [J] et reconnaît la réticence dolosive des consorts [K]-[Z]. Elle engage également la responsabilité délictuelle de la S.A.S Vaneau pour manquement à son obligation d’information. La cour ordonne la réouverture des débats pour examiner l’indemnisation des préjudices subis par les époux [J].

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 1

ARRÊT DU 17 JANVIER 2025

(n° , 20 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 23/01782 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CHADF

Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Novembre 2022 -Tribunal Judiciaire hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de PARIS – 2ème Chambre – RG n° 20/04053

APPELANTS

Monsieur [G] [J] né le 02 Septembre 1984 à [Localité 7],

[Adresse 1]

[Localité 11]

Madame [U] [M] épouse [J] née le 28 Septembre 1981 à Province de Hubei, Municipalité de [Localité 13],

[Adresse 1]

[Localité 11]

Tous deux représentés par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111 assistés de Me Pascal ORMEN de la SELARL ORMEN PASSEMARD & AUTRES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0555

INTIMÉS

Monsieur [L] [K] né le 03 Février 1972 à [Localité 10]

[Adresse 3]

[Localité 5]

Madame [X] [Z] née le 21 Novembre 1971 à [Localité 9]

[Adresse 3]

[Localité 5]

Tous deux représentés par Me Jean-yves ROCHMANN, avocat au barreau de PARIS, toque : D0643

S.A.S. Agence Immobilière VANEAU immatricuéle au RCS de Paris sous le numéro 450 623 103, agissant poursuites et diligences pris en la personne de son représentant légal domiciliè en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 11]

Représentée par Me Ariane LAMI SOURZAC, avocat au barreau de PARIS, toque : C0380

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 22 février 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :

Marie-Agnès SENTUCQ, présidente de chambre

Nathalie BRET, conseillère

Catherine GIRARD- ALEXANDRE, conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Madame Catherine GIRARD-ALEXANDRE , Conseillère,, dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

Greffier : Madame Marylène BOGAERS, lors des débats

ARRÊT :

– contradictoire,

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour initialement prévue le 24 mai 2024. Ultérieurement, ils ont été informés que la décision serait prorogée en dernier lieu le 17 janvier 2025, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Marie-Agnès SENTUCQ, présidente de chambre, et par Marylène BOGAERS, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

Par acte authentique en date du 15 février 2018 conclu par l’entremise de la SAS Vaneau, agent immobilier, détentrice d’un mandat de vente sans exclusivité en date du 22 janvier 2018, [L] [K] et [X] [Z] (ci-après les consorts [K]-[Z]) ont unilatéralement promis de vendre à [G] [J] et [U] [M] épouse [J] (ci-après les époux [J]) un appartement dépendant d’un ensemble immobilier en copropriété, situé [Adresse 2] à [Localité 11] moyennant le prix de 1.030.000 €.

La vente a été réalisée par acte authentique du 30 mai 2018.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 31 mars 2020, les époux [J] ont mis en demeure les consorts [K]-[Z] de leur verser la somme de 50.000 € aux fins d’indemniser leur préjudice résultant de la dissimulation d’informations essentielles et déterminantes de leur consentement concernant l’existence et la gravité des désordres affectant l’immeuble et l’existence de nombreux contentieux à l’encontre de la copropriété, nécessitant de lourdes dépenses de travaux qu’ils n’avaient pas été mis en mesure de prévoir.

Par acte d’huissier du 25 mai 2020, les époux [J] ont assigné les consorts [K]-[Z] ainsi que la S.A.S Vaneau devant le tribunal judiciaire de Paris sur le fondement principal du dol et subsidiaire de la garantie des vices caches.

Par jugement du 9 novembre 2022, le tribunal judiciaire de Paris a statué ainsi :

Déboute les époux [J] de leurs demandes tendant à :

Condamner solidairement [L] [K] et [X] [Z] et la S.A.S Vaneau à leur verser une indemnité de 85.000 euros pour leur préjudice matériel, une indemnité de 10.000 euros pour trouble de jouissance et une indemnité de 5.000 euros pour leur préjudice moral, outre les intérêts légaux avec anatocisme à compter du 31 mars 2020,

Les condamner solidairement à leur verser une somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum les époux [J] à verser les indemnités suivantes au titre de l’article 700 du code de procédure civile :

2.000 euros à [L] [K] et [X] [Z],

2.000 euros à la S.A.S Vaneau ;

Les condamne aux dépens et accorde à Maître Ariane LAMI SOURZAC le bénéfice de l’article 699 du code de procédure civile,

Les époux [J] ont interjeté appel de cette décision par déclaration remise au greffe le 16 janvier 2023.

PRETENTIONS DES PARTIES

Par conclusions notifiées par voie électronique le 29 janvier 2024, les époux [J], appelants, demandent à la cour, au visa des articles 1116, 1382, 1641 et 1645 du Code civil, de:

-INFIRMER le jugement du 9 novembre 2022 du tribunal judiciaire de Paris en ce qu’il

– « DEBOUTE les époux [J] de leurs demandes tendant à :

Condamner solidairement [L] [K] et [X] [Z] et la S.A.S. Vaneau à leur verser une indemnité de 85 000 euros pour leur préjudice matériel, une indemnité de 10 000 euros pour trouble de jouissance et une indemnité de 5 000 euros pour leur préjudice moral, outre les intérêts légaux avec anatocisme à compter du 31 mars 2020,

Les condamner solidairement à leur verser une somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

-CONDAMNE in solidum les époux [J] à verser les indemnités suivantes au titre de l’article 700 du Code de procédure civile :

2 000 euros à [L] [K] et [X] [Z],

2 000 euros à la S.A.S. Vaneau.

