Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Douai
Thématique : Prolongation de la Rétention Administrative : Évaluation des Diligences et de la Régularité des Motifs
→ Résumé[S] [Z], ressortissant afghan, a été placé en rétention administrative le 27 novembre 2024. Le 30 novembre, un magistrat a prolongé cette rétention de 26 jours. [S] [Z] a interjeté appel, contestant la légalité de son placement. Le juge a confirmé que ses prérogatives se limitaient à vérifier la régularité de la décision. L’appel a été jugé recevable, et bien que [S] [Z] ait contesté l’application de l’article L. 751-10 du CESEDA, l’arrêté de placement a été justifié par son statut irrégulier. Les diligences administratives ont été considérées suffisantes, confirmant ainsi la prolongation de la rétention.
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COUR D’APPEL DE DOUAI
Chambre des Libertés Individuelles
N° RG 24/02391 – N° Portalis DBVT-V-B7I-V4U4
N° de Minute : 2356
Ordonnance du dimanche 01 décembre 2024
République Française
Au nom du Peuple Français
APPELANT
M. [S] [Z]
né le 01 Janvier 2000 à [Localité 3] AFGHANISTAN
de nationalité Afghane
Acteullement retenu au centre de rétention de [Localité 1]
dûment avisé, comparant en personne par visioconférence
assisté de Me Soizic SALOMON, avocat au barreau de DOUAI, Avocat (e) commis (e) d’office et de Mme [W] [J] interprète assermenté en langue dari, tout au long de la procédure devant la cour,
INTIMÉ
M. LE PREFET DU PAS DE CALAIS
dûment avisé, absent représenté par Maître Kao WIYAO, actis, avocat au barreau du Val de Marne
PARTIE JOINTE
M. le procureur général près la cour d’appel de Douai : non comparant
MAGISTRATE DELEGUEE : Stéfanie JOUBERT, conseillère à la Cour d’Appel de Douai désignéé par ordonnance pour remplacer le premier président empêché
assistée de Farid FERDI, greffier
DÉBATS : à l’audience publique du dimanche 01 décembre 2024 à 13 h 15
Les parties comparantes ayant été avisées à l’issue des débats que l’ordonnance sera rendue par mise à disposition au greffe
ORDONNANCE : rendue à Douai par mise à disposition au greffe le dimanche 01 décembre 2024 à
Le premier président ou son délégué,
Vu les articles L.740-1 à L.744-17 et R.740-1 à R.744-47 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) et spécialement les articles R 743-18 et R 743-19 ;
Vu l’aricle L 743-8 et L 922-3 al 1 à 4 du CESEDA ;
Vu l’ordonnance du juge du tribunal judiciaire de de BOULOGNE SUR MER en date du 30 novembre 2024 à 11 h 25 notifiée à 11 h 31 à M. [S] [Z] prolongeant sa rétention administrative ;
Vu l’appel interjeté par M. [S] [Z] par déclaration reçue au greffe de la cour d’appel de ce siège le 30 novembre 2024 à 16 h 31 sollicitant la main-levée du placement en rétention administrative ;
Vu le procès-verbal des opérations techniques de ce jour ;
Vu l’audition des parties, les moyens de la déclaration d’appel et les débats de l’audience ;
EXPOSE DES FAITS
[S] [Z], né le 1er janvier 2000, à [Localité 3] (Afghanistan) de nationalité afghane a fait l’objet d’un placement en rétention administrative ordonné par le préfet du Nord le 27 novembre 2024 et notifié le même jour à 18h , dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire.
Par décision du 30 novembre 2024, notifiée à 11h31, le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Boulogne-sur-Mer a ordonné la prolongation du placement en rétention administrative de [S] [Z] pour une durée de 26 jours.
[S] [Z], a interjeté appel de cette ordonnance le 30 novembre 2024 à 16h30.
Au soutien de son recours, [S] [Z] soutient les moyens suivants :
* sur la décision de placement en rétention :
– absence de base légale
* sur la prolongation de la mesure de rétention
– l’administration n’a pas accompli les diligences suffisantes dès son placement en rétention.
