Cour d’appel de Colmar, 28 janvier 2025, RG n° 24/02366
Cour d’appel de Colmar, 28 janvier 2025, RG n° 24/02366

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Colmar

Thématique : Honoraires d’Avocat : Contestation et Fixation en l’Absence de Convention

Résumé

Contexte de l’affaire

Madame [B] [J] a sollicité l’assistance de Maître [I] en juillet 2023 pour introduire un recours de plein contentieux au tribunal administratif de Strasbourg, concernant des allégations de harcèlement moral sur son lieu de travail à l’université de Strasbourg. Elle avait été engagée en tant que chargée de gestion administrative et financière.

Procédure initiale et désaccord sur les honoraires

Le recours préalable a été déposé par Maître [I] via Télérecours. Cependant, des désaccords sur les honoraires ont conduit à la rupture de leur relation professionnelle le 19 septembre 2023, sans qu’aucune convention d’honoraires ne soit signée. Par la suite, Maître [I] a saisi le bâtonnier pour la fixation de ses honoraires.

Décisions du bâtonnier et du tribunal

Le 4 janvier 2024, le bâtonnier a ordonné à Madame [J] de verser 2 700 € à Maître [I], ainsi qu’une somme de 100 € au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile. Cette décision a été déclarée exécutoire par le tribunal judiciaire de Strasbourg le 22 février 2024.

Appel et référé de Madame [J]

Le 27 juin 2024, Madame [J] a fait appel de l’ordonnance du bâtonnier et a assigné Maître [I] en référé le 16 juillet 2024, demandant l’arrêt de l’exécution provisoire et l’annulation du paiement de 2 700 €. Elle a également formulé diverses demandes de condamnation à l’encontre de l’avocat.

Ordonnance de la présidente de chambre

Le 19 août 2024, la présidente de chambre a ordonné l’arrêt de l’exécution provisoire et a déclaré irrecevables toutes les autres demandes de Madame [J].

Arguments de Madame [J]

Dans ses écritures, Madame [J] a soutenu que son appel était recevable, arguant qu’elle n’avait pas été informée des décisions du bâtonnier. Elle a également contesté la régularité des notifications et a demandé l’annulation des ordonnances pour non-respect du principe du contradictoire.

Réponse de Maître [I]

Maître [I] a contesté la recevabilité de l’appel, affirmant que Madame [J] n’avait pas respecté le délai d’un mois pour faire appel. Il a également précisé qu’il avait agi dans l’urgence pour éviter la forclusion et a maintenu sa demande de fixation d’honoraires.

Recevabilité de l’appel et annulation des ordonnances

Le tribunal a jugé que la notification des décisions n’avait pas été effectuée correctement, rendant l’appel de Madame [J] recevable. Cependant, il a rejeté sa demande d’annulation des ordonnances, considérant que le bâtonnier avait respecté les procédures de notification.

Fixation des honoraires

Le tribunal a constaté qu’aucune convention d’honoraires n’avait été signée, mais a jugé que Maître [I] avait droit à une juste indemnisation. Les honoraires ont été fixés à 1 200 € TTC, en tenant compte des diligences effectuées par l’avocat.

Rejet des autres demandes

Les autres demandes de Madame [J], notamment celles concernant la responsabilité de Maître [I], ont été rejetées, le tribunal n’ayant pas compétence pour statuer sur ces questions dans le cadre de la contestation des honoraires.

Conclusion de la décision

Le tribunal a déclaré le recours recevable, rejeté les demandes d’annulation des ordonnances, ordonné à Madame [J] de payer 1 200 € à Maître [I], et a débouté Madame [J] de ses autres demandes, y compris celles fondées sur l’article 700 du code de procédure civile.

