Cour d’appel de Nîmes, 21 octobre 2024, RG n° 21/03943
Cour d’appel de Nîmes, 21 octobre 2024, RG n° 21/03943

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Nîmes

Thématique : La continuité du même contrat de travail via une succession d’employeurs

 

Résumé

La continuité du contrat de travail de M. [S] [P] a été reconnue malgré une succession d’employeurs. Embauché initialement par la SARL Logistic Chrono en 2014, son contrat a été transféré à la SASU Logistic Global Express, puis à la SASU XL Partner. La cour a confirmé que son ancienneté devait être fixée au 2 mai 2014, en raison de l’absence de formalités lors des transferts. Les manquements de l’employeur, tels que des retenues injustifiées sur salaire et le non-paiement d’heures supplémentaires, ont justifié la requalification de la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

21 octobre 2024
Cour d’appel de Nîmes
RG n°
21/03943

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 21/03943 – N° Portalis DBVH-V-B7F-IHJW

CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE NIMES

09 septembre 2021

RG :21/00049

Me [X] [M] – Mandataire liquidateur de S.A.S.U. XL PARTNER

C/

[S]

Grosse délivrée le 21 OCTOBRE 2024 à :

– Me CHABAUD

– Me VAJOU

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH

ARRÊT DU 21 OCTOBRE 2024

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NIMES en date du 09 Septembre 2021, N°21/00049

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, a entendu les plaidoiries, en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère

GREFFIER :

Monsieur Julian LAUNAY-BESTOSO, Greffier à la 5ème chambre sociale, lors des débats et du prononcé de la décision.

DÉBATS :

A l’audience publique du 18 Septembre 2024, où l’affaire a été mise en délibéré au 21 Octobre 2024.

Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.

APPELANTE :

Me [M] [X] (SAS LES MANDATAIRES) – Mandataire liquidateur de S.A.S.U. XL PARTNER

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

n’ayant pas constitué avocat ou défenseur syndical, Me CHABAUD Jean-Marie représentant la société XL PARTNER avant le prononcé de la liquidation judiciaire de celle-ci

INTIMÉ :

Monsieur [P] [S]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Emmanuelle VAJOU, avocat au barreau de NIMES

AGS / CGEA DE [Localité 4]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

n’ayant pas constitué avocat ou défenseur syndical

ARRÊT :

Arrêt réputé contradictoire, prononcé publiquement et signé par M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 21 Octobre 2024, par mise à disposition au greffe de la cour.

FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS

Lié par un contrat de travail avec la SASU XL Partner M. [S] [P] a, le 5 novembre 2020, pris acte de sa rupture au motif d’une exécution déloyale de son contrat par son employeur.

Par requête du 5 février 2021, M. [S] [P] a saisi le conseil de prud’hommes de Nîmes aux fins de voir requalifier sa prise d’acte en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et voir condamner la SASU XL Partner au paiement de diverses sommes indemnitaires.

Par jugement du 9 septembre 2021, le conseil de prud’hommes de Nîmes a :

– dit que la moyenne des trois derniers mois de salaire s’établit à la somme de 1.830, 40 euros,

– condamné la SASU XL Partner à verser à M. [S] [P] les sommes suivantes :

– 12.812,80 euros nets au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

– 3.043,45 euros nets à titre d’indemnité légale de licenciement,

– 3.660,80 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

– 366,00 euros à titre de congés payés y afférents,

– 1.605,65 euros bruts à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires d’octobre 2019 à octobre 2020,

– 160,57 euros à titre de congés payés y afférents,

– 686,27 euros bruts à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires d’avril à juin 2020,

– 68,63 euros bruts à titre de congés payés y afférents,

– 355,25 euros bruts à titre de rappel de salaire du mois de mars 2020,

– 35,53 euros bruts à titre de congés payés y afférents,

– 329,47 euros bruts à titre de rappel de salaire du mois de novembre 2020,

– 32,95 euros bruts à titre de congés payés y afférents,

– 1.105,92 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de congés payés,

– 2.500 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

– 10.982,40 euros nets à titre d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

– 1.500 euros selon les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– ordonné la remise des documents de fin de contrat rectifiés, conformes à la décision et ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard 15 jours après la notification de la décision

– ordonné l’exécution provisoire en application des dispositions de l’article 515 du code de procédure civile

– débouté M. [S] [P] du surplus de ses demandes,

– condamné la SASU XL Partner aux dépens.

Par acte du 28 octobre 2021, la SASU XL Partner a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Par ordonnance d’incident du 08 juillet 2022, le conseiller de la mise en état, saisi par M. [P] [S] aux fins de voir prononcer la radiation de l’appel interjeté par la SAS XL Partner à l’encontre du jugement en date du 09 septembre 2021 rendu par le conseil de prud’hommes de Nîmes, a déclaré une telle demande irrecevable.

