Cour d’appel d’angers, 21 juin 2022, N° RG 18/00317
Cour d’appel d’angers, 21 juin 2022, N° RG 18/00317

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel d’Angers

Résumé

La SAS Etablissements Dutertre a obtenu une ordonnance le 27 janvier 2017, condamnant M. [O] à payer 7 811,84 euros pour des factures impayées. Après opposition de M. [O], le tribunal d’instance d’Angers a confirmé la dette le 4 décembre 2017, le condamnant également à 800 euros de frais de justice. En appel, M. [O] a contesté la décision, arguant que la SAS n’avait pas prouvé l’existence de la dette. Cependant, la cour d’appel a confirmé le jugement initial, considérant que la SAS avait fourni des preuves suffisantes et a débouté M. [O] de sa demande de délais de paiement.

COUR D’APPEL

D’ANGERS

CHAMBRE A – CIVILE

CM/IM

ARRET N°:

AFFAIRE N° RG 18/00317 – N° Portalis DBVP-V-B7C-EIK6

Jugement du 04 Décembre 2017

Tribunal d’Instance d’ANGERS

n° d’inscription au RG de première instance 17/00519

ARRET DU 21 JUIN 2022

APPELANT :

Monsieur [F] [O]

né le 04 Novembre 1957 à [Localité 5] (49)

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Philippe LANGLOIS de la SCP ACR AVOCATS, avocat au barreau d’ANGERS – N° du dossier 71180087

INTIMEE :

S.A.S. ETABLISSEMENTS DUTERTRE

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Amélie ROUSSELOT substituant Me Paul HUGOT de la SELARL LEXCAP, avocat au barreau de SAUMUR – N° du dossier 22380246

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue publiquement à l’audience du 06 Décembre 2021 à 14 H 00, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame MULLER, Conseiller faisant fonction de Président, qui a été préalablement entendue en son rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame ROUSTEAU, Présidente de chambre

Madame MULLER, Conseiller

Madame REUFLET, Conseiller

Greffière lors des débats : Madame LEVEUF

ARRET : contradictoire

Prononcé publiquement le 21 juin 2022 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l’article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Catherine MULLER, Conseiller, en remplacement de Sylvie ROUSTEAU, Présidente de chambre, empêchée, et par Christine LEVEUF, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

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Exposé du litige

La SAS Etablissements Dutertre qui exerce une activité de commerce de gros de céréales, de semences et d’aliments pour bétail a obtenu le 27 janvier 2017 une ordonnance enjoignant à M. [F] [O] de lui payer la somme de 7 811,84 euros en principal au titre de factures impayées, avec intérêts au taux légal à compter du 6 décembre 2016.

Par déclaration adressée au greffe le 14 mars 2017, M. [O] a formé opposition à cette ordonnance qui lui a été signifiée le 16 février 2017.

Par jugement en date du 4 décembre 2017, le tribunal d’instance d’Angers a déclaré l’opposition formée par M. [O] recevable mais non fondée, a mis à néant l’ordonnance entreprise et, statuant à nouveau, a :

– condamné M. [O] à payer à la SAS Etablissements Dutertre la somme de 7 811,84 euros en principal, outre les intérêts au taux légal à compter du 6 décembre 2016

– débouté M. [O] de sa demande de délais de paiement

– condamné M. [O] à payer à la SAS Etablissements Dutertre la somme de 800 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile et rejeté sa demande au même titre

– ordonné l’exécution provisoire

– condamné M. [O] aux dépens en ce compris les dépens liés à la procédure en injonction de payer.

Suivant déclaration en date du 16 février 2018, M. [O] a relevé appel de ce jugement en ce qu’il a déclaré son opposition non fondée, l’a condamné à payer à la SAS Etablissements Dutertre les sommes de 7 811,84 euros en principal, outre intérêts, et de 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, a rejeté sa demande au même titre et l’a condamné aux dépens, intimant cette société.

