Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Paris
Thématique : Soins psychiatriques sans consentement : confirmation de l’ordonnance du juge des libertés.
→ RésuméLe 17 avril 2023, la Cour d’appel de Paris a statué sur l’appel interjeté par le préfet du Val-de-Marne concernant l’hospitalisation de M. [V] en soins psychiatriques sans consentement. Le juge des libertés et de la détention avait précédemment refusé la prolongation de cette mesure, considérant que la réintégration du patient était fictive. L’absence d’avis médical récent a été soulignée, compromettant le droit du patient à une évaluation adéquate. La Cour a confirmé la décision du juge, déclarant l’appel recevable, et a laissé les dépens à la charge de l’État, garantissant ainsi la protection des droits du patient.
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17 avril 2023
Cour d’appel de Paris
RG n°
23/00178
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 1 – Chambre 12
SOINS PSYCHIATRIQUES SANS CONSENTEMENT
ORDONNANCE DU 17 AVRIL 2023
(n°172, 3 pages)
N° du répertoire général : N° RG 23/00178 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CHM6N
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 28 Mars 2023 -Tribunal Judiciaire de CRETEIL (Juge des Libertés et de la Détention) – RG n° 23/01431
L’audience a été prise au siège de la juridiction, en audience publique, le 13 Avril 2023
Décision réputée contradictoire
COMPOSITION
Stéphanie GARGOULLAUD, président de chambre à la cour d’appel, agissant sur délégation du Premier Président de la cour d’appel de Paris,
assisté de Roxane AUBIN, greffier lors des débats et du prononcé de la décision
APPELANT
Monsieur LE PRÉFET DU VAL DE MARNE
demeurant ARS D’Ile de France – [Adresse 2]
non comparant, non représenté,
INTIMÉ
M. [Z] [V] (Personne ayant fait l’objet des soins)
né le 11/11/1971 à VALENCIENNES
demeurant [Adresse 3]
Ayant été hospitalisé au Centre hospitalier [5]
non comparant en personne, représenté par Me Sandre BONFILS FILAINE, avocat commis d’office au barreau de Paris
TUTEUR/ CURATEUR
UDAF 94
demeurant [Adresse 4]
non comparant, non représenté,
LIEU D’HOSPITALISATION
CENTRE HOSPITALIER LES MURETS
demeurant [Adresse 1]
non comparant, non représenté,
MINISTÈRE PUBLIC
Représenté par Mme Anne BOUCHET, avocate générale,
DÉCISION
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE,
M. [V] a été admis en soins psychiatriques sans consentement à plusieurs reprises depuis 2015, en dernier lieu par une décision du préfet modifiant la prise en charge en un programme de soins du 23 janvier 2023.
Or le patient est en fugue depuis le 27 février 2023, et le préfet a pris une décision de réintégration le 17 mars 2023.
Le préfet a sollicité du JLD la poursuite de cette mesure par une requête du 23 mars 2023 à laquelle le JLD n’a fait droit par ordonnance du 28 mars 2023 au motif que la décision de réintégration est purement fictive et sans objet.
Le préfet a interjeté appel de cette ordonnance le 6 avril 2023.
Les parties ont été convoquées et l’audience s’est tenue le 13 avril au siège de la juridiction, en audience publique.
Par des conclusions exposées par écrit et reprises oralement à l’audience, le conseil de l’intéressé précise qu’il n’est pas présent, qu’il n’y a aucune actualisation de la situation par un certificat récent et que la décision critiquée doit être confirmée.
L’avocate générale a requis oralement l’infirmation de l’ordonnance, compte-tenu des éléments médicaux du dossier.
Le préfet n’a pas comparu et ne s’est pas fait représenter.
SUR CE,
Il résulte des dispositions de l’article L. 3211-12-1 du code de la santé publique que l’hospitalisation complète d’un patient ne peut se poursuivre sans que le juge des libertés et de la détention, préalablement saisi par le représentant de l’Etat dans le département, n’ait statué sur cette mesure avant l’expiration d’un délai de 12 jours suivant cette décision ou celle prise par un juge des libertés et de la détention pour maintenir cette hospitalisation complète
Dans le cas d’une rupture du programme de soin maintenu sur décision du préfet, il n’est pas exigé de motivation sur de nouveaux faits susceptibles de troubler l’ordre public, il suffit de vérifier que le programme de soins ‘ne permet plus, du fait du comportement du patient, de lui dispenser les soins adaptés’ (1re Civ., 14 novembre 2014, pourvoi n°13-12.220 et 10 février 2016, pourvoi n° 14-29.521).
En l’espèce, cependant, la juridiction ne dispose d’aucun avis médical récent, ni certificat de situation.
Selon l’article L. 3211-12-4 du code de la santé publique, en cas d’appel d’une ordonnance du juge des libertés et de la détention prise en application de l’alinéa 1er de l’article L. 3211-12-1, un avis rendu par un psychiatre de l’établissement d’accueil de la personne admise en soins psychiatriques sans consentement se prononçant sur la nécessité de poursuivre l’hospitalisation complète est adressé au greffe de la cour d’appel au plus tard quarante-huit heures avant l’audience (1re Civ., 4 mars 2020, pourvoi n° 19-14.269). Dans le contexte du présent dossier et sans explication de la part du préfet le défaut de production d’un certificat ou avis médical permettant une telle actualisation de la situation de la personne porte nécessairement atteinte à ses droits.
Il peut être relevé, ainsi que l’indique le juge des libertés et de la détention, que la réintégration était en l’espèce « fictive » et n’avait d’autre objet que de permettre une inscription de l’intéressé au fichier des personnes recherchées (FPR), action qu’il n’y a pas lieu de contrôler à l’occasion d’une demande de prolongation d’une mesure de soins sans consentement. A cet égard, les Rapports de la Cour de cassation ont mentionné depuis 2019 des suggestions de modifications législatives ou réglementaires permettant de prendre en considération cette situation en permettant une inscription au FPR sans imposer de procédure jusqu’à une réintégration effective dans des conditions dépendant de la durée de la fugue. Ces suggestions étaient notamment motivées par le constat que « en cas de fugue du patient, les certificats médicaux ne sont pas circonstanciés ce qui prive le juge de la faculté d’exercer un contrôle effectif sur la mesure de soin ».
Pour l’ensemble de ces raisons, il convient donc de confirmer la décision du juge des libertés et de la détention.
PAR CES MOTIFS,
Le délégué du premier président, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par décision contradictoire,
DÉCLARE l’appel recevable,
CONFIRME l’ordonnance du juge des libertés et de la détention,
LAISSE les dépens à la charge de l’Etat.
Ordonnance rendue le 17 AVRIL 2023 par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE MAGISTRAT DÉLÉGATAIRE
Une copie certifiée conforme notifiée le 17/04/2023 par fax/courriel à :
‘ patient à l’hôpital
ou/et X par LRAR à son domicile
X avocat du patient
X directeur de l’hôpital
‘ tiers par LS
‘ préfet de police
‘ avocat du préfet
X tuteur / curateur par LRAR
X Parquet près la cour d’appel de Paris
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