Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Paris
Thématique : Délai de recours et validité des notifications : enjeux de la contestation des cotisations sociales.
→ RésuméContexte de l’affaireM. [E] [P], médecin gynécologue, a formé opposition à une contrainte signifiée par acte d’huissier le 21 janvier 2020, à la demande de la C.A.R.M.F. pour le recouvrement d’une somme de 21 337,79 euros, correspondant à des cotisations et des majorations de retard pour l’exercice 2018. L’opposition a été envoyée par courrier le 12 février 2020, soit après le délai légal de quinze jours. Décision du tribunal de première instanceLe tribunal judiciaire de Paris a rendu un jugement le 02 avril 2021, déclarant l’opposition à contrainte irrecevable et laissant les frais à la charge de M. [E] [P]. La créance a été réduite à 19 620,91 euros. Le tribunal a justifié sa décision par le non-respect du délai d’opposition prévu par le code de la sécurité sociale. Appel de M. [E] [P]M. [E] [P] a interjeté appel le 24 septembre 2021, soit plus de quatre mois après la notification du jugement. Il conteste la recevabilité de son appel, arguant que la notification avait été envoyée à son ancienne adresse et que la signature sur l’accusé de réception n’était pas la sienne. Il demande l’infirmation du jugement et la reconnaissance de ses demandes. Arguments de la C.A.R.M.F.La C.A.R.M.F. soutient que l’appel est irrecevable, car M. [E] [P] a dépassé le délai d’un mois pour faire appel. Elle demande également la confirmation du jugement de première instance, en précisant que les cotisations sont calculées sur les revenus des deux années précédentes et que M. [E] [P] reste redevable de certaines sommes. Analyse de la recevabilité de l’appelLa cour a examiné la notification du jugement et a constaté qu’elle ne précisait pas clairement les modalités de recours. En conséquence, le délai d’appel n’ayant pas couru, l’appel de M. [E] [P] a été jugé recevable. Recevabilité de l’opposition à contrainteConcernant l’opposition à contrainte, la cour a confirmé que M. [E] [P] n’avait pas respecté le délai de quinze jours pour former son opposition, rendant ainsi cette dernière irrecevable. La cour a également noté que les arguments de M. [E] [P] sur la nullité de la contrainte ne s’appliquaient pas dans ce contexte. Conclusion de la courLa cour a confirmé le jugement du tribunal de première instance dans toutes ses dispositions, déclarant M. [E] [P] responsable des dépens et n’ayant pas droit à l’exécution provisoire. |
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 12
ARRÊT DU 10 Janvier 2025
(n° , 5 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : S N° RG 21/08039 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CEMZQ
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 02 Avril 2021 par le Pole social du TJ de Paris RG n° 20/00755
APPELANT
Monsieur [E] [P]
[Adresse 4]
[Localité 2]
représenté par Me Armand BOUKRIS, avocat au barreau de PARIS, toque : B0274
INTIMEE
CAISSE AUTONOME DE RETRAITE DES MEDECINS DE FRANCE (CARMF)
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par M. [X] [R] en vertu d’un pouvoir spécial
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 30 Octobre 2024, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Monsieur Christophe LATIL, Conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Carine TASMADJIAN, présidente de chambre
Monsieur Christophe LATIL, Conseiller
Madame Sandrine BOURDIN, conseillère
Greffier : Madame Agnès ALLARDI, lors des débats
ARRET :
– CONTRADICTOIRE
– prononcé
par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
-signé par Madame Carine TASMADJIAN, présidente de chambre et par Madame Agnès ALLARDI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La cour statue sur l’appel interjeté par M. [E] [P] d’un jugement prononcé le
02 avril 2021 par le pôle social du tribunal judiciaire de Paris dans un litige l’opposant à la Caisse Autonome de Retraite des Médecins de France (la C.A.R.M.F.)
FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Les circonstances de la cause ayant été correctement rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de rappeler que, exerçant la profession de médecin gynécologue, M. [E] [P] a formé opposition, par courrier daté du 12 février 2020 et posté le 13 février 2020, devant le pôle social du tribunal judiciaire de Paris à l’encontre de la contrainte qui lui a été signifiée par acte d’huissier le 21 janvier 2020 à la demande de la C.A.R.M.F. pour recouvrement de la somme de 21 337,79 euros correspondant à 20 497 euros de cotisations et 840,79 euros de majorations de retard sur l’exercice 2018.
Par jugement du 02 avril 2021 le pôle social du tribunal judiciaire de Paris a :
– déclaré la présente opposition à contrainte irrecevable,
– laissé les frais de signification de contrainte et les dépens à la charge de
M. [E] [P],
– donné acte à la C.A.R.M.F. de ce que la créance a été réduite à hauteur de 18 437 euros de cotisations et de 823,91 euros de majorations de retard, soit un total de 19 620,91 euros.
Pour statuer en ce sens, le tribunal a retenu que l’opposition à la contrainte formée par
M. [E] [P] le 13 février 2020 est intervenue plus de quinze jours après qu’elle lui a été signifiée par acte d’huissier le 21 janvier 2020, au-delà du délai prévu à l’article R. 133-3 du code de la sécurité sociale.
