Cour d’appel de Nancy, 3 avril 2023
Cour d’appel de Nancy, 3 avril 2023

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Nancy

Thématique :

Résumé

Le signe « Le Made in France » peut être déposé sans risque de confusion avec « Au Made in France », dédié aux burgers. L’élément graphique du second signe, dominant par sa taille et ses couleurs, crée une impression distincte. L’expression « Made in France » évoque une caractéristique des produits, ce qui la rend peu distinctive. Ainsi, l’élément graphique confère à « Au Made in France » sa distinctivité, écartant tout risque de confusion, même pour des services identiques. L’ajout de « Spécialités de sandwichs et hamburgers à la française » ne modifie pas cette analyse, justifiant le rejet de l’opposition par l’INPI.

Le signe « Le Made in France » peut être déposé à titre de marque sans porter atteinte aux droits sur la marque « Au Made in France » (pour des Burgers à la française).  

L’impression générale d’ensemble produite par les deux signes est très différente en raison de l’élément graphique du signe second, très prééminent de par sa taille et ses couleurs.

Par ailleurs, l’expression ‘Made in France’ renvoie nécessairement à une caractéristique des produits et services de restauration qu’elle désigne, à savoir, fabriqué en France ou selon un savoir-faire français, de sorte qu’elle n’est que très faiblement distinctive.

Dans cette circonstance, l’élément graphique, généralement considéré comme secondaire dans l’esprit du consommateur d’attention moyenne, confère au signe second sa distinctivité en ce qu’il permet d’en identifier l’origine commerciale et suffit à écarter tout risque de confusion, incluant le risque d’association quand bien même les produits et services désignés sont identiques.

L’ajout des termes ‘ Spécialités de sandwichs et hamburgers à la française ‘, au demeurant purement descriptifs des produits désignés par cette marque, ne sont pas de nature à modifier l’analyse relative au risque de confusion. C’est dès lors à bon droit que Monsieur le directeur général de l’INPI a rejeté l’opposition formée par la société Made in France Franchise.

 