N° RG 24/02366 – N° Portalis DBVW-V-B7I-IKPR

Minute N° : 8M 4/2025

Notification par

LRAR aux parties

Copie exécutoire à :

– Me [I]

Copie à :

– Mme le bâtonnier de l’ordre des avocats de [Localité 6]

le

Le greffier,

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE COLMAR

ORDONNANCE DU 28 JANVIER 2025

Audience publique tenue le 26 novembre 2024 par Madame CHURLET-CAILLET, première présidente de la cour d’appel de Colmar, assistée de Monsieur BIERMANN, greffier

Nature de l’affaire : contestation d’honoraires d’avocat

DEMANDERESSE :

Madame [B] [J]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Comparante, assistée de Monsieur [E] [D], dûment mandaté

DEFENDEUR :

Maître Roland HOUVER, avocat au barreau de Strasbourg

[Adresse 1]

[Localité 4]

Comparant

ORDONNANCE CONTRADICTOIRE du 28 Janvier 2025

prononcée publiquement par mise à disposition de l’ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

****

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS

Madame [B] [J] a contacté Maître [I] en juillet 2023 pour déposer au tribunal administratif de Strasbourg un recours de plein contentieux relatif à des faits de harcèlement moral qu’elle aurait subi à l’université de Strasbourg Unistra où elle avait été engagée comme chargée de gestion administrative et financière.

Le recours préalable obligatoire en matière indemnitaire a été transmis par Maître [I] par Télérecours au tribunal administratif.

De nombreux échanges ont eu lieu par la suite entre Madame [B] [J] et Maître [I]. L’absence d’accord sur les honoraires a mis fin aux relations entre les parties le 19 septembre 2023. Aucune convention d’honoraires n’a été signée.

Par requête du 26 octobre 2023 Maître [I] a saisi le bâtonnier de l’ordre des avocats de [Localité 6] aux fins de fixation de ses honoraires.

Par ordonnance du 4 janvier 2024, le bâtonnier a :

– ordonné et au besoin condamné Madame [J] à payer à Maître [I] la somme de 2 700 € outre les intérêts au taux légal à compter du 19 septembre 2023 ainsi que les entiers frais et dépens et notamment ceux occasionnés par la signification et l’exécution de la décision

-condamné Madame [J] à payer à Maître [I] la somme de 100 € au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile

– ordonné l’exécution provisoire de la décision pour le tout.

Cette ordonnance a été déclarée exécutoire par ordonnance du premier vice-président délégué du président du tribunal judiciaire de Strasbourg du 22 février 2024.

Madame [J] le 27 juin 2024 a fait appel de l’ordonnance du 4 juin 2024.

Elle a également assigné en référé le 16 juillet 2024 Maître [I] devant la première présidente de la cour d’appel de Colmar afin que soit ordonné l’arrêt de l’exécution provisoire de l’ordonnance rendue le 4 janvier 2024 par le bâtonnier de l’ordre des avocats de Strasbourg et celle rendue le 22 février 2024 par le président du tribunal judiciaire de Strasbourg. Elle sollicitait également l’annulation définitive du paiement de la somme de 2700 € et diverses condamnations de l’avocat, notamment en ce qui concerne tous les frais liés à l’exécution forcée de la décision du bâtonnier.

Par ordonnance mise à disposition le 19 août 2024 à laquelle il convient de se référer la présidente de chambre agissant sur délégation de la première présidente a ordonné l’arrêt de l’exécution provisoire et déclaré toutes autres demandes de Madame [J]

irrecevables.

Dans ses écritures du 9 octobre 2024 reprises oralement à l’audience, Madame [J] demande :

-que son recours déposé contre l’ordonnance du bâtonnier en date du 4 janvier 2024 et celle du président du tribunal judiciaire de Strasbourg du 22 février 2024 soit déclarée recevable et que soit ordonnée l’annulation de ces deux décisions.

-que soit annulée définitivement la somme de 2 700 € outre celle de 100 € réclamées ainsi que tous frais adjacents liés à l’exécution forcée par l’étude [U] et [G].