Par jugement du 09 novembre 2023, la SASU XL Partner faisait l’objet d’une procédure de redressement judiciaire, convertie en liquidation judiciaire par jugement du 16 janvier 2024.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 2 mai 2022, la SASU XL Partner demande à la cour de :

– repoussant toutes conclusions contraires comme injustes et en tous cas mal-fondées ;

– infirmer le jugement rapporté en ce qu’il a ;

– dit que la moyenne des trois derniers mois de salaire s’établit à la somme de 1 830,40 euros ;

– condamné la SASU XL Partner à verser à M. [S] [P] les sommes suivantes :

‘ 12 812,80 euros nets au titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

‘ 3 043,45 euros nets à titre d’indemnité légale de licenciement ;

‘ 3 660 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis et 366 euros à titre de congés

payés afférents ;

‘ 1 605,65 euros bruts à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires d’octobre 2019

à octobre 2020 et 160,56 euros à titre de congés payés y afférents ;

‘ 686,27 euros bruts à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires d’avril à juin 2020 et 68,63 euros à titre de congés payés afférents ;

‘ 355,25 euros bruts à titre de rappel de salaire de mars 2020 et 35,53 euros à titre de congés payés afférents ;

‘ 329,47 euros bruts à titre de rappel de salaire pour le mois de novembre 2020 et 32,95 euros

de congés payés afférents ;

‘ 1 105,92 euros bruts au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés ;

‘ 2 500 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;

‘ 10 982,40 euros nets à titre d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé ;

‘ 1 500 euros au titre de l’article 700 du CPC ;

– ordonné la remise des documents de fin de contrats rectifiés sous astreinte de 50 euros par jour de retard 15 jours après la notification de la décision ;

Et statuant à nouveau :

A titre principal

– débouter M. [S] [P] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

A titre subsidiaire : sur l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Si par extraordinaire la cour devait estimer que la prise d’acte de la rupture du contrat de travail doit être requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse, ramener l’indemnité au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse à trois mois de salaire en vertu de l’article L.1235-3 du code du travail ;

En tout état de cause

– condamner M. [S] [P] à payer à la concluante la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles en vertu de l’article 700 du Code de procédure civile, ainsi que les entiers frais et dépens ;

La société soutient que :

– M. [S] [P] a été engagé à compter du 1er octobre 2019, il a été sanctionné dès le 29 novembre 2011 (sic), il n’a pas respecté les consignes lui interdisant de stationner le véhicule confié ailleurs que sur le site Chronopost,

– il lui a été enjoint par la société Chronopost de ne plus affecter M. [S] [P] pour l’exécution de ses prestations,

– elle a proposé un reclassement à M. [S] [P], qui l’a refusé et a sollicité une rupture conventionnelle, indiquant, le 2 octobre 2020 à son employeur avoir d’ores et déjà trouvé un nouvel emploi pour le 2 novembre 2020 c’est ainsi que les parties ont régularisé une rupture conventionnelle le 29 octobre 2021,

– elle conteste l’existence d’un groupe de sociétés rappelant que la seule circonstance que diverses sociétés ont pour gérant la même personne ne suffit pas à établir l’existence d’un groupe au sens des articles L.1233-3, L.1226-2, L.1226-10 ou l’article L.2331-1 du code du travail en absence de démonstration d’une société dominante, les sociétés SARL Logistic Chrono, Logistic Express et XL Partner sont indépendantes et n’ont aucun lien capitalistique entre elles,

– elle n’a pas commis de faute en ne reprenant pas l’ancienneté de M. [S] [P] puisqu’elle n’avait aucune raison de le faire,

-M. [S] [P] a été réglé de l’ensemble des heures effectuées,

– elle conteste que M. [S] [P] a poursuivi son activité sans réduction d’horaire de travail,

– la retenue sur salaire est justifiée par le fait que M. [S] [P] n’a pas stationné son véhicule sur le site de l’entreprise, que celui-ci a pris feu et que l’assurance a refusé d’indemniser le sinistre,

– la volonté de dissimuler des heures de travail n’est pas rapportée.

En l’état de ses dernières écritures en date du 20 février 2024, contenant appel incident, M. [S] [P] a demandé à la cour de :

– confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Nîmes, le 9 septembre 2021, en ce qu’il a :

o fixé la moyenne des trois derniers mois de salaire à 1.830,40 euros

o condamné la SASU XL Partner à verser à M. [S] [P], les sommes suivantes :

*12.812,80 euros nets au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

*3.043,45 euros nets à titre d’indemnité légale de licenciement,

*3.660,80 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

*366,00 euros à titre de congés payés y afférents,

*1.605,65 euros bruts à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires d’octobre 2019 à octobre 2020,

*160,57 euros à titre de congés payés y afférents,

*686,27 euros bruts à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires d’avril à juin 2020,

*68,63 euros bruts à titre de congés payés y afférents,

*355,25 euros bruts à titre de rappel de salaire du mois de mars 2020,

*35,53 euros bruts à titre de congés payés y afférents,

*329,47 euros bruts à titre de rappel de salaire du mois de novembre 2020,

*32,95 euros bruts à titre de congés payés y afférents,

*1.105,92 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de congés payés,

*2.500 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

*10.982,40 euros nets à titre d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

*1.500 euros selon les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

*Dépens.

o ordonné la remise des documents de fin de contrat rectifiés, conformes à la décision et ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard 15 jours après la notification de la décision

– infirmer le jugement rendu par le Conseil de prud’hommes de Nîmes, en ce qu’il a débouté M. [S] [P] des demandes de condamnations suivantes :

o 2.160,45 euros bruts de rappel de salaire lié à l’application du salaire minimum conventionnel et de la garantie annuelle de salaire conventionnelle outre 216.05 euros bruts de congés payés afférents pour la période de janvier 2018 à octobre 2020 inclus ;

o 1.144 euros bruts d’indemnité compensatrice de congés payés (15 jours) ;

o 21.209,93 euros bruts de rappel de salaire pour heures supplémentaires du 1er janvier 2018 au 5 novembre 2020 outre 2.121 euros bruts de congés payés afférents.

