Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Montpellier
→ RésuméMme [X] [H] a engagé M. [D] [B] en 1998 pour son domaine viticole. Après plusieurs évolutions de contrat, des tensions sont apparues lorsque l’épouse de M. [B] a créé une entreprise sur le domaine. En mars 2015, M. [B] a été licencié pour des manquements professionnels. Contestant ce licenciement, il a saisi le conseil de prud’hommes, qui a jugé en sa faveur. Après le décès de Mme [H], ses héritiers ont contesté cette décision. La Cour d’Appel a finalement confirmé la légitimité du licenciement tout en reconnaissant certaines créances de M. [B], soulignant la complexité de l’affaire.
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Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D’APPEL DE MONTPELLIER
2e chambre sociale
ARRET DU 18 JANVIER 2024
Numéro d’inscription au répertoire général :
N° RG 17/00709 – N° Portalis DBVK-V-B7B-NF6H
ARRÊT n°
Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 MAI 2017
CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER – N° RG F 15/00738
APPELANT :
Monsieur [D] [L] [B]
né le 27 décembre 1969 à [Localité 6] (44)
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représenté par Me Emmanuelle CARRETERO de la SCP SOLLIER / CARRETERO, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMES :
Madame [X] [J], veuve [H]
(décédée le 3 juin 2020 )
Représentée par Me Céline LUGAGNE DELPON, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMES EN INTERVENTION FORCEE
en qualité d’héritier de Madame [X] [J] veuve [H] :
Madame [Z] [P] [S] [H] épouse [E]
née le 05 Avril 1958 à [Localité 7] (34)
de nationalité française
[Adresse 8]
[Adresse 2]
Représentée par Me Céline LUGAGNE DELPON, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant
Assistée par Me Yves VIVIEZ DE CHATTELARD, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant
Monsieur [R] [H]
Né le 09 Mars 1950 à [Localité 7] (34)
de nationalité française
[Adresse 4]
[Localité 7]
Représenté par Me Céline LUGAGNE DELPON, avocat au barreau de MONTPELLIER
Ordonnance de clôture du 31 Octobre 2023
COMPOSITION DE LA COUR :
En application de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 21 NOVEMBRE 2023, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l’article 804 du même code, devant la cour composée de :
Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre
Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller
Madame Magali VENET, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Marie-Lydia VIGINIER
ARRET :
– contradictoire ;
– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
– signé par Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre, et par Madame Marie-Lydia VIGINIER, Greffier.
*
* *
EXPOSE DU LITIGE :
Mme [X] [J] épouse [H] était de son vivant propriétaire du domaine de [Adresse 8] situé sur la commune de [Localité 5], constitué de 35 hectares de terres plantées de vignes et de bâtiments d’exploitation et de vinification.
M. [D] [B], a été engagé par Mme [X] [H] le 1er juillet 1998 en qualité d’ouvrier agricole tractoriste, selon contrat à durée déterminée de six mois renouvelé une fois jusqu’au 31 décembre 1999, puis par contrat à durée indéterminée verbal à compter du 1er janvier 2000.
La convention collective applicable est celle des exploitants agricoles de l’Hérault.
Par convention de mise à disposition gratuite du 20 mars 2000, Mme [X] [H] a mis à la disposition de Monsieur [D] [B] et de son épouse Mme [N] [B] une maison sur le terrain de [Adresse 8].
Au cours de l’année 2008 , Mme [N] [B] a créé une entreprise de négoce de bois dénommée Eco Bois 34 et a été autorisée à occuper un terrain sur le domaine afin d’y stocker du bois et du matériel pour le compte de l’entreprise.
Suite au décès de l’époux de Mme [X] [H] intervenu au cours de l’année 2009, sa fille Mme [Z] [H] et son mari M. [E] ont secondé Mme [H] dans la gestion du domaine.
Par contrat de travail a durée indéterminée du 23 décembre 2013, la durée du travail de M. [B] a été fixée à 24 heures par semaine, soit 104 heures par mois , avec pour horaire habituel du mercredi au vendredi : 8h -12h ; 13h30-17h30 ; horaire d’été , du mercredi au vendredi : 6h-12h; 15h17h ; en contrepartie d’un salaire mensuel brut de 1903 euros et une qualification d’ouvrier agricole tractoriste niveau III échelon 2 coefficient 155 de la convention collective applicable.
Le 09 mars 2015 M. [D] [B] a été reconnu travailleur handicapé à compter du 1er septembre 2014 et classé par la Mutualité Sociale Agricole en invalidité 2ème catégorie à compter du 1er avril 2015.
Le 20 mars 2015, M. [D] [B] a été convoqué à un entretien préalable à un licenciement.
Par lettre du 15 avril 2015, M. [B] a été licencié pour cause réelle et sérieuse.
Le 20 mai 2015, M. [B] a saisi le conseil de prud’hommes de Montpellier afin de contester son licenciement et voir condamner l’employeur au paiement de diverses sommes.
Par jugement du 04 mai 2017 le conseil de prud’hommes a :
– dit que le licenciement de M. [D] [B] est sans cause réelle et sérieuse,
– condamné Mme [X] [H] à payer à M. [D] [B] les sommes suivantes :
– 46800 € brut à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
– 5780,07€ à titre de rappel de salaires
– 13936 € au titre d’indemnité pour travail dissimulé
– 1037,40€ au titre de prime de paniers
– débouté M. [D] [B] de ses autres demandes comme infondées,
– ordonné la remise des documents sociaux, bulletins de salaire rectifiés et régularisation auprès des organismes sociaux sous astreinte de 10€ par jour de retard à compter du 30éme jour de la notification et par document,
– condamné Mme [X] [H] à payer à M. [D] [B] la somme de 1000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
Par déclaration en date du 01 juin 2017, M. [D] [B] a relevé appel de la décision en ce que le conseil de prud’hommes l’a débouté de sa demande en réparation de son préjudice moral, de sa demande en requalification statut cadre, de sa demande au titre de l’avantage en nature que constituait le logement, de sa demande au titre de la perte de ses droits à pension et de sa demande au titre de la perte de ses droits à la retraite.