Subsidiairement,

‘ que soit condamné Maître [I] à lui verser 1 500 € de dommages-intérêts au titre de l’exécution forcée du paiement de la somme de 3 920,72 €, la somme de 2 700 € ayant été augmentée de frais de saisie-attribution

– que soit engagée la responsabilité civile professionnelle de Monsieur [I] qui sera mis en cause dans les juridictions civiles et pénales compétentes

-que Maître [I] soit condamné sur ce fondement à titre reconventionnel à la somme de 3 920,72 € outre les intérêts calculés postérieurement à la date du 26 juin 2024 du fait de l’exécution forcée injustifiée

-que Maître [I] soit condamné à lui payer la somme de 1500 € au titre des frais irrépétibles de l’article 700 du nouveau code de procédure civile

Maître [I] relève l’irrecevabilité de l’appel de Madame [J] pour ne pas avoir respecté le délai d’un mois en suite de l’ordonnance du bâtonnier.

Madame [J] objecte que son recours est recevable car elle n’a eu connaissance ni de la requête, ni de la décision du bâtonnier et n’a appris l’existence de cette dernière qu’à l’occasion de l’exécution forcée en recevant à son domicile un courrier du commissaire de justice la SCP [U] et [G] et que c’est auprès de ce dernier qu’elle a eu accès aux contenus des décisions rendues à son encontre. Elle précise qu’elle justifie de déplacements en Europe du 21 août au 23 novembre 2023 en sorte qu’elle n’était pas présente à son domicile.

Elle demande l’annulation :

-de l’ordonnance du 4 janvier 2024 et celle du 22 février 2024 pour non-respect du principe du contradictoire

-de la mesure d’exécution forcée

– de la demande de fixation d’honoraire initial de Maître [I].

A défaut, elle rappelle qu’aucune facturation d’honoraires n’est justifiée car aucune convention n’a été établie ni signée et aucun mandat n’a été donné à Maître [I].

Elle explique que Maître [I] a seulement transmis par télérecours au tribunal administratif un dossier entièrement préparé en amont par elle-même et un précédent avocat, Maître [I] ayant été seulement sollicité pour prendre la suite de ce dernier, outre éventuellement plusieurs procédures civiles et pénales à envisager. Les relations ayant rapidement cessé, elle fait valoir que Maître [I] n’a exposé aucun frais et n’a procédé à aucune diligence pour elle.

Elle expose que de plus Maître [I] n’ignorait pas qu’elle était en invalidité depuis juin 2022, que son état de santé était fragile et sa situation financière extrêmement précaire.

Elle évoque enfin de multiples manquements et harcèlements de l’avocat y compris dans la mise à exécution de la décision du bâtonnier, susceptibles d’engager sa responsabilité civile et pénale et desquels elle conclut à sa condamnation à lui payer des dommages et intérêts et remboursements.

Maitre [I] rappelle qu’il est intervenu dans l’urgence compte tenu de la forclusion encourue si la requête devant le tribunal administratif n’était pas déposée rapidement. Il a informé madame [J] de ses tarifs et celle-ci a proposé de tenir compte des barèmes de l’assureur de protection juridique pour chacune des procédures engagées.

Il ajoute que cependant Madame [J] n’a pas signalé le sinistre à son assureur et que compte tenu de l’attitude de la cliente, il a mis fin à leur relation.

Il maintient sa demande de fixation d’honoraires telle que présentée devant le bâtonnier.

Il tient pour inacceptables les écrits et les propos tenus par cette dernière y compris à l’occasion de l’instance présente.

PAR CES MOTIFS

DISONS le recours recevable,

REJETONS la demande d’annulation de l’ordonnance du bâtonnier de l’ordre des avocats de Strasbourg du 4 janvier 2024 et de l’ordonnance sur requête du président du tribunal judiciaire de Strasbourg du 22 février 2024,

ORDONNONS et au besoin condamnons madame [J] à payer à Maître [I] la somme de 1 200 € avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision,

DÉBOUTONS Madame [J] du surplus de ses demandes en ce compris celles relatives à une condamnation sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNONS madame [J] aux dépens.

Le Greffier La Première présidente

 


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