Statuant à nouveau

– juger que l’ancienneté de M. [S] [P] remonte au 2 mai 2014,

– juger que la SASU XL Partner est bien créancière de l’intégralité des demandes de M. [S] [P] par application des règles relatives au transfert du contrat de travail,

– juger que la SASU XL Partner a bien commis des manquements graves dans le cadre de l’exécution de la relation contractuelle

– requalifier la prise d’acte de rupture de M. [S] [P] en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– fixer au passif de la SASU XL Partner, en liquidation judiciaire, les condamnations suivantes au bénéfice de M. [P] [S] :

– 12.812,80 euros nets à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (7 mois de salaire* selon barème Macron) ;

– 3.043,45 euros nets à titre d’indemnité de licenciement ;

– 3.660,80 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis (2 mois*), outre 366,08 euros bruts de congés payés afférents.

*Dernier salaire reconstitué base 39H = 1.830,40 euros bruts

– fixer au passif de la SASU XL Partner, en liquidation judiciaire, les condamnations aux rappels de salaires suivants au bénéfice de M. [P] [S] :

– 2.160,45 euros bruts de rappel de salaire lié à l’application du salaire minimum conventionnel et de la garantie annuelle de salaire conventionnelle outre 216.05 euros bruts de congés payés afférents pour la période de janvier 2018 à octobre 2020 inclus et à titre subsidiaire, 56,29 euros bruts outre 5,63 euros bruts de congés payés afférents ;

– 1.605,65 euros bruts de rappel de salaire lié au non-paiement des heures supplémentaires structurelles contractuelles entre 35H et 39H outre 160,57 euros bruts de congés payés afférents pour la période d’octobre 2019 à octobre 2020 inclus (hors période d’activité partielle) ;

– 686,27 euros bruts au titre des heures supplémentaires structurelles contractuelles entre 35H et 39H dues pendant la période d’activité partielle d’avril à juin 2020 inclus, outre 68,63 euros bruts de congés payés afférents ;

– 355,25 euros bruts de rappel de salaires correspondant à une retenue sur salaire injustifiée sur le salaire du mois de mars 2020 outre 35,53 euros bruts de congés payés afférents ;

– 329,47 euros bruts de rappel de salaire au titre du mois de novembre 2020 outre 32,95 euros bruts de congés payés afférents.

– 1.144 euros bruts d’indemnité compensatrice de congés payés (15 jours) ;

– 21.209,93 euros bruts de rappel de salaire pour heures supplémentaires du 1er janvier 2018 au 5 novembre 2020 outre 2.121 euros bruts de congés payés afférents.

– juger l’exécution déloyale par la société XL Partner du contrat de travail,

– fixer au passif de la SASU XL Partner, en liquidation judiciaire, la condamnation au bénéfice de M. [P] [S], à la somme de 5.000 euros nets de dommages-intérêts à ce titre.

– juger l’existence d’un travail dissimulé intentionnel,

– fixer au passif de la SASU XL Partner, en liquidation judiciaire, la condamnation au bénéfice de M. [P] [S], de la somme de 10.982,40 euros nets de dommages-intérêts à ce titre (6 mois).

*Dernier salaire reconstitué de base 39H ! 1.830,40 euros bruts

– fixer au passif de la SASU XL Partner, en liquidation judiciaire, la condamnation au bénéfice de M. [P] [S], la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

– ordonner la rectification et délivrance des bulletins de salaire rectifiés et des documents de fin de contrat sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par document.

– débouter la SARL XLPartner, ainsi que les parties requises, de toutes leurs demandes, fins et prétentions plus amples ou contraires.

M. [S] [P] fait valoir que :

– il a été embauché par contrat de travail à durée déterminée par la SARL Logistic Chrono, du 2 mai 2014 au 6 août 2014 qui s’est poursuivi en contrat à durée indéterminée à compter du 10 septembre 2014 ayant toutefois continué de travailler entre le 7 août 2014 et le 9 septembre 2014, à compter du 1er février 2017, il devenait salarié, chauffeur livreur, de la SASU Logistic Global Express, son contrat de travail était transféré au profit de la société SASU XL Partner, à compter du 1er octobre 2019,

