Cour d’appel de Lyon, 7 septembre 2018
Cour d’appel de Lyon, 7 septembre 2018

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Lyon

Thématique : Géolocalisation du salarié : la déclaration CNIL insuffisante

Résumé

La géolocalisation des salariés doit respecter des conditions strictes pour être légale. Dans une affaire récente, une entreprise a été condamnée à verser plus de 2 000 heures de travail supplémentaires à un salarié, car elle n’avait pas correctement consulté le comité d’entreprise avant d’implémenter un dispositif de géolocalisation. Bien que la déclaration à la CNIL ait été faite et que le salarié ait été informé, l’absence de consultation formelle du comité a rendu les relevés d’horaires non opposables. Cette situation souligne l’importance de respecter les obligations légales en matière de surveillance des employés.

Calcul des heures supplémentaires

Le calcul des heures de travail supplémentaires effectuées par le salarié peut dépendre directement de la licéité d’un dispositif de géolocalisation. Dans cette affaire, une entreprise a été condamnée à payer à l’un de ses salariés plus de 2 000 heures de travail supplémentaires.

Relevés de géolocalisation

Pour contester les relevés manuscrits présentés par le salarié, la société avait produit la totalité des relevés de géolocalisation du véhicule de service qu’elle avait confié au salarié. Pour être régulier, l’usage par un employeur d’un dispositif de géolocalisation des véhicules confiés à ses salariés pour l’exercice de leurs fonctions suppose notamment qu’au préalable : i) le comité d’entreprise ait été informé et consulté sur ce projet, ii) une déclaration à la CNIL ait été régulièrement effectuée, iii) que le salarié ait reçu une notification individuelle de la mise en oeuvre de ce traitement informatisé le concernant.

En l’espèce, la déclaration CNIL avait bien été effectuée et le salarié avait reçu la notification requise l’informant de ce que son véhicule ferait l’objet d’une géolocalisation. Toutefois, aucune preuve de la consultation du comité d’entreprise sur ce projet, consultation qui supposait que ce comité émette un avis à ce sujet, n’était rapportée (le comité d’entreprise avait simplement été informé et non consulté).

Consultation du comité d’entreprise

La consultation du comité d’entreprise, qui doit permettre à ce dernier de donner son avis sur la pertinence et la proportionnalité entre l’utilisation de la géolocalisation et la finalité recherchée (surveillance des salariés, suivi du temps de travail, etc.) est expressément imposée à l’employeur par les articles L.2323-13 et L.2323-32 du code du travail qui, dans leur rédaction applicable au litige, disposent que :

Article L. 2323-13: « Le comité d’entreprise est informé et consulté, préalablement à tout projet important d’introduction de nouvelles technologies, lorsque celles-ci sont susceptibles d’avoir des conséquences sur l’emploi, la qualification, la rémunération, la formation ou les conditions de travail. Les membres du comité reçoivent, un mois avant la réunion, des éléments d’information sur ces projets et leurs conséquences sur chacun des sujets mentionnés au premier alinéa. » ; Article L. 2323-32, alinéa 3: « Le comité d’entreprise est informé et consulté, préalablement à la décision de mise en oeuvre dans l’entreprise, sur les moyens ou les techniques permettant un contrôle de l’activité des salariés. »

En l’espèce, il apparaît que si le but poursuivi dans la mise en oeuvre de ce dispositif de géolocalisation au sein de l’entreprise n’était pas sérieusement contestable, s’agissant de travailler avec le salarié sur l’organisation optimisée de son activité, il n’en reste pas moins que le comité d’entreprise n’a manifestement pas été régulièrement consulté à ce sujet, faute de preuve de ce que cet organe représentatif a émis sur ce sujet un avis, même implicite. Il apparaissait d’ailleurs que même l’information donnée au comité d’entreprise était ici critiquable, l’employeur ne justifiant aucunement de l’envoi aux membres du comité des documents et informations prévus par le 2ème alinéa de l’article L2323-13, ni du respect du délai d’un mois prévu par ce texte. En conséquence,  les relevés d’horaires de travail tirés du dispositif de géolocalisation du véhicule de service du salarié ne lui étaient pas juridiquement opposables.

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