Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Lyon
Thématique : Rupture de contrat et exécution des obligations salariales : enjeux financiers en question
→ RésuméExposé du litigeM. [J] [N] a été embauché par la société Tangram Finance en tant que rédacteur spécialisé à partir du 1er juin 2020. Le 1er février 2023, l’ensemble du personnel a été transféré à la S.A.S. Editions Messignac, spécialisée dans la conception et l’édition de magazines. Après des discussions infructueuses sur sa rémunération variable, M. [N] a décidé, par courriel du 29 mars 2023, de prendre acte de la rupture de son contrat de travail, imputant la responsabilité à la société Editions Messignac. Le 19 juillet 2023, il a saisi le conseil de prud’hommes de Lyon pour faire reconnaître que cette prise d’acte équivalait à un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Jugement du conseil de prud’hommesLe 11 juillet 2024, le conseil de prud’hommes a rendu un jugement condamnant la société Editions Messignac à verser plusieurs sommes à M. [N], incluant 16 500 € pour rappel de rémunération variable de 2022, 11 156,25 € pour 2023, ainsi que des congés payés afférents. Le salaire moyen des douze derniers mois a été fixé à 3 235 € bruts, et les sommes dues ont été majorées des intérêts légaux à partir de la convocation de la société devant le bureau de jugement. Appel de M. [N]M. [N] a interjeté appel le 8 août 2024, se limitant à contester les condamnations relatives aux sommes de 16 500 € et 1 650 € de congés payés pour 2022. Le 21 novembre 2024, la société Editions Messignac a assigné M. [N] en référé pour demander l’arrêt de l’exécution provisoire du jugement, tout en sollicitant que chaque partie conserve la charge de ses dépens. Arguments de la société Editions MessignacLors de l’audience du 6 janvier 2025, la société Editions Messignac a soutenu qu’il existait un moyen sérieux de réformation, arguant que le conseil de prud’hommes n’avait pas pris en compte un paiement de 12 659,60 € effectué le 5 mars 2024 pour la rémunération variable de 2022. Elle a également évoqué des conséquences manifestement excessives sur sa situation financière, affirmant que l’exécution provisoire risquait d’aggraver ses difficultés économiques. Réponse de M. [N]M. [N] a contesté les demandes de la société, demandant le remboursement de 128,74 € pour ses dépens et 1 800 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile. Il a soutenu que la société avait reconnu sa créance pour les sommes allouées et qu’il n’avait pas l’intention de mettre à exécution la décision sur le montant déjà couvert. Il a également contesté l’existence de conséquences manifestement excessives, arguant que les preuves fournies par la société étaient insuffisantes. Décision du délégué du premier présidentLe délégué a relevé que l’exécution provisoire ne pouvait être arrêtée que si un moyen sérieux de réformation était établi et si l’exécution risquait d’entraîner des conséquences manifestement excessives. Il a noté que la société Editions Messignac n’avait pas fourni de preuves suffisantes pour démontrer un risque de conséquences excessives, et que ses attestations étaient trop générales et manquaient de détails chiffrés. Conclusion sur les demandesEn conséquence, la demande d’arrêt de l’exécution provisoire a été rejetée, et la demande reconventionnelle de M. [N] pour le remboursement de frais a été déclarée irrecevable. La société Editions Messignac a été condamnée aux dépens de la procédure et à verser une indemnité à M. [N] au titre de l’article 700 du Code de procédure civile. |
N° R.G. Cour : N° RG 24/00240 – N° Portalis DBVX-V-B7I-QB4E
COUR D’APPEL DE LYON
JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT
ORDONNANCE DE REFERE
DU 20 Janvier 2025
DEMANDERESSE :
S.A.S. LES EDITIONS MESSIGNAC représentée par son président en exercice M. [B]
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représentée par Me Loïc DUCHANOY de la SCP LDH AVOCATS, avocat au barreau de DIJON
DEFENDEUR :
M. [J] [N]
[Adresse 2]
[Localité 1]
avocat postulant : la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocats au barreau de LYON (toque 475)
avocat plaidant : Me Philippe GROS (cabinet ORATIO AVOCATS), avocat au barreau de LYON (toque 660)
Audience de plaidoiries du 06 Janvier 2025
DEBATS : audience publique du 06 Janvier 2025 tenue par Pierre BARDOUX, Conseiller à la cour d’appel de Lyon, délégataire du Premier Président dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées selon ordonnance du 2 septembre 2024, assisté de Sylvie NICOT, Greffier.
ORDONNANCE : contradictoire
prononcée le 20 Janvier 2025 par mise à disposition de l’ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile;
signée par Pierre BARDOUX, Conseiller et Sylvie NICOT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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EXPOSE DU LITIGE
M. [J] [N] a été embauché initialement par la société Tangram Finance à compter du 1er juin 2020 en qualité de rédacteur spécialisé.
L’ensemble du personnel a été transféré en application de l’article L. 1224-1 du Code du travail à compter du 1er février 2023 au sein de la S.A.S. Editions Messignac qui a pour activité principale la conception et l’édition de magazines.
Suite à des échanges infructueux concernant sa rémunération et notamment la partie variable, M. [N] a, par courriel du 29 mars 2023, entendu prendre acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de la société Editions Messignac.