– il considère que son ancienneté remonte au 2 mai 2014 en l’absence d’acquiescement de sa part à tout transfert de son contrat de travail, aucune des sociétés Logistic Chrono ni Logistic Global Express n’a formalisé de rupture de son contrat de travail, il considère que le transfert intra-UES est démontré dès lors que sont rapportées une concentration de pouvoir de direction ‘ même dirigeant, une similarité des activités ‘ même activité (transport routier et frais interurbains)

et la mutabilité des salariés,

– le transfert conventionnel de contrat peut parfaitement s’envisager entre sociétés totalement indépendantes, sans aucun lien ni économique, ni capitalistique rappelant que la Sarl Logistic Chrono a été liquidée le 7 avril 2018 et que la société Logistic Global Express a été liquidée le 22 décembre 2021,

– la prise d’acte de rupture du contrat de travail est motivée par les manquements imputables à l’employeur à savoir :

– l’absence de fourniture de travail et retenue sur salaire injustifiée au cours du mois de mars 2020 alors qu’il n’est pas responsable du sinistre survenu sur le véhicule qu’il utilisait,

– alors qu’il était placé en activité partielle du 20 avril au 31 juillet 2020, il a, en réalité, travaillé à temps plein pour l’employeur, outre que cela constitue un délit de travail dissimulé, cette situation lui a causé un préjudice financier puisque de ce fait, il a perdu sa prime d’activité de 116 euros par mois sur un trimestre complet,

– les minima conventionnels n’ont pas été respectés, la reprise de son ancienneté lui permettait d’obtenir une majoration de 2% à partir du 2 mai 2016 et de 4% à compter du 2 mai 2019 ; la garantie annuelle de salaire n’a pas non plus été respectée ; il n’a donc jamais perçu le salaire auquel il aurait dû prétendre, conformément aux dispositions de la Convention collective applicable,

– son salaire mensuel était établi sur une base de 151,67 heures au lieu des 169,00h prévues dans son contrat de travail, durant la période où il a été placé en activité partielle, il aurait dû être indemnisé des heures supplémentaires structurelles entre 35h et 39h ce qui n’a pas été le cas,

– il n’a jamais pu bénéficier d’une visite médicale que ce soit à son embauche ou tout le long de la relation contractuelle, or, il connaît d’importants problèmes de santé dont notamment des problèmes de dos qui auraient nécessité un suivi renforcé et probablement un aménagement de poste, au vu du poste qu’il occupait,

– ses heures supplémentaires ne lui ont pas été payées, ses horaires étaient les suivants :

– début : 6h le lundi et 5h30 du mardi au samedi

– fin : 15h30 sauf une semaine sur 5 à 17h30 du lundi au vendredi

il réalisait plus de 50 heures de travail effectif par semaine,

– ses salaires n’étaient versés que très tardivement,

– lors de la perte du contrat avec Chronopost, son employeur plutôt que d’envisager un licenciement économique lui a proposé de démissionner, c’est ainsi qu’il était amené à accepter une convention de rupture ne tenant pas compte de sa réelle ancienneté, toutefois l’employeur refusant de lever la clause d’exclusivité prévue au contrat de travail qui n’apparaissait pas indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise, justifiée par la nature des tâches à accomplir et proportionnée au but recherché, il n’avait donc d’autre choix que de se rétracter de la rupture conventionnelle et de prendre acte de la rupture de son contrat de travail.

La SAS les Mandataires prise en la personne de Maître [X] [M], ès qualités de liquidateur judiciaire à la liquidation judiciaire de la SARL XL Partner désigné par jugement de conversion en liquidation judiciaire du 16 janvier 2024 du tribunal de commerce d’Aix-en-Provence, appelée en la cause par voie d’assignation délivrée à personne habilitée à recevoir l’acte le 23 février 2024 n’a pas conclu.

L’Unedic, délégation AGS CGEA de [Localité 4] appelée en la cause par voie d’assignation délivrée à personne habilitée à recevoir l’acte le 23 février 2024 n’a pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.

Par ordonnance en date du 26 avril 2023, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 5 septembre 2023 à 16 heures et fixé l’examen de l’affaire à l’audience du 5 octobre 2023. Par avis du 6 septembre 2023, l’examen de l’affaire a été appelé à l’audience du 14 mars 2024. Par une nouvelle ordonnance en date du 16 mai 2024, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet du 19 août 2024 et fixé l’examen de l’affaire à l’audience du 18 septembre 2024 à 14 heures.

MOTIFS

Il convient de rappeler que, bien que placée en liquidation judiciaire, la SASU XL Partner a déposé alors qu’elle était in bonis des conclusions qui saisissent valablement la cour étant rappelé que selon une jurisprudence constante conformément à l’article 419 du code de procédure civile, lorsque la représentation est obligatoire, l’avocat ne peut se décharger de son mandat de représentation que du jour où il est remplacé par un nouveau représentant constitué par la partie ou, à défaut, commis par le bâtonnier ou par le président de la chambre de discipline.

Les organes de la procédure collective, dont le mandat consiste à représenter la société appelante toujours partie à la présente procédure, étant rappelé qu’en matière prud’homale la décision d’ouverture d’une procédure collective n’interrompt ni ne suspend la procédure en cours, ont été régulièrement mis en cause et n’ont pas jugé utile de constituer un nouvel avocat ni de prendre de nouvelles conclusions.

La cour prendra donc en considération les conclusions déposées le 2 mai 2022 pour le compte de la SASU XL Partner.