3 avril 2023 Cour d’appel de Nancy RG n° 22/01455 RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS ———————————— COUR D’APPEL DE NANCY Première Chambre Civile ARRÊT N° /2023 DU 03 AVRIL 2023 Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/01455 – N° Portalis DBVR-V-B7G-E76B Décision déférée à la Cour : décision de l’Institut National de la Propriété Industrielle, OPP 22-0048/BOC, en date du 31 mai 2022, DEMANDERESSE AU RECOURS : S.A.R.L. MADE IN FRANCE FRANCHISE, prise en la personne de son représentant légal, pour ce domicilié au siège social, sis [Adresse 3] Représentée par Me Bruno ZILLIG de la SCP LAGRANGE ET ASSOCIÉS, avocat au barreau de NANCY DÉFENDEUR AU RECOURS : Monsieur [C] [M] né le 1er juin 1987 à [Localité 4] (93) domicilié [Adresse 2] Représenté par Me Frédéric BARBAUT de la SELARL MAITRE FREDERIC BARBAUT, substitué par Me Sahra AMM, avocats au barreau de NANCY En présence de : INSTITUT NATIONAL DE LA PROPRIETE INDUSTRIELLE (INPI), prise en la personne de son représentant légal, pour ce domicilié [Adresse 1] COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 07 Février 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Mélina BUQUANT, Conseiller, Présidente d’audience, et Madame Claude OLIVIER-VALLET, Magistrat honoraire, chargée du rapport, Greffier, lors des débats : Madame Céline PERRIN ; Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Monsieur Guerric HENON, Président de Chambre, Madame Mélina BUQUANT, Conseiller, Madame Claude OLIVIER-VALLET, Magistrat honoraire, selon ordonnance de Monsieur le Premier Président en date du 1er février 2023 ——————————————————————————————————– Copie exécutoire délivrée le à Copie délivrée le à ——————————————————————————————————– A l’issue des débats, le Président a annoncé que l’arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe le 03 Avril 2023, en application de l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile, ARRÊT : contradictoire, rendu par mise à disposition publique au greffe le 03 Avril 2023, par Madame PERRIN, Greffier, conformément à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ; signé par Monsieur HENON, Président, et par Madame PERRIN, Greffier ; FAITS ET PROCÉDURE : Monsieur [C] [M] a déposé le 14 octobre 2021, la demande d’enregistrement n° 4 808 149 portant sur la marque semi-figurative ‘AU MADE IN FRANCE’. Le 4 janvier 2022, la S.A.R.L. MADE IN FRANCE FRANCHISE a formé opposition à l’enregistrement de cette marque en se prévalant d’un risque de confusion au regard des droits antérieurs suivants : – la marque verbale ‘LE MADE IN FRANCE’, déposée le 14 janvier 2002, enregistrée sous le n° 3 141 398 et régulièrement renouvelée, dont la société opposante est devenue titulaire suite à une transmission de propriété. – la marque verbale ‘MADE IN FRANCE SPÉCIALITÉS DE SANDWICHS ET HAMBURGERS À LA FRANÇAISE’, déposée le 14 janvier 2002, enregistrée sous le n° 3 141 400 et régulièrement renouvelée, dont la société opposante est devenue titulaire suite à une transmission de propriété. L’opposition a été régulièrement notifiée au titulaire de la demande d’enregistrement. Aucune observation en réponse à l’opposition n’a été présentée dans le délai de deux mois qui lui était imparti. Par décision du 31 mai 2022, Monsieur le directeur général de l’INPI a rejeté l’opposition dans son entier. Par acte en date du 22 juin 2022 la société MADE IN FRANCE FRANCHISE a interjeté appel. Dans le dernier état de ses conclusions notifiées le 30 janvier 2023 auxquelles le présent arrêt se réfère expressément pour plus ample exposé des moyens et arguments, l’appelante demande de : – la déclarer recevable et bien fondée en son recours à l’encontre de la décision d’opposition de l’INPI du 31 mai 2022, en ce que la demande de marque verbale semi-figurative n°21/4808149 pouvait être adoptée comme marque pour désigner des services identiques, sans porter atteinte aux marques françaises LE MADE IN FRANCE n°02/3141398 et MADE IN FRANCE SPÉCIALITÉS DE SANDWICHS ET HAMBURGERS À LA FRANÇAISE n°02/3141400, conformément à l’article L. 713-2 du Code de la propriété intellectuelle pour les services suivants : Classe 43 : « Services de restauration (alimentation) ; services de traiteurs » – annuler la décision d’opposition du 31 mai 2022 (OPP 22-0048 / BOC). – condamner M. [C] [M] à payer à la société MADE IN FRANCE FRANCHISE la somme de 4000 euros en application de l’article 700 de Code de procédure civile. – condamner M. [C] [M] aux entiers dépens en application de l’article 699 du Code de procédure civile qui pourront être recouvrés par Maître Bruno Zillig. Dans ses dernières conclusions notifiées le 16 décembre 2022 auxquelles le présent arrêt se réfère expressément pour plus ample développement des moyens et argument l’intimé demande : – à titre principal, de déclarer la société MADE IN FRANCE FRANCHISE irrecevable en ses demandes et de la débouter purement et simplement de l’ensemble de ses moyens, fins et prétentions, – à titre subsidiaire, de déclarer la société MADE IN FRANCE FRANCHISE mal fondée en ses demandes et de la débouter purement et simplement de l’ensemble de ses moyens, fins et prétentions, En tout état de cause, de condamner la société MADE IN FRANCE FRANCHISE à payer à Monsieur [C] [M] une indemnité de 4000,00 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers frais et dépens de l’instance. Monsieur le directeur de l’INPI a présenté ses observations par courrier en date du 19 décembre 2022, reçu le 22 décembre 2022. Il conclut à la confirmation de la décision contestée. Le ministère public auquel le dossier a été communiqué, s’en est rapporté à l’appréciation de la cour. L’affaire a été appelée à l’audience de plaidoirie du 7 février 2023 et mise en délibéré au 3 avril 2023. MOTIFS DE LA DÉCISION : Sur la recevabilité du recours : Le moyen est fondé sur l’article L 716-2-4 du code de la propriété intellectuelle qui dispose : ‘Est irrecevable : 1° La demande en nullité fondée sur une marque antérieure lorsque le titulaire de la marque antérieure enregistrée n’établit pas, sur requête du titulaire de la marque postérieure, qu’à la date du dépôt ou à la date de priorité de cette marque postérieure, la marque antérieure, susceptible d’être annulée sur le fondement des 2°, 3° et 4° de l’article L. 711-2, avait acquis un caractère distinctif ; 2° La demande en nullité fondée sur le b du 1° du I de l’article L. 711-3 lorsque le titulaire de la marque antérieure enregistrée n’établit pas, sur requête du titulaire de la marque postérieure, qu’à la date du dépôt ou à la date de priorité de cette marque postérieure, la marque antérieure invoquée avait acquis un caractère suffisamment distinctif susceptible de justifier l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public ; 3° La demande en nullité fondée sur le 2° du I de l’article L. 711-3 lorsque le titulaire de la marque antérieure enregistrée n’établit pas, sur requête du titulaire de la marque postérieure, qu’à la date du dépôt ou à la date de priorité de cette marque postérieure, la marque antérieure invoquée avait acquis une renommée au sens de cette disposition.’ Le présent recours s’analyse en un recours en annulation de la décision rendue le 31 mai 2022 par Monsieur le directeur général de l’INPI, laquelle a statué sur une opposition formée par l’appelante au dépôt de la marque figurative AU MADE IN FRANCE. Les dispositions du texte ci-dessus visé, qui concernent les actions en nullité de marques enregistrées, ne sont dès lors pas applicables au cas d’espèce. Le moyen d’irrecevabilité sera donc rejeté. Sur le fond : Aux termes des dispositions de l’article L.713-2 du code de la propriété intellectuelle : ‘ Est interdit, sauf autorisation du titulaire de la marque, l’usage dans la vie des affaires pour des produits ou des services : 1° D’un signe identique à la marque et utilisé pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels la marque est enregistrée ; 2° D’un signe identique ou similaire à la marque et utilisé pour des produits ou des services identiques ou similaires à ceux pour lesquels la marque est enregistrée, s’il existe dans l’esprit du public, un risque de confusion incluant le risque d’association du signe avec la marque.’ L’opposition est fondée sur l’existence d’un risque de confusion. Le risque de confusion doit être apprécié globalement en tenant compte de l’ensemble des facteurs pertinents du cas d’espèce. Cette appréciation globale doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, auditive ou conceptuelle des marques en cause, se fonder sur l’impression d’ensemble produite par les marques, en tenant compte, notamment des éléments distinctifs et dominants de celles-ci. Le risque de confusion s’entend du risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement. Les facteurs pertinents concernant la comparaison des produits ou services incluent, en particulier, leur nature, leur fonction, leur destination ainsi que leur caractère complémentaire. Sur le fondement de la marque verbale ‘LE MADE IN FRANCE’ n° 3 141 398 Sur la comparaison des produits : Il est patent que les marques en cause désignent des produits et services identiques à savoir ‘les services de restauration (Alimentation) ; services de traiteur’ en classe 43 de la classification internationale. L’argument relatif à la nature de l’exploitation effectivement développée par chacune des parties, soit d’une part un restaurant de gastronomie française faite maison et d’autre part un restaurant de sandwichs est inopérante à cet égard, de même que la circonstance tirée de l’éloignement géographique des établissements. Sur la comparaison des signes : La marque opposée est une marque purement verbale ‘LE MADE IN FRANCE’ composée de quatre mots écrits en capitales d’imprimerie. La demande d’enregistrement porte sur un signe complexe composé d’un élément verbal, ‘Au made in France’, en lettres cursives, surmonté d’un élément graphique de grande taille représentant, dans des couleurs bleu, blanc et rouge, une fleur de lys, dont la base repose sur un tissu drapé, et derrière laquelle apparaissent de profil, à droite la tête d’un coq, dont le bec est jaune, et à gauche sa queue. La similarité des signes en présence ne repose donc que sur le seul élément verbal et au sein de celui-ci sur la reprise des trois mots ‘made in France’, les calligraphies et l’attaque, soit ‘Le’ et ‘Au’ étant différentes. Phonétiquement et conceptuellement les deux signes sont proches. Sur le risque de confusion : Il y a lieu de relever que l’impression générale d’ensemble produite par les deux signes est très différente en raison de l’élément graphique du signe second, très prééminent de par sa taille et ses couleurs. Par ailleurs, l’expression ‘Made in France’ renvoie nécessairement à une caractéristique des produits et services de restauration qu’elle désigne, à savoir, fabriqué en France ou selon un savoir-faire français, de sorte qu’elle n’est que très faiblement distinctive. Dans cette circonstance, l’élément graphique, généralement considéré comme secondaire dans l’esprit du consommateur d’attention moyenne, confère au signe second sa distinctivité en ce qu’il permet d’en identifier l’origine commerciale et suffit à écarter tout risque de confusion, incluant le risque d’association quand bien même les produits et services désignés sont identiques. Sur le fondement de la marque verbale MADE IN FRANCE Spécialités de sandwichs et hamburgers à la française n° 3 141 400 Les produits et services désignés étant les mêmes que dans la marque n°3 141 398, ils sont identiques ainsi qu’il a été exposé. Les considérations développées ci-dessus quant aux signes en présence sont pareillement applicables à cette seconde marque. L’ajout des termes ‘ Spécialités de sandwichs et hamburgers à la française ‘, au demeurant purement descriptifs des produits désignés par cette marque, ne sont pas de nature à modifier l’analyse relative au risque de confusion. C’est dès lors à bon droit que Monsieur le directeur général de l’INPI a rejeté l’opposition formée par la société Made in France Franchise. Sur les frais et dépens : La procédure ne comporte pas de dépens de sorte que les demandes à ce titre n’ont pas lieu d’être examinées. Il serait inéquitable que Monsieur [M] supporte la charge de ses frais. Il lui sera alloué la somme de 1500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. PAR CES MOTIFS, LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, Déclare recevable le recours formé par la S.A.R.L. Made in France Franchise à l’encontre de la décision rendue par le directeur général de l’Institut National de la Propriété Industrielle le 31 mai 2022, Au fond, Rejette ledit recours, Condamne la S.A.R.L. Made in France Franchise à payer à Monsieur [C] [M] la somme de 1500 euros (MILLE CINQ CENTS EUROS) au titre de l’article 700 du code de procédure civile, Dit n’y avoir lieu à dépens. Dit que le présent arrêt sera notifié par lettre recommandée avec avis de réception par les soins du greffier aux parties et au directeur général de l’Institut National de la Propriété Industrielle. Le présent arrêt a été signé par Monsieur HENON, Président de chambre à la Cour d’Appel de NANCY, et par Madame PERRIN, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. Signé : C. PERRIN.- Signé : G. HENON.- Minute en sept pages.  

 

 


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