Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Paris
Thématique : Responsabilité de l’employeur face aux maladies professionnelles et droit à l’information préalable
→ RésuméEmbauche et Déclaration de MaladieMonsieur [P] [W] a été embauché le 1er décembre 2003 par la société [4] en tant que maçon. Le 14 novembre 2011, il a déposé une déclaration de maladie professionnelle accompagnée d’un certificat médical initial, indiquant un syndrome du canal carpien bilatéral, confirmé par des examens médicaux. La caisse a alors instruit deux maladies professionnelles liées à cette déclaration. Prise en Charge des MaladiesLe 23 avril 2012, la caisse a informé la société de la possibilité de consulter le dossier avant la décision de prise en charge prévue pour le 14 mai 2012. Par la suite, la caisse a notifié à la société la prise en charge des deux maladies le 14 mai 2012. Recours et Jugement du TribunalAprès une contestation infructueuse devant la commission de recours amiable, la société a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Créteil. Le 7 juin 2017, le tribunal a déclaré le recours recevable, mais a débouté la société de ses demandes, confirmant que les décisions de prise en charge étaient opposables à elle. Appel et Arrêt de la Cour d’AppelLa société a interjeté appel le 7 novembre 2017. Le 14 mai 2021, la cour d’appel de Paris a infirmé le jugement de Créteil, déclarant inopposables à la société les décisions de prise en charge des maladies. La caisse a alors formé un pourvoi contre cet arrêt. Décision de la Cour de CassationLe 22 juin 2023, la Cour de cassation a cassé l’arrêt de la cour d’appel, annulant toutes ses dispositions et renvoyant l’affaire devant une autre formation de la cour d’appel de Paris. La société a été condamnée à payer des dépens. Examen de la Demande de la CaisseLa caisse a saisi la cour d’appel de Paris le 23 août 2023, demandant la confirmation du jugement de 2017. La société a contesté la recevabilité de cette demande, arguant que la caisse n’avait plus d’intérêt à agir après avoir obtenu satisfaction en première instance. Caractère Abusif de la ProcédureLa société a également soutenu que la procédure de la caisse était abusive, l’obligeant à engager des frais pour se défendre. La caisse a rétorqué qu’elle cherchait à obtenir une position favorable de la cour d’appel. Décision Finale de la CourLa cour a déclaré irrecevable la saisine de la caisse, condamnant celle-ci à verser 1.000 euros à la société au titre de l’article 700 du code de procédure civile. La société a été déboutée de sa demande de dommages-intérêts, et la caisse a été condamnée aux dépens d’appel. |
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 13
ARRÊT DU 10 Janvier 2025
(n° , 5 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : S N° RG 23/06655 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CILSJ
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 Juin 2017 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de CRETEIL RG n° 15/00293
APPELANTE
CPAM 91 – ESSONNE
DEPARTEMENT JURIDIQUE
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Me Amy TABOURE, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901
INTIMEE
SOCIETE [4]
[Adresse 5]
[Localité 3]
représentée par Me Julien TSOUDEROS, avocat au barreau de PARIS, toque : D1215
substitué par Me Karine HISEL, avocat au barreau de PARIS, toque : C2408
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 14 novembre 2024, en audience publique et double rapporteur, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Monsieur Raoul CARBONARO, Président de chambre et Madame Sophie COUPET, Conseillère, chargés du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Raoul CARBONARO, Président de chambre
Monsieur Gilles REVELLES, Conseiller
Madame Sophie COUPET, Conseillère
Greffier : Madame Agnès IKLOUFI, lors des débats
ARRÊT :
– CONTRADICTOIRE
– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, prévu le vendredi 10 janvier 2025, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile
-signé par Monsieur Raoul CARBONARO, Président de chambre et Madame Fatma DEVECI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La cour est saisie par la caisse primaire d’assurance maladie de l’Essonne (la caisse), à la suite d’un arrêt rendu par la Cour de cassation le 22 juin 2023 dans un litige l’opposant à la société [4] (la société).
FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Monsieur [P] [W] a été embauché le 1er décembre 2003 par la société [4] et occupait, en dernier lieu, un poste de maçon.
Le 14 novembre 2011, il a établi une déclaration de maladie professionnelle à laquelle était joint un certificat médical initial mentionnant :
« – canal carpien bilatéral confirmé par EMG à gauche le 15/07/2011 et à droite le 12/10/2011 : bloc de conduction motrice sur les deux nerfs médians
-Mouvements répétés de préhension des mains avec force (maçon)»
La caisse a procédé à l’instruction de deux maladies professionnelles : le syndrome du canal carpien droit et le syndrome du canal carpien gauche.
Par un courrier recommandé daté du 23 avril 2012 et réceptionné par la société le 25 avril 2013, la caisse a offert la possibilité à la société de venir consulter le dossier préalablement à la décision de prise en charge à intervenir le 14 mai 2012.