Sur l’ancienneté de M. [S] [P]

M. [S] [P] relate qu’il a été embauché par contrat de travail à durée déterminée par la SARL Logistic Chrono, du 2 mai 2014 au 6 août 2014, contrat qui s’est poursuivi en contrat à durée indéterminée à compter du 10 septembre 2014, qu’il a toutefois continué de travailler entre le 7 août 2014 et le 9 septembre 2014, à compter du 1er février 2017, il devenait salarié, chauffeur livreur, de la SASU Logistic Global Express, son contrat de travail était transféré au profit de la société SASU XL Partner, à compter du 1er octobre 2019.

Si la notion de groupe de sociétés n’a rien à voir avec le présent contentieux, la question qui se pose est de savoir s’il y a eu continuité du même contrat de travail depuis l’origine via une succession d’employeurs.

Il apparaît que les trois sociétés employeur appartiennent toutes au même actionnaire unique, M. [K] [L], exercent toutes la même activité ( transport/fret) et que M. [S] [P] y occupait le même poste de chauffeur/livreur.

Il est établi par les pièces versées que la Sarl Logistic Chrono a été liquidée le 7 avril 2018 et que la SASU Logistic Global Express a été liquidée le 22 décembre 2021.

Selon l’article L.1224-1du code du travail «Lorsque survient une modification dans la situation juridique de l’employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l’entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l’entreprise».

L’article L.1224-2 précise que «Le nouvel employeur est tenu, à l’égard des salariés dont les contrats de travail subsistent, aux obligations qui incombaient à l’ancien employeur à la date de la modification».

Constitue une entité économique autonome un ensemble organisé de personnes et d’éléments corporels ou incorporels poursuivant un objectif économique propre. Le transfert d’une telle entité se réalise si des moyens corporels ou incorporels significatifs et nécessaires à l’exploitation de l’entité sont repris, directement ou indirectement, par un nouvel exploitant.

Le transfert d’une entité économique autonome s’opère à la date à laquelle le nouvel exploitant est mis en mesure d’assurer la direction de cette entité.

Il se déduit de ces articles que, sauf collusion frauduleuse entre les employeurs successifs, seul le nouvel employeur est tenu envers le salarié aux obligations et au paiement des créances résultant de la poursuite du contrat de travail après le transfert.

Il apparaît en l’espèce que le contrat de travail de M. [S] [P] a été transféré, sans son assentiment et sans qu’aucune formalité ne soit accomplie, entre ces différentes sociétés poursuivant une même activité avec les mêmes éléments corporels ce qui constitue une fraude aux droits du salarié, peu importe le silence observé par ce dernier qui ne saurait valoir acceptation de la situation imposée.

C’est à bon droit que M. [S] [P] considère que son ancienneté doit être fixée au 2 mai 2014 mettant en exergue les man’uvres de M. [L] lequel crée une société, transfère ses salariés sans reprendre une quelconque ancienneté sur une autre entité, puis liquide cette société.

La SASU XL Partner n’apporte aucune contestation sérieuse à ce constat sauf à prétendre que à sa connaissance, Monsieur [S] a évidemment reçu les documents de fin de contrat le cas échéant ce qui n’est nullement démontré.

Sur la rupture du contrat de travail

M. [S] [P] reproche à l’employeur de ne pas avoir exécuté loyalement son contrat de travail et développe les griefs suivants :

1) l’absence de fourniture de travail et retenue sur salaire injustifiée au cours du mois de mars 2020 :

Cette retenue n’est pas contestée par l’employeur qui explique que ‘ Monsieur [S] a détourné le véhicule de service qui a pris feu devant chez lui au mois de mars 2020 ;

Que, tenant ce lieu de stationnement, l’assurance n’a pas pris en charge le sinistre ;

Que Monsieur [S] a ensuite prétendu ne pas pouvoir venir travailler à défaut de véhicule et a souhaité être mis en congé sans soldes le temps de récupérer son véhicule ;

Qu’il en résulte que la retenue de salaire est parfaitement justifiée et que la Cour le déboutera de cette demande infondée.’

Ces explications, au demeurant inopérantes faute d’établir l’existence d’une faute lourde de la part du salarié seule susceptible d’engager sa responsabilité, ne sont étayées par aucun élément alors qu’au contraire M. [P] [S] démontre par la production des échanges de SMS avec son employeur suite à ce sinistre et de l’attestation de M. [H] que la SASU XL Partner se trouvait dans l’impossibilité du fait de la destruction du véhicule utilitaire de fournir du travail à son salarié ce qui ne pouvait entraîner une retenue sur salaire.

En effet M. [H] indique : «en mars 2000 le camion de [P] a été brûlé par des malfaiteurs. L’employeur nous a départagé le travail de [P] car avec le confinement impossible pour lui de trouver un véhicule supplémentaire . Le travail était très lourd pour nous…»

Le jugement mérite confirmation en ce qu’il a ordonné le paiement d’un rappel de salaire à ce titre.

