Cour d’Appel d’Aix-en-Provence, 14 septembre 2017
Cour d’Appel d’Aix-en-Provence, 14 septembre 2017

Type de juridiction : Cour d’Appel

Juridiction : Cour d’Appel d’Aix-en-Provence

Thématique : Edition de chaînes TV : la présomption de fraude fiscale

Résumé

La domiciliation d’entreprises dans des locaux abritant de nombreuses sociétés sans activité réelle peut signaler une fraude fiscale. Dans une affaire récente, une société luxembourgeoise, contrôlée par des résidents français, n’avait pas les moyens nécessaires pour exercer son activité déclarée, qui se déroulait en réalité en France. L’administration fiscale a ainsi pu justifier des perquisitions, fondées sur des présomptions de soustraction à l’impôt. La simple absence de déclarations fiscales constitue un indice suffisant pour engager des investigations, sans que le juge n’ait à établir la matérialité des infractions.

Centres de domiciliation déguisés

Certains éléments doivent alerter sur la présomption d’une fraude fiscale, parmi ceux-là la domiciliation au sein de bâtiments domiciliant de nombreuses sociétés sans réelle activité sur place. Dans cette affaire, était caractérisée la présomption de fraude fiscale (exercice en France d’une activité commerciale sans souscrire les déclarations fiscales et comptables y afférentes sur le territoire) justifiant des opérations de visites et de saisies domiciliaires ordonnées par le juge des libertés et de la détention.

Activités réelles en France

L’administration fiscale a pu ainsi déduire qu’une société domiciliée au Luxembourg était contrôlée et dirigée par des résidents français, ne disposant pas au Luxembourg, de moyens humains et matériels lui permettant d’exercer l’ensemble de l’activité déclarée (les activités réelles étaient en France).

Conditions de la perquisition fiscale

Aux termes de l’article L. 16 B du livre des procédures fiscales, l’autorité judiciaire peut autoriser l’administration à effectuer une visite domiciliaire lorsqu’il existe des présomptions qu’un contribuable se soustrait à l’établissement ou au paiement des impôts sur le revenu ou sur les bénéfices ou des taxes sur le chiffre d’affaires en se livrant à des achats ou à des ventes sans facture, en utilisant ou en délivrant des factures ou des documents ne se rapportant pas à des opérations réelles ou en omettant sciemment de passer ou de faire passer des écritures ou en passant ou en faisant passer sciemment des écritures inexactes ou fictives dans des documents comptables dont la tenue est imposée par le code général des impôts. Le défaut de souscription des déclarations fiscales constitue un indice de l’omission de passation d’écritures comptables.

Cette disposition n’exige que de simples présomptions, le juge de l’autorisation n’étant pas le juge de l’impôt et n’ayant pas à rechercher si les infractions sont caractérisées.

Application pratique aux éditeurs de chaînes TV

En l’espèce, la société de droit luxembourgeois avait pour objet social une activité de production audiovisuelle et d’édition de chaînes télévisées (Libido TV, Jacquie et Michel, Beur FM TV …). Si la société disposait d’une concession de diffusion au Luxembourg, elle était seulement locataire d’un bureau meublé de 11 mètres carrés et avait déclaré des prestations de services intracommunautaires à destination de sociétés françaises sans aucune immobilisation corporelle. Elle ne déduisait pas en charges de frais de personnel et ses charges étaient principalement constituées de frais de sous-traitance.

Il a été jugé que l’exercice d’une activité commerciale de diffusion de programmes télévisées ne saurait se limiter au seul outil technique de diffusion mais nécessite des moyens humains et un organe décisionnel pour le développement de l’activité en amont de la diffusion et notamment la sélection des programmes.  Enfin, le capital de la société était détenu par une personne physique (et son épouse) résidant en France.

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