Par courriers datés du 14 mai 2012, la caisse a notifié à la société la prise en charge, au titre de la législation sur les risques professionnels, des deux maladies, à savoir le syndrome du canal carpien droit et le syndrome du canal carpien gauche.
Après vaine contestation devant la commission de recours amiable de la caisse, par courrier du 30 août 2012, la société [4] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Créteil, suite à la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable.
Par jugement rendu le 7 juin 2017, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Créteil a :
Déclaré le recours de la société SAS [4] recevable en la forme;
Débouté la société de ses demandes ;
Dit que les décisions du 14 mai 2012 de prise en charge par la caisse primaire d’assurance maladie de l’Essonne au titre de la législation professionnelle de maladies professionnelles déclarées par Monsieur [P] [W] le 14 novembre 2011 étaient opposables à la SAS [4].
La société a interjeté appel le 7 novembre 2017 de ce jugement qui lui avait été notifié à une date indéterminée.
Par arrêt rendu le 14 mai 2021, la chambre 13 du pôle 6 de la cour d’appel de Paris a :
Infirmé le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de Créteil du 7 juin 2017 en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau ;
Dit inopposables à la société [4] les prises en charge par la caisse primaire d’assurance maladie de l’Essonne au titre de la législation sur les risques professionnels des maladies déclarées par M. [W] le 29 novembre 2011 ;
Condamné la caisse primaire d’assurance maladie de l’Essonne aux dépens d’appel.
La caisse primaire d’assurance maladie de l’Essonne a formé un pourvoi à l’encontre de cet arrêt.
Par arrêt rendu le 22 juin 2023, la Cour de cassation a :
Cassé et annulé, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 14 mai 2021, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ;
Remis l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les a renvoyées devant la cour d’appel de Paris, autrement composée ;
Condamné la société [4] aux dépens ;
En application de l’article 700 du code de procédure civile, condamné la société [4] à payer à la caisse primaire d’assurance maladie de l’Essonne la somme de 3.000 euros.
Pour statuer ainsi, la Cour de cassation a considéré que :
« [‘] 5. Pour dire inopposables à l’employeur les décisions de prise en charge, au titre de la législation professionnelle, des maladies déclarées par la victime, l’arrêt, après avoir constaté que la caisse avait produit aux débats, pour chacune des maladies dont la prise en charge était sollicitée, le courrier d’information de fin d’instruction invitant l’employeur à consulter les pièces constitutives du dossier, retient qu’il ressort de ces courriers que la caisse, n’indiquant pas le tableau des maladies professionnelles dont relevaient les affections qu’elle envisageait de prendre en charge, n’a pas rempli l’obligation d’information mise à sa charge.
6. En statuant ainsi, alors qu’il résultait de ses constatations que l’employeur avait été informé, par lettres du 23 avril 2012, de la clôture de l’instruction concernant chacune des maladies déclarées et de la possibilité de consulter les dossiers jusqu’à la date à laquelle la caisse entendait prendre sa décision, le mettant ainsi en mesure de prendre connaissance des éléments susceptibles de lui faire grief et de faire valoir ses observations avant cette décision, la cour d’appel a violé le texte susvisé. [‘] »
La caisse primaire d’assurance maladie de l’Essonne a procédé à la saisine de la cour d’appel de Paris par courrier recommandé avec accusé de réception envoyé le 23 août 2023.
L’affaire a été examinée à l’audience du 14 novembre 2024.
Par conclusions visées par le greffe et reprises à l’audience, la caisse demande à la cour de :
A titre principal, confirmer le jugement rendu le 7 juin 2017 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Créteil ;
Condamner la société [4] à lui payer la somme de 1.500€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions visées par le greffe et reprises oralement à l’audience, la société demande à la cour de :
Juger que la société [4] n’a pas saisi la cour d’appel de renvoi afin de contester le jugement rendu le 7 juin 2017 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Créteil, lequel est donc passé en force de chose jugée ;
Juger que la caisse est dépourvue d’intérêt à agir ;
Juger irrecevables les demandes formulées par la caisse ;
Juger que la procédure poursuivie par la caisse est abusive ;
En conséquence,
Débouter la caisse de l’intégralité de ses demandes ;
Condamner la caisse au paiement de la somme de 3.000€ à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
Condamner la caisse au paiement de la somme de 3.000€ en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Pour un exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour, par application de l’article 455 du code de procédure civile, renvoie à leurs conclusions écrites visées par le greffe à l’audience du 14 novembre 2024.
A l’issue de l’audience, les parties ont été informées que la décision serait mise à disposition le 10 janvier 2025.
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
DÉCLARE irrecevable la saisine formée par la caisse primaire d’assurance maladie de l’Essonne,
CONDAMNE la caisse primaire d’assurance maladie de l’Essonne à verser à la société [4] la somme de mille (1000) euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
DÉBOUTE la société [4] de sa demande de dommages-intérêts,
DÉBOUTE la caisse primaire d’assurance maladie de l’Essonne de sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
CONDAMNE la caisse primaire d’assurance maladie de l’Essonne aux dépens d’appel.
La greffière Le président
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