Cour d’appel de Paris, 17 janvier 2017
Cour d’appel de Paris, 17 janvier 2017

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Paris

Thématique : Manettes de jeu vidéo compatibles Sony

Résumé

L’administration des douanes peut retenir des marchandises suspectées de contrefaçon à la demande d’un titulaire de droits. Dans le cas de Sony, 3 000 manettes de jeu compatibles, prétendument contrefaisantes, ont été saisies. Cependant, la société n’a pas respecté les délais de saisine des juridictions, rendant les procès-verbaux irrecevables. De plus, les manettes étaient présentées comme compatibles avec la PS3, utilisant des logos pour identifier les touches, ce qui ne constitue pas nécessairement une contrefaçon. Le droit de la marque ne permet pas d’interdire l’usage d’indications nécessaires à la destination d’un produit.

Mesure de rétention douanière

L’administration des douanes peut, sur demande écrite du propriétaire d’une marque enregistrée ou du bénéficiaire d’un droit exclusif d’exploitation, assortie des justifications de son droit, retenir dans le cadre de ses contrôles les marchandises que celui-ci prétend constituer une contrefaçon (article L. 716-8 du CPI). Dans ce cadre, les services des douanes de l’aéroport de Bordeaux ont informé la société Sony d’une mesure de retenue communautaire sur 3 000 manettes de jeux supposées contrefaisantes du modèle « Padkenxi » et destinées au groupe Casino. Suite à la saisie contrefaçon opérée, Sony a poursuivi le distributeur en contrefaçon.

Risque vraisemblable de contrefaçon

L’article L. 521-6 du code de procédure civile relatif aux dessins et modèles, dispose que « Toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon peut saisir en référé la juridiction civile compétente afin de voir ordonner, au besoin sous astreinte, à l’encontre du prétendu contrefacteur ou des intermédiaires dont il utilise les services, toute mesure destinée à prévenir une atteinte imminente aux droits conférés par le titre ou à empêcher la poursuite d’actes argués de contrefaçon ». Saisie en référé ou sur requête la juridiction ne peut ordonner les mesures demandées que si les éléments de preuve, raisonnablement accessibles au demandeur, rendent vraisemblable qu’il est porté atteinte à ses droits ou qu’une telle atteinte est imminente (des dispositions similaires sont applicables aux marques identiques).

Importance des délais

En l’espèce, les délais de saisine des juridictions n’ont pas été respectés par la société Sony, les procès-verbaux de saisies-contrefaçon ont été écartés car irrecevables. La mesure de retenue est levée de plein droit à défaut, pour le titulaire des droits, dans un délai de 10 jours ouvrables, à compter de la notification de la retenue des marchandises, de justifier auprès des services douaniers soit de mesures conservatoires décidées par la juridiction civile compétente, soit de s’être pourvu par la voie civile ou par la voir correctionnelle et d’avoir constitué les garanties destinées à l’indemnisation éventuelle du détenteur des marchandises au cas où la contrefaçon ne serait pas reconnue ultérieurement. Le titulaire dispose d’un délai de 20 jours ouvrables ou 31 jours civils si ce délai est plus long à compter du jour où est intervenue la saisie ou la description, pour saisir le juge du fond.

En revanche, la contrefaçon pouvant être prouvée par tous moyens, la société Sony a pu s’appuyer sur des procès-verbaux de constat d’achat.

Manettes de jeu compatibles : le doute sur la contrefaçon

Le caractère vraisemblable de l’atteinte aux droits de Sony était toutefois insuffisamment caractérisé. En effet, les manettes de jeux vidéo en cause étaient présentées à la vente comme des produits compatibles avec les manettes de jeu Playstation PS3. Les  logiciels de jeu utilisent les logos triangle, rond, croix et carré aux fins d’identification des quatre touches, et de mémorisation ; ces logos ont également une fonction sémantique permettant dans les manuels d’emploi de désigner une touche par un symbole, conformément à ce qui se produit pour tout appareil électrique, électronique ou informatique ; pour exercer ces 3 fonctions, les manettes de jeu compatibles PS3 doivent pouvoir comporter les symboles qui constituent donc une caractéristique de la manette de jeu compatible dont le propriétaire de la marque ne peut interdire l’usage.

De surcroît, le droit conféré par la marque communautaire ne permet pas à son titulaire d’interdire à un tiers l’usage, dans la vie des affaires : i) d’indications relatives à l’espèce, à la qualité, à la quantité, à la destination, à la valeur, à la provenance géographique, à l’époque de la production du produit ou de la prestation du service ou à d’autres caractéristiques de ceux-ci; ii) de la marque lorsqu’il est nécessaire pour indiquer pour indiquer la destination d’un produit ou d’un service, notamment en tant qu’accessoire ou pièce détachée.

Destinées à une clientèle initiée aux jeux sur consoles, les manettes arguées de contrefaçon ne présentaient donc que peu de risque de confusion tant la forme comme les logos figurant sur les manettes Sony sont reconnaissables.

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