Mme [X] [J] épouse [H] est décédé le 3 juin 2020.
M. [R] [H] et Mme [Z] [H], héritiers de Mme [X] [J] ont été assignés en intervention forcée le 3 mai 2021.
**************
Dans ses dernières conclusions en date du 10 juin 2021 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé de ses moyens et prétentions, M. [D] [B] demande à la cour de :
– réformer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes le 04 mai 2017 en ce qu’il a débouté M. [B] de sa demande en réparation de son préjudice moral, de sa demande tendant à se voir reconnaître le statut de cadre, de sa demande au titre de l’avantage en nature que constituait le logement, de sa demande au titre de la perte de ses droits à pension et de sa demande au titre de la perte de ses droits à retraite ;
– Condamner Mme [H] à payer la somme de 30000 euros en réparation du préjudice moral compte tenu des conditions entourant la rupture du contrat de travai ;
– Dire et juger que M. [B] revendique à bon droit le statut de cadre ;
– Condamner Mme [H] à rectifier sous astreinte de 50€ par jour le certificat de travail, l’attestation pôle emploi ainsi que l’ensemble des documents sociaux ;
– Condamner Mme [H] à régulariser sous astreinte de 50€ par jour passé 30 jours après la notification du jugement à intervenir la situation de M. [B] auprès de l’ARRCO et de l’AGIRC à compter du 1er janvier 2010 ;
– Condamner Mme [H] à payer la somme de 25000 euros de dommages et intérêts du fait de la non affiliation de M. [B] à un régime de retraite complémentaire du fait de son statut de cadre du 1er juillet 1998 au 31 décembre 2009.
Vu l’article 1147 du code civil,
– La condamner à payer la somme de 149 217,14€ à titre de dommages et intérêts pour la perte du droit à pension ;
– La condamner à payer la somme de 192000 € pour la perte des droits à la retraite ;
– La condamner à payer la somme de 50000€ en réparation du préjudice subi du fait du non paiement des paniers et de l’absence d’intégration du logement au salaire comme avantage en nature ;
– La condamner à payer la somme de 8000€ au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
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Dans ses dernières conclusions en date du 23 août 2021 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé de ses moyens et prétentions, Mme [Z] [H] épouse [E] demande à la cour de :
– Dire et juger que le licenciement est bien fondé sur une cause réelle et sérieuse,
– Dire et juger que la demande de rappel de salaire de 5.780,07 € est prescrite et en tout état de cause infondée,
– Concernant le travail dissimulé, à titre principal, dire et juger que les conditions du salaire dissimulé ne sont pas réunies et subsidiairement ramener cette indemnité à la somme de 11.418 €,
– Dire et juger que la demande de dommages et intérêts confondus pour prime de panier et indemnité au titre du logement de fonction est irrecevable,
– Subsidiairement dire et juger que la prime de panier n’est pas due,
– A titre plus subsidiaire encore qu’elle est pour partie prescrite et ne saurait être supérieure à la somme de 826,32 €,
En conséquence,
-Infirmer le jugement en ce qu’il l’a condamnée à verser à [D] [B] la somme 45.800,00 € bruts à titre de dommages et intérêts en réparation du licenciement,
-Infirmer le jugement en ce qu’il l’a condamnée à verser à [D] [B] la somme 5.780,07 € bruts à titre de rappel de salaire et condamner [D] [B] à lui restituer cette somme,
-Infirmer le jugement en ce qu’il l’a condamné Madame [H] à verser à [D] [B] la somme 13.936 € bruts à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé,
-Infirmer le jugement en ce qu’il a condamné Madame [H] à verser à [D] [B] la somme de 1.037,41 € au titre de la prime de paniers,
– Dire et juger que les fonctions exécutées par [D] [B] ne relèvent pas du statut cadre,
– Dire et juger que [D] [B] ne justifie pas d’un préjudice moral,
En conséquence,
– Confirmer le jugement en ce qu’il a débouté [D] [B] de sa demande de requalification de son statut au statut de cadre,
– Confirmer le jugement en ce qu’il a débouté [D] [B] de ses demandes de condamnation de Madame [H] aux sommes de :
– 30 000 € en réparation du préjudice moral compte tenu des conditions entourant la rupture du contrat de travail,
– Rectification sous astreinte de 50 € par jour le certificat de travail, l’attestation POLE EMPLOI ainsi que l’ensemble des documents sociaux,
– Régularisation sous astreinte de 50 € par jour passé 30 jours après la notification du jugement à intervenir la situation de [D] [B] auprès de l’ARRCO et de l’AGIRC à compter du 1 er janvier 2010,
– 25 000 € à titre de dommages et intérêts du fait de la non affiliation de [D] [B] à un régime de retraite complémentaire du fait de son statut de cadre du 1 er juillet 1998 au 31 décembre 2009,
– 149.217,14 € à titre de dommages et intérêts pour la perte du droit à pension,
– 192.000 € à titre de dommages et intérêts pour la perte des droits à la retraite,
– Le condamner à payer la somme de 8.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
– Le condamner au paiement des entiers dépens de l’instance.
En tout état de cause,
-Débouter Monsieur [R] [H] de son appel incident tendant à se voir garantir de toute éventuelle condamnation par la concluante.
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Dans ses dernières conclusions en date du 10 juin 2021 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé de ses moyens et prétentions, M. [R] [H] demande à la cour de :
– Dire et juger que le licenciement est bien fondé sur une cause réelle et sérieuse,
– Dire et juger que la demande de rappel de salaire de 5.780,07 € est prescrite et en tout état de cause infondée,
– Concernant le travail dissimulé, à titre principal, dire et juger que les conditions du salaire dissimulé ne sont pas réunies et subsidiairement ramener cette indemnité à la somme de 11.418 €.
