Cour d’appel de Dijon, 24 octobre 2024, RG n° 22/00750
Cour d’appel de Dijon, 24 octobre 2024, RG n° 22/00750

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Dijon

Thématique : Le commencement de preuve en matière d’heures supplémentaires

 

Résumé

Dans l’affaire opposant Mme [G] [Y] à la société START PEOPLE, la cour a confirmé le jugement du conseil de prud’hommes, déclarant le licenciement de Mme [Y] sans cause réelle et sérieuse. La cour a également statué sur la demande de paiement d’heures supplémentaires, concluant que Mme [Y] avait fourni des éléments suffisants pour justifier sa demande. En conséquence, la société a été condamnée à verser des indemnités, incluant un rappel de salaire et des dommages-intérêts, tout en infirmant certaines demandes de la société concernant la légitimité du licenciement.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

24 octobre 2024
Cour d’appel de Dijon
RG n°
22/00750

S.A.S. START PEOPLE

C/

[G] [Y]

C.C.C le 24/10/24 à:

-Me

Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée le 24/10/24 à:

-Me

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE – AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE DIJON

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 24 OCTOBRE 2024

MINUTE N°

N° RG 22/00750 – N° Portalis DBVF-V-B7G-GCJL

Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de DIJON, section AD, décision attaquée en date du 03 Novembre 2022, enregistrée sous le n° 21/00170

APPELANTE :

S.A.S. START PEOPLE prise en la personne de ses représentants légaux en exercice domiciliés en cette qualité au siège social

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Anne GESLAIN de la SELARL DU PARC – MONNET – BOURGOGNE, avocat au barreau de DIJON, Me Aymeric DE LAMARZELLE de la SELARL ACTANCE, avocat au barreau de PARIS substituée par Maître Santhi TILLENAYAGANE, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :

[G] [Y]

[Adresse 3]

[Localité 2]

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro C212312024004617 du 24/06/2024 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Dijon)

représentée par Me Laurence BACHELOT de la SARL CANNET – MIGNOT, avocat au barreau de DIJON

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 19 septembre 2024 en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Rodolphe UGUEN-LAITHIER, conseiller chargé d’instruire l’affaire et qui a fait rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la Cour étant alors composée de :

Olivier MANSION, président de chambre,

Fabienne RAYON, présidente de chambre,

Rodolphe UGUEN-LAITHIER, conseiller,

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Juliette GUILLOTIN,

ARRÊT : rendu contradictoirement,

PRONONCÉ par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ par Olivier MANSION, Président de chambre, et par Juliette GUILLOTIN, Greffière, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

Mme [G] [Y] a été embauchée par la société START PEOPLE par un contrat à durée déterminée du 13 janvier 2020 en qualité de consultante junior, puis la relation de travail s’est poursuivie dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée à temps complet à compter du 6 juillet 2020.

Le 4 février 2021, elle a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 15 suivant, assorti d’une mise à pied à titre conservatoire.

Le 19 février 2021, elle a été licenciée pour faute grave.

Par requête du 19 mars 2021, elle a saisi le conseil de prud’hommes de Dijon afin de juger que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse, ou à tout le moins fondé sur une cause réelle et sérieuse, et condamner l’employeur aux conséquences indemnitaires afférentes, outre un rappel de salaire.

Par jugement du 3 novembre 2022, le conseil de prud’hommes de Dijon a accueilli ses demandes.

Par déclaration formée le 29 novembre 2022, la société START PEOPLE a relevé appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions du 22 février 2023, l’appelante demande de :

– infirmer le jugement déféré en ce qu’il :

* a dit que le licenciement ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse,

* l’a condamnée à lui verser les sommes suivantes :

– 143,91 euros à titre de rappel de salaire, outre 14,39 euros bruts au titre des congés payés afférents,

– 541 euros à titre d’indemnité légale de licenciement,

– 1 068 euros bruts à titre de rappel de salaire correspondant à la période de la mise à pied conservatoire, outre 106,80 euros au titre des congés payés afférents, – 1 852,51 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 185,25 euros au titre des congés payés afférents,

– 3 900 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

* a ordonné la production des documents légaux rectifiés en fonction de la décision soit les bulletins de paie, le certificat de travail et l’attestation Pôle Emploi,

* a dit que les condamnation prononcées emporteront intérêts aux taux légal à compter de la date de réception de la convocation du défendeur devant le bureau de conciliation, soit le 5 mai 2021 pour toutes les sommes de nature salariale,

* l’a déboutée de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

* l’a condamnée aux dépens,

– fixer la moyenne des salaires à 1 829,45 euros,

à titre principal,

– infirmer le jugement déféré en ce qu’il a jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse et reconnaitre le bien fondé du licenciement pour faute grave et débouter Mme [Y] de l’ensemble de ses demandes,

à titre subsidiaire,

– infirmer le jugement déféré en ce qu’il a jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse et reconnaître à tout le moins que le licenciement est pourvu d’une cause réelle et sérieuse,

