Cour d’appel d’Agen, 7 février 2024
Cour d’appel d’Agen, 7 février 2024

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel d’Agen

Thématique : Nullité du contrat de licence de marque et d’approvisionnement

Résumé

La nullité du contrat de licence de marque et d’approvisionnement entre la SAS Distriplus et la SAS Océane a été prononcée par le tribunal de commerce, en raison de l’absence d’information précontractuelle conforme à l’article L 330-3 du code de commerce. Cet article impose au fournisseur de fournir des informations sincères permettant à l’autre partie de s’engager en connaissance de cause. La SAS Océane a contesté la validité du contrat, arguant qu’elle n’avait pas reçu les documents requis avant la signature. En appel, la cour a infirmé le jugement initial, rétablissant la créance de la SAS Distriplus.

L’article L 330-3 du code de commerce est pleinement applicable à une licence de marque assortie d’une exclusivité.

Ainsi :  » Toute personne qui met à la disposition d’une autre personne un nom commercial, une marque ou une enseigne, en exigeant d’elle un engagement d’exclusivité ou de quasi-exclusivité pour l’exercice de son activité, est tenue, préalablement à la signature de tout contrat conclu dans l’intérêt commun des deux parties, de fournir à l’autre partie un document donnant des informations sincères, qui lui permette de s’engager en connaissance de cause.

Ce document, dont le contenu est fixé par décret, précise notamment, l’ancienneté et l’expérience de l’entreprise, l’état et les perspectives de développement du marché concerné, l’importance du réseau d’exploitants, la durée, les conditions de renouvellement, de résiliation et de cession du contrat ainsi que le champ des exclusivités.

Lorsque le versement d’une somme est exigé préalablement à la signature du contrat mentionné ci-dessus, notamment pour obtenir la réservation d’une zone, les prestations assurées en contrepartie de cette somme sont précisées par écrit, ainsi que les obligations réciproques des parties en cas de dédit.

Le document prévu au premier alinéa ainsi que le projet de contrat sont communiqués vingt jours minimum avant la signature du contrat, ou, le cas échéant, avant le versement de la somme mentionnée à l’alinéa précédent.  »

Nos Conseils :

– Assurez-vous de fournir à l’autre partie un document contenant des informations sincères avant la signature de tout contrat de licence de marque et d’approvisionnement, conformément à l’article L 330-3 du code de commerce.

– Vérifiez que toutes les obligations réciproques des parties, notamment en cas de dédit, sont clairement spécifiées par écrit dans le contrat.

– En cas de doute sur la validité du contrat de franchise, n’hésitez pas à consulter un avocat spécialisé en droit commercial pour obtenir des Réflexes juridiques adaptés à votre situation.

Résumé de l’affaire

La société Distriplus a un contrat de fourniture exclusive de farine avec la SAS Océane, exploitant une boulangerie, qui n’a pas réglé ses approvisionnements. Suite à une requête de la SAS Distriplus, le tribunal de commerce a ordonné à la SAS Océane de payer une somme importante. Cependant, la SAS Océane a fait opposition à cette ordonnance. Par la suite, le tribunal de commerce a prononcé la liquidation judiciaire de la SAS Océane et a désigné un liquidateur. Lors d’un jugement ultérieur, le tribunal a annulé le contrat entre les deux parties, ordonné la restitution de certaines sommes et condamné la SAS Océane à payer une somme à la SAS Distriplus. La SAS Distriplus a fait appel de cette décision, demandant notamment de fixer sa créance au passif de la SAS Océane.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

7 février 2024
Cour d’appel d’Agen
RG n°
23/00310
ARRÊT DU

07 Février 2024

JYS/AM

———————

N° RG 23/00310 –

N° Portalis DBVO-V-B7H-DDIR

———————

S.A.S.U. DISTRIPLUS

C/

[H] [P] en qualité de liquidateur judiciaire de la S.A.S. OCEANE,

S.A.S. OCEANE

——————

GROSSES le

aux avocats

ARRÊT n° 48-24

COUR D’APPEL D’AGEN

Chambre Civile

Section commerciale

LA COUR D’APPEL D’AGEN, 1ère chambre dans l’affaire,

ENTRE :