– Dire et juger que la demande de dommages et intérêts confondus pour prime de panier et indemnité au titre du logement de fonction est irrecevable,
– Subsidiairement dire et juger que la prime de panier n’est pas due,
– A titre plus subsidiaire encore qu’elle est pour partie prescrite et ne saurait être supérieure à la somme de 826,32 €,
En conséquence,
– Infirmer le jugement en ce qu’il l’a condamnée à verser à Monsieur [D] [B] la somme 45.800,00 € bruts à titre de dommages et intérêts en réparation du licenciement,
– Infirmer le jugement en ce qu’il l’a condamnée à verser à Monsieur [D] [B] la somme 5.780,07 € bruts à titre de rappel de salaire et condamner Monsieur [D] [B] à restituer cette somme aux héritiers,
– Infirmer le jugement en ce qu’il l’a condamné Madame [X] [H] à verser à Monsieur [D] [B] la somme 13.936 € bruts à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé,
– Infirmer le jugement en ce qu’il a condamné Madame [X] [H] à verser à Monsieur [D] [B] la somme de 1.037,41 € au titre de la prime de paniers,
– Dire et juger que les fonctions exécutées par Monsieur [D] [B] ne relèvent pas du statut cadre,
– Dire et juger que Monsieur [D] [B] ne justifie pas d’un préjudice moral,
En conséquence,
– Confirmer le jugement en ce qu’il a débouté Monsieur [D] [B] de sa demande de requalification de son statut au statut de cadre,
– Confirmer le jugement en ce qu’il a débouté Monsieur [D] [B] de ses demandes de condamnation de Madame [X] [H] aux sommes de :
– 30 000 € en réparation du préjudice moral compte tenu des conditions entourant la rupture du contrat de travail,
– Rectification sous astreinte de 50 € par jour le certificat de travail, l’attestation POLE EMPLOI ainsi que l’ensemble des documents sociaux,
– Régularisation sous astreinte de 50 € par jour passé 30 jours après la notification du jugement à intervenir la situation de Monsieur [D] [B] auprès de l’ARRCO et de l’AGIRC à compter du 1er janvier 2010,
– 25 000 € à titre de dommages et intérêts du fait de la non affiliation de Monsieur [D] [B] à un régime de retraite complémentaire du fait de son statut de cadre du 1er juillet 1998 au 31 décembre 2009,
– 149.217,14 € à titre de dommages et intérêts pour la perte du droit à pension,
– 192.000 € à titre de dommages et intérêts pour la perte des droits à la retraite,
A titre subsidiaire,
– Condamner Madame [Z] [H] à garantir Monsieur [R] [H] en cas de condamnation sur sa part,
– Condamner Monsieur [D] [B] à payer la somme Monsieur [R] [H] de 6.500 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
– Le condamner au paiement des entiers dépens de l’instance.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Il convient préalablement de rappeler qu’aux termes de l’article 954 du code de procédure civile, les prétentions sont récapitulées sous forme de dispositif et la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif.
Il en découle que nonobstant les moyens et, le cas échéant, les demandes ou fins de non recevoir formulées dans le corps des conclusions de chacune des parties, la cour n’est saisie que des demandes figurant dans le dispositif des conclusions et pas de celles qui n’auraient pas été reprises dans ce dispositif.
Sur l’exécution du contrat de travail :
Sur la classification :
Lorsqu’il existe une contestation sur la classification professionnelle qui doit être attribuée à un salarié, il y a lieu de rechercher la nature de l’emploi effectivement occupé par le salarié et la qualification qu’il requiert.
Le salarié qui revendique l’application d’un niveau de classification supérieure doit établir qu’il exerce effectivement les fonctions correspondant à cette dernière qualification.
En l’espèce, le contrat de travail de M. [D] [B] stipule qu’il exerçait les fonctions d’ouvrier agricole tractoriste niveau III échelon 2 coefficient 155 de la convention collective des exploitations agricoles de l’Hérault.
La fonction d’ouvrier qualifié niveau III échelon 1-coefficient 150 est ainsi définie :
‘Type d’activité-Niveau de compétence :
– Capable d’exécuter sur l’exploitation tous les travaux manuels et mécanisés courants.
– Capable de déceler les anomalies dans le fonctionnement du matériel, d’exécuter les dépannages élémentaires, de constater les incidents de culture et d’en informer son supérieur.
– peut être assisté par d’autres salariés qui l’aident dans l’accomplissement de sa tâche.
Niveau de formation:
Emploi correspondant au référentiel B.E.P.A. ou CQP ouvrier qualifié de l’exploitation viticole
Autonomie :
Peut être amené à prendre des initiatives dans son travail en application d’instructions générales.
Responsabilité :
Apte à guider une équipe
Exemple de travaux :
– Conduite du tracteur pour tous les travaux mécanisés, réglage des outils, traitement avec remplissage, entretien courant du tracteur et des matériels automoteurs,
– Conduite pour déplacement, entretien et nettoyage du matériel de récoltes mécanisés en grandes cultures, semences, vigne, arboriculture, maraîchage, etc…
– Conduite des prétailleuses, écimeuses, épandeurs d’engrais, broyeur de sarments, conduite de l’élévateur pour toutes les manipulations etc…
-Fertilisation et irrigation……
Et la fonction d’ouvrier qualifié niveau III échelon II coefficient 155 est ainsi définie :
Type d’activité :
La même qu’à l’échelon 1 mais avec une meilleure technicité et une plus grande polyvalence.
Niveau de formation :
Emploi correspondant au référentiel du BEPA
Autonomie :
Capable de raisonner son travail, et de l’adapter en fonction des circonstances sans avoir besoin d’une surveillance dans l’exécution de son travail.
