Cour d’appel de Bordeaux, 25 novembre 2024, RG n° 22/00764
Cour d’appel de Bordeaux, 25 novembre 2024, RG n° 22/00764

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Bordeaux

Thématique : Conflit sur la preuve des obligations contractuelles dans un contexte matrimonial complexe

Résumé

Contexte matrimonial et séparation des biens

M. [R] [U] et Mme [O] [C] [V] se sont mariés le 21 avril 1990 sous le régime de la communauté légale, avant d’adopter le régime de la séparation de biens par jugement d’homologation le 12 décembre 1992. M. [U] est gérant unique de la société CTI [U] Bâtiment, immatriculée le 31 mars 2015. Le divorce a été prononcé par le tribunal judiciaire de Bordeaux le 9 juin 2022, mais la liquidation du régime matrimonial reste en suspens.

Patrimoine immobilier des époux

Le patrimoine indivis des époux comprend deux biens immobiliers : un immeuble à usage d’habitation, ancien domicile conjugal, occupé par M. [U], et un immeuble générant des revenus fonciers, composé de quatre appartements et d’une maison. M. [U] possède également deux autres immeubles à Mérignac et quatre parts de la SCI ACS, tandis que Mme [V] détient un immeuble à Mérignac et quatre parts de la même SCI.

Litige concernant des travaux réalisés

La société CTI [U] Bâtiment a assigné Mme [V] et M. [U] en juillet 2019 pour obtenir le paiement de travaux réalisés, incluant une facture de 19 720,80 euros pour des travaux sur un bien propre de Mme [V] et deux factures totalisant 104 061,65 euros pour des travaux effectués dans l’ancien logement familial. Le tribunal a débouté la société de ses demandes contre Mme [V] mais a condamné M. [U] à payer la somme de 104 061,65 euros.

Appel de la société CTI [U] Bâtiment

La société CTI [U] Bâtiment a fait appel du jugement, contestando le débouté de ses demandes contre Mme [V] et la condamnation de M. [U]. Elle a demandé la réformation du jugement pour obtenir le paiement des factures contestées et la confirmation de la condamnation de M. [U].

Arguments des parties en appel

Les parties ont présenté des conclusions variées. La société CTI [U] Bâtiment a soutenu que les travaux avaient été réalisés sur des biens indivis et a demandé des condamnations in solidum. M. [U] a contesté sa condamnation à payer la somme de 104 061,65 euros, tandis que Mme [V] a demandé la confirmation du jugement initial et des dommages et intérêts pour procédure abusive.

Décision de la cour

La cour a examiné les demandes en paiement, notamment celles relatives aux factures de 2017. Elle a constaté que les travaux avaient été réalisés sur des biens personnels et indivis, sans preuve suffisante de l’accord de Mme [V] pour le paiement. La cour a confirmé le jugement initial, rejetant les demandes de la société CTI [U] Bâtiment et condamnant celle-ci aux dépens et à verser des frais irrépétibles à Mme [V].

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

————————–

ARRÊT DU : 25 NOVEMBRE 2024

N° RG 22/00764 – N° Portalis DBVJ-V-B7G-MRKQ

S.A.R.L. CTI [U] BATIMENT

c/

[R] [U]

[O] [C] [V] épouse [U]

Nature de la décision : AU FOND

Copie exécutoire délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 13 janvier 2022 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de bordeaux (RG : 19/06424) suivant déclaration d’appel du 14 février 2022

APPELANTE :

S.A.R.L. CTI [U] BATIMENT agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

Activité : , demeurant [Adresse 5] – [Localité 6]

Représentée par Me Charlotte MOUSSEAU de la SCP LAYDEKER – SAMMARCELLI – MOUSSEAU, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉS :

[R] [U]

né le 23 Novembre 1963 à [Localité 8] (Portugal)

de nationalité Française

demeurant [Adresse 5] – [Localité 6]

Représenté par Me Alrick METRAL de l’ASSOCIATION METRAL ET PENAUD-METRAL, avocat au barreau de BORDEAUX

[O] [C] [V] épouse [U]

née le 05 Mai 1967 à [Localité 7] (Portugal)

de nationalité Portugaise,

demeurant [Adresse 3] – [Localité 2]

Représentée par Me David LEMEE, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 14 octobre 2024 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Bénédicte LAMARQUE, conseiller, qui a fait un rapport oral de l’affaire avant les plaidoiries,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Paule POIREL, présidente,

Bénédicte LAMARQUE, conseiller,

Emmanuel BREARD, conseiller,

Greffier lors des débats : Vincent BRUGERE

ARRÊT :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

* * *

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE

M. [R] [U] et Mme [O] [C] [V] se sont mariés le 21 avril 1990 sous le régime de la communauté légale et ont adopté, par jugement d’homologation rendu le 12 décembre 1992, le régime de la séparation de biens.

M. [U] est gérant unique de la société CTI [U] Bâtiment, immatriculée le 31 mars 2015.

Par jugement du tribunal judiciaire de Bordeaux en date du 9 juin 2022, le divorce a été prononcé, l’ordonnance de non-conciliation du 5 décembre 2017 ayant attribué la jouissance du domicile conjugal à l’époux, à titre onéreux. La liquidation du régime matrimonial n’est pas encore réglée.

Le patrimoine indivis des époux [U] – [V] comporte deux biens immobiliers :

– un immeuble à usage d’habitation, situé [Adresse 5] à [Localité 6], qui

constituait l’ancien domicile conjugal, occupé par M. [U] seul ;

– un immeuble composé de quatre appartements et d’une maison, procurant des revenus fonciers, situé [Adresse 1] à [Localité 6].