– fixer l’indemnité légale de licenciement à 495 euros,

– fixer l’indemnité compensatrice de préavis à 1 mois de salaire, soit 1 829,45 euros,

– débouter la salariée du surplus de ses demandes,

à titre infiniment subsidiaire,

– limiter le quantum de l’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse à 1 mois de salaire faute pour Mme [Y] de démontrer un quelconque préjudice,

en tout état de cause,

– condamner Mme [Y] à lui verser 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions du 15 mai 2023, Mme [Y] demande de :

– confirmer le jugement déféré en ce qu’il a :

* dit que le licenciement ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse,

* condamné la société START PEOPLE à lui verser les sommes suivantes:

– 143,91 euros à titre de rappel de salaire, outre 14,39 euros bruts au titre des congés payés afférents,

– 541 euros à titre d’indemnité légale de licenciement,

– 1 068 euros bruts à titre de rappel de salaire correspondant à la période de la mise à pied conservatoire, outre 106,80 euros au titre des congés payés afférents,

– 1 852,51 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 185,25 euros au titre des congés payés afférents,

– 3 900 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

* ordonné la remise des documents légaux rectifiés,

* ordonné l’exécution provisoire,

à titre subsidiaire,

– condamner la société START PEOPLE au paiement des sommes suivantes :

* 541 euros à titre d’indemnité légale de licenciement,

* 1 068 euros bruts à titre de rappel de salaire pour la période de mise à pied à titre conservatoire, outre 106,80 euros bruts au titre des congés payés afférents,

* 1 852,51 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 185,25 euros bruts au titre des congés payés afférents,

– condamner la société START PEOPLE au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Pour l’exposé complet des moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

A titre liminaire, la cour relève que la société START PEOPLE développe un argumentaire sur la caractère contestable du jugement déféré du fait d’un défaut de motivation sans toutefois en tirer de conséquence en termes de nullité, se bornant à en solliciter l’infirmation sur le fond.

I – Sur le rappel de salaire :

Aux termes de l’article L.3171-2 alinéa 1er du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l’employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l’article L. 3171-3 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, l’employeur tient à la disposition de l’inspecteur ou du contrôleur du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.

Selon l’article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

Mme [Y] sollicite le paiement d’heures supplémentaires selon décompte produit en pièce n°9 établissant le nombre des heures réclamées à 13 heures réparties sur les semaines 31 à 33 et 40 à 43, soit la somme de 143, 31 euros à titre de rappel de salaire sur la base d’un taux horaire de 11,07 euros majoré de 25% pour les 8 premières heures supplémentaires travaillées, 50% pour les suivantes.

La cour considère que ces éléments sont suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’elle prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Après avoir rappelé qu’il incombe à la salariée d’apporter à tout le moins des commencements de preuve sur les heures supplémentaires qu’elle prétend avoir réalisées, la société START PEOPLE oppose que la demande formulée est dénuée de toute démonstration ou pièce en ce sens, la salariée se contentant d’affirmer qu’elle a réalisé des heures supplémentaires sans corroborer ses affirmations par la production d’un quelconque élément démontrant la réalisation des heures alléguées ni justification de l’activité réalisée pendant ces heures.

Elle ajoute que le décompte produit a été établi postérieurement à la relation de travail, qu’il ne vise nullement les heures d’arrivée et de départ de la salariée à son poste et aucune pièce ne fait apparaître la moindre demande d’heures supplémentaires de la part de sa hiérarchie ou de sa direction.

Néanmoins, contrairement à ce que la société START PEOPLE soutient, il ressort des pièces produites que le décompte de la salariée mentionne ses heures de début et de fin de service, le matin comme l’après-midi, ce qui permet de vérifier que les heures supplémentaires invoquées correspondent effectivement aux heures figurant dans son relevé d’heures.

Par ailleurs, peu important que ce relevé ait été réalisé pendant ou après la relation de travail, la cour relève que celui-ci n’apporte au débat aucun élément de nature à établir la durée du travail de la salarié sur la période considérée alors qu’il lui incombe d’assurer le contrôle des heures de travail effectuées. A cet égard, s’il est constant que seules les heures supplémentaires effectuées à la demande de l’employeur donnent droit à rémunération, l’absence d’autorisation préalable n’exclut pas un accord tacite de sa part. En l’occurrence, la société START PEOPLE ne saurait ne prévaloir du fait qu’elle n’a pas autorisé les heures supplémentaires que Mme [Y] réclame dès lors qu’elle n’est pas en mesure de démontrer qu’elle contrôlait son temps de travail.

En conséquence des développements qui précèdent, faute pour la société START PEOPLE de justifier du moindre élément de nature à remettre en cause la réalité des heures supplémentaires invoquées par Mme [Y], il sera alloué à cette dernière la somme de 143, 31 euros à titre de rappel de salaire, outre 14,33 euros au titre des congés payés afférents, le jugement déféré étant confirmé sur ce point.

II – Sur le bien fondé du licenciement :

La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise.

Il appartient à l’employeur de rapporter la preuve de la faute grave commise par le salarié.