Responsabilité :
Capable d’optimiser le travail par une bonne efficacité dans les opérations à réaliser.
Capable de déceler une anomalie dans le fonctionement du matériel qu’il conduit et de prendre les mesures qui conviennent.
Exemple de travaux :
La même qu’à l’échelon avec en plus la conduite des matériels spécialisés, exemple : tractopelle, épareuse, etc…
Maintenance du matériel,
Traitements phytosanitaires avec préparation du produit dans le strict respect des consignes de son supérieur hiérarchique.’
M. [B] revendique la classification catégorie IV- Chef de culture telle que définie à l’avenant n° 6 modifié à la convention collective viticole du 28 février 1952 pour les exploitations viticoles de l’Hérault concernant les conditions de travail des cadres de ces exploitations :
‘ Catégorie IV- Chef de culture
C’est le cadre dont l’initiative et la responsabilité sont limités à la répartition et à la bonne exécution des travaux, sous les ordres directs de l’employeur qui pourra éventuellement lui confier la distribution de la paye du personnel…..
Ils sont chargés de répartir habituellement le travail, d’en surveiller sous leur responsabilité la bonne exécution conformément à des ordres directs et précis de l’employeur….
A l’appui de sa demande, M. [B] verse aux débats une attestation dactylographiée, signée ‘[W]-[H]’ ainsi rédigée :
‘Je soussignée Madame [H] [J] – Exploitante Agricole au Domaine de [Adresse 8] à [Localité 5]- atteste par la présente que :
M. [D] [B] – Chef de Culture du Domaine- habite avec sa famille sur le Domaine où il jouit d’un logement de fonction. Fait à [Adresse 8] le mardi 17 juin 2008″.
Ce document, daté d’une période pendant laquelle Mme [W] [H] était hospitalisée en raison d’une lourde pathologie , n’établit pas à lui seul que le salarié exerçait effectivement les fonctions correspondant à la qualification de chef de culture qu’il revendique.
Par ailleurs, M. [B] ne prétend pas dans ses écritures avoir exercé des missions d’encadrement et ne produit aucune pièce en ce sens. Il ressort au contraire des rapports d’activité qu’il a lui même établis et adressés à Mme [Z] [H] sur la période de novembre 2014 à janvier 2015 que le travail effectué correspondait à sa classification d’ouvrier agricole (tailler, ramasser les sarments, enterrer l’engrais, changer les piquets, arracher les souches….)
Un autre salarié de Mme [H], M. [U] [A] mentionne également que ses instructions pour le travail lui était donné par la fille de Mme [H] et les échanges de mails avec les fournisseurs versés à la procédure établissent que M. [B] ne prenait pas de responsabilités ni d’initiatives et suivait uniquement les directives qui lui étaient données par son employeur.
Il en découle que M. [B] ne relevait pas du statut de chef de culture et c’est à juste titre que le conseil de prud’hommes l’a débouté de la demande formée à ce titre ainsi que des demandes subséquentes de régularisation auprès des organismes ARCCO et AGIRC ainsi que de sa demande de dommages et intérêts à hauteur de 25000 euros, la décision sera confirmée en ce sens.
Sur le travail dissimulé :
En application des articles L.8221-3 et L.8221-5 du code du travail, le fait pour l’employeur de se soustraire intentionnellement aux déclarations qui doivent être effectuées aux organismes de sécurité sociale ou à l’administration fiscale, est réputé travail dissimulé, ainsi que le fait de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement des formalités de délivrance d’un bulletin de paie ou de déclaration préalable à l’embauche. De même est réputé travail dissimulé le fait de mentionner sur le bulletin de paie un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement effectué.
L’ article L.8223-1 prévoit en cas de rupture du contrat de travail, l’octroi au salarié en cas de travail dissimulé, d’une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.
La dissimulation n’est caractérisée que s’il est établi que l’employeur a de manière intentionnelle, mentionné sur le bulletin de paie un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement effectué.
En l’espèce, le 27 février 2015, Mme [H] a adressé à M. [B] un courrier rédigé en ces termes:
‘Mes enfants ont attiré mon attention sur le fait que les modalités de versement d’une partie de votre salaire mises en place par mon mari avant son décès et qui a perduré après lui jusqu’en 2012 n’étaient pas conformes aux règles ce que j’ignorais. Le cabinet d’expert-comptable Bonniol a donc procédé à la déclaration rectificative auprès des organismes sociaux. Vous trouverez ci-joint les bulletins rectifiés pour la période de 2010 à 2012.’
Il apparaît également , au vu des relevés bancaires produits aux débats, que le salaire de M. [B] lui était régulièrement versé par deux virements distincts dont l’un correspondait au montant figurant sur son bulletin de paie et déclaré aux organismes sociaux, et l’autre à une somme complémentaire non déclarée, de sorte que la dissimulation est caractérisée .
Dès lors, c’est à bon droit que le premier juge a condamné , en son principe, l’employeur au paiement d’une indemnité forfaitaire égale à 6 mois de salaire. Cependant, le conseil de prud’hommes a condamné l’employeur au paiement de la somme de 13 936 euros sur fondant sur la base d’un salaire erroné soit l’ancienne rémunération nette de 2322 euros, alors que depuis le 23 décembre 2013 le salaire de M. [B] avait été fixé à 1903,72
euros, la décision sera en conséquence infirmée en son quantum et l’indemnité forfaitaire sera fixée à la somme de 11422,32 euros.
Sur la demande de rappel de salaire :
L’article L3245-1 du code du travail dispose :
‘L’action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
La demande peut porter sur les sommes dues au titre des droits dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.’
En l’espèce, l’acte de saisine est du 20 mai 2015 et le contrat de travail a été rompu le 15 avril 2015, de sorte que la demande de M. [B] n’était pas prescrite pour les sommes dues à compter du 15 avril 2012.
Il ressort des éléments précédemment développés qu’une partie du salaire versé mensuellement à M. [B] pendant la période non prescrite ne figurait pas sur les bulletins de paie et que ceux-ci ont été réétablis pour y intégrer les charges dues aux organismes sociaux en se fondant sur la totalité du salaire perçu par le salarié.
Cependant, l’analyse des relevés bancaires produits aux débats à compter du mois d’avril 2012 et jusqu’au 31 mai 2013 laisse apparaître que sur cette période, la totalité du salaire dû à M. [B] et figurant sur les bulletins de paie rectifiés lui était bien versé chaque mois par deux virements bancaires distincts, l’un sur le compte de [D] [B] au Crédit Agricole et l’autre sur le compte de [D] [B] à la Banque populaire.
M. [B] sollicite en outre des rappels de salaire d’un montant total de 37,31€ au titre des mois de juillet, août, septembre et octobre 2013 et produit au débats des bulletins de paie ainsi que les relevés bancaires laissant apparaître le différentiel revendiqué sans que l’employeur ne justifie avoir réglé la totalité du salaire dû.
Il convient en conséquence de faire droit en son principe à la demande de rappel de salaire, mais de l’infirmer en son montant
initialement fixé à 5780,07 euros, pour le fixer à la somme de 37,31 euros.
Sur la pension d’invalidité :
M. [B] sollicite la somme de 149 217,14€ au titre de la perte de ses droits à la pension d’invalidité consécutive à l’absence de déclaration d’une partie de son salaire. Il précise que sa situation n’a pas été régularisée pour la période antérieure à l’année 2010 alors que la pension d’invalidité 1ère catégorie est égale à 30% du salaire brut des 10 meilleurs années et que la pension d’invalidité 2ème catégories est égales à 50% du salaire brut des 10 meilleurs années.
Il convient préalablement de relever que le salarié ne conteste pas les conditions d’octroi de calcul et de versement des rentes invalidités, régies par les dispositions des articles L341-4 du code de la sécurité sociale dont la contestation relève de la compétence du pôle social du tribunal judiciaire, mais qu’il sollicite l’indemnisation du préjudice né de la faute commise par l’employeur dans le cadre de l’exécution du contrat de travail, soit l’omission de déclaration de la totalité des salaires perçus, qui relève de la compétence de la chambre sociale statuant en matière prud’homale.
M. [B] soutient avoir bénéficié d’une pension d’invalidité 1ère catégorie à compter du 1er janvier 2014 puis d’une pension d’invalidité 2ème catégorie à compter du 1er juin 2015.
Concernant la perception de la pension 1ère catégorie à compter de janvier 2014, l’analyse de ses relevés bancaires laisse apparaître qu’il a perçu en décembre 2014 et en février 2015 la somme de 484,49 euros de pension invalidité versée par la MSA.
Concernant la pension de catégorie 2, il produit une attestation du directeur de la MSA du 22 octobre 2015 mentionnant qu’il est titulaire d’une pension d’invalidité depuis le 01/04/2015 classé en catégorie 2.
Il produit en outre des bulletins de paie dont ceux relatifs à la période 2008 et 2009, accompagnés du récapitulatif manuscrit des heures de travail effectivement réalisées par le salarié et de la rémunération qui lui était effectivement due, auxquels l’employeur n’objecte aucun élément contraire, établissant ainsi que sur cette période seule une partie des heures de travail effectuées et du salaire versé étaient déclarées.
Il verse également aux débats la notification de décision de la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé pour la période du 01 septembre 2014 au 31 août 2019, ainsi qu’un courrier de la MSA du 28 juillet 2017 mentionnant ‘notre caisse a la possibilité de revenir sur les cotisations non appréciées pour les périodes énoncée de 1998 à 2010 à condition qu’il y ait un jugement ordonnant la régularisation des bulletins de salaires. Cela impacterait effectivement vos droits invalidité et retraite.’
Ces éléments établissent que M. [B] a subi un préjudice consécutif à la minoration des salaires pris en compte pour le calcul des droits à pension invalidité qu’il convient d’indemniser en lui allouant la somme de 15 000 euros.
Sur la pension retraite :
M. [D] [B] sollicite le versement de dommages et intérêts d’un montant de 192000 euros en réparation du préjudice né de l’absence de déclaration d’une partie de son salaire effectivement versé depuis son embauche.
La demande de dommages et intérêts qui s’analyse en une demande indemnitaire consécutive au préjudice né de la faute commise par l’employeur dans le cadre de l’exécution du contrat de travail n’est pas prescrite.
Les pièces produites par le salarié laissent apparaître qu’au moins au titre de l’année 2008 et 2009 la totalité des salaires perçus n’était pas déclaré par l’employeur auprès des organismes sociaux , de sorte que le salarié a subi un préjudice consécutif au montant de la rémunération prise en compte pour le calcul de sa future retraite qu’il convient d’indemniser en lui allouant la somme de 20000 euros.
Sur la prime de panier et l’avantage lié au logement :
M. [B] sollicite la somme de 50 000 euros en réparation du préjudice subi du fait du non paiement des primes de paniers et de l’absence d’intégration du logement au salaire comme avantage en nature. Cette demande de dommages et intérêts formée à titre global pour deux préjudices distincts est suffisamment déterminée pour être recevable et pour que la cour puisse y répondre.
Sur la prime de panier :
La convention collective applicable prévoit en son article 38 du chapitre VII ‘Avantage en nature’ modifié par l’avenant n°150 et n°175 que :
‘La prime de panier sera due pour chaque journée avec un minimum de 5 heures travaillées . La prime sera due pour tout jour férié travaillé, quel que soit le nombre d’heures travaillées. Ce montant sera revalorisé au 1er janvier chaque année sur la base de l’évolution de l’indice mensuel des prix à la consommation de l’ensemble des ménages apprécié au mois d’octobre de l’année précédente'(le montant de la prime de panier au 1er janvier 2014 est de 2,20 euros.)’