– LES CONDAMNE aux dépens et accordé à Maître Ariane Lami Sourzac le bénéfice de l’article 699 du Code de procédure civile. » ;

A TITRE PRINCINPAL

– JUGER que Madame [Z] et Monsieur [L] [K] sont à l’origine d’une réticence dolosive d’informations essentielles lors de la vente du 30 mai 2018 de l’appartement situé au [Adresse 1] ;

EN CONSEQUENCE :

– CONDAMNER solidairement Madame [X] [Z], Monsieur [L] [K] et l’agence Vaneau à verser à Monsieur et Madame [J] la somme de 87.000 euros à parfaire à titre de dommages et intérêts avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 31 mars 2020 et anatocisme ;

A TITRE SUBSIDIAIRE

– JUGER que l’immeuble était affecté de vices cachés que Madame [Z] et Monsieur [L] [K] ne pouvaient ignorer lors de la vente du 30 mai 2018 de l’appartement situé au [Adresse 1] ;

EN CONSEQUENCE :

– CONDAMNER solidairement Madame [X] [Z], Monsieur [L] [K] et l’agence Vaneau à verser à Monsieur et Madame [J] la somme de 87.000 euros à parfaire à titre de dommages et intérêts avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 31 mars 2020 et anatocisme ;

EN TOUT ETAT DE CAUSE :

– CONDAMNER solidairement Madame [X] [Z], Monsieur [L] [K] et l’agence Vaneau à verser à Monsieur et Madame [J] la somme de 10.000 euros à parfaire à titre de dommages et intérêts pour préjudice de jouissance avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 31 mars 2020 et anatocisme

– CONDAMNER solidairement Madame [X] [Z], Monsieur [L] [K] et l’agence Vaneau à verser à Monsieur et Madame [J] la somme de 5.000 euros à parfaire à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 31 mars 2020 et anatocisme

– CONDAMNER solidairement Madame [X] [Z], Monsieur [L] [K] et l’agence Vaneau à verser à Monsieur et Madame [J] la somme de 10.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux dépens dont distraction au profit de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU en application de l’article 699 du CPC.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 5 février 2024, M. [K] et Mme [Z] demandent à la cour, au visa notamment des articles 1116 et 1641 du code civil, de :

Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ; en conséquence :

Débouter Monsieur et Madame [J] de toutes leurs demandes, fins et conclusions

Condamner solidairement Monsieur et Madame [J] à payer la somme de 5.000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu’aux entiers dépens tant de première instance que d’appel et dire que ceux d’appel pourront être recouvrés directement par Maître Jean-Yves ROCHMANN, avocat constitué conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 5 février 2024, l’Agence Immobilière Vaneau, conclut, au visa de l’article 1240 du Code Civil, 5 et 59 du Décret du 17 mars 1967, à la confirmation du jugement, au rejet de demandes des époux [J] à son encontre, et à titre additionnel, demande de les condamner à lui payer la somme de 3.500€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens de première instance et d’appel, dont distraction au profit de Maître Ariane Lami Sourzac, Avocat, conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de Procédure Civile.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 8 février 2024.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 9 novembre 2022 en ce qu’il a rejeté les demandes de [G] [J] et [U] [M] épouse [J] à l’encontre de [L] [K], [X] [Z] et la SAS Vaneau;

Statuant de nouveau,

Dit que [L] [K] et [X] [Z] ont commis une réticence dolosive la réticence dolosive quant aux désordres structurels graves affectant les fondations de l’ensemble immobilier du [Adresse 2] à [Localité 11], engageant leur responsabilité délictuelle à l’égard des époux [J];

Dit que la SAS Vaneau a manqué à son obligation d’information et de conseil à l’égard de [G] [J] et [U] [M] épouse [J] engageant sa responsabilité délictuelle à leur égard;

Avant dire droit sur l’indemnisation des préjudices subis par [G] [J] et [U] [M] épouse [J]:

Ordonne la révocation de l’ordonnance de clôture et la réouverture des débats ;

Invite les parties à présenter leurs observations, sous forme de conclusions remises selon le calendrier ci-après précisé, sur le préjudice des époux [J] constitué par la perte de chance de ne pas contracter ou d’avoir pu contracter à des conditions plus avantageuses;

Dit que [G] [J] et [U] [M] épouse [J] déposeront leurs conclusions au plus tard pour l’audience de mise en état, sans présence obligatoire, du 20 mars 2025

(13 H 00) ;

Dit que [L] [K] et [X] [Z] déposeront leurs conclusions au plus tard pour l’audience de mise en état, sans présence obligatoire, du 22 mai 2025 (13H 00);

Dit que la SAS Vaneau notifiera ses conclusions au plus tard pour l’audience de mise en état du 26 juin 2025, sans présence obligatoire (13H00);

Dit que l’ordonnance de clôture interviendra le 2 octobre 2025 et que l’affaire sera fixée à l’audience collégiale du 16 octobre 2025 à 14H00, salle PORTALIS, escalier Z, 2ème étage, 2Z60, la présente notification valant convocation ;

Dit qu’il est sursis à statuer sur les demandes au titre des préjudices des époux [J], au titre des frais irrépétibles, ainsi que sur les dépens dans l’attente du nouvel examen de l’affaire selon le calendrier ci-dessus établi.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

 


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