Il est constant que lorsque les juges considèrent que les faits invoqués par l’employeur ne caractérisent pas une faute grave, ils doivent rechercher si ces faits n’en constituent pas moins une cause réelle et sérieuse de licenciement.

La lettre de licenciement du 19 février 2021, laquelle fixe les limites du litige, est rédigée dans les termes suivants :

« Nous avons été contraints de constater plusieurs manquements graves de votre part dans l’exercice de votre fonction.

Alors que l’une de vos missions en qualité de consultante consiste à démarcher des entreprises afin de mettre à disposition du personnel intérimaire, il s’avère que vous avez établi, à plusieurs reprises, de fausses propositions actives (PA).

En effet, nous avons constaté qu’un certain nombre de PA que vous avez saisi sur le logiciel Quattro comme étant des PA « réussies » n’étaient en réalité pas des PA mais des commandes servies consécutivement à des demandes de clients.

Ce constat a été établi en janvier 2021 après un diagnostic réalisé au sein de l’agence de [Localité 5] à l’arrivée de la nouvelle responsable d’agence. Ce diagnostic visait à examiner les axes d’amélioration et les dossiers prioritaires à traiter au sein de l’agence, ainsi que l’accompagnement à donner à l’agence et à ses membres.

Nous avons alors été surpris par le nombre important de PA effectuées au cours de ces derniers mois, alors que l’objectif fixé par la Direction est la réalisation de 5 PA par semaine.

En effet, vous avez réalisé :

o Aout 2020 : 121 PA

o Septembre 2020 : 272 PA

o Octobre 2020 : 165 PA

o Novembre 2020 : 169 PA

o Décembre 2020 : 198 PA

Fort de ce constat, nous avons procédé à une vérification plus approfondie des PA que vous avez effectuées et avons alors constaté que, depuis plusieurs mois, un certain nombre de PA avaient été falsifiées puisqu’elles répondaient en réalité à des commandes clients.

Notamment, nous avons relevé ces falsifi cations.

– PA « réussie » réalisée le 18 décembre 2020 à 7h46 pour le client SAS BAFFY concernant un poste de plaquiste : M. [R] [O]. Cette PA répond en réalité à une commande du client SAS BAFFY en date du 17 décembre 2020 à 11 h46 pour un plaquiste ;

– PA « réussie » réalisée le 24 novembre 2020 à 17h55 pour le client RESO concernant un poste d’agent de quai / manutentionnaire : M. [I] [D]. Cette PA répondait en réalité à une commande du client RESO en date du 24 novembre 2020 à 10h04 pour un manutentionnaire ;

– PA « réussie » réalisée le 24 novembre 2020 à 17h25 pour le client RESTALLIANCE concernant un poste de chef de cuisine : M. [H] [B]. Cette PA répondait en réalité à une commande du client RESTALLIANCE en date du même jour pour un chef de cuisine ;

– PA « réussie » réalisée le 11 septembre 2020 à 17h41 pour le client IDVERDE concernant un poste de paysagiste : M. [E] [T]. Cette PA répondait en réalité à une commande du client IDVERDE en date du 11 septembre 2020 à 16h11 pour un paysagiste ;

– PA « réussie » réalisée le 6 aout 2020 à 17h11 pour le client RESO concernant un poste de manutentionnaire : M. [F] [VF]. Cette PA répondait en réalité à une commande du client RESO en date du 6 aout 2020 à 14h47 pour un manutentionnaire ;

– PA « réussie » réalisée le 5 aout 2020 à 12h01 pour le client VDGS ALUMINIUM/SEPALUMIC concernant un poste de manutentionnaire : M. [W] [PU]. Cette PA répondait en réalité à une commande du client VDGS ALUMINIUM/SEPALUMIC en date du 5 aout 2020 à 10h45 pour un préparateur de commandes ;

– PA « réussie » réalisée le 4 aout 2020 à 18h00 pour le client ALDES concernant un poste d’agent logistique : M. [V] [L]. Cette PA répondait en réalité à une commande du client ALDES en date du 31 juillet 2020 pour un Technico-Commercial Magasin.

Lors de l’entretien du 15 février 2021, vous avez reconnu avoir saisi des PA consécutivement à des commandes clients.

En établissant ces fausses PA, vous avez délibérément manipulé le logiciel pour gonfler artificiellement vos résultats.

Il s’agit là d’une faute particulièrement grave puisque vous avez, d’une part, bafoué vos obligations contractuelles de loyauté et d’intégrité incombant à chaque salarié de l’entreprise, et d’autre part engagé votre responsabilité pénale. En eff et, le fait d’établir des documents falsifi és est constitutif du délit de faux et usage de faux, puni d’une peine de trois ans d’emprisonnement et de 45.000 € d’amende.

Un tel comportement, qu’aucune raison légitime ne saurait justifier, est intolérable et ne peut être cautionné au sein de notre entreprise.

Outre cette faute grave, nous avons constaté que vous ne respectez pas le process de l’entreprise en ce qui concerne le traitement des commandes clients.

En effet, vous positionnez systématiquement 1 candidat par commande.

