Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Nouméa
Thématique : Responsabilité du dirigeant face à l’insuffisance d’actif et aux sanctions afférentes
→ RésuméProcédure de première instanceLa société [17] a été enregistrée au RCS le 4 juin 2003, sous la direction de M. [Z] [H] [U]. En raison de la cessation des paiements déclarée par son gérant, le tribunal a ouvert une procédure de redressement judiciaire le 3 avril 2017, fixant la date de cessation des paiements au 1er mars 2016 et désignant la selarl [K]-[L] [F] comme mandataire judiciaire. Un plan de continuation proposé par la société a été rejeté par deux créanciers détenant 55 % des créances. Le 26 mars 2018, le tribunal a converti le redressement en liquidation judiciaire, constatant l’incapacité du gérant à régler les nouvelles dettes. La Cour d’Appel de Nouméa a confirmé cette décision le 20 août 2018. Convoque M. [Z] [H] [U]Le 1er avril 2020, la liquidatrice a convoqué M. [Z] [H] [U] pour le condamner à combler l’insuffisance d’actif de la société, s’élevant à 32 563 579 francs pacifiques. Le jugement du 28 juin 2022 a rejeté certaines exceptions soulevées par M. [H] [U], a déclaré l’action recevable et l’a condamné à combler l’insuffisance d’actif, tout en lui imposant une interdiction de gérer de 15 ans. Procédure d’appelM. [H] [U] a interjeté appel le 23 septembre 2022, contestant le jugement. Dans ses conclusions, il a demandé l’annulation de la requête de la selarl [K]-[L] [F], la prescription de l’action et la réduction du montant des condamnations. La selarl [K]-[L] [F] a, quant à elle, demandé la confirmation du jugement initial, en soulignant les fautes de gestion de M. [H] [U]. Motifs de la décisionLa cour a d’abord examiné les exceptions de procédure et a confirmé que les actions n’étaient pas prescrites. Concernant l’insuffisance d’actif, le tribunal a fixé le montant à 32 563 579 francs pacifiques, mais a constaté que certains paiements avaient été effectués, réduisant le montant à 27 199 246 francs pacifiques. La responsabilité de M. [H] [U] a été engagée en raison de fautes de gestion, notamment le dépôt tardif de la déclaration de cessation de paiements et l’absence de comptabilité. Sanctions personnellesLe tribunal a prononcé une interdiction de gérer de 15 ans contre M. [H] [U], en raison de ses manquements aux obligations légales. Malgré ses arguments de bonne foi, la cour a confirmé la nécessité de cette sanction pour protéger l’économie locale et prévenir de futures faillites. ConclusionLa cour a réformé le jugement en réduisant le montant de l’insuffisance d’actif à 27 199 246 francs pacifiques, tout en confirmant les autres dispositions du jugement initial. M. [H] [U] a été condamné aux dépens de l’instance d’appel. |
N° de minute : 2024/81
COUR D’APPEL DE NOUMÉA
Arrêt du 25 novembre 2024
Chambre commerciale
N° RG 22/00081 – N° Portalis DBWF-V-B7G-TKY
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 28 Juin 2022 par le Tribunal mixte de Commerce de NOUMEA (RG n° :20/604)
Saisine de la cour : 23 Septembre 2022
APPELANT
M. [Z] [H] [U]
né le [Date naissance 2] 1964 à [Localité 14],
demeurant [Adresse 3] – [Localité 14]
Représenté par Me Nathalie LEPAPE, avocat au barreau de NOUMEA
INTIMÉ
Me [K] [L] [F] – S.E.L.A.R.L. [K] [L] [F]
, ès qualité de mandataire liquidateur de la SARL [17],
demeurant [Adresse 1] – [Localité 18]
AUTRE INTERVENANT
MINISTERE PUBLIC
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 10 Octobre 2024, en chambre du conseil, devant la cour composée de :
M. Philippe ALLARD, Président de chambre, président,
Mme Zouaouïa MAGHERBI, Conseiller,
Madame Béatrice VERNHET-HEINRICH, Conseillère,
qui en ont délibéré, sur le rapport de Madame Béatrice VERNHET-HEINRICH.
Greffier lors des débats et lors de la mise à disposition : M. Petelo GOGO
25/11/2024 : Copie revêtue de la formule exécutoire – Me [F] ;
Expéditions – Me LEPAPE ; MP ;
– Copie CA ; copie TMC
L’affaire a été communiquée au ministère public, qui a fait connaître son avis
ARRÊT :
– contradictoire,
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,
– signé par Mme Zouaouïa MAGHERBI, Conseiller, en lieu et place de M. Philippe ALLARD, Président légitimement empêché, et par M. Petelo GOGO, greffier, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.
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PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE
La société [17] a été enregistrée au RCS le 4 juin 2003 pour une activité de travaux de terrassement, transport de matériaux divers, assainissement, voiries et réseaux divers, mécanique générale, aménagement et équipement, second ‘uvre et toutes entreprises de travaux publics ou autres.
Elle avait pour gérant de droit M. [Z] [H] [U].