MOTIFS DE LA DÉCISION
De manière liminaire il est rappelé que le juge judiciaire ne peut se prononcer ni sur le titre administratif d’éloignement de l’étranger, ni, directement ou indirectement, sur le choix du pays de destination.
Les prérogatives judiciaires se limitent à vérifier la régularité et le bien fondé de la décision restreignant la liberté de l’étranger en plaçant ce dernier en rétention, ainsi qu’à vérifier la nécessité de la prolongation de la rétention au vu des diligences faites par l’administration pour l’exécution de l’expulsion et le maintien de la rétention dans la plus courte durée possible.
I – Sur la recevabilité de l’appel du requérant :
L’appel de [S] [Z] ayant été interjeté dans les formes et les délais légaux sera déclaré recevable.
II – Sur la décision de placement en rétention administrative :
Sur le défaut de base légale
[S] [Z] soutient que la décision de placement enr étention vise l’article L. 751-10 du CESEDA sans préciser sur lequel de ces alinéas elle fonde sa décision de placement.
Cet article indique : ‘Le risque non négligeable de fuite mentionné à l’article L. 751-9 peut, sauf circonstance particulière, être regardé comme établi dans les cas suivants :
1° L’étranger s’est précédemment soustrait, dans un autre Etat membre, à la détermination de l’Etat responsable de l’examen de sa demande d’asile ou à l’exécution d’une décision de transfert;
2° L’étranger a été débouté de sa demande d’asile dans l’Etat membre responsable ;
3° L’étranger est de nouveau présent sur le territoire français après l’exécution effective d’une décision de transfert ;
4° L’étranger s’est soustrait à l’exécution d’une précédente décision d’éloignement ;
5° L’étranger, aux fins de se maintenir sur le territoire français, a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d’identité ou de voyage ;
6° L’étranger a dissimulé des éléments de son identité, de son parcours migratoire, de sa situation familiale ou de ses demandes antérieures d’asile ; la circonstance tirée de ce qu’il ne peut justifier de la possession de documents d’identité ou de voyage en cours de validité ne peut toutefois suffire, à elle seule, à établir une telle dissimulation ;
7° L’étranger qui ne bénéficie pas des conditions matérielles d’accueil prévues au titre V du livre V ne peut justifier du lieu de sa résidence effective ou permanente ;
8° L’étranger qui a refusé le lieu d’hébergement proposé en application de l’article L. 552-8 ne peut justifier du lieu de sa résidence effective ou permanente ou si l’étranger qui a accepté le lieu d’hébergement proposé a abandonné ce dernier sans motif légitime ;
9° L’étranger ne se présente pas aux convocations de l’autorité administrative, ne répond pas aux demandes d’information et ne se rend pas aux entretiens prévus dans le cadre de la procédure de détermination de l’État responsable de l’examen de sa demande d’asile ou de l’exécution de la décision de transfert sans motif légitime ;
10° L’étranger s’est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5 ;
11° L’étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à la procédure de détermination de l’État responsable de l’examen de sa demande d’asile ou à la procédure de transfert ;
12° L’étranger a refusé de se soumettre à l’opération de relevé d’empreintes digitales prévue au 3° de l’article L. 142-1 ou a altéré volontairement ses empreintes digitales pour empêcher leur enregistrement.’
L’arrêté de placement en rétention est précisément motivé sur ce point puisqu’ il indique que l’intéressé est dépourvu de tout document justifiant la régularité de son entrée et de son séjour sur le territoire national; qu’il se trouve en situation irrégulière sur le territoire national: ne pouvant justifier du lieu de sa résidence effective ou permanente, se déclarant sans domicile fixe, et déclarant ne pas être demandeur d’asile auprès d’un Etat membre alors que ces propos sont contredits par la consultation d’Eurodac; qu’il doit être regardé omme se soustrayant à la détermination de l’Etat responsable de l’examen de sa demande d’asile ou à l’exécution d’une décision de transfert.