Par ordonnance de référé en date du 11 avril 2018, le premier président de la cour d’appel a rejeté la demande d’arrêt de l’exécution provisoire présentée par l’appelant et l’a condamné à payer à l’intimée la somme 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 18 mars 2020.

L’audience initialement prévue du 27 avril 2020 ayant été supprimée dans le contexte de la pandémie de Covid-19, l’affaire a été reportée à l’audience du 23 novembre 2020 puis défixée et renvoyée à celle du 6 décembre 2021.

Dans ses dernières conclusions en date du 19 mars 2018, M. [O] demande à la cour, le recevant en son appel, au visa de l’article 1353 alinéa 1er du code civil, de :

– infirmer le jugement entrepris

– dire la SAS Etablissements Dutertre non recevable, en tout cas non fondée en ses demandes en paiement dirigées contre lui et l’en débouter

– le décharger intégralement des condamnations prononcées contre lui tant à titre principal qu’au titre de l’article 700 du code de procédure civile ou des dépens

– condamner la SAS Etablissements Dutertre à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de ses frais irrépétibles par application de l’article 700 du code de procédure civile

– très subsidiairement, pour le cas où il serait déclaré débiteur de tout ou partie des sommes réclamées par la SAS Etablissements Dutertre, lui accorder les plus larges délais de paiement

– rejeter toutes prétentions contraires comme non recevables, en tout cas non fondées

– condamner la SAS Etablissements Dutertre aux dépens de première instance et d’appel, lesquels seront recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

Il fait valoir que la SAS Etablissements Dutertre ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe en vertu de l’article 1353 du code civil, de l’obligation dont elle demande l’exécution et que ni les factures ni l’absence de contestation à réception de réclamations du prétendu créancier ne suffisent à en établir la réalité, même si la preuve est libre en matière commerciale, d’autant que le litige n’est pas commercial.

Il note que l’argument tiré d’un usage constant de mars 2011 à septembre 2013 selon lequel il acquittait les factures qui lui étaient présentées sans bon de commande ni bon de livraison signé par lui se retourne contre la SAS Etablissements Dutertre car on ne voit pas pourquoi il aurait cessé cette pratique à compter d’octobre 2013, qu’il a tout simplement refusé de payer les factures qui ne correspondent pas à des livraisons effectives, qu’on imagine mal la SAS Etablissements Dutertre continuer à lui livrer les marchandises en 2014 et 2015 sans être payée, que certains des bons de livraisons produits en première instance ont été signés, mais pas par lui, ce qui confirme que dans les relations entre les parties les bons de livraison devaient être signés et n’exclut donc pas que les marchandises n’aient pas été livrées chez lui, que la SAS Etablissements Dutertre devait en sa qualité de professionnel s’assurer de la traçabilité de ses livraisons, ce qu’elle n’a pas fait, que la circonstance que les bons de livraisons émis unilatéralement soient conformes aux factures émises tout aussi unilatéralement ne peut pas davantage constituer la preuve requise et que, s’il avait entendu reconnaître le bien fondé des prétentions de celle-ci, il aurait fait des offres de paiement par écrit.

Dans ses dernières conclusions d’intimé en date du 17 avril 2018, la SAS Etablissements Dutertre demande à la cour de confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions, de débouter M. [O] de toutes ses demandes et de le condamner à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel, ainsi qu’aux entiers dépens d’appel.

Rappelant que le montant réclamé en principal correspond au total des factures de livraisons d’orge pour l’alimentation des animaux de M. [O] restant impayées, hors agios facturés par ailleurs, elle approuve la motivation du premier juge sur l’usage suivi entre les parties de ne pas établir de bon de commande ni faire signer de bon de livraison, sur la correspondance en tous points des bons de livraison et des factures et sur l’absence de contestation de l’existence de sa dette par le débiteur à réception des différents courriers qui lui ont été adressés.