Sur déclaration de cessation des paiements de son susnommé gérant, le tribunal de ce siège, par jugement du 3 avril 2017, a prononcé l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire de ladite société, fixé la date de cessation des paiements au le 1er mars 2016 et a désigné notamment la selarl [K]-[L] [F] ès qualités de mandataire judiciaire;
Un plan de continuation a été présenté par la débitrice au cours de la période d’observation, mais deux créanciers, la Cafat et le CRE, détenant 55 % du total des créances déclarées, s’y sont opposés à raison des dettes nouvelles survenues durant la même période ;
Par jugement du 26 mars 2018, le tribunal, au constat que le gérant de ladite débitrice se disait incapable de solder ces dettes nouvelles, a converti le redressement en liquidation judiciaire et désigné cette fois la selarl [K]-[L] [F] en qualité de mandataire liquidateur.
Sur appel de la société [17], la Cour d’Appel de Nouméa, par arrêt du 20 août 2018, a confirmé ce jugement de liquidation.
Par requête déposée au greffe le 1er avril 2020, la sus-nommée liquidatrice a fait convoquer M. [Z] [H] [U] devant la juridiction consulaire à l’effet de le voir condamner à supporter le comblement de l’insuffisance d’actif de la société [17] soit la somme de 32 563 579 francs pacifiques.
Par jugement dont appel du 28 juin 2022, le tribunal mixte de commerce de Nouméa a :
– dit irrecevable et rejeté des débats la note en délibéré de la selarl [K]-[L] [F] en date au greffe du 28 avril 2022,
– rejeté l’exception de nullité soulevée par M. [H] [U]
– dit non prescrite et par suite recevable l’action en sanction de la selarl [K]-[L] [F] ès qualités de liquidateur de la société [17] à l’encontre du défendeur,
– rejeté en conséquence la fin de non-recevoir soulevée par M.[H] [U]
– condamner M.[H] [U] à supporter le comblement de l’insuffisance d’actif de la liquidation de la société [17] à hauteur de la somme totale de 32 563 579 francs pacifiques
– prononcé à l’encontre de M.[H] [U] une mesure d’interdiction de gérer d’une durée de 15 années, laquelle emporte interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale,
– dit n`y avoir lieu à exécution provisoire,
– débouté, chacune des parties du surplus de ses demandes,
– dit que le jugement devra faire l’objet de la publicité prévue à l’article 220 de la délibération 352 du l8 janvier 2008.
PROCÉDURE D’APPEL
M. [H] [U] a relevé appel de ce jugement par requête enregistrée au greffe le 23 septembre 2022.
Dans ses dernières conclusions déposées au greffe le 29 avril 2024 auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens, il demande à la cour de :
– de juger de nul effet la requête déposée par la selarl [K]-[L] [F] es qualité de mandataire liquidateur de la société [17],
– d’accueillir la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l’action
– dire et juger prescrite l’action engagée à son encontre,
– dire et juger irrecevable l’action engagée à son encontre
Subsidiairement,
– débouter la selarl [K] [L] [F] en qualité de mandataire liquidateur de la société [17] de toutes ses demandes, fins et prétentions,
A titre plus subsidiaire,
– ramener à de plus justes proportions le quantum des condamnations
– condamner la selarl [K]-[L] [F] à verser à la selarl [K] [L] [F] en qualité de mandataire liquidateur la somme de 400 000 francs pacifiques sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions déposées au greffe le 8 décembre 2023, auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens, le selarl [K] [L] [F] demande à la cour de :
– confirmer le jugement du 28 juin 2022 en ce qu’il a constaté des fautes de gestion particulièrement graves à l’encontre de M. [Z] [H] [U]
– confirmer le jugement en ce qu’il a prononcé des sanctions pécuniaires à son encontre pour la totalité des insuffisances d’actif constatées dans la liquidation judiciaire de la société [17]
Par conséquent,
– condamner M.[Z] [H] [U] à supporter le comblement de l’insuffisance d’actif de la société [17] soit la somme de 32 563 579 francs pacifiques,
– confirmer le jugement en ce qu’il a prononcé à son encontre une mesure d’interdiction de gérer d’une durée de 15 années, laquelle emporte interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale,
– le débouter en qualité d’ancien gérant de la société [17] de toutes ses demandes,
– le condamner aux frais de la procédure et aux entiers dépens.
Le Ministère public a conclu à la confirmation de la décision le 5 mai 2023.
PAR CES MOTIFS
La cour,
– Réforme le jugement rendu le 28 juin 2022 par le tribunal mixte de commerce de Nouméa, en ce qu’il a condamné M. [Z] [H] [U] à supporter le comblement de l’insuffisance d’actif de la liquidation de la sarl Société [17] à hauteur de la somme totale de 32 563 579 francs pacifiques
Et statuant à nouveau,
– Condamne M. [Z] [H] [U] à supporter le comblement de l’insuffisance d’actif de la liquidation de la Sarl Société [17] à hauteur de la somme totale de
27 199 246 francs pacifiques
– Confirme le jugement en toutes ses autres dispositions
Y ajoutant
– Condamne M. [Z] [H] [U] aux entiers dépens de l’instance d’appel.
Le greffier, Le président.
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