Par acte du 19 juillet 2023, M. [N] a saisi le conseil de prud’hommes de Lyon afin de voir juger que la prise d’acte de la rupture ait les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Par jugement contradictoire du 11 juillet 2024, cette juridiction a notamment :
– condamné la société Editions Messignac à payer les sommes suivantes à M. [N] :
16 500 € outre 1 650 € de congés payés afférents au titre de rappel de rémunération variable pour l’année 2022,
11 156,25 € outre 1 115,62 € de congés payés afférents au titre de rappel de rémunération variable pour l’année 2023,
2 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
– fixé le salaire moyen des douze derniers mois à 3 235 € bruts,
– dit que les sommes attribuées à M. [N] au titre des rappels de salaires seront majorés des intérêts légaux à compter de la date de réception de la convocation de la société Editions Messignac devant le bureau de jugement du 9 novembre 2023.
M. [N] a interjeté appel de la décision le 8 août 2024 en limitant sa portée, concernant les condamnations prononcées par le conseil de prud’hommes, à celle qui lui alloué les sommes de 16 500 € et de 1 650 € de congés payés afférents au titre de rappel de rémunération variable pour l’année 2022.
Par acte du 21 novembre 2024, la société Editions Messignac a assigné en référé M. [N] devant le premier président aux fins d’arrêt de l’exécution provisoire en sollicitant que chaque partie conserve la charge de ses dépens.
A l’audience du 6 janvier 2025 devant le délégué du premier président, les parties, régulièrement représentées, s’en sont remises à leurs écritures, qu’elles ont soutenues oralement.
Dans son assignation, la société Editions Messignac soutient au visa de l’article 514 »3 du Code de procédure civile l’existence d’un moyen sérieux de réformation en ce que le conseil de prud’hommes n’a pas pris en compte le règlement de la somme de 12 659,60 € qu’elle a effectué le 5 mars 2024 au titre de la rémunération variable pour l’année 2022 ainsi que des congés payés afférents qu’elle estimait devoir.
S’agissant des conséquences manifestement excessives, la société Editions Messignac relève que sa situation financière est particulièrement préoccupante puisque ses disponibilités ne lui permettent pas de régler les condamnations prononcées à son encontre au profit de M. [N]. Elle explique que l’exécution provisoire risquerait d’entraîner des conséquences manifestement excessives au sens de l’article 514-3 du Code de procédure civile : dégradation supplémentaire de la trésorerie de la société, accroissement significatif de ses dettes sociales.
Dans ses conclusions déposées au greffe par RPVA le 23 décembre 2024, M. [N] s’oppose aux demandes de la société Editions Messignac et demande au délégué du premier président de condamner cette dernière à lui rembourser la somme de 128,74 € au titre de ses dépens et à lui payer la somme de 1 800 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
Il soutient l’absence de moyens sérieux de réformation concernant uniquement les sommes allouées par le conseil de prud’hommes au titre de la rémunération variable pour l’année 2022 et les congés payés afférents, qui sont seules discutées en appel, car la société Edtions Messignac avait reconnu par aveu judiciaire sa créance à ce titre à hauteur des condamnations prononcées, aveu suivi d’un versement de 12 659,60 € le 5 mars 2024. Il indique n’avoir pas l’intention de mettre à exécution la décision prud’homale sur le montant d’ores et déjà couvert par son employeur.
Il estime que l’erreur du conseil de prud’hommes qui n’a pas déduit le montant versé est sans conséquence sur l’exécution.
Il conteste l’existence de conséquences manifestement excessives au regard de l’insuffisance des pièces produites par la société Editions Messignac en relevant que l’attestation dressée par son expert-comptable utilise le conditionnel et est insuffisant à prouver la réalité de ses prétendues difficultés.
Elle réclame le paiement par la société Editions Messignac du montant des frais retenus par le commissaire de justice soit la somme de 128,74 €.
Dans ses dernières conclusions déposées au greffe par RPVA le 3 janvier 2024, la société Editions Messignac maintient les demandes contenues dans son assignation et sollicite le rejet de celles présentées par M. [N].
Le délégué du premier président a relevé d’office la question de son absence de pouvoir juridictionnel pour statuer sur les dépens de première instance ou sur l’affectation à l’une ou l’autre des parties des frais inhérents à l’exécution forcée de la décision de première instance.
Pour satisfaire aux dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour plus de précisions sur les faits, prétentions et arguments des parties, à la décision déférée, aux conclusions régulièrement déposées et ci-dessus visées, comme pour l’exposé des moyens à l’énoncé qui en sera fait ci-dessous dans les motifs.
PAR CES MOTIFS
Nous, Pierre Bardoux, délégué du premier président, statuant publiquement, en référé, par ordonnance contradictoire,
Vu la déclaration d’appel du 8 août 2024,
Rejetons la demande d’arrêt de l’exécution provisoire présentée par la S.A.S. Editions Messignac,
Déclarons M. [J] [N] irrecevable en sa demande en paiement de la somme de 128,74 €,
Condamnons la S.A.S. Editions Messignac aux dépens de ce référé et à verser à M. [J] [N] une indemnité de 800 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE
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