Elle souligne que M. [O] ne rapporte aucune preuve de nature à contredire les modalités antérieures des relations d’affaires entretenues entre les parties conformément à un usage habituel en matière agricole, n’a que très partiellement exécuté les plans d’apurement de sa dette qu’elle lui a proposés et qu’il a acceptés, n’a jamais émis la moindre contestation concernant la marchandise livrée, la réalité des livraisons ou la qualité des produits livrés et n’a jamais remis en question sa facturation.

Elle s’oppose à l’octroi de nouveaux délais à l’appelant qui s’est déjà accordé lui-même des délais importants en abusant de sa bonne volonté.

Sur ce,

L’irrecevabilité des demandes adverses soulevée par l’appelant au dispositif de ses conclusions sans développer aucun moyen au soutien de cette prétention constitue une clause de style qui, conformément à l’article 954 du code de procédure civile, ne saisit pas la cour.

Ceci précisé, les factures dont la SAS Etablissements Dutertre réclame paiement à M. [O] sont les suivantes :

– partie de la facture «VTE APPRO 039479» en date du 6 novembre 2013 d’un montant de 1 212,78 euros TTC, sur lequel reste dû un solde de 242,24 euros, relative à la fourniture de 5,06 tonnes d’orge selon bon de livraison n°192275 en date du 31 octobre 2013

– totalité de la facture «VTE APPRO 041434» en date du 9 janvier 2014 d’un montant de 1 236,93 euros TTC relative à la fourniture de 5,02 tonnes d’orge selon bon de livraison n°193463 en date du 7 janvier 2014

– totalité de la facture «VTE APPRO 043232» en date du 17 mars 2014 d’un montant de 1 212,29 euros TTC relative à la fourniture de 4,92 tonnes d’orge selon bon de livraison n°194380 en date du 10 mars 2014

– totalité de la facture «VTE APPRO 045846» en date du 16 mai 2014 d’un montant de 1 399,55 euros TTC relative à la fourniture de 5,68 tonnes d’orge selon bon de livraison n°195749 en date du 15 mai 2014

– totalité de la facture «VTE APPRO 048499» en date du 12 août 2014 d’un montant de 728,79 euros TTC relative à la fourniture de 3,14 tonnes d’orge selon bon de livraison n°197958 en date du 11 août 2014

– totalité de la facture «VTE APPRO 049949» en date du 2 octobre 2014 d’un montant de 1 146,57 euros TTC relative à la fourniture de 4,94 tonnes d’orge selon bon de livraison n°194848 en date du 30 septembre 2014

– totalité de la facture «VTE APPRO 052435» en date du 8 décembre 2014 d’un montant de 1 137,29 euros TTC relative à la fourniture de 4,9 tonnes d’orge selon bon de livraison n°199728 en date du 4 décembre 2014

– totalité de la facture «VTE APPRO 054476» en date du 19 février 2015 d’un montant de 708,18 euros TTC relative à la fourniture de 2,9 tonnes d’orge selon bon de livraison n°201764 en date du 13 février 2015.

Les livraisons litigieuses étant toutes antérieures au 1er octobre 2016, il y a lieu de faire application du code civil dans sa rédaction antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016.

En vertu de l’article 1315 alinéa 1er du code civil, il appartient à la SAS Etablissements Dutertre de rapporter la preuve de l’obligation dont elle réclame l’exécution, ce par tous moyens dès lors qu’aucune des factures concernées n’excède la somme de 1 500 euros fixée par le décret n°2204-836 en date du 20 août 2004.

Elle produit les bons de livraison et tickets de pesée correspondants, strictement conformes aux factures émises.

Conformément à l’usage en matière agricole, ces ventes d’aliments pour le bétail n’étaient précédées d’aucune commande par écrit.

En outre, si la SAS Etablissements Dutertre ne disconvient pas que les bons de livraison pouvaient n’être pas signés par M. [O] lui-même, elle démontre au travers des factures et bons de livraison correspondants et du détail du compte complet de M. [O] depuis le 1er janvier 2011 qu’il en allait de même pour les livraisons d’orge antérieures de quantités similaires payées par celui-ci sur la période de mars 2011 à septembre 2013 inclus, ce qui suffit à établir l’existence d’une pratique en ce sens suivie par les parties dans le cadre de leurs relations d’affaires, et que M. [O] a, en réalité, accumulé progressivement du retard dans le paiement de ses factures et ainsi acquitté le 23 décembre 2013 le montant de la facture «VTE APPRO 032062» en date du 6 avril 2013, soit la somme de 1 507,84 euros, puis effectué uniquement des versements de 1 000 euros le 6 mai 2014, 2 000 euros le 8 septembre 2014, 1 000 euros le 4 décembre 2014 et 3 000 euros le 27 février 2015 à valoir sur les factures postérieures, avant de cesser tout règlement, ce qui explique que la SAS Etablissements Dutertre a pu continuer à effectuer des livraisons sans être réglée jusqu’en février 2015.

Enfin, à réception du courrier de la SAS Etablissements Dutertre en date du 25 mai 2016 listant les écritures portées à son compte et échues à cette date, avec mention pour chaque facture de sa référence, sa date, sa date d’échéance, son montant et du reste dû, et lui demandant expressément d’en contrôler l’exactitude, de l’aviser de toute erreur et, après ce pointage, de lui adresser son règlement, M. [O] n’a émis aucune contestation sur la réalité et la qualité des livraisons, ni sur les montants facturés.

Il s’en déduit que, comme l’a exactement considéré le premier juge, la SAS Etablissements Dutertre rapporte suffisamment la preuve de l’obligation de M. [O] au paiement des factures susvisées.

M. [O] ne justifie de son côté d’aucun paiement qui n’aurait pas été pris en compte, alors que la preuve du paiement lui incombe en vertu de l’article 1315 alinéa 2 du code civil.

Le jugement ne peut, dès lors, qu’être confirmé en ce qu’il a condamné M. [O] à payer à la SAS Etablissements Dutertre la somme de 7 811,84 euros en principal, assortie des intérêts de retard courant de plein droit au taux légal à compter du 6 décembre 2016, date de distribution de la lettre recommandée de mise en demeure, en application de l’article 1153 ancien (devenu 1231-6) du code civil.

Par ailleurs, dans la mesure où il n’a pas relevé appel de la disposition ayant rejeté sa demande de délais de paiement, où il ne produit pas plus en appel qu’en première instance de justificatifs de sa situation financière permettant de s’assurer qu’il n’est pas en mesure de s’acquitter du montant de sa dette déjà ancienne et où il n’émet aucune offre concrète de règlement, M. [O] ne peut qu’être débouté de sa demande visant à obtenir les plus larges délais de paiement sur le fondement de l’article 1244-1 ancien (devenu 1343-5) du code civil.

Partie perdante, il supportera les entiers dépens d’appel, ainsi que, en considération de l’équité et de la situation respective des parties, une somme de 1 000 euros au titre des frais non compris dans ces dépens exposés par l’intimée en vertu de l’article 700 1° du code de procédure civile, sans pouvoir prétendre au bénéfice du même texte, le jugement étant confirmé sur le sort des dépens et l’application de l’article 700 en première instance.

Par ces motifs,

La cour,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions dans les limites de sa saisine.

Y ajoutant,

Condamne M. [O] à payer à la SAS Etablissements Dutertre la somme de 1 000 (mille) euros en application de l’article 700 1° du code de procédure civile en appel et le déboute de sa demande au même titre.

Le condamne aux entiers dépens d’appel.

LA GREFFIERE P/LA PRESIDENTE EMPECHEE

C. LEVEUF C. MULLER

 


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