Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Metz
Thématique : Conflit sur le maintien de salaire et l’urgence des obligations contractuelles en cas d’accident du travail
→ RésuméContexte de l’affaireMme [V] [T] a été engagée par la SARL Ambulances Hunault dans le cadre d’un contrat d’apprentissage, débutant le 30 septembre 2022 et se terminant le 27 décembre 2023. Elle a déclaré avoir subi un accident du travail le 7 août 2023, entraînant des arrêts de travail successifs. Demande de référéLe 27 octobre 2023, Mme [T] a saisi le conseil de prud’hommes de Metz en référé, demandant le maintien de son salaire pendant ses périodes d’absence ainsi que des dommages et intérêts. Décision du conseil de prud’hommesLe 28 décembre 2023, le conseil de prud’hommes a jugé la demande de Mme [T] recevable, rejetant l’exception d’incompétence de la société Ambulances Hunault. Il a ordonné le paiement de 2 390,23 euros pour le maintien de salaire et 1 260 euros pour dommages et intérêts, ainsi que la délivrance d’un bulletin de paie sous astreinte. Appel de la société Ambulances HunaultLe 9 janvier 2024, la société Ambulances Hunault a interjeté appel de l’ordonnance, demandant son annulation et contestant la compétence du conseil de prud’hommes, arguant de l’absence d’urgence et de contestations sérieuses. Arguments de la société Ambulances HunaultL’appelante a soutenu que l’absence de paiement des indemnités journalières était imputable à Mme [T], qui aurait tardé à déclarer son accident. Elle a également contesté le caractère urgent de la demande, affirmant que la salariée avait repris le travail avant de saisir la juridiction. Réponse de Mme [T]En réponse, Mme [T] a demandé l’irrecevabilité de l’appel, confirmant l’ordonnance initiale et soulignant l’absence de contestation sérieuse sur le maintien de son salaire. Elle a également fait état de difficultés financières dues à l’absence de paiement. Analyse de la cour d’appelLa cour a examiné la demande d’annulation de l’ordonnance, concluant que le principe du contradictoire n’avait pas été violé. Elle a également confirmé que l’obligation de maintien de salaire n’était pas sérieusement contestable, en raison de l’absence de versement des indemnités journalières. Décisions finales de la courLa cour a déclaré l’appel recevable mais a rejeté la demande d’annulation. Elle a confirmé l’ordonnance de référé, précisant que les montants alloués à Mme [T] étaient à titre de provision. La société Ambulances Hunault a été condamnée à verser 1 000 euros à Mme [T] au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens d’appel. |
Arrêt n°25/00001
08 Janvier 2025
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N° RG 24/00066 – N° Portalis DBVS-V-B7I-GC22
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Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de METZ
28 Décembre 2023
23/00257
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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE METZ
Chambre Sociale-Section 1
ARRÊT DU
Huit janvier deux mille vingt cinq
APPELANTE :
S.A.R.L. AMBULANCES HUNAULT prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Me Virginie LEVASSEUR, avocat au barreau de DOUAI, avocat postulant
Représentée par Me Stephan FARINA, avocat au barreau de LILLE, avocat plaidant
INTIMÉE :
Mme [V] [T]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Cécile CABAILLOT, avocat au barreau de METZ
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 08 octobre 2024, en audience publique, devant la cour composée de :
Mme Véronique LAMBOLEY-CUNEY, Présidente de chambre
M. Benoit DEVIGNOT, Conseiller
M. François-Xavier KOEHL, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme Catherine MALHERBE
ARRÊT : Contradictoire
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile;
Signé par Mme Véronique LAMBOLEY-CUNEY, Présidente de chambre, et par Monsieur Alexandre VAZZANA, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE
Mme [V] [T] a été embauchée par la SARL Ambulances Hunault en exécution d’un contrat d’apprentissage du 30 septembre 2022 au 27 décembre 2023.
Se déclarant victime d’un accident du travail en date du 7 août 2023, elle a été placée en arrêt de travail à compter du 14 août 2023 jusqu’au 3 septembre 2023 puis du 9 septembre 2023 jusqu’au 24 septembre 2023.
Par requête introductive d’instance enregistrée au greffe le 27 octobre 2023, Mme [T] a saisi la formation de référé du conseil de prud’hommes de Metz afin de solliciter à titre provisionnel le paiement du maintien de ses salaires pendant la période d’absence et des dommages et intérêts.
Par ordonnance du 28 décembre 2023, le conseil de prud’hommes de Metz, siégeant en audience foraine au tribunal de proximité de Sarrebourg, a statué en formation de référé comme suit :
« sur l’exception d’incompétence in limine litis :
– dit et juge la demande de Mme [T] recevable ;
– rejette l’exception d’incompétence de la société Ambulances Hunault ;
sur la demande de maintien du salaire :
– constate l’absence de contestations sérieuses ;
– dit et juge que l’obligation n’est pas sérieusement contestable ;
– ordonne à la société Ambulances Hunault de payer à Mme [T] la somme de 2 390,23 euros net au titre du maintien de salaire ;
– dit que cette somme portera des intérêts de droit au taux légal à compter de la date de la demande, le 27 octobre 2023 ;
– ordonne à la société Ambulances Hunault de payer à Mme [T] la somme de 1 260 euros net à titre de dommages et intérêts pour inexécution fautive du contrat de travail ;
– dit que cette somme portera des intérêts de droit au taux légal à compter du prononcé de la présente décision ;
– ordonne à la société Ambulances Hunault de délivrer à Mme [T], sous peine d’une astreinte de 20 euros par jour de retard à compter du 15ième jour suivant le prononcé de la présente décision, pendant une durée de 6 mois, le bulletin de paie du mois de septembre 2023 ;
– se réserve la liquidation de l’astreinte ;
– ordonne à la société Ambulances Hunault de payer à Mme [T] une somme de 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– déboute la société Ambulances Hunault de sa demande reconventionnelle sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamne la société Ambulances Hunault aux dépens. »
Par déclaration électronique transmise le 9 janvier 2024, la société Ambulances Hunault a régulièrement interjeté appel de l’ordonnance de référé.