Or, nous vous rappelons que le process impose de positionner plusieurs candidats sur la même commande de manière que le client puisse opérer un choix qui répond au mieux à ses besoins. Vous ne pouvez ignorer cette procédure alors que vous avez suivi le parcours complet d’intégration lors de votre arrivée au sein de notre entreprise.

Par ailleurs, vous faites preuve d’un manque cruel de rigueur dans la gestion des tâches qui vous sont confiées. Notamment, vous avez posté au mois de janvier 2021 une annonce d’offred’emploi pour le compte du client [M] mais celle-ci était incorrecte car elle ne répondait pas au besoin du client. L’annonce portait sur un poste de préparateur de commandes alors que l’entreprise désirait un cariste titulaire d’un Caces R489 2B pour réaliser du réapprovionnement de ligne en usine.

Également, vous faites régulièrement des erreurs lors de la rédaction des contrats de mission. A titre d’exemples, vous avez établi un contrat pour le client Chronopost sur un poste de chauffeur livreur mais n’avez pas indiqué le bon lieu de mission.

Les contrats pour M. [P] et [K] n’étaient pas corrects : il n’y était pas indiqué les sites de travail ni les références du poste de travail, ce qui a pour effet de générer des problèmes de facturation et d’intégration dans PILOTT.

Votre responsable de secteur, [S] [RE], et votre responsable, [J] [A], sont contraintes de vous alerter fréquemment sur des erreurs que vous avez commises.

Si l’accompagnement de chaque salarié par son responsable est un acte managérial normal, il est en revanche anormal que votre responsable et responsable de secteur soient contraintes de rectifier des erreurs que vous avez commises.

De tels manquements de votre part ont pour effet de porter atteinte à l’image de sérieux et au professionnalisme de notre société.

Enfin, nous ne pouvons accepter le comportement que vous avez à l’égard de votre responsable de secteur, [S] [RE], et de votre responsable d’agence, [J] [A].

En effet, vous contestez régulièrement les remarques qui vous sont faites, ce qui constitue une certaine insubordination de votre part à l’égard de votre hiérarchie.

Notamment, lors d’un entretien avec Mme [RE] le 1 er décembre 2020, alors que cette dernière vous a sensibilisé sur le comportement à adopter, vous vous êtes emportée avec colère, démontrant là encore le fait que vous n’acceptez aucune remarque.

Une telle attitude ne peut être tolérée. Chaque salarié(e) doit faire preuve de respect dans le cadre de ses relations de travail auprès de ses collègues et responsables.

Compte tenu de la gravité de l’ensemble de ce qui précède, votre maintien dans l’entreprise s’avère impossible.

En conséquence, nous sommes contraints de vous licencier pour faute grave.’ (pièce n°5)

Mme [Y] conteste son licenciement et soutient que :

s’agissant des supposées fausses propositions actives (PA) :

– contrairement à ce qui est indiqué dans la lettre de licenciement, elle n’a jamais reconnu lors de l’entretien préalable du 15 février 2021 avoir saisi des PA consécutivement à des commandes clients et les ‘PA réussies’ citées à titre d’exemple se justifient par le fait que les candidats avaient été au préalable proposés aux clients par téléphone. Il s’agissait donc de PA téléphoniques ayant engendré des commandes et non des commandes initiales passées par les clients. Les clients ayant répondu favorablement, des commandes étaient créées obligatoirement.

Le process veut que les PA soient saisies avant la création de la commande, et ce, dans l’attente des réponses clients afin de les clôturer (chaque vendredi). Une commande doit nécessairement être créée dans le logiciel QUATTRO afin que ce dernier puisse procéder à la « mise en contrat du candidat », c’est-à-dire créer automatiquement le contrat.

En tout état de cause, le process « répondre à une commande » versé aux débats par la société START PEOPLE, ne correspond pas au process à appliquer dans les exemples retenus dans la lettre de licenciement, dans lesquels les candidats avaient été au préalable proposés aux clients par téléphone. C’est en l’absence de commande clients que le process est différent (pièce n°13). Il n’y a donc aucun manquement de sa part et encore moins de falsification,

– la société ne justifie aucunement que ses homologues ne procèdent pas de cette façon alors que le tableau récapitulatif pour l’agence de [Localité 5] pour les mois de novembre et décembre 2020 et le tableau récapitulatif pour une autre agence de la région pour les mois de septembre, octobre, novembre et décembre 2020 qu’elle verse au débat (pièces n°14 et 15) démontrent que les nombre de PA, de clients, de prospects par semaine et par mois pour Mmes [U] et [CH] sont très proches des siens or aucune d’elles n’a été accusée de faux et usage de faux.

En outre, l’employeur semble lui reprocher d’avoir réalisé 103 PA sur l’année 2020 or ramené à la semaine, cela correspond à moins de 5 PA par semaine.