2) Sur l’activité à temps partiel :

M. [S] [P] relate qu’alors qu’il était placé en activité partielle du 20 avril au 31 juillet 2020 en raison de la crise sanitaire liée à la COVID-19, il a, en réalité, travaillé à temps plein pour l’employeur, outre que cela constitue un délit de travail dissimulé, cette situation lui a causé un préjudice financier puisque de ce fait, il a perdu sa prime d’activité de 116 euros par mois sur un trimestre complet,

M. [S] [P] justifie par la production des pièces versées, notamment les échanges de SMS avec son employeur, les attestations de M. [W] [H], M. [A] [T] et Mme [D] [N], l’attestation de l’employeur à la CAF confirmant le travail de son salarié du 17 mars au 10 mai 2020 qu’il a bien continué à travailler pour la SASU XL Partner dans les conditions habituelles dans le respect des mesures d’hygiène et de sécurité imposées.

Le jugement qui a ordonné le paiement de rappel de salaire de ce chef sera confirmé.

Ce faisant l’employeur qui ne pouvait ignorer qu’il déclarait un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement exécuté par le salarié s’est rendu coupable de travail dissimulé emportant en application des dispositions de l’article L.8223-1 du code du travail le paiement d’une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

3) Sur les minima conventionnels :

M. [S] [P] soutient que les minima conventionnels n’ont pas été respectés.

Il est exact que la reprise de son ancienneté au 2 mai 2014 lui permettait d’obtenir une majoration de 2% à partir du 2 mai 2016 et de 4% à compter du 2 mai 2019 comme le confirme l’extrait de la convention collective nationale des transports routiers versée en pièce n° 16 par le salarié.

Il apparaît également que la garantie annuelle de salaire n’a pas non plus été respectée et M. [S] [P] propose en pièce n°17 le calcul du rappel de salaire SMC et GAS lui revenant :

Rappel SMC

Rappel GAS

solde

congés payés

2018

482,69 €

515,11 €

1019

317,11 €

180,84 €

2020

344,26 €

320,44 €

TOTAUX

1 144,06 €

1 016,39 €

2 160,45 €

216,05 €

lequel ne fait l’objet d’aucune contestation de la part de l’appelante.

4) Sur le paiement des heures prévues au contrat de travail :

M. [S] [P] constate que son salaire mensuel était établi sur une base de 151,67 heures au lieu des 169,00h prévues dans son contrat de travail, ce qui résulte effectivement de la lecture de son contrat de travail et des mentions portées sur ses bulletins de paie.

La société appelante ne fournit aucun explication sur ce point.

M. [S] [P] ajoute que durant la période où il a été placé en activité partielle, il aurait dû être indemnisé des heures supplémentaires structurelles entre 35h et 39h ce qui n’a pas été le cas, le jugement mérite confirmation de ce chef également.

5) Sur les visites médicales :

M. [S] [P] expose qu’il n’a jamais pu bénéficier d’une visite médicale que ce soit à son embauche ou tout le long de la relation contractuelle ce qui en soit n’entraîne pas automatiquement réparation. Il ajoute qu’il connaît d’importants problèmes de santé dont notamment des problèmes de dos qui auraient nécessité un suivi renforcé et probablement un aménagement de poste, au vu du poste qu’il occupait, il verse au débats en pièce n°21 des comptes rendus médicaux qui mentionnent :

‘Indication :

Patient connu pour des anomalies osseuses de type congénitale au niveau lombaire.

Résultat:

Densite osseuse normale.

Bascule du plancher pelvien droite de 15 mm.

L’attention est retenue par la présence d’une déviation grand rayon de courbure dextro-convexe dorsale.

La déviation est favorisée par la présence d’anomalie au niveau lombaire, on objective en effet la présence d’un bloc vertébral L1 -L2 avec hemi-vertèbre L2 fusionnée avec L1.

L’ensemble formant un corps vertébral asymétrique dans le plan frontal.

ll existe également un bloc vertébral apparemment acquit en L3-L4.

ll existe une hémi-vertèbre L5 avec un aspect trapézoidal asymétrique dans le plan frontal.

L’ensemble génère une déviation sinistro-convexe lombaire de 42,8° entre le plateau inférieur de T11 et le plateau inférieur de L4.

Remaniements de type dégénératif prédominant au niveau de la concavité de la scoliose lombaire haute et basse.’

Le suivi de M. [S] [P] par la médecine du travail aurait pu assurer une adaptation de son poste de travail qui aurait minimisé l’impact sur son état de santé de ses conditions de travail.

Le jugement qui a alloué à M. [S] [P] la somme de 2.500 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail sera confirmé de ce chef.

6) Sur les heures supplémentaires :

M. [S] [P] relate que ses heures supplémentaires ne lui ont pas été payées alors que ses horaires étaient les suivants :

– début : 6h le lundi et 5h30 du mardi au samedi

– fin : 15h30 sauf une semaine sur 5 à 17h30 du lundi au vendredi

Il soutient qu’il réalisait plus de 50 heures de travail effectif par semaine.

Aux termes de l’article L3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail effectuées, l’employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

En cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées.

À défaut d’éléments probants fournis par l’employeur, les juges se détermineront au vu des seules pièces fournies par le salarié

Après analyses des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

Il appartient à la juridiction de vérifier si les heures supplémentaires revendiquées ont été rendues nécessaires par le travail confié au salarié, l’opposition à l’exécution de celle-ci de l’employeur se trouvant alors indifférente.

