Cour d’appel de Papeete, 21 novembre 2019
Cour d’appel de Papeete, 21 novembre 2019

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Papeete

Thématique : Contrat de réciprocité avec la SACEM : le Tribunal de Paris compétent

Résumé

Le Tribunal de Paris est compétent pour trancher les litiges relatifs à la reddition des comptes entre la SACEM et ses délégataires étrangers, notamment la SPACEM, en liquidation judiciaire. Les juges ont constaté des déficiences graves dans la gestion des droits par la SPACEM, telles que l’absence de suivi des répartitions et l’opacité comptable. Les dettes devront être traitées devant le tribunal. En vertu d’un contrat de réciprocité, la SPACEM a exercé des droits exclusifs pour autoriser l’exécution publique et la reproduction des œuvres, ce qui implique une identification précise des droits d’auteur pour le recouvrement des redevances.

Le Tribunal de Paris est compétent pour statuer sur la reddition des comptes entre la SACEM et ses délégataires étrangers et notamment la SCPACEM, depuis en liquidation judiciaire. Se fondant sur des audits, les juges ont retenu que la gestion des droits par la SPACEM était gravement déficiente (absence de suivi des répartitions, des avances sociétaires et du solde des comptes de perception, non-respect des dispositions statutaires sur plusieurs points, opacité de la comptabilité). Les dettes existantes devront faire l’objet de procédures devant le Tribunal de Paris. Les instances en recouvrement de rémunérations d’utilisation d’oeuvre de l’esprit donnant lieu à un droit exclusif de reproduction par un organisme de gestion collective sont soumises au code de l’organisation judiciaire qui attribuent compétence en la matière au tribunal de Paris.

Application des contrats de réciprocité

Selon un contrat de réciprocité conclu, en qualité de
délégataire en Polynésie française des sociétés SACEM et la SDRM, la SPACEM y a
exercé les droits exclusifs de ces dernières «d’autoriser ou d’interdire
l’exécution publique des oeuvre qui forment ou formeront» le répertoire de la
SACEM, et «d’autoriser ou d’interdire l’enregistrement et la reproduction
mécanique des oeuvre qui forment ou formeront» le répertoire de la SDRM, ainsi
que la mise en circulation des enregistrements réalisés.

C’est dans l’exercice de cette délégation de la gestion des
droits d’auteur et des droits voisins par les organismes de gestion collective
SPACEM et SDRM que la SPACEM a demandé, par son liquidateur judiciaire, à la
société de diffusion TAHITI NUI SATELLITE de procéder au paiement des
redevances d’exploitation de ces droits exclusifs après avoir justifié de leur
montant.

L’existence d’un organisme de gestion collective du droit
d’auteur et des droits voisins a pour effet de transférer la protection de ceux-ci
et leur effectivité à cet organisme. L’exercice par la SPACEM de sa délégation
à l’égard de la société TNS n’a donc pas été sans effet sur l’effectivité des
droits exclusifs des auteurs et artistes-interprètes, non seulement en ce qui
concerne leur répartition, mais aussi du point de vue des modalités de leur
perception, en ce compris leur définition et leur identification.
L’établissement des comptes entre la SPACEM et la société TNS suppose
nécessairement que soient identifiés et reconnus les droits d’auteur exclusifs
qui forment l’assiette des redevances dues par les utilisateurs et les
diffuseurs.

Au demeurant, c’est sur le fondement du contrat de
réciprocité du 10 avril 1979 entre la SACEM/SDRM et la SPACEM que le
liquidateur judiciaire de cette dernière, à défaut de disposer d’une
comptabilité complète ou fiable, a demandé à la société TNS et à ses ayants
droit de justifier de l’exécution dudit contrat. Or, le contrat de réciprocité
a pour objet et pour cause des droits d’auteurs qui figurent dans les
catalogues de ces organismes.

Compétence du tribunal de Paris

En effet, la gestion collective ne s’applique qu’aux œuvres
d’un répertoire déterminé. Celui-ci circonscrit l’étendue des pouvoirs de
l’organisme de gestion collective à délivrer des autorisations aux utilisateurs
et aux diffuseurs. Par conséquent, l’inclusion ou non d’un droit d’auteur ou
d’un droit voisin dans le répertoire géré par la SPACEM directement ou sur
délégation de la SACEM et de la SDRM est une question qui peut faire l’objet d’une
action en matière de propriété littéraire et artistique au sens des articles
L211-10 et D211-6-1 du code de l’organisation judiciaire.

Au demeurant, ces textes renvoient aux dispositions du code de la propriété intellectuelle, dont l’article L331-1 définit cette compétence de manière étendue, comme ayant pour objet les actions civiles et les demandes relatives à la propriété littéraire et artistique, en y incluant expressément les questions connexes de concurrence déloyale. L’article L324-3 (anc. L321-2) du code de la propriété intellectuelle dispose que les contrats conclus par les organismes de gestion collective avec les utilisateurs de tout ou partie de leur répertoire sont des actes civils. L’article L324-5 limite les pouvoirs des organismes de gestion aux termes du mandat donné par ses membres, qui sont les titulaires des droits d’auteur. Télécharger la décision

 

 


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