Enfin, la différence de taux de transformation des consultants au niveau national par rapport à elle (68% contre 80%) n’est pas énorme et il convient de prendre en compte la taille de l’agence, son secteur d’activité, …

– les commissions étant calculées sur le chiffre d’affaires, elles sont sans lien avec le nombre de PA et l’employeur ne justifie pas l’affirmation selon laquelle le nombre de PA réussies avait un impact direct sur le chiffre d’affaires collectif réalisé par les consultants de l’agence. Au contraire, une simulation du calcul mensuel de sa rémunération variable 2020 confirme que le nombre de PA, réussies ou pas, ne fait pas partie des données à remplir (pièce n°16), ce que confirme Mmes [VP] et [X] (pièces n°25 et 32),

– la société START PEOPLE ne produit aucun élément étayant le prétendu impact du nombre de propositions actives réussies sur son évaluation professionnelle, l’employeur n’ayant procédé à aucun entretien annuel d’évaluation,

– la lettre de licenciement comme les conclusions de l’employeur ne caractérisent nullement la prétendue exécution déloyale de son contrat de travail, la mention du délit de faux et usage de faux étant parfaitement grotesque.

s’agissant du supposé non-respect du process de l’entreprise :

– il ne s’agissait en aucun cas de positionner automatiquement un seul candidat. Cette situation se présentait lorsqu’il n’y avait pas de profil correspondant dans le vivier de l’agence. Il fallait alors trouver un profil et procéder à son inscription,

– contrairement à ce qu’indique l’employeur dans ses conclusions, dans l’hypothèse où seul un candidat correspondait au profil recherché, aucun process ni aucune demande de sa hiérarchie ne lui a été faite pour que cela soit spécifié,

– contrairement à ce qui est indiqué dans la lettre de licenciement, si elle devait effectivement suivre un parcours complet d’intégration, elle n’a pu le faire intégralement du fait de la crise sanitaire (pièces adverses n°12 et 13) et la société prétend qu’elle aurait suivi ces formations à distance sans en justifier. En tout état de cause, les formations à distance sont de courtes durées

et l’employeur se garde bien de justifier de leur contenu,

– le courrier électronique du 10 novembre 2021 de M. [N], directeur des opérations, transmettant en pièce jointe aux équipes un process sur les interfaces démontre que les dits process n’étaient pas clairs en février 2021 lorsqu’elle a quitté l’entreprise (pièce n°31).

s’agissant du supposé manque de rigueur :

– les contrats invoqués par l’employeur n’ont pas été rédigés par elle et son nom n’y apparaît d’ailleurs pas,

– si une erreur a été commise sur un contrat pour le client Chronopost pour un poste de chauffeur livreur, aucune précision n’est apportée quant à la date de rédaction de ce contrat de mission ni d’ailleurs aucune autre précision, de sorte qu’elle est dans l’incapacité d’apporter la moindre réponse à ce grief,

– les contrats de MM. [P] et [K] ont été établis pour le premier par la responsable secteur, Mme [RE] et la responsable d’agence, Mme [A] (pièce n°17) et pour le deuxième le 23 novembre 2020, date à laquelle elle était en RTT (pièces n° 18 et 19), de même que le 2 décembre 2020, date de l’erreur invoquée (pièce n°24),

– la seule et unique pièce versée par la société START PEOPLE est un courrier électronique de Mme [A] du 22 janvier 2021 (pièces adverse n°7) concernant le client [M]. L’erreur invoquée (avoir posté une annonce portant sur un poste de préparateur de commande alors que l’entreprise cherchait un cariste titulaire d’un CACES R489 2B) est légère pour justifier un licenciement pour faute grave, d’autant qu’elle était embauchée en qualité de consultante junior, donc débutante.

s’agissant de la supposée insubordination :

– ce grief est mensonger. Elle ne s’est jamais permise de manquer de respect à ses collègues et responsables. Elle a simplement contredit sa responsable, Mme [RE], qui lui reprochait à tort de ne pas avoir effectué un travail demandé. Mme [VP] atteste d’ailleurs du respect dont elle a toujours fait preuve (pièce n°25).

Au titre de la charge de la preuve qui lui incombe, la société START PEOPLE expose et produit les éléments suivants :

s’agissant de la falsification du nombre de PA :

– chaque salarié embauché suit un ‘parcours d’intégration’ comprenant des formations et du e-learning sur des sujets tels que l’utilisation du logiciel QUATTRO, les actions commerciales de recrutement (pièces n°12 et 13). Mme [Y] a naturellement été formée aux diverses modalités d’enregistrement des propositions actives (PA) que Mme [C], chargée de projets au sein de la société OneSys en charge de la formation au logiciel QUATTRO, explique clairement dans un courrier électronique (pièce n° 14),