S.A.S.U. DISTRIPLUS représentée par son président en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 1]

Représentée par Me David LLAMAS, Postulant, avocat au barreau d’AGEN et par Me Jean IGLESIS, Plaidant, avocat au barreau de TOULOUSE

APPELANTE d’un Jugement du Tribunal de Commerce d’Auch en date du 17 Mars 2023, RG 2021001579

D’une part,

ET :

Maître [H] [P] en qualité de liquidateur judiciaire de la S.A.S. OCEANE

[Adresse 3]

[Localité 4]

S.A.S. OCEANE

[Adresse 2]

[Localité 4]

Tous deux n’ayant pas constitué avocat

INTIMÉS

D’autre part,

COMPOSITION DE LA COUR :

l’affaire a été débattue et plaidée en audience publique le 06 Décembre 2023 devant la cour composée de :

Président : André BEAUCLAIR, Président de chambre

Assesseurs : Dominique BENON, Conseiller

Jean-Yves SEGONNES, Conseiller, qui a fait un rapport oral à l’audience, rédacteur

Greffière : Lors des débats : Nathalie CAILHETON

Lors de la mise à disposition : Chrystelle BORIN

ARRÊT : prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile

FAITS

La société Distriplus a un contrat de fourniture exclusive de farine à la SAS Océane exploitant une boulangerie à [Localité 4] (Gers), annexé à l’acte de cession du 3 avril 2018 du fonds de commerce. Cette dernière n’a pas réglé ses approvisionnements du

26 novembre 2020 au 22 mars 2021 et le président du tribunal de commerce a enjoint le 10 août 2021 à la SAS Océane de payer 24 326,89 euros au principal sur la requête de la SAS Distriplus. Suivant acte au greffe du tribunal de commerce d’Auch, la SAS Océane a fait opposition à l’ordonnance, le 20 septembre 2021.

Suivant jugement du 3 juin 2022, le tribunal de commerce d’Auch a prononcé la liquidation judiciaire de la SAS Océane et a désigné Me [P] administrateur judiciaire, en qualité de liquidateur. Par déclaration du 20 juillet 2022, Me [O], pour la SAS Distriplus, a déclaré sa créance du montant de 24 326,89 euros en principal, et 24 411,84 avec les intérêts et les frais.

Par jugement contradictoire du 17 mars 2023, le tribunal a :

– prononcé la nullité du contrat entre la SAS Distriplus et la SAS Océane,

– ordonné la restitution des redevances versées par la SAS Océane à la SAS Distriplus pour un montant de 22 000 euros ttc,

– ordonné la compensation des sommes dues entre les parties et condamné la SAS Océane à payer à la SAS Distriplus la somme de 3 372 ,88 euros,

– débouté la SAS Distriplus de sa demande à titre de dommages et intérêts,

– mis à la charge de la SAS Distriplus les dépens liquidés par le greffe à la somme de 109,77 euros,

– condamné la SAS Distriplus à verser à la SAS Océane 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Pour annuler le contrat d’approvisionnement, le tribunal a jugé que la société Distriplus n’a pas justifié de l’information précontractuelle précédant la signature entre le fournisseur et le nouveau revendeur, à la SAS Océane.

PROCÉDURE

Suivant déclaration au greffe de la cour, la SASU Distriplus a fait appel de tous les chefs de ce dispositif, le 14 avril 2023 ; elle a intimé la SAS Océane et Me [P], administrateur du redressement judiciaire de la SAS Océane.

Selon conclusions visées au greffe le 10 mai 2023, Me [O] pour la SAS Distrpilus demande, en réformant le jugement et statuant à nouveau, de :

– débouter la SAS Océane de ses demandes,

– fixer sa créance au passif de la SAS Océane à la somme de 24 411,84 euros,

– condamner Me [P] en qualité de son mandataire liquidateur à payer 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L’appelante expose que la SAS Océane a bénéficié d’une information approfondie antérieure à la cession et les conséquences d’un défaut d’exécution de cette obligation ne sont pas l’annulation automatique. Elle fait valoir que le tribunal n’a pas motivé en quoi le consentement de la SAS Océane a été vicié alors qu’elle a bénéficié de ses conseils, ses services et ses prix compétitifs durant les trois premières années du contrat sans