Par conclusions transmises par voie électronique le 6 mai 2024, la société Ambulances Hunault demande à la cour de :
– la déclarer recevable en son appel,
– prononcer la nullité de l’ordonnance entreprise,
– annuler, ou à défaut, infirmer l’ordonnance précitée en toutes ses dispositions,
statuant à nouveau,
– déclarer Mme [T] irrecevable en toutes ses demandes et l’en débouter,
– condamner Mme [T] à payer la somme de 1 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner Mme [T] aux dépens.
A l’appui de son appel, au visa des articles 15 et 16 du code de procédure civile, l’appelante soulève la nullité de l’ordonnance entreprise au motif de la violation du principe du contradictoire. Elle estime que l’intimée a communiqué aux premiers juges des pièces par note en délibéré après la clôture des débats et que celles-ci ont été prises en considération dans leur décision. Elle invoque également des incohérences au sein de l’ordonnance critiquée. En réponse, aux arguments de l’intimée, elle précise qu’il ne s’agit pas d’un appel-nullité, recours spécifique, mais d’un appel annulation/réformation.
La société Ambulances Hunault invoque l’incompétence de la formation de référé du conseil de prud’hommes aux motifs de l’absence de caractère d’urgence de la demande et de l’existence d’une contestation sérieuse. Elle fait valoir que la salariée a saisi la juridiction prud’homale postérieurement à reprise du travail et que les retards de paiement des indemnités journalières ne lui sont pas imputables, Mme [T] ayant tardé à déclarer son accident du travail. Elle ajoute avoir transmis l’attestation de salaire à la Caisse primaire d’assurance maladie.
L’appelante considère les demandes de la salariée infondées rappelant qu’aux termes de l’article L 1226-3 du code du travail les indemnités journalières doivent être déduites de la rémunération due par l’employeur et précisant que Mme [T] ne lui avait pas adressé de décompte de la Caisse primaire d’assurance maladie. Elle ajoute que cette communication est intervenue seulement dans le cadre du présent litige.
Par conclusions transmises par voie électronique le 9 avril 2024, Mme [T] demande à la cour de :
à titre principal
– prononcer l’irrecevabilité de l’appel-nullité formé par la société Ambulances Hunault,
à titre subsidiaire
– confirmer en toutes ses dispositions l’ordonnance entreprise,
– débouter la société Ambulances Hunault de l’ensemble de ses demandes,
– condamner la société Ambulances Hunault à lui payer la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la société Ambulances Hunault aux dépens.
L’intimée expose que l’appel-nullité exercé par la société Ambulances Hunault est irrecevable, seul un appel annulation étant possible. Elle conteste tout manquement au principe du contradictoire qu’elle considère non établi précisant que l’ordonnance attaquée ne fait pas référence aux pièces communiquées en cours de délibéré.
Mme [T] estime que la condition d’urgence est démontrée par la nature salariale de la créance réclamée. Elle ajoute que sa reprise du travail ne saurait établir le défaut d’urgence, soulignant qu’elle a fait l’objet d’un nouvel arrêt dès le 1er novembre 2023. Elle fait valoir qu’il n’existe aucune contestation sérieuse, aucun paiement des compléments de salaire n’étant intervenu et son employeur ayant tardé à adresser l’attestation de salaire.
En raison du défaut de paiement, elle précise que la demande de provision n’est pas contestable.
Elle affirme également que l’absence de versement du complément de salaire constitue un trouble manifestement illicite.
Elle se prévaut de l’absence de contestation par l’appelante du montant du rappel de salaire auquel elle a été condamnée. En réponse à la société Ambulances Hunault qui prétend ne pas avoir reçu communication du décompte des indemnités journalières, elle souligne qu’elle ne lui a jamais écrit pour lui demander.
Mme [T] ajoute que le défaut de paiement de salaire est l’origine de ses difficultés financières dont elle justifie.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Déclare recevable l’appel de la SARL Ambulances Hunault ;
Rejette la demande d’annulation de l’ordonnance de la SARL Ambulances Hunault ;
Confirme l’ordonnance de référé en date du 28 décembre 2023 du conseil de prud’hommes de Metz en toutes ses dispositions sauf à préciser que les montants alloués à la salariée le sont à titre de provision ;
Y ajoutant
Condamne la SARL Ambulances Hunault à verser à Mme [V] [T] une somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SARL Ambulances Hunault aux dépens d’appel et rejette sa demande au titre de ses frais irrépétibles exposés en cause d’appel
Le Greffier La Présidente
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