Il en découle que M. [B] avait droit à une telle prime pour la période comprise entre 15 avril 2012 au 15 avril 2015, dont le montant a justement été évalué par les premiers juges dont les calculs sont précisément détaillés , au regard de la situation du salarié , à la somme de 1037,40 euros.
Sur la demande au titre du logement :
M. [D] [B] soutient que le logement mis à sa disposition par l’employeur constituerait un logement de fonction qui aurait dû être soumis à charge sociale en tant qu’avantage en nature, qu’il n’a pas fait l’objet des cotisations correspondantes induisant là
encore une perte tant sur le plan de la pension d’invalidité que sur celui de la retraite.
A l’appui de ses prétentions, il verse aux débat une attestation de Mme [H] en date du 14 juillet 2011 dans laquelle est mentionnée: ‘M. [B] est logé à titre gratuit sur l’entreprise dans un logement fonctionnel depuis le 1 janvier 1998. »
Il apparaît d’une part que cette attestation est contredite par la date d’embauche de M. [B] soit le 1er juillet 1998 et d’autre part par la convention de de mise à disposition gratuite du logement en date du 20 mars 2000, au profit de M. et Mme [D] [B] qui ne prévoit nullement que cette mise à disposition se rattache au contrat de travail en qualité d’avantage en nature mais qui au contraire stipule :
‘Cette mise à disposition ayant lieu sans loyer, la présente convention n’entre pas dans le champ d’application de la loi du 06 juillet 1989, les parties pouvant librement en fixer les clauses et les conditions; en conséquence, chacune des parties pourra librement donner congé à l’autre à tous moments, sauf à respecter un préavis de un mois , sans avoir à motiver la raison du congé. ….’
Il est ainsi établi que le logement mis à la disposition de M. [B] par son employeur ne constituait pas un avantage en nature rattaché au contrat de travail , la décision sera confirmée en ce qu’elle a rejeté la demande de dommages et intérêts de ce chef.
Sur la rupture du contrat de travail :
La lettre de licenciement pour cause réelle et sérieuse notifiée à M. [B] le 15 avril 2015 est rédigée ainsi :
Je fais suite à la convocation à l’entretien préalable du 20 mars et à l’entretien préalable qui s’est tenu le 9 avril à l’occasion duquel vous étiez assisté de Monsieur [I] et moi-même représentée par [Z] [H] assistée de son époux.
Nous avons eu à déplorer de votre part des agissements répétés et constitutifs d’une cause réelle et sérieuse justifiant de la rupture du contrat de travail qui nous lie.
Au printemps 2008, alors que je traversais de très graves problèmes de santé, qui ont accéléré ou provoqué la détérioration de la santé de mon mari, mort l’année suivante, votre épouse, Madame [N] [B] m’informait de la création de son entreprise unipersonnelle de vente de bois de chauffage, et m’exposait qu’il s’agissait d’une activité destinée à procurer à votre ménage un revenu d’appoint.
Elle demandait à pouvoir bénéficier d’un endroit sur le domaine pour stocker ce bois s’engageant à le retirer sur simple demande de ma part.
Pour les raisons précitées, mon mari et moi étions hors d’état de nous y opposer bien que cela ne nous réjouissait pas.
Or, il s’est avéré peu à peu que vous étiez en réalité le co-gérant de fait et l’exploitant de cette activité commerciale que vous avez développée et fait fructifier de manière particulièrement significative, ainsi qu’en témoigne le site que vous avez mis en ligne sur internet.
En effet, ce qui m’avait été initialement présenté comme un lieu de simple stockage de bois a été en réalité utilisé comme le siège d’une entreprise de découpe et de conditionnement de bois de chauffage avec des livraisons de plus en plus importantes et fréquentes de billons à transformer et à conditionner en stères de bois, dont vous assurez vous même la livraison, accompagné de votre épouse, avec le camion de l’entreprise.
Malgré nos demandes répétées malheureusement restées verbales, vous demandant d’arrêter cette activité sur le domaine, incompatible avec l’exécution satisfaisante de votre contrat de travail, vous avez continué d’y consacrer toute votre attention et votre énergie ainsi qu’une grande partie de votre temps au détriment de votre activité salariée.
Fin 2013, vous avez fait part de votre souhait de voir votre contrat de travail à temps plein être réduit en un contrat de travail à temps partiel à 24 heures par semaine.
Cette demande était motivée par le fait de votre placement en invalidité partielle à compter du 1 er janvier 2014.
J’ai bien entendu aussitôt accédé à votre demande et nous avons passé un avenant à votre contrat de travail conformément à vos souhaits vous permettant ainsi de ne pas travailler les lundis et mardis, votre temps de travail étant réparti sur les mercredis, jeudis et vendredis.
Pendant l’année 2014, vous avez consacré ce temps de repos à l’activité de la société ECO BOIS 34, en sus de ce que vous faisiez déjà sur les autres jours, ce qui a permis un développement plus grand encore de la société.
Cette activité de conditionnement et vente de bois de chauffage est devenue florissante, et de plus en plus lucrative. Vous avez alors mûri le projet de vous y consacrer entièrement ce qui est votre droit.
Dans cette perspective, fin 2014, vous modifiez le statut juridique de cette entreprise qui a été transformée en SARL et annonciez votre projet de transférer votre activité à [Localité 9], étant en pourparlers pour l’acquisition d’une maison et d’un terrain vous permettant ce transfert ce qui induisait la fin de votre activité salariale à [Adresse 8].
Cependant ne voulant pas donner votre démission, vous avez alors, dans l’espoir de négocier une indemnité de départ dans le cadre d’une rupture conventionnelle, adopté un comportement particulièrement peu professionnel et tout à fait inadmissible.