Le jugement a été notifié par lettre recommandée avec demande d’accusé de réception revenue avec la mention de sa distribution le 12 avril 2021 à M. [E] [P] qui en a interjeté appel par la voie électronique du RPVA le 24 septembre 2021.
L’affaire a alors été fixée à l’audience du 30 octobre 2024 lors de laquelle les parties ont développé oralement leurs conclusions écrites déposées au dossier.
In limine litis, la C.A.R.M.F. entend opposer à M. [E] [P] l’irrecevabilité de son appel, formé le 24 septembre 2021, soit plus de plus de quatre mois après la notification du jugement intervenue le 12 avril 2021, ainsi que cela ressort de l’accusé de réception du courrier de notification.
M. [E] [P] demande à la cour de :
– infirmer le jugement rendu le 02 avril 2021 par le tribunal judiciaire de Paris en toutes ses dispositions,
Statuant de nouveau,
– le juger recevable et bien fondé en ses demandes,
En conséquence,
– rejeter l’ensemble des demande de la C.A.R.M.F.,
– enjoindre la C.A.R.M.F. de procéder au calcul des cotisations définitives 2018,
– condamner la C.A.R.M.F. à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la C.A.R.M.F. aux entiers dépens de la présente instance,
– ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir.
M. [E] [P] soutient que son appel est recevable en faisant valoir que le courrier de notification du jugement critiqué a été envoyé à son ancienne adresse et bien qu’ayant mis en place une redirection de courrier du 1er février 2021 au 30 septembre 2022, la notification de la décision a manifestement été présentée à son ancienne adresse, la signature sur l’accusé de réception n’étant manifestement pas la sienne.
Quant à la recevabilité de l’opposition à contrainte, M. [E] [P], invoquant les dispositions de l’article 114 du code de procédure civile, considère que l’opposition à contrainte qu’il a formalisée le 12 février 2020 ne peut être déclarée irrecevable alors que la C.A.R.M.F. n’allègue aucun préjudice, ni grief que lui causerait cette opposition.
Sur le fond, M. [E] [P] fait valoir qu’à compter du 20 juin 2016 il a exercé sa profession de médecin gynécologue via la constitution d’une SELAS dont il était mandataire social et qu’en conséquence les revenus qu’il percevait en qualité de président de la SELAS étaient exclus des cotisations prélevées par la C.A.R.M.F. car soumises au régime général de la sécurité sociale.
Il expose ainsi avoir déclaré, au titre de l’année 2018, 45 078 euros de revenus micro-BNC et 42 480 euros de dividendes distribués par la SELAS, pour un total de 87 558 euros.
Il estime que la C.A.R.M.F. doit dès lors calculer les cotisations sur la base de ce montant et non sur ceux déclarés au titre des années 2016 et 2017.
La C.A.R.M.F. demande à la cour de :
– déclarer l’appel irrecevable,
ou, à titre subsidiaire,
– confirmer le jugement rendu le 02 avril 2021 en ce qu’il a déclaré irrecevable l’opposition à contrainte 2018 et donné acte de que la créance s’élevait à un total de 19 260,91 euros à la date du 02 avril 2021,
– constater qu’à la date du 24 octobre 2024, le docteur [P] reste redevable de 810,76 euros au titre des majorations de retard afférentes aux cotisations de l’exercice 2018.
Au soutien de sa demande de confirmation du jugement, la C.A.R.M.F. fait valoir que la contrainte contestée a été signifiée par acte d’huissier à M. [E] [P] le
21 janvier 2020 qui ne pouvait valablement former opposition que jusqu’au mercredi
05 février 2020, à l’issue du délai de quinze jours ayant commencé à courrir le
22 janvier 2020.
Sur le fond, elle rappelle que les cotisations sont calculées sur les revenus N-2 et que M. [E] [P], qui avait liquidé ses droits à pension de retraite au 1er janvier 2016, avait conservé une activité médicale libérale et ne s’était pas acquitté de la totalité de ses cotisations pour l’exercice 2018 pour un montant dû en principal de 20 497 euros, calculées suite aux déclarations des revenus 2016 (104 627 euros) et 2017 (19 450 euros).
Elle précise que postérieurement à la contrainte, elle a procédé à un nouvel examen du dossier et a exclu de l’assiette des cotisations les revenus perçus en qualité de président de la SELAS, le montant des cotisations dues ayant été ramené à la somme de 18 437 euros.
Elle précise que depuis le jugement de première instance, les cotisations ont été entièrement soldées par des encaissements intervenus entre le 27 avril 2023 et le
25 septembre 2024, à l’exception de 810,76 euros restant dus au titre des majorations de retard.
En application de l’article 455 du code procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties déposées à l’audience pour l’exposé complet des moyens développés et soutenus à l’audience.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
DECLARE recevable l’appel formé par M. [E] [P] le 24 septembre 2021 ;
CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement (RG n° 20/00755) prononcé le
02 avril 2021 par le pôle social du tribunal judiciaire de Paris ;
DIT n’y avoir lieu à statuer sur la demande d’exécution provisoire ;
CONDAMNE M. [E] [P] aux dépens.
La greffière La présidente
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