Le salarié peut revendiquer le paiement d’heures supplémentaires à raison de l’accord tacite de l’employeur.

Cet accord tacite peut résulter de la connaissance par l’employeur de la réalisation d’heures supplémentaires par le biais de fiche de pointage et l’absence d’opposition de l’employeur à la réalisation de ces heures.

L’absence de mise en place par l’employeur d’un tel système ne le prive pas du droit de soumettre au débat contradictoire tout élément de droit, de fait et de preuve, quant à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies.

Pour établir la réalité de ses horaires, M. [S] [P] avance que ses horaires étaient fixes et suivaient toutes les semaines le même roulement comme en attestent ses collègues de travail à savoir :

– M. [R] [V] : « Chaque chauffeur livreur effectue le picking sur le quai qui lui ai attribué, le picking commence environ a 6h le lundi et environ 5h30 du mardi au Samedi. Chaque chauffeur tri récupère les colis défilant sur les tapis afférents à leur tournée, les classe en fonction des adresses, les scan et les charges dans leur camion. Cela dure environ 2h. A la fin les chauffeurs avec leur scan peuvent se faire éditer leur feuille de route (C11) pour partir en livraison. Cette feuille de route est restitué à Chronopost en fin de tournée comme preuve de livraison (signature du client, heure de livraison, etc.)»

– M. [W] [H] : «…nous travaillons du lundi au samedi à partir de 5h 30 sauf le lundi six heures et finissons selon la quantité de travail vers 15 heures (non stop) et une semaine sur cinq nous devions travailler en plus de nos horaires habituels du lundi au vendredi jusqu’à 17h30/18h…»

– M. [Z] [E] : « Intérimaire puis salarié de Chronopost depuis sept ans , j’atteste que le picking ( tris des colis avec classement et chargement des tournées ) à Chronopost débute le lundi au plus tard à 6h et du mardi au samedi plus tard à 5h30. Lors de lourdes périodes le picking commence plutôt. Il dure approximativement 2 heures. À la suite de ce picking, les chauffeurs se font éditer des C11 ( feuille de route indique les heures de livraison de chaque client, adresse du client, numéro de colis, signature des clients suite à la réception de leur colis) qui leur permettent de quitter l’agence Chronopost pour partir en livraison. »

Par ailleurs il résulte du courriel du 28 janvier 2021 de la société Chronopost que l’employeur avait accès aux documents censés établir la réalité des horaires effectués : «Comme répondu dans le mail du 29/12, M. [P] [S] n’a jamais fait partie de nos salariés mais était employé de la société de transport XL PARTNER. Les données figurant sur les documents demandés étant confidentielles, Chronopost, en tant que donneur d’ordre de la société XL PARTNER et non employeur de M. [S], ne peut donner de suite favorable à cette demande et invite M. [S] à se rapprocher de son ancien employeur.». Or la société employeur n’a pas communiqué ces éléments.

Il sera fait droit à la demande tendant au paiement de la somme de 21.209,93 euros bruts de rappel de salaire pour heures supplémentaires du 1er janvier 2018 au 5 novembre 2020 outre 2.121 euros bruts de congés payés afférents.

7) Sur le paiement tardif des salaires :

M. [S] [P] indique que ses salaires n’étaient versés que très tardivement, ainsi au mois de mars 2020, son salaire ne lui a pas été versé avant le 20 avril, il en a été de même au mois de juillet 2020, où son salaire ne lui a été versé que le 11 août ce qui résulte de ses relevés bancaires.

Son salaire du mois d’octobre 2020 ne lui a été réglé que le 17 novembre 2020 malgré de multiples relances et son salaire du mois de novembre 2020 ne lui a jamais été réglé.

Enfin il n’a jamais perçu le solde de ses congés payés qui lui sont dus comme le démontre son décompte en pièce n°28 :

Départ au 05/11/2020

4 jours qui auraient été travaillés sur une base de 7,8H

329,47 € Rappel de salaire

32,95 € CP afférents

1 830,40 € Sa1aire mensuel brut

CP à solder 14,5 arrondis à 15

1 144,00 €

Toutefois M. [S] [P] qui demande la confirmation du jugement en ce qu’il lui a accordé 1.105,92 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de congés payés, n’est pas recevable à solliciter le paiement de la somme de 1.144 euros de ce même chef.

8) Sur l’absence de fourniture de travail à compter du 1er novembre 2020 et l’impossibilité de s’engager auprès d’un autre employeur en raison de la présence d’une clause d’exclusivité illicite

M. [S] [P] relate que lors de la perte du contrat avec Chronopost, son employeur plutôt que d’envisager un licenciement économique lui a proposé de démissionner, c’est ainsi qu’il était amené à accepter une convention de rupture ne tenant pas compte de sa réelle ancienneté, toutefois l’employeur refusant de lever la clause d’exclusivité prévue au contrat de travail qui n’apparaissait pas indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise, justifiée par la nature des tâches à accomplir et proportionnée au but recherché, il n’avait donc d’autre choix que de se rétracter de la rupture conventionnelle et de prendre acte de la rupture de son contrat de travail.