L’époux est par ailleurs propriétaire de deux immeubles à usage d’habitation situés à Mérignac et de quatre parts de la SCI ACS.

L’épouse est de son côté propriétaire d’un immeuble à usage d’habitation, situé à Mérignac, et de quatre parts de la SCI ACS.

Les époux ont fait le choix, sur les années de vie commune, d’effectuer ou de faire effectuer des travaux dans divers biens indivis ou personnels de Mme [V].

Par acte d’huissier du 11 juillet 2019, la société CTI [U] Bâtiment a fait assigner Mme [V] et M. [U] devant le tribunal de grande instance de Bordeaux aux fins, notamment, d’obtenir le paiement par Mme [V] d’une facture d’un montant de 19 720,80 euros pour le paiement de travaux réalisés sur un bien propre et par Mme [V] et M. [U], in solidum, de deux factures totalisant la somme de 104 061,65 euros correspondant à des travaux effectués dans l’ancien logement familial.

Par jugement contradictoire du 13 janvier 2022, le tribunal judiciaire de Bordeaux a :

– débouté la société CTI [U] Bâtiment de l’ensemble de ses demandes formées à l’encontre de Mme [V] ;

– condamné M. [U], conformément à sa demande, à payer à la société CTI [U] Bâtiment la somme de 104 061,65 euros ;

– condamné la société CTI [U] Bâtiment à payer à Mme [V] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– débouté les parties du surplus de leurs prétentions ;

– condamné in solidum la société CTI [U] et M. [U] aux dépens.

La société CTI [U] Bâtiment a relevé appel de ce jugement par déclaration du 14 février 2022, en ce qu’il a :

– débouté la société CTI [U] Bâtiment de l’ensemble de ses demandes formées à l’encontre de Mme [V] ;

– condamné M. [U], conformément à sa demande, à payer à la société CTI [U] Bâtiment la somme de 104 061,65 euros ;

– condamné la société CTI [U] Bâtiment à payer à Mme [V] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– débouté les parties du surplus de leurs prétentions ;

– condamné in solidum la société CTI [U] et M. [U] aux dépens.

Par dernières conclusions déposées le 26 octobre 2022, la société CTI [U] Bâtiment demande à la cour de :

– réformer le jugement en ce qu’il a :

– débouté la société CTI [U] Bâtiment de ses demandes en paiement au titre des factures du 12 juillet 2017 et du 21 octobre 2017 à l’égard de Mme [V] ;

– condamné la société CTI [U] Bâtiment à verser à Mme [V] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné la société CTI [U] Bâtiment aux dépens ;

– confirmer le jugement pour le surplus.

Statuant à nouveau :

– condamner Mme [V] à verser à la société CTI [U] Bâtiment une somme de 19 720,80 euros TTC au titre de la facture établie le 12 juillet 2017 par la société CTI [U] Bâtiment, avec intérêt au taux légal à compter de l’assignation ;

– condamner in solidum Mme [V] et M. [U] à verser à la société CTI [U] Bâtiment une somme de 100 903 euros TTC au titre de la facture établie le 21 octobre 2017 par la société CTI [U] Bâtiment, avec intérêt au taux légal à compter de l’assignation ;

– débouter Mme [V] de ses demandes ;

– condamner in solidum Mme [V] et M. [U] à verser à la société CTI [U] Bâtiment une somme de 6 000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamner in solidum Mme [V] et M. [U] aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP Laydeker Sammarcelli Mousseau, avocats, sous ses affirmations de droit.

Par dernières conclusions déposées le 21 juillet 2022, M. [U] demande à la cour de :

– réformer le jugement datant du 13 janvier 2022 en ce qu’il a condamné M. [U] à payer à la société CTI [U] Bâtiment la somme de 104 061,65 euros.

Statuant de nouveau :

– condamner in solidum Mme [V] et M. [U] à verser à la société CTI [U] Bâtiment une somme de 104 061,65 euros au titre de deux factures établies les 21 octobre 2017 et 8 juillet 2019 par la société CTI [U] Bâtiment ;

– débouter Mme [V] de toute autre demande ;

– débouter la CTI [U] Bâtiment de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile à l’égard de M. [U] ;

– débouter la CTI [U] Bâtiment de sa demande de condamnation aux entiers dépens envers M. [U] ;

– condamner Mme [V] à verser à M. [U] la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamner Mme [V] aux dépens d’appel.

Par dernières conclusions déposées le 5 août 2022, Mme [V] demande à la cour de :

– déclarer la société CTI [U] Bâtiment recevable mais non fondée en son appel ;

– confirmer le jugement du 13 janvier 2022 en ce qu’il a débouté la société CTI [U] Bâtiment de l’ensemble de ses demandes à l’égard de Mme [V] ;

– le réformer en que la demande de Mme [V] en dommages et intérêts pour procédure abusive a été rejetée ;

– débouter la société CTI [U] Bâtiment de l’ensemble de ses demandes ;

– débouter M. [U] de ses demandes ;

– condamner la société CTI [U] Bâtiment à verser à Mme [V] la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive outre 4 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

L’affaire a été fixée à l’audience rapporteur du 14 octobre 2024.

L’instruction a été clôturée par ordonnance du 30 septembre 2024.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Dans les limites de sa saisine,

Confirme le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

Condamne la CTI [U] Bâtiment à verser à Mme [V] la somme complémentaire de 4.000 euros au titre des frais irréptibles engagés en cause d’appel,

Condamne la CTI [U] Bâtiment aux dépens.

Le présent arrêt a été signé par Paule POIREL, présidente, et par Vincent BRUGERE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,

 


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