– Mme [Y] a délibérément falsifié le logiciel QUATTRO sur lequel les consultants enregistrent l’ensemble des éléments clients et intérimaires, et notamment les PA en indiquant qu’elle avait réalisé des ‘propositions actives’ à plusieurs reprises alors qu’il s’agissait seulement de commandes de clients. Or le ‘process’ mis en place au sein de la société concernant le traitement des commandes et la gestion des PA est connu de Mme [Y] et il ne faut pas confondre la saisie des commandes des clients et les PA car les premières font suite à un besoin du client qui se tourne vers l’agence pour solliciter un candidat pour une mission donnée alors que les PA concernent les cas où l’agence suscite auprès du client un besoin, notamment en recevant un candidat. Les PA sont envoyées jusqu’à ce que le candidat soit placé et c’est seulement à ce moment-là que la PA doit être cochée en ‘PA réussie’. Ainsi, en enregistrant les commandes des clients en propositions actives, donc en besoin qu’elle aurait créé pour le client, Mme [Y] fait faussement croire à sa supérieure hiérarchique qu’elle serait compétente pour évoluer en qualité de consultante commerciale et bénéficier d’une augmentation de salaire,

– les éléments relevés par la société sur le logiciel QUATTRO contredisent les arguments de la salariée (pièce n°15), ce qu’elle a expressément reconnu tant lors de son entretien préalable que dans ses conclusions et lors de l’audience de jugement du 8 septembre 2022. Ainsi, il découle des données entrées par Mme [Y] qu’elle aurait réalisé 103 PA réussies sur l’année 2020, ce qui est largement au-dessus de ses homologues consultants sur le même secteur. En outre, le taux de transformation des PA de Mme [Y] (80%) est largement supérieur à celui effectué sur le territoire national (68%) (pièces n°19 et 20),

– l’objectif de réussir une PA est de créer de nouveaux partenaires pour la société. Or selon les données entrées par Mme [Y], elle a contacté moins d’entreprises que ses homologues consultants du même secteur qui ont une moyenne de 4,6 entreprises nouvelles contactées mais réalise un taux de transformation bien supérieur (pièce n°11),

– ces manquements sont d’autant plus graves que la salariée a bénéficié d’un accompagnement de sa responsable de secteur et d’un soutien tant du juridique que du service formation.

Néanmoins, nonobstant le fait que la société START PEOPLE procède par affirmation concernant le fait que la salariée aurait reconnu les faits lors de l’entretien préalable, aucun compte rendu de celui-ci n’étant produit, la cour constate en premier lieu qu’il ressort des conclusions de Mme [Y] que celle-ci ne discute pas la matérialité des saisies de ‘PA réussies’ qui lui sont reprochées mais justifie l’enregistrement auquel elle a procédé par le fait que les candidats avaient été au préalable proposés aux clients par téléphone, concluant qu’il s’agissait donc de PA téléphoniques ayant engendré des commandes et non des commandes initiales passées par les clients.

Or la société START PEOPLE ne produit aucun élément de nature à contredire cet argumentaire, se bornant rappeler que Mme [Y] était formée et informée de la procédure (‘process’) à mettre en oeuvre sans toutefois justifier du contenu des formations effectuées.

Par ailleurs, l’extrait de la procédure interne produit en pièce n°6 est peu explicite à cet égard, se limitant à distinguer la procédure applicable d’une part aux commandes d’un client et d’autre part aux propositions actives sans aucunement répondre au cas particulier soulevé par Mme [Y] d’une PA par téléphone. En effet, la procédure décrit la nécessité pour la salariée ‘d’exploiter tous les outils permettant d’identifier les entreprises correspondant au profil du candidat’, parle du fait de les contacter, sans préciser comment, et décrit une trame d’entretien auprès d’un prospect afin de se présenter elle-même et de présenter le candidat, pour au final indiquer que ‘dans tous les cas la PA est enregistrée dans quattro’, sans plus de précision sur le passage entre ‘PA’ et ‘PA réussie’.

Quant au courrier électronique de Mme [C] décrivant les trois chemins d’accès dont dispose le consultant pour enregistrer les PA depuis la fiche candidat, il s’agit avant tout d’un mode d’emploi du logiciel et non une définition des critères permettant de passer de ‘PA’ à ‘PA réussie’ (pièce n°14).

Dans ces conditions, étant par ailleurs relevé que Mme [Y] produit au débat deux tableaux récapitulatif d’activité (agence de [Localité 5] et une autre agence) démontrant un nombre de PA, de clients, de prospects hebdomadaires et mensuels similaires à d’autres consultants (pièces n°14 et 15), ce qui contredit les chiffres invoqués par l’employeur au soutien d’une pratique frauduleuse de sa part, et peu important que la pièce manuscrite n°13 de la salariée soit dépourvue de force probante, la société START PEOPLE échoue à démontrer en quoi l’enregistrement des ‘PA réussies’ effectué par Mme [Y] caractérise un manquement au process interne, de sorte que le grief n’est pas établi.

s’agissant du non-respect des ‘process’ :

– Mme [Y] a bénéficié de formations, certes en distanciel du fait de la crise sanitaire (pièce n°12), et pouvait consulter à tous moments le process c’ur de métier mis à sa disposition et sur lequel l’ensemble des procédures internes de la société sont rangées par item, les minutes juridiques des différents services, mais également l’ensemble des procédures et notes de service,

– bien que pleinement formée et informée, et alors qu’il lui était clairement spécifié de positionner plusieurs profils pour toute commande de client, elle a délibérément décidé de ne pas respecter les procédures mises en place, ce qu’elle reconnaît,

– dans l’hypothèse où elle ne disposait que d’un candidat correspondant au profil recherché, il lui appartenait de le spécifier à sa hiérarchie et au client, ce qu’elle n’a pas fait,

– l’affirmation selon laquelle le process aurait été différent en l’absence de commande client ne résulte que d’une pièce manuscrite qu’elle s’est constituée elle-même (pièce adverse n°13).

