Cour d’appel de Lyon, 13 juillet 2018
Cour d’appel de Lyon, 13 juillet 2018

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Lyon

Thématique : Téléphonie : preuve de la surconsommation du salarié

Résumé

Une société a licencié un agent de sécurité pour faute grave en raison de l’utilisation abusive de son téléphone professionnel, entraînant des surconsommations de plus de 10 000 euros. L’employeur a accusé le salarié d’avoir détourné la carte SIM pour son usage personnel. Cependant, les preuves fournies, notamment un listing de surconsommation, étaient incohérentes et ne permettaient pas d’établir la responsabilité exclusive du salarié. En conséquence, le licenciement a été jugé sans cause réelle et sérieuse, entraînant une indemnisation de près de 23 000 euros, ainsi que 2 000 euros pour préjudice moral.

Licenciement pour faute grave

Une société a licencié un agent de sécurité pour faute grave pour utilisation à des fins privées du portable de la société ayant entraîné des surconsommations (plus de 10 000 euros). L’employeur reprochait au salarié d’avoir enlevé la carte SIM du téléphone portable mis à sa disposition pour la mettre dans son téléphone personnel (détournement du matériel professionnel à des fins personnelles).

Preuve des agissements fautifs

Il résulte des dispositions de l’article L.1231-1 du code du travail que le contrat à durée indéterminée peut être rompu à l’initiative de l’employeur ou du salarié; aux termes de l’article L.1232-1 du code du travail, le licenciement par l’employeur pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse. Il résulte des dispositions combinées des articles L 1232-1, L 1232-6, L 1234-1 et L 1235-1 du code du travail que devant le juge, saisi d’un litige dont la lettre de licenciement fixe les limites, il incombe à l’employeur qui a licencié un salarié pour faute grave, d’une part d’établir l’exactitude des faits imputés à celui-ci dans la lettre, d’autre part de démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien de ce salarié dans l’entreprise pendant la durée limitée du préavis.

Il ressortait des éléments factuels du dossier concernant les surconsommations téléphoniques établies par un listing fourni par la société ORANGE, que des connexions internet ont été effectuées par l’équipe de surveillance dont faisait partie le salarié licencié. Cependant des éléments apparaissaient incohérents et contradictoires :

– le listing attestant des dates, heures et durées de surconsommations ne permettait pas de retrouver les numéros de téléphones utilisés et ce alors qu’aux termes des factures produites, il apparaissait que la société possédait 7 téléphones et que seuls 4 téléphones auraient été abusivement utilisés ;

– un des numéros visés dans la lettre de licenciement n’apparaissait pas être attribué à la société ;

– il n’était pas établi que le salarié avait la responsabilité exclusive des téléphones qui étaient utilisés aux jours concernés (téléphones partagés) ;

– concernant l’utilisation loyale du matériel, la société n’a fait signer aucun document au salarié (charte ou autre) ;

Dans ces conditions, la société n’établissait pas les utilisations abusives.

Indemnisation du licenciement sans cause réelle et sérieuse

En application des articles L 1235-3 et L 1235-5 du code du travail, le salarié ayant eu une ancienneté supérieure à deux ans dans une entreprise occupant habituellement 11 salariés au moins, a pu prétendre, en l’absence de réintégration dans l’entreprise, à une indemnité qui ne pouvait être inférieure aux salaires des six derniers mois. Compte tenu de l’effectif de l’entreprise, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée, de son ancienneté de plus de 16 années, de ce qu’il n’a pu retrouver un nouvel emploi, le salarié a obtenu près de 23 000 euros d’indemnisation. Au regard des circonstances de la rupture intervenue brutalement alors que le salarié n’avait fait l’objet d’aucune sanction disciplinaire au préalable, le salarié a également obtenu 2000 euros à titre de dommages et intérêts pour son préjudice moral.

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