Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Nancy
→ RésuméLors d’une émission, un médecin a mentionné un procès contre un tiers condamné pour exercice illégal de la profession de pharmacien. Ce dernier a poursuivi France Télévisions pour atteinte à sa présomption d’innocence. Le groupe audiovisuel a nié toute responsabilité, affirmant qu’il n’était pas responsable des propos des intervenants et qu’il avait respecté sa liberté d’informer. Concernant la prescription de l’action, la loi impose d’introduire l’instance dans les trois mois suivant l’acte de publicité. Le juge a constaté qu’aucun acte de procédure n’avait été effectué dans ce délai, entraînant le rejet de la demande.
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Mise en cause d’un tiers condamnéAu cours d’une émission, un médecin interrogé par une journaliste avait évoqué un procès contre un tiers condamné pour exercice illégal de la profession de pharmacien et escroquerie au préjudice de la CPAM. Le tiers cité à l’antenne a poursuivi France Télévisions pour atteinte à sa présomption d’innocence. Responsabilité de France TélévisionsLe groupe public audiovisuel a décliné toute responsabilité en invoquant le fait qu’il n’était pas responsable des propos tenus à l’antenne par les intervenants et qu’il n’avait pas dépassé les limites de sa liberté d’informer les téléspectateurs sur un sujet d’intérêt général de santé publique. Par ailleurs, la présentatrice s’était bornée à interviewer un tiers ayant émis des commentaires nuancés et avait bien fait comprendre que le jugement correctionnel n’était pas définitif. Prescription de l’action : des délais strictsTout le régime procédural de la loi du 29 juillet 1881 ne s’applique pas à l’action civile en réparation de l’atteinte au respect de la présomption d’innocence (article 9-1 du code civil). En revanche les règles relatives à la prescription de cette action demeurent soumises aux dispositions spéciales d’ordre public de l’article 65-1 de la loi de 1881 qui imposent, non seulement d’introduire l’instance dans les trois mois de l’acte de publicité, mais aussi de réitérer dans le même délai, un acte de procédure manifestant à l’adversaire son intention de la poursuivre. En l’occurrence, le juge a bien été saisi dans le délai de trois mois suivant la date de diffusion de l’émission télévisée mais aucun acte de procédure de nature à marquer l’intention de poursuivre l’action n’est intervenu dans les trois mois suivant l’assignation. A ce titre, ne constituent pas un acte de procédure manifestant l’intention de poursuivre : i) les avis d’inscription des assignations au rôle adressés par le greffe aux conseils ; ii) l’avis de jonction des deux procédures ; iii) les divers renvois de l’affaire à des audiences ultérieures ordonnés par le magistrat à la demande des défendeurs ou de l’ensemble des parties ; iv) l’ordonnance de renvoi à une autre audience ; v) les courriers officiels entre avocats. En conséquence, en l’absence d’acte interruptif de prescription dans le délai de trois mois, les juges ont fait droit à la fin de non-recevoir soulevée par la société France Télévisions. |
→ Questions / Réponses juridiques
Quel était le sujet de l’émission qui a conduit à la mise en cause d’un tiers ?L’émission en question a abordé un procès impliquant un tiers qui avait été condamné pour exercice illégal de la profession de pharmacien et escroquerie au préjudice de la CPAM (Caisse Primaire d’Assurance Maladie). Ce procès a été évoqué par un médecin lors de son interview par une journaliste. Le tiers, dont le nom n’est pas mentionné, a ensuite poursuivi France Télévisions pour atteinte à sa présomption d’innocence, arguant que les propos tenus à l’antenne nuisaient à son image et à son droit à un procès équitable. Comment France Télévisions a-t-il justifié son absence de responsabilité ?France Télévisions a décliné toute responsabilité en affirmant qu’il n’était pas responsable des propos tenus par les intervenants lors de l’émission. Le groupe a soutenu qu’il n’avait pas dépassé les limites de sa liberté d’informer, en considérant que le sujet abordé était d’intérêt général, notamment en matière de santé publique. De plus, la présentatrice de l’émission a précisé que le jugement correctionnel n’était pas définitif, ce qui a permis de nuancer les propos tenus et de rappeler que la présomption d’innocence devait être respectée. Quelles sont les règles de prescription concernant l’action en réparation de l’atteinte à la présomption d’innocence ?Les règles de prescription pour l’action en réparation de l’atteinte à la présomption d’innocence sont strictes et sont régies par l’article 65-1 de la loi du 29 juillet 1881. Cette loi impose que l’instance soit introduite dans un délai de trois mois à partir de l’acte de publicité, et qu’un acte de procédure manifestant l’intention de poursuivre soit également réitéré dans ce même délai. Dans le cas présent, bien que le juge ait été saisi dans les trois mois suivant la diffusion de l’émission, aucun acte de procédure n’a été effectué dans le délai requis, ce qui a conduit à la fin de non-recevoir soulevée par France Télévisions. Quels actes de procédure ne sont pas considérés comme manifestant l’intention de poursuivre ?Plusieurs actes de procédure n’ont pas été considérés comme manifestant l’intention de poursuivre l’action. Parmi ceux-ci, on trouve : i) les avis d’inscription des assignations au rôle adressés par le greffe aux conseils ; ii) l’avis de jonction des deux procédures ; iii) les renvois de l’affaire à des audiences ultérieures ordonnés par le magistrat ; iv) l’ordonnance de renvoi à une autre audience ; et v) les courriers officiels échangés entre avocats. Ces éléments n’ont pas été jugés suffisants pour interrompre le délai de prescription, ce qui a conduit à la décision des juges de faire droit à la demande de France Télévisions. |
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