Néanmoins, étant rappelé qu’il est reproché à Mme [Y] de ‘positionner systématiquement 1 candidat par commande’ alors que le process impose de positionner plusieurs candidats sur la même commande de manière que le client puisse opérer un choix qui réponde au mieux à ses besoin, la cour constate avec la salariée qu’il ne ressort pas des pièces produites le moindre élément sur la conduite à tenir dans l’hypothèse où seul un candidat correspondait au profil recherché, pas plus qu’il n’est démontré qu’il lui appartenait dans ce cas de le spécifier à sa hiérarchie et au client. En effet, le courrier électronique de Mme [C] n’aborde pas cette question spécifique (pièce n°14), pas plus que les extraits de la procédure interne de traitement des commandes (pièce n°6).

Enfin, si la société START PEOPLE insiste sur le fait que la salariée a été formée et informée sur la mise en oeuvre des procédures internes, il n’est produit aucun élément sur le contenu de ces formations et il ne ressort pas des pièces produites, en particulier le courrier électronique de Mme [Z] (pièce n°13) la démonstration d’un exposé de la marche à suivre en cas de candidature unique sur une commande.

En conséquence, la société START PEOPLE échouant à démontrer en quoi le fait pour Mme [Y] de ‘positionner systématiquement 1 candidat par commande’ caractérise un manquement au process interne, le grief n’est pas établi.

Sur les manquements dans l’exécution de sa mission :

– Mme [Y] a pris connaissance de sa fiche de poste lors de son embauche, ce qu’elle ne conteste pas. Or celle-ci prévoit explicitement, au titre de la gestion, qu’elle aura la charge de ‘réaliser le contrat avant prise de poste’ (pièce n°2). Or elle mettait en ligne des annonces de poste erronées pour le compte des clients (pièce n°7), ce qu’elle ne conteste pas non plus,

– Mme [Y] a bénéficié d’une formation à distance sur les méthodes de recrutement le 4 décembre 2020 (pièce n°28) et si elle n’est effectivement pas signataire des contrats concernés, elle n’est pas moins à l’initiative de leur envoi puisqu’il s’agit des dossiers qu’elle suivait sauf à soutenir qu’elle a communiqué, sans relecture préalable ni vérifications, des contrats à ses clients.

Néanmoins, étant rappelé que ce grief se décline en deux faits distincts :

– d’une part avoir posté en janvier 2021 une annonce d’offre d’emploi (client [M]) erronée s’agissant de la désignation du profil de poste,

– d’autre part des erreurs lors de la rédaction des contrats de mission pour le client Chronopost (erreur sur le lieu de mission) et pour les salariés [P] et [K] (absence d’indication sur les sites de travail ou de référence du poste de travail),

la cour relève avec Mme [Y] qu’au delà du fait de ne pas être signataire des dits contrats, celle-ci justifie que le contrat [P] n’a pas été établi par elle (pièce n°17) et que pour le contrat [K] elle ne peut en être l’auteur puisque absente aux dates concernées (date de l’erreur ou date d’établissement du contrat – pièces n°18).

Par ailleurs, pour seule preuve de la responsabilité de Mme [Y] dans l’erreur du contrat Chronopost la société START PEOPLE produit un courrier électronique de Mme [A] du 22 janvier 2021 qui n’est qu’affirmatif à cet égard et ne précise pas sur quels éléments elle se fonde pour en attribuer la responsabilité à Mme [Y], ce qui ne saurait se déduire de sa fiche de poste lui confiant la tâche de réaliser le contrat avant prise de poste, ce d’autant qu’en démontrant que le contrat [P] a été établi par Mmes [RE] et [A], elle justifie que cette tâche ne relevait pas exclusivement d’elle.

Enfin, il ressort des conclusions des parties que Mme [Y] admet que l’erreur concernant le dossier [M] lui est imputable, arguant de son caractère léger et insuffisant pour justifier le licenciement pour faute grave d’une salariée débutante.

Il s’en déduit que ce grief n’est établi qu’en ce qui concerne l’erreur de rédaction du contrat [M].

Sur l’insubordination :

– Mme [Y] invoque des difficultés relationnelles avec sa responsable de secteur sans étayer cette fausse affirmation de la moindre pièce probante. Au contraire, elle admet dans ses conclusions avoir ‘contredit sa responsable, Madame [RE]’, en omettant le ton employé pour s’adresser à sa responsable, alors même que cette dernière a toujours été dans l’accompagnement de son équipe,

– Mme [RE] est un très bon manager aimé de ses équipes (pièces n°24 à 27).

