Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Lyon
Thématique : Retrait d’avis négatifs sur Google : attention à l’astreinte
→ RésuméEn matière de retrait d’avis négatifs sur Google, il est déterminant de demander une décision sous astreinte. Un juge des référés a condamné un client à retirer des avis sous son nom et de faux profils. Malgré cette décision, le client a continué à publier des commentaires, évoquant des accusations de harcèlement et menaçant de nouvelles actions. Le tribunal a constaté que le client n’a pas prouvé que son retard dans l’exécution était dû à des causes extérieures. De plus, sa demande de réduction de l’astreinte en raison de sa situation financière a été jugée inopérante.
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En matière de retrait d’avis négatifs sur Google, il est opportun de demander une décision sous astreinte. Par ordonnance, le juge des référés du tribunal de grande instance de Lyon a condamné le client d’un salon de coiffure à retirer ses avis Google sous son nom et sous de faux profils.
Le client avait refusé d’appliquer la décision de retrait, il avait trouvé le temps de poster de nouveaux commentaires faisant état de manière confuse de ‘harcèlement’, ‘humiliation’ ‘violation de la loi’ etc…, refusant expressément de retirer ses avis, menaçant d’alerter ‘tout son réseau Web’, annonçant le dépôt d’autres avis, un dépôt de plainte à la CNIL et jusqu’à son débarquement dans le salon ‘pour taper un scandale’.
Dans ces conditions, le client n’établit pas ainsi que le retard dans l’exécution de l’ordonnance de référé provienne d’une cause extérieure ni d’une quelconque difficulté rencontrée pour retirer les avis.
Le client a fait valoir en vain que le montant de l’astreinte liquidée était totalement disproportionné par rapport à ses revenus et charges. Ce moyen est inopérant au regard des dispositions légales qui n’autorisent pas le juge à supprimer ou réduire le montant de l’astreinte en considération de la situation de charges et revenus du débiteur.
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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE LYON
6e Chambre
ARRET DU 06 Mai 2021
N° RG 20/05255 – N° Portalis DBVX-V-B7E-NFEB
Décision du Juge de l’exécution de lyon du 15 septembre 2020
RG : 20/02142
X
C/
S.A.R.L. OUEST BEAUTE
APPELANT :
M. Z X
[…]
[…]
Représenté par Me Thomas FOURREY, avocat au barreau de LYON, toque : 390
INTIMEE :
S.A.R.L. OUEST BEAUTE
[…]
[…]
Représentée par Me Olivia EMIN de la SELARL LEGAL AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 393
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Date de clôture de l’instruction : 06 Avril 2021
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 06 Avril 2021
Date de mise à disposition : 06 Mai 2021
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
— B C, président
— Evelyne ALLAIS, conseiller
— Magali DELABY, conseiller assistés pendant les débats de Sylvie GIREL, greffier
A l’audience, B C a fait le rapport, conformément à l’article 804 du code de procédure civile.
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par B C, président, et par Sylvie GIREL, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS, PROCÉDURE ET DEMANDES DES PARTIES
Par ordonnance du 16 décembre 2019, le juge des référés du tribunal de grande instance de Lyon a, notamment, condamné Z X à retirer les avis postés sur les pages Google portés sur le salon de coiffure J K de Craponne, émanant des profils de Célia Giraud, D E, F G et H I, sous astreinte de 300 euros par jour de retard, commençant à courir 8 jours après la signification de la décision pour une durée de 6 mois.
Cette ordonnance a été signifiée à M. X le 23 décembre 2019.
Par exploit d’huissier délivré le 2 juin 2020, la Sarl Ouest Beauté, exerçant à l’enseigne J K, a saisi le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Lyon aux fins de :
— voir liquider l’astreinte mise à la la charge de M. X à la somme de 40.300 euros arrêtée au 5 mai 2020,
— le voir condamner en conséquence à lui payer la somme de 35.700 euros, arrêtée au 20 avril 2020,
— voir condamner M. X aux dépens ainsi qu’à lui payer la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
M. X n’a pas comparu ni ne s’est fait représenter à l’audience du juge de l’exécution du 23 juin 2020.
Par jugement en date du 15 septembre 2020, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Lyon a :
— liquidé l’astreinte provisoire telle que fixée dans l’ordonnance du juge de référés du tribunal de grande instance de Lyon du 16 décembre 2019, pour la période du 1er janvier 2020 au 11 mars 2020, à la somme de 21.300 euros et condamné en tant que de besoin Z X à payer ladite somme à la Sarl Ouest Beauté,
— condamné M. X à payer à la Sarl Ouest Beauté la somme de 400 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
— condamné M. Y aux dépens,
— et rappelé que cette décision est exécutoire par provision.