Le 17 février à l’occasion de l’épandage d’engrais à effectuer sur la vigne, vous exigiez soudainement par le truchement de Monsieur [G] [T], salarié de notre fournisseur, l’entreprise SOCOPA de recevoir des consignes précises et par mail de [Z] [H] : noms des parcelles, dose, enterrer l’engrais ou pas.
Or, par votre ancienneté et compte tenu du volume acheté déjà livré, vous saviez très bien que l’engrais est à épandre sur la totalité des vignes et que le dosage vous était précisé par l’entreprise SOCOPA.
Non seulement votre exigence était totalement superflue mais de surcroît mêlait de façon particulièrement déplacée un tiers à vos contestations.
Enfin, le 20 février, vous avez refusé à deux reprises de montrer à [K] [V] le fonctionnement du nouveau tracteur CASE auquel était attelé l’épandeur prêté pour une courte durée par l’entreprise SOCOPA que nous devions restituer le plus tôt possible.
D’abord à la demande que ce dernier vous a faite directement en début de matinée sur instruction de [Z] [H].
Ensuite sur la demande verbale que [Z] [H] vous faisait personnellement en cours de matinée, vous refusiez catégoriquement à nouveau d’exécuter cette instruction et ce en présence de [K] [V].
Ces deux comportements étaient uniquement dictés dans l’intérêt de nuire à votre employeur.
Votre attitude a contraint [Z] [H] à réitérer cette instruction par mail en fin de matinée pour que vous consentiez enfin à exposer le fonctionnement du tracteur dans l’après-midi.
Notre exploitation du fait de sa petite taille ne peut supporter ce genre de comportement qui est de nature à mettre en péril son équilibre. Plus particulièrement encore en début de printemps alors que les travaux à prévoir sont soumis à des conditions climatiques qui constituent une contrainte supplémentaire à notre activité.
L’ensemble de ces faits particulièrement graves qui pourraient justifier un licenciement pour faute grave ne sont qu’une illustration de votre état d’esprit consistant à contester tout ce qui vous est demandé, et notamment de faire un rapport détaillé, exploitable et compréhensible de votre activité journalière.
De même que pendant votre temps de travail, vous êtes sans cesse en conversation téléphonique sur votre téléphone portable, ce qui ralentit l’exécution de votre travail.
Ainsi pendant la matinée du 19 février 2015, vous avez labouré les parcelles du plateau en mettant beaucoup plus de temps que d’ordinaire, car vous avez passé le plus clair de votre temps à vous arrêter pour parler au téléphone.
Plus récemment, le 26 mars dans l’après-midi alors que vous aviez l’instruction de travailler dans la vigne dénommée « La Madoune » après avoir garé votre véhicule non loin, vous y avez été invisible une grande partie de l’après-midi.
Vers 16h30, [Z] [H] vous a enfin trouvé assis dans votre véhicule en train de passer des coups de téléphone depuis votre portable.
Parallèlement, nous constatons un très mauvais entretien et état du matériel qui vous est confié. Faute d’entretien généralisé du matériel, tous les tracteurs ont eu en 2014 de grosses avaries sur-la même période, nous plaçant dans obligation d’acheter précipitamment un tracteur neuf pour assurer les traitements.
En outre, nous venons de constater que la charrue n’a pas été graissée depuis son achat en 2008.
Vos refus d’exécuter les ordres et plus généralement le désintérêt que vous manifestez à l’égard de votre travail qui est de plus en plus bâclé, nous ont contraints à embaucher un salarié supplémentaire afin de ne pas mettre en péril l’exploitation.
Dans ces conditions, nous avons pris la décision de vous licencier pour cause réelle et sérieuse compte tenu des conséquences pour notre entreprise, votre préavis qui débutera à compter de la première présentation de cette lettre sera d’une durée de 2 mois allongée d’un mois du fait de la classification en travailleur handicapé dont vous relevez. Nous vous dispensons de l’effectuer.
A l’issue de votre préavis, nous vous remettrons votre certificat de travail, votre attestation Pôle Emploi et votre solde de tout compte.
Compte tenu de la dispense de préavis, nous vous remercions de bien vouloir nous remettre le bip et les clefs en votre possession de tous les cadenas de la ferme et du garage, ainsi que celles de la maison principale que nous vous avions confiées….’
Il est ainsi reproché à M. [B] :
– d’avoir privilégié l’activité de vente de bois de chauffage de l’entreprise ECO BOIS 34 créée par son épouse au détriment de l’exploitation du Domaine de [Adresse 8],
– d’avoir sollicité des consignes précises le 17 février 2015 de la part de Mme [Z] [H] quant à l’épandage d’engrais sur le domaine,
– d’avoir le 20 février 2015 refusé à deux reprises de former M. [K] [V] à l’utilisation d’un nouveau tracteur auquel était attelé un épandeur pour une courte période qui devait être restitué
– de nombreux appels téléphoniques pendant son travail qui ralentissaient l’accomplissement de ses missions,
– de ne pas veiller à l’entretien du matériel,
– d’avoir contraint l’employeur à embaucher un salarié supplémentaire afin de ne pas mettre en péril l’exploitation en raison du refus de M. [B] d’exécuter les ordres et le désintérêt de ce dernier à l’égard de son travail.
– Concernant le défaut d’entretien du matériel, l’employeur verse aux débats :
Une attestation d’un salarié de l’entreprise, [U] [A] rédigée ainsi :
« J’ai constaté en arrivant au domaine en mars 2015 que le matériel manquait réellement d’entretien (charrue pas graissée, prétailleuse inutilisable), Le bâtiment qui sert à abriter les tracteurs et le matériel entre autre était désordonné, comme abandonné, la grange autrement dit l’atelier pour bricoler ou effectuer les petites réparations était très sale et surtout vide (très peu d’outil) et le peu qu’il y avait était très sommaire ».