Néanmoins, peu important les qualités professionnelles et humaines respectives de Mmes [RE] et [Y], il est fait grief à cette dernière de ‘s’être emportée’, le 1er décembre 2020, lors d’un entretien avec la première. Or nonobstant l’absence de précision sur les termes ou le ton susceptibles d’avoir été employés au cours de cet échange, la cour relève que pour établir la réalité de ce grief, la société START PEOPLE ne produit strictement aucun élément, pas même une attestation de Mme [RE] pourtant première concernée. Il n’est pas non plus produit le moindre élément de nature à contredire l’affirmation de la salariée selon laquelle elle a seulement exprimé une contradiction sans lui manquer de respect.

Il s’en déduit que le grief n’est pas établi.

En conséquence des développements qui précèdent, il ressort que seul le grief relatif à l’erreur de rédaction dans le contrat [M] est établi. Néanmoins, si ce manquement est imputable à Mme [Y] et permet de retenir une faute de sa part, le licenciement constitue une sanction disproportionnée par rapport à la faute commise.

Le jugement déféré qui a jugé que le licenciement de Mme [Y] est sans cause réelle et sérieuse sera donc confirmé.

Au titre des conséquences indemnitaires afférentes à un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la salariée demande la confirmation du jugement déféré en ce qu’il lui a alloué les sommes suivantes :

– 541 euros à titre d’indemnité légale de licenciement,

– 1 068 euros bruts à titre de rappel de salaire correspondant à la période de la mise à pied conservatoire, outre 106,80 euros au titre des congés payés afférents,

– 1 852,51 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 185,25 euros au titre des congés payés afférents,

– 3 900 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, sur la base d’un salaire moyen de référence s’établissant à la somme de 1 852,51 euros, moyenne des 12 derniers mois de salaire retenue par le conseil de prud’hommes.

La société START PEOPLE oppose que la moyenne des salaires s’établit à 1 829,45 euros et conclut au rejet de ses demandes au motif que le licenciement repose sur une faute grave.

Etant rappelé que le salaire moyen à prendre en compte pour le calcul de d’indemnité légale de licenciement et les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse s’établit sur la base des sommes effectivement perçues par la salariée sur les 12 ou 3 derniers mois, soit en l’espèce la somme de 1 829,45 euros, et qu’à la date du licenciement Mme [Y] justifiait d’une ancienneté de 1 an et 2 mois, durée du préavis conventionnel incluse, il lui sera alloué les sommes suivantes :

– 1 068 euros à titre de rappel de salaire sur la mise à pied conservatoire, outre 106,80 euros au titre des congés payés afférents,

le jugement déféré étant confirmé sur ce point,

– 533,58 euros à titre d’indemnité de licenciement,

– 1 829,45 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 182,29 au titre des congés payés afférents,

– 1 829,45 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse compte tenu des circonstances du licenciement, de la situation de la salariée et faisant application des dispositions de l’article L.1235-3 du code du travail,

le jugement déféré étant infirmé sur ces points.

III – Sur les demandes accessoires :

– sur les intérêts au taux légal :

Le jugement déféré qui a dit que les condamnation prononcées emporteront intérêts aux taux légal à compter de la date de réception de la convocation du défendeur devant le bureau de conciliation, soit le 5 mai 2021 pour toutes les sommes de nature salariale, et à compter du présent jugement pour toute autre somme sera confirmé.

– Sur la remise documentaire :

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a condamné la société START PEOPLE à remettre à Mme [Y] ses bulletins de paye, un certificat de travail et une attestation Pôle Emploi rectifiés.

– sur les frais irrépétibles et les dépens :

Le jugement déféré sera confirmé sur ces points.

La société START PEOPLE sera condamnée à payer à Mme [Y] la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

La demande de la société START PEOPLE au titre de l’article 700 du code de procédure civile à hauteur d’appel sera rejetée,

la société START PEOPLE succombant, elle sera condamnée aux dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

CONFIRME le jugement rendu le 3 novembre 2022 par le conseil de prud’hommes de Dijon sauf en ce qu’il a condamné la société START PEOPLE à payer à Mme [G] [Y] les sommes suivantes :

– 541 euros à titre d’indemnité légale de licenciement,

– 1 852,51 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 185,25 euros au titre des congés payés afférents,

– 3 900 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

CONDAMNE la société START PEOPLE à payer à Mme [G] [Y] les sommes suivantes :

– 533,58 euros à titre d’indemnité de licenciement,

– 1 829,45 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 182,29 au titre des congés payés afférents,

– 1 829,45 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

REJETTE la demande de Mme [G] [Y] au titre de l’exécution provisoire,

REJETTE la demande de la société START PEOPLE au titre de l’article 700 du code de procédure civile à hauteur d’appel,

CONDAMNE la société START PEOPLE aux dépens d’appel,

Ledit arrêt a été prononcé par mise à disposition au greffe le 24 octobre 2024, signé par M. Olivier MANSION, président de chambre et Mme Juliette GUILLOTIN, greffier.

Le greffier Le président

Juliette GUILLOTIN Olivier MANSION


 


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