Le juge de l’exécution, après avoir relevé que les avis litigieux figuraient toujours sur la page Google du salon de coiffure, a liquidé l’astreinte pour la période arrêtée au 11 mars 2020, compte tenu de la suspension du cours de l’astreinte à partir du 12 mars 2020 jusqu’au 23 juin 2020 en vertu de l’article 4 de l’ordonnance n°2020-306 du 25 mars 2020 modifiée par l’article 4 de l’ordonnance n°2020-427 du 15 avril 2020 et l’article 1er de l’ordonnance n°2020-560 du 13 mai 2020.
M. X a relevé appel de cette décision par déclaration reçue au greffe de la cour le 1er octobre 2020.
Par ordonnance du 6 octobre 2020, le président de la chambre, faisant application des dispositions des articles 905 du code de procédure civile et R.121-20 al.2 du code des procédures civiles d’exécution a fixé l’affaire à l’audience du 6 avril 2021 à 13h30.
En ses conclusions du 6 novembre 2020, Z X demande à la Cour d’infirmer le jugement du 15 septembre 2020 et supprimer l’astreinte liquidée par le ‘jugement du 23 décembre 2019″.
Par conclusions du 4 décembre 2020, la Sarl Ouest Beauté demande à la Cour de statuer comme suit, au visa des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, 131-3 et 131-4 du code des procédures d’exécution :
— débouter M. X de toutes ses demandes, fins et prétentions,
— confirmer en toutes ses dispositions la décision entreprise,
y ajoutant,
— condamner M. X au paiement de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
— le condamner aux entiers dépens de l’instance.
Il est expressément renvoyé aux conclusions des parties pour l’exposé exhaustif de leurs moyens et prétentions.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Aux termes de l’article L.131-4 du code des procédures civiles d’exécution, le montant de l’astreinte provisoire est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l’injonction a été adressée et des difficultés qu’il a rencontrées pour l’exécuter.
Le taux de l’astreinte définitive ne peut jamais être modifié lors de sa liquidation.
L’astreinte provisoire ou définitive est supprimée en tout ou partie s’il est établi que l’inexécution ou le retard dans l’exécution de l’injonction du juge provient, en tout ou partie, d’une cause étrangère.
M. X fait valoir en premier lieu qu’il n’a pas eu connaissance de l’ordonnance de référé du 16 décembre 2019 qui a été signifiée en l’étude de l’huissier de justice. Étant accaparé par son travail d’auto-entrepreneur et l’assistance portée à sa mère handicapée à la suite d’un AVC de juillet 2019 à février 2020, il a omis de retirer l’acte chez l’huissier.
ll n’a pas non plus été touché par l’assignation à comparaître devant le juge de l’exécution et ce n’est qu’en septembre 2020, à l’occasion de la notification du jugement attaqué, qu’il a eu connaissance de l’ensemble de la procédure.
Sur ce,
M. X, après un échange de messages avec le responsable du salon de coiffure, a été destinataire d’une lettre recommandée du 4 octobre 2019 avec avis de réception signé le 9 octobre 2019, par laquelle le conseil de la société Ouest Beauté l’a mis en demeure de retirer les avis postés sous son nom et sous de faux profils.
Loin d’être absorbé exclusivement par son travail ou l’aide apportée à sa mère, il a trouvé le temps de poster de nouveaux commentaires faisant état de manière confuse de ‘harcèlement’, ‘humiliation’ ‘violation de la loi’ etc…, refusant expressément de retirer ses avis, menaçant d’alerter ‘tout son réseau Web’, annonçant le dépôt d’autres avis, un dépôt de plainte à la CNIL et jusqu’à son débarquement dans le salon ‘pour taper un scandale’.
Par la suite, M. X, qui n’ignorait pas les intentions de la société Ouest Beauté affichées dans le courrier de son conseil de porter l’affaire en justice, a délibérément négligé de retirer trois actes d’huissiers de justice successifs (assignation en référé, signification de l’ordonnance de référé, assignation devant le juge de l’exécution).
ll ne prétend pas non plus avoir rencontré une quelconque difficulté pour retirer les avis litigieux, ce qu’il a fait après avoir eu connaissance du jugement attaqué.
Dans ces conditions, M. X n’établit pas ainsi que le retard dans l’exécution de l’ordonnance de référé provienne d’une cause extérieure ni d’une quelconque difficulté rencontrée pour retirer les avis.
En second lieu, M. X fait valoir que le montant de l’astreinte liquidée est totalement disproportionné par rapport à ses revenus et charges. ll ne dispose d’aucun bien immobilier ni de bien mobilier de valeur, étant locataire de son appartement et de son véhicule à usage professionnel.
Ce moyen est inopérant au regard des dispositions légales précitées qui n’autorisent pas le juge à supprimer ou réduire le montant de l’astreinte en considération de la situation de charges et revenus du débiteur.
Le jugement est confirmé. Les dépens de première instance et d’appel sont à la charge du débiteur mais, en équité, il n’y a pas lieu de faire application de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement prononcé le 15 septembre 2020 par le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Lyon,
Condamne Z X aux dépens,
Déboute la Sarl Ouest Beauté de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER
LE PRÉSIDENT
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