– Concernant l’investissement de M. [B] à l’égard de son activité de vente de bois de chauffage au détriment de son activité salarié, l’employeur produit :
Une attestation de [Y] [F], habitante de [Adresse 8], ainsi rédigée :
« Il m’arrivait souvent de sortir de [Adresse 8] pour faire les courses et de croiser Mr [B], souvent seul dans les premiers temps au volant de son camion jaune, allant ou revenant d’une livraison de bois, à des heures où normalement, il aurait dû travailler pour Madame [H], et systématiquement dans des créneaux horaires où elle ne pouvait constater cette situation (avant 10h ou pendant la sieste de Mme [H] de 13h à 16h). A plusieurs reprises, le voisinage m’a fait remarquer le manque de scrupules de Mr [B] vis-à-vis de son employeur. J’ai d’ailleurs souvent pu constater moi-même qu’en passant le portail, au volant du tracteur, Monsieur [B] rentrait chez lui au lieu d’aller dans les vignes. J’entendais alors le fonctionnement de sa machine à bois.
La propriété de Mme [H] enclavant en étrier la maison qu’habitait Mr [B], il me suffisait d’aller au jardin potager qui surplombe le site d’Eco-bois pour voir Mr [B] charger son camion jaune pour les livraisons. Si je n’ai pas le souvenir d’avoir vu Mme [B] sur le site d’Eco-bois, je l’ai souvent vue les deux dernières années, assise auprès de son mari dans le camion.
Assez vite, Mme [H] a laissé la main à Mme [E] sa fille, dans la conduite de l’exploitation. Le rythme de la machine à bois s’est alors intensifié. Mme [E], venant toutes les semaines, parfois tous les 15 jours, pour des périodes de 24 à 48h, Mr [B], bien souvent prévenu avant nous de son arrivée, avait tout le loisir d’organiser ses livraisons en son absence, pour à ce
moment-là respecter ses horaires de travail. Nous le voyions alors beaucoup moins à la cuisine. Il y venait toujours à la hâte pour y déposer le cahier, ou prendre les clefs de la voiture de Mme [H] qu’il prenait systématiquement pour les besoins de l’exploitation.
Son affaire prospérait, sans doute puisqu’il m’a déclaré un jour qu’il pourrait très facilement se passer de son activité salarié à [Adresse 8] pour se consacrer totalement à son affaire.
Attirée par le bruit de la machine que nous entendions de la maison, j’allais parfois au potager et je voyais Mr [B] sur le site d’Eco-bois, à travailler toujours seul, à des heures où il aurait dû travailler pour Madame [H].
Très embarrassée par cette situation, qui de témoin silencieux faisait de moi une complice, j’ai fini par dénoncer cette situation malhonnête dont j’étais témoin. »
Ces témoignages rapportent la preuve d’un manque d’entretien du matériel confié à M. [B], alors que cette mission, au regard de sa classification, relevait des compétences, ainsi que son désinvestissement de son travail salarié au profit de sa seconde activité de négoce de bois, exercée pour partie sur des plages horaires qu’il aurait dû consacrer au service de son employeur, sans que le salarié ne produise d’objection en sens contraire.
Dès lors, ces éléments, sans qu’il ne soit nécessaire d’examiner les autres griefs, établissent l’existence d’une cause réelle et sérieuse justifiant le licenciement critiqué.
La décisions sera en conséquence infirmée en ce qu’elle a dit que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse et M. [B] sera débouté de ses demandes subséquentes à la rupture du contrat de travail.
Sur la demande de M. [R] [H] :
La créance de M. [B] à l’égard de la succession trouve son origine dans la relation de travail ayant lié ce dernier à son employeur Mme [X] [H], et non dans une gestion du domaine imputable à Mme [Z] [H], de sorte qu’il convient de rejeter la demande tendant à garantir M. [R] [H] du règlement de sa part par Mme [Z] [H].
PAR CES MOTIFS :
La cour :
Infirme le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Montpellier le 04 mai 2017 en ce qu’il a :
– dit que le licenciement de M. [D] [B] est sans cause réelle et sérieuse.
– ordonné la remise des documents sociaux, bulletins de salaire rectifiés et régularisation auprès des organismes sociaux sous astreinte.
– condamné Mme [X] [H] à payer à M. [D] [B]:
– 46800€ brut à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause telle et sérieuse.
– 5780,07 euros à tire de rappel de salaires.
– 13 396 euros au titre du travail dissimulé.
– débouté M. [B] de sa demande à titre de dommages et intérêt pour perte du droit à pension invalidité.
– débouté M. [B] de ses demandes au titre de la perte des droits à la retraite.
Statuant à nouveau :
– Dit que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse.
– Rejette la demande de dommages et intérêt pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
– Dit que M. [D] [B] dispose d’une créance à l’égard de la succession de Mme [X] [H] décédée le 03 juin 2020 à hauteur des sommes suivantes :
– 11 422,32 euros au titre du travail dissimulé .
– 37,31 euros à titre de rappel de salaires.
– 15 000 euros au titre de la perte du droit à pension invalidité.
– 20 000 euros au titre de la perte du droit à pension retraite.
– 37,31 euros à titre de rappel de salaire.
Confirme la décision en ses autres dispositions critiquées.
Rappelle que les dettes d’une succession se divisent entre les héritiers qui n’en sont tenus personnellement qu’au prorata de leurs droits respectifs.
Rejette la demande de M. [R] [H] tendant à le garantir du règlement de sa part par Mme [Z] [H].
– Dit que M. [D] [H] dispose d’une créance à l’égard de la succession de Mme [X] [H] décédée le 3 juin 2020 à hauteur de 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
– Dit que les dépens seront supportés par la succession de Mme [X] [H].
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
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