Il avance qu’alors même que son employeur n’était plus en mesure de lui fournir du travail et la

rémunération afférente, il s’est ainsi trouvé dans l’impossibilité de travailler pour un autre employeur.

Or la société intimée produit en pièce n°7 un courrier remis en mains propres contre signature à M. [S] [P] par lequel elle lui proposait plusieurs postes à [Localité 6] et à [Localité 5] et prenait acte que M. [S] [P] avait d’ores et déjà accepté un poste pour assurer au profit du nouveau sous-traitant de Chronopost les tournées qu’il assurait jusqu’alors.

Ce grief ne peut être retenu.

Les griefs dont la réalité a été reconnue ci-avant étaient suffisamment graves pour justifier la prise d’acte de rupture du contrat de travail aux torts de l’employeur laquelle produit les effets d’un licenciement dénué de cause réelle et sérieuse.

Sur l’indemnisation

En application des dispositions de l’article L.1235-3 telles qu’issues de l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 tenant compte du montant de la rémunération de M. [S] [P] ( 1.830,40 euros en moyenne) et de son ancienneté en années complètes ( 6 années), dans une entreprise comptant au moins onze salariés, la cour retient que l’indemnité à même de réparer intégralement le préjudice de M. [S] [P] doit être évaluée à la somme de 12.812,80 euros correspondant à l’équivalent de sept mois de salaire brut. Le jugement mérite confirmation sur ce point.

Les sommes allouées au titre de l’indemnité légale de licenciement, de l’indemnité compensatrice de préavis et des congés payés y afférents ne sont pas discutées.

L’équité commande de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et de fixer l’indemnité à la somme de 1.500,00 euros à ce titre.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Par arrêt réputé contradictoire, rendu publiquement en dernier ressort

Confirme le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Nîmes, le 9 septembre 2021, en ce qu’il a :

– fixé la moyenne des trois derniers mois de salaire à 1.830,40 euros

– condamné la SASU XL Partner à verser à M. [S] [P], les sommes suivantes sauf à préciser qu’elles seront inscrites au passif de la société :

12.812,80 euros nets au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

3.043,45 euros nets à titre d’indemnité légale de licenciement,

3.660,80 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

366,00 euros à titre de congés payés y afférents,

1.605,65 euros bruts à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires d’octobre 2019 à octobre 2020,

160,57 euros à titre de congés payés y afférents,

686,27 euros bruts à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires structurelles d’avril à juin 2020,

68,63 euros bruts à titre de congés payés y afférents,

355,25 euros bruts à titre de rappel de salaire du mois de mars 2020,

35,53 euros bruts à titre de congés payés y afférents,

329,47 euros bruts à titre de rappel de salaire du mois de novembre 2020,

32,95 euros bruts à titre de congés payés y afférents,

1.105,92 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de congés payés,

2.500 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

10.982,40 euros nets à titre d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

1.500 euros selon les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

aux dépens.

– ordonné la remise des documents de fin de contrat rectifiés, conformes à la décision et ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard 15 jours après la notification de la décision

Infirme le jugement en ce qu’il a débouté M. [S] [P] des demandes de condamnations suivantes :

– 2.160,45 euros bruts de rappel de salaire lié à l’application du salaire minimum conventionnel et de la garantie annuelle de salaire conventionnelle outre 216.05 euros bruts de congés payés afférents pour la période de janvier 2018 à octobre 2020 inclus ;

– 21.209,93 euros bruts de rappel de salaire pour heures supplémentaires du 1er janvier 2018 au 5 novembre 2020 outre 2.121 euros bruts de congés payés afférents.

Statuant à nouveau

Juge que l’ancienneté de M. [S] [P] remonte au 2 mai 2014,

Fixe au passif de la SASU XL Partner, en liquidation judiciaire, les condamnations aux rappels de salaires suivants au bénéfice de M. [P] [S] :

– 2.160,45 euros bruts de rappel de salaire lié à l’application du salaire minimum conventionnel et de la garantie annuelle de salaire conventionnelle outre 216.05 euros bruts de congés payés afférents pour la période de janvier 2018 à octobre 2020 inclus ;

– 21.209,93 euros bruts de rappel de salaire pour heures supplémentaires du 1er janvier 2018 au 5 novembre 2020 outre 2.121 euros bruts de congés payés afférents.

Fixe au passif de la SASU XL Partner, en liquidation judiciaire, la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Ordonne la rectification et délivrance des bulletins de salaire conformes à la présente décision,

Dit que ces sommes seront inscrites par le mandataire liquidateur sur l’état des créances de la procédure collective ouverte à l’encontre de la SASU XL Partner,

Dit qu’en application des articles L 622-28 et L 641-3 du Code de commerce, le jugement d’ouverture de la procédure collective arrête définitivement à sa date le cours des intérêts au taux légal des créances salariales nées antérieurement,

Rejette toute autre demande,

Dit que les dépens seront considérés comme frais privilégiés dans le cadre de la procédure collective.

Arrêt signé par le président et par le greffier.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


 


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon