Cour d’appel de Montpellier, 24 septembre 2024, RG n° 23/02592
Cour d’appel de Montpellier, 24 septembre 2024, RG n° 23/02592

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Montpellier

Résumé

La SAS Terroirs du Sud a fourni 150 hectolitres de vin rouge à la SAS MDO pour 72’000 euros, mais MDO n’a pas réglé la facture. Après une mise en demeure infructueuse, Terroirs du Sud a obtenu une ordonnance d’injonction de payer, à laquelle MDO a formé opposition. Suite à cette opposition, MDO a été placée en redressement judiciaire. Terroirs du Sud a déclaré sa créance, reconnue par le tribunal, mais d’autres demandes ont été rejetées. En appel, la cour a confirmé la créance et admis des frais accessoires, condamnant MDO à verser 3000 euros à Terroirs du Sud pour les frais d’avocat.

La SAS Terroirs du Sud a livré 150 hl de vin rouge à la SAS MDO, pour un montant de 72’000 euros, mais MDO n’a pas réglé la facture malgré l’émission de lettres de change. Après une mise en demeure infructueuse, Terroirs du Sud a obtenu une ordonnance d’injonction de payer, à laquelle MDO a formé opposition. MDO a ensuite été placée en redressement judiciaire, et Terroirs du Sud a déclaré sa créance. Un jugement a reconnu la dette de MDO de 72’000 euros, mais a rejeté d’autres demandes de Terroirs du Sud. Cette dernière a interjeté appel, demandant la réintégration de ses demandes rejetées, y compris des frais et des intérêts. MDO et les organes de la procédure collective n’ont pas comparu à l’appel. L’instruction a été clôturée en juin 2024.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

24 septembre 2024
Cour d’appel de Montpellier
RG n°
23/02592
ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

Chambre commerciale

ARRET DU 24 SEPTEMBRE 2024

Numéro d’inscription au répertoire général :

N° RG 23/02592 – N° Portalis DBVK-V-B7H-P2OP

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 12 JANVIER 2022

TRIBUNAL DE COMMERCE DE MONTPELLIER

N° RG 2020012953

APPELANTE :

S.A..S. TERROIRS DU SUD

[Adresse 7]

[Localité 3]

Représentée par Me Eric NAVARRO, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMES :

Maître [H] [T] ès-qualités de Mandataire judiciaire de la société SAS MDO selon jugement du Tribunal de commerce de Montpellier en date du 28 juin 2021

[Adresse 5]

[Localité 1]

(assigné le 18 juillet 2023 à personne)

S.A.S. SAS MDO

[Adresse 6]

[Localité 2]

(assignée le 19 juillet 2023selon procès-verbal de recherches infructueuses)

S.E.L.A.R.L. FHB Représentée par Me [K] [Y] ès-qualités d’Administrateur judiciaire de la société SAS MDO selon jugement du Tribunal de commerce de Montpellier en date du 28 juin 2021

[Adresse 4]

[Localité 1]

(assignée le 18 juillet 2023 à personne habilitée)

Ordonnance de clôture du 06 Juin 2024

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 27 Juin 2024,en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Jean-Luc PROUZAT, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Danielle DEMONT, présidente de chambre

Mme Anne-Claire BOURDON, conseillère

M. Jean-Luc PROUZAT, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

Greffier lors des débats : Mme Jacqueline SEBA

Ministère public :

L’affaire a été communiquée au ministère public.

ARRET :

– de défaut ;

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

– signé par Mme Danielle DEMONT, présidente de chambre, et par Mme Jacqueline SEBA, greffière.

FAITS et PROCEDURE – MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES:

La SAS Terroirs du Sud a livré à la SAS MDO, exerçant une activité de négoce de vins, spiritueux et produits régionaux, une quantité de 150 hl de vin rouge «’AOP Pic Saint Loup », millésime 2018, qui a fait l’objet d’une facture en date du 18 février 2020, d’un montant TTC de 72’000 euros’; en règlement de cette facture, la société MDO a émis diverses lettres de change (18 février 2020 et 6 mai 2020), qui ont été impayées à leurs échéances.

Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception en date du 21 juillet 2020, la société Terroirs du Sud a, en vain, mis la société MDO en demeure de lui régler cette somme et, après le dépôt d’une requête, a obtenu, le 18 septembre 2020, une ordonnance du président du tribunal de commerce de Montpellier faisant injonction à cette dernière de lui régler la somme de 72’000,00 euros en principal assortie des intérêts au taux contractuel à compter du 17 avril 2020, outre 543,60 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et 35,21 euros au titre des dépens liquidés.

La société MDO a formé opposition, le 3 novembre 2020, à cette ordonnance qui lui avait été signifiée le 13 octobre 2020.

En cours d’instance devant le tribunal de commerce, la société MDO a fait l’objet, par un jugement du même tribunal en date du 28 juin 2021 publié le 4 juillet suivant au Bodacc, d’une procédure de redressement judiciaire, ce qui a conduit la société Terroirs du Sud à déclarer sa créance entre les mains de M. [T], désigné en qualité de mandataire judiciaire, à concurrence de la somme de 83’493,83 euros se décomposant comme suit’:

-72’000euros, montant de la facture n° 13’795 du 18 février 2020,

-543,60 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

-35,21 euros au titre des dépens,

-827,55 euros au titre des intérêts contractuels à compter du 17 avril 2020 jusqu’au 27 juin 2021 (à parfaire),

-87,47 euros au titre des frais de signification,

-10’000,00 euros au titre des frais pour faire constater la carence de la société MDO.

Après que les organes de la procédure collective, la Selarl FHB, administrateur judiciaire, et M. [T], mandataire judiciaire, eurent été mis en cause devant le tribunal par exploit du 18 octobre 2021, ce dernier a, par jugement du 12 janvier 2022 :

-joint l’affaire n° 2021013130 avec l’affaire principale enrôlée sous le RG n° 2020012953,

-donné acte de la reconnaissance par la société MDO de sa dette envers la société Terroirs du Sud de 72’000 euros assortie des intérêts au taux contractuel jusqu’au 27 juin 2021,

-admis la créance de la société terroirs du Sud à l’encontre de la société MDO pour la somme de 72’000 euros en principal assorti des intérêts au taux contractuel jusqu’au 27 juin 2021,

-rejeté les autres demandes de la société Terroirs du sud,

-jugé n’y avoir lieu à recourir aux dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

-condamné la société Terroirs du Sud aux entiers dépens, dont frais de greffe liquidés et taxés à la somme de 163,07 euros toutes taxes comprises.

Par déclaration reçue le 16 mai 2023 au greffe de la cour, la société Terroirs du Sud a régulièrement relevé un appel de ce jugement, limité au rejet du surplus de ses demandes (article 700 du code de procédure civile pour 543,60 euros, dépens pour 37,21 euros, frais de signification par ministère d’huissier de justice pour 87,47 euros, intérêts contractuels courus du 27 juin 2021 jusqu’au complet paiement pour mémoire, frais pour faire constater la carence de la société MDO pour 10’000 euros).

Elle demande à la cour, dans ses conclusions déposées le 14 août 2023 via le RPVA, de :

Vu les articles 1103 et 1343-2 du code civil,

Vu les articles L. 622-21, L. 622-28 et R. 622-23 du code de commerce,

(‘)

-infirmer le jugement du tribunal de commerce de Montpellier en date du 12 janvier 2022 en ce qu’il a rejeté ses autres demandes,

-infirmer le même jugement en ce qu’il a jugé n’y avoir lieu à recourir aux dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

-infirmer de même le jugement en ce qu’il l’a condamnée aux entiers dépens, dont frais de greffes liquidés et taxés à la somme de 163,07 euros toutes taxes comprises,

Et, ce faisant, statuant à nouveau :

-admettre le surplus de la créance, au-delà du principal de 72’000 euros assorti des intérêts au taux contractuel jusqu’au 27 juin 2021, savoir :

‘ article 700 du code de procédure civile pour 543,60 euros,

‘ dépens pour 35,21 euros,

‘ frais de signification par ministère d’huissier de justice pour 87,47 euros,

‘ intérêts contractuels courus du 27 juin 2021 jusqu’au complet paiement de la créance dont s’agit pour mémoire,

‘ frais pour faire constater la carence de la société MDO pour 10’000 euros,

-fixer ceux faisant sa créance au passif de la procédure collective de la société MDO pour un montant de 83’493,83 euros savoir, comme suit :

‘ 72’000 euros au titre du principal,

‘ 1493,83 euros au titre des accessoires,

‘ 10’000 euros au titre des frais pour faire constater la créance,

‘ à parfaire des intérêts au taux contractuel dus selon les modalités de calcul telles que précisées à la déclaration de créance jusqu’au complet paiement de la créance,

-rejeter tous moyens et autres demandes contraires,

-condamner solidairement la société MDO, son administrateur judiciaire, la société FHB ès qualités, et son mandataire judiciaire, M. [T] ès qualités, au paiement de la somme de 3000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.

Au soutien de son appel, elle fait valoir pour l’essentiel que la société MDO lui est redevable des frais de signification de l’ordonnance d’injonction de payer, des dépens taxés et des frais non taxables exposés au stade du dépôt de la requête en injonction de payer, que la règle de l’arrêt du cours des intérêts édictée à l’article L. 622-28 du code de commerce ne lui interdit pas de réclamer les pénalités de retard dont les modalités de calcul (taux d’intérêt appliqué par la BCE à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage) sont prévues à la facture et courent donc au-delà du 28 juin 2021 jusqu’au complet paiement de la créance et qu’elle a dû engager des frais et honoraires d’avocat devant le tribunal de commerce, à la suite de l’opposition formée par la société MDO, pour faire constater la carence de celle-ci.

La société MDO n’a pas comparu, la signification de la déclaration d’appel ayant fait l’objet d’un procès-verbal de recherches établi le 19 juillet 2023 selon les modalités de l’article 659 du code de procédure civile.

La Selarl FBB et M. [T] ès qualités n’ont pas, non plus, constitué avocat bien que la déclaration d’appel leur ait été signifiée par exploits délivrés le 18 juillet 2023 à personne (M. [T]) et à une personne s’étant déclarée habilitée à recevoir la copie de l’acte pour le compte de la personne morale (Selarl FHB).

Il est renvoyé, pour l’exposé complet des moyens et prétentions de l’appelante, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

C’est en l’état que l’instruction a été clôturée par une ordonnance du magistrat de la mise en état en date du 6 juin 2024.

MOTIFS de la DECISION’:

Le jugement entrepris n’est pas critiqué en ce qu’il a fixé à la somme de 72’000 euros assortie des intérêts contractuels jusqu’au 27 juin 2021, conformément aux dispositions de l’article L. 622-22 du code de commerce applicable au redressement judiciaire, la créance de la société Terroirs du Sud au passif de la société MDO, correspondant au montant de la facture éditée le 18 février 2020.

La facture, qui prévoit comme date d’échéance celle du 17 avril 2020, énonce qu’à défaut de paiement à l’échéance, le taux des pénalités de retard est égal au taux d’intérêt appliqué par la Banque centrale européenne (BCE) à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage ; ces pénalités de retard, qualifiées d’intérêts contractuels par le tribunal dans son jugement du 12 janvier 2022, découlent de l’application du II de l’article L. 441-10 du code de commerce et sont exigibles de plein droit.

Or, aux termes de l’article L. 622-28 du code de commerce : « Le jugement d’ouverture arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels, ainsi que tous intérêts de retard et majorations, à moins qu’il ne s’agisse des intérêts résultant de contrats de prêt conclus pour une durée égale ou supérieure à un an ou de contrats assortis d’un paiement différé d’un an ou plus (‘) » ; la pénalité de retard prévue par l’article L. 441-10, II, du code de commerce, qui constitue un intérêt moratoire, est donc soumise à la règle de l’arrêt du cours des intérêts édictée par l’article L. 622-28, ce dont il résulte que les pénalités de retard exigibles sur la somme de 72’000,00 euros, montant de la facture, ne courent que sur la période du 17 avril 2020, date d’échéance de la facture, jusqu’au 27 juin 2021, le jugement d’ouverture du redressement judiciaire de la société MDO étant intervenu le 28 juin 2021 ; c’est donc à tort que la société Terroirs du Sud sollicite la fixation d’une créance d’intérêts contractuels du 27 juin 2021 jusqu’à complet paiement de sa créance.

En revanche, la société Terroirs du Sud a dû exposer des frais et honoraires d’avocat en vue du dépôt de la requête en injonction de payer pour 543,60 euros (correspondant à la note de frais et honoraires de Me Navarro, avocat, en date du 20 août 2020), des frais de greffe pour 35,21 euros (montant de l’état de frais édité par le greffe du tribunal de commerce de Montpellier le 18 septembre 2020) et des frais de signification de l’ordonnance d’injonction de payer pour 87,47 euros (coût de l’acte de la SAS Exadex, huissiers de justice, en date du 13 octobre 2020)’; elle peut dès lors prétendre obtenir la fixation d’une créance de 666,28 euros au titre des accessoires.

La société Terroirs du Sud demande enfin la fixation d’une créance de 10’000euros au titre des frais pour faire constater la carence de la société MDO (sic) et correspondant aux frais et honoraires de son avocat, exposés devant le tribunal de commerce appelé à statuer sur la constatation de la créance et la fixation de son montant ; les frais et honoraires ainsi exposés entrent toutefois dans les prévisions de l’article 700 du code de procédure civile.

À cet égard, le tribunal a, au motif erroné que la société Terroirs du Sud succombait (sic), mis à sa charge les dépens, dont les frais de greffe liquidés et taxés à la somme de 163,07 euros TTC’; ce chef du jugement doit être réformé et les dépens d’instance mise à la charge de la société MDO, partie perdante au sens de l’article 696 du code de procédure civile.

Au regard de la solution apportée au règlement du litige en cause d’appel, les dépens y afférents doivent également être supportés par la société MDO.

Il convient enfin de faire application, au profit de la société Terroirs du Sud, contrainte d’exposer des frais non taxables pour faire constater sa créance et en fixer le montant, des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile à hauteur de la somme de 3000 euros.

PAR CES MOTIFS’:

La cour,

Infirme le jugement déféré en ce qu’il a rejeté la demande de la société Terroirs du Sud au titre des accessoires de sa créance et la condamne aux dépens, dont les frais de greffe liquidés et taxés à la somme de 163,07 euros TTC,

Statuant à nouveau de ces chefs,

Fixe la créance de la société Terroirs du Sud au passif de la procédure de redressement judiciaire ouverte à l’égard de la société MDO à la somme de

666,28 euros au titre des accessoires,

Condamne la société MDO aux dépens, dont les frais de greffes liquidés et taxés à la somme de 163,07 euros TTC,

Confirme le jugement entrepris dans le surplus de ses dispositions,

Condamne la société MDO aux dépens d’appel,

La condamne à payer à la société terroirs du Sud la somme de 3000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Le greffier Le président


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