L’arrêté préfectoral de placement en rétention a ainsi considéré, au visa des articles L 751-9 et L 751-10, que l’étranger appelant, relevant d’une procédure dite ‘Dublin III’, présentait un ‘risque non négligeable de fuite’ rendant la restriction de liberté proportionnée audit risque.
Il en résulte que le grief tiré du défaut de base légale doit être écarté.
III – Sur la prolongation de la mesure de rétention administrative :
Sur les diligences de l’administration :
Selon la directive dite « Retour » n° 2008-115/CE du 16 décembre 2008, en son article 15 §1, ‘toute rétention est aussi brève que possible et n’est maintenue qu’aussi longtemps que le dispositif d’éloignement est en cours et exécuté avec toute la diligence requise’.
Il ressort de l’article L. 741-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile que l’administration doit justifier avoir effectué toutes les ‘diligences utiles’ suffisantes pour réduire au maximum la période de rétention de l’étranger.
En l’espèce, il ressort de la procédure que les services de la préfecture ont consulté la borne Eurodac et requiss la Bulgarie auprès duquel l’intéressé apparaissait avoir déposé une demande de protection internationale aux fins de reprise en charge, et ce dès le 27 novembre 2024, soit le jour de son placement en rétention administrative.
Ainsi, les diligences nécesssaires ont été entreprises par les autorités françaises, et dans un délai raisonnable.
Dès lors, ce moyen sera rejeté.
Conformément au droit communautaire, aucun moyen soulevé par les parties ou susceptible d’être relevé d’office ne paraît contraire à la prolongation de la rétention administrative.
Par conséquent, l’ordonnance de prolongation de la mesure de rétention administrative de [S] [Z] sera confirmée.
PAR CES MOTIFS
Déclare recevable l’appel formé par [S] [Z];
Confirme l’ordonnance de prolongation de la mesure de rétention administrative de [S] [Z], rendue par le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Boulogne-sur-Mer le 30 novembre 2024.
DISONS que la présente ordonnance sera communiquée au ministère public par les soins du greffe ;
DISONS que la présente ordonnance sera notifiée dans les meilleurs délais à M. [S] [Z] par l’intermédiaire du greffe du centre de rétention administrative par truchement d’un interprète en tant que de besoin, à son conseil et à l’autorité administrative ;
LAISSONS les dépens à la charge de l’État.
Farid FERDI,
greffier
Stéfanie JOUBERT, conseillère
A l’attention du centre de rétention, le dimanche 01 décembre 2024
Bien vouloir procéder à la notification de l’ordonnance en sollicitant, en tant que de besoin, l’interprète intervenu devant le premier président ou le conseiller délégué : Mme [W] [J]
Le greffier
N° RG 24/02391 – N° Portalis DBVT-V-B7I-V4U4
REÇU NOTIFICATION DE L’ORDONNANCE DU 01 Décembre 2024 ET DE L’EXERCICE DES VOIES DE RECOURS (à retourner signé par l’intéressé au greffe de la cour d’appel de Douai par courriel – [Courriel 2]) :
Vu les articles 612 et suivants du Code de procédure civile et R. 743-20 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile
Pour information :
L’ordonnance n’est pas susceptible d’opposition.
Le pourvoi en cassation est ouvert à l’étranger, à l’autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d’attente ou la rétention et au ministère public.
Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.
Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l’avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.
Reçu copie et pris connaissance le
– M. [S] [Z]
– par truchement téléphonique d’un interprète en tant que de besoin
– nom de l’interprète (à renseigner) :
– décision transmise par courriel au centre de rétention de pour notification à M. [S] [Z] le dimanche 01 décembre 2024
– décision transmise par courriel pour notification à M. LE PREFET DU PAS DE CALAIS et à Maître Soizic SALOMON Maître Xavier TERMEAU le dimanche 01 décembre 2024
– décision communiquée au tribunal administratif de Lille
– décision communiquée à M. le procureur général
– copie au tribunal judiciaire
Le greffier, le dimanche 01 décembre 2024
N° RG 24/02391 – N° Portalis DBVT-V-B7I-V4U4
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