Cour d’appel de Paris, 12 mai 2016
Cour d’appel de Paris, 12 mai 2016

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Paris

Thématique : Conservation du numéro fixe : un facteur déterminant du contrat

Résumé

La conservation du numéro fixe est essentielle pour les clients d’un opérateur téléphonique. Dans une affaire récente, un client a vu son numéro modifié sans préavis après avoir accepté une extension de son abonnement. Cette interruption de service a causé un préjudice significatif, notamment la perte d’accès à Internet et à ses services téléphoniques. Bien que l’opérateur ait tenté de se dégager de sa responsabilité, les juges ont reconnu une faute, entraînant une indemnisation de 2.000 euros pour le client. La clause limitative de responsabilité de l’opérateur n’a pas pu s’appliquer en raison de la nature de la faute commise.

Changement de numéro fixe

Un opérateur a proposé à son client une extension de son abonnement téléphonique consistant dans la possibilité d’appeler de manière illimitée des numéros de portables ; le lendemain de l’acceptation de cette extension, la ligne du client a été coupée  et son numéro de téléphone fixe modifié (ce dont il n’avait pas été informé).

Responsabilité de l’opérateur

L’opérateur s’est vu poursuivi pour faute lourde. Celle-ci se caractérise par un comportement d’une extrême gravité confinant au dol et dénotant l’inaptitude du débiteur de l’obligation à l’accomplissement de la mission contractuelle qu’il avait acceptée. En l’espèce, les juges ont considéré que la modification du numéro de la société à la suite d’une erreur et l’interruption du service téléphonique et de la connexion au réseau Internet ne caractérisent pas une faute lourde.

En revanche, cette modification intervenue sans le consentement du client, de même que l’interruption des services durant plusieurs semaines constituent bien une faute qui a généré au détriment du client un préjudice consistant dans la privation de l’accès au réseau Internet et aux services téléphoniques auxquels la société était abonnée ainsi que dans la suppression du numéro de téléphone permettant à sa clientèle de la contacter, préjudice dont l’opérateur doit réparation.

L’opérateur n’a pu se  dégager de sa responsabilité en soutenant que l’abonnement souscrit par le client sur la même ligne avait nécessairement pour objet et pour effet de se substituer en tous points au précédent abonnement.

Clause limitative de responsabilité

Sur le montant de l’indemnisation, l’opérateur avait prévu une clause limitative de responsabilité (celle-ci étant applicable en l’absence de faute lourde) :

« Dans les seuls cas où Neuf [aux droits de laquelle vient aujourd’hui la société SFR] aura commis une faute prouvée par le client dans l’exécution du contrat de service, Neuf réparera les dommages matériels directs causés au client dans la limite d’une somme équivalente aux montants payés par le client à Neuf au titre du contrat de service pour les trois derniers mois précédant la survenance de l’événement ayant entraîné le dit dommage.  

La responsabilité de Neuf ne saurait ainsi être engagée, notamment, dans les cas suivants :  

– préjudice indirect et/ou immatériel tel que, notamment perte de chance et/ou de profit et, plus généralement, toute perte ou dommage économique, quelle qu’en soit la nature,  

– interruption du service,  

– force majeure ou faits indépendants de sa volonté et, notamment, interruption du service résultant de la défaillance du réseau de l’OBL » 

Au regard de ces dispositions, le préjudice matériel direct subi par le client a été réparé par l’allocation de la somme 2.000 euros.

Pas de prescription anale

A noter que dans cette affaire, la prescription anale n’a pas été retenue. La prescription annale édictée par l’article L. 34-2 du code des postes et des télécommunications électroniques est acquise, au profit des opérateurs, pour toutes demandes en restitution du prix de leurs prestations de communications électroniques présentées après un délai d’un an à compter du jour du payement. Un tel texte n’est pas applicable dès lors que le client ne réclame pas le remboursement du prix de prestations de communications électroniques mais recherche la responsabilité de l’opérateur pour avoir résilié le contrat d’abonnement téléphonique et Internet qui les liait, interrompu les services de téléphonie et d’accès au réseau Internet et changé sans raison et sans son consentement le numéro de téléphone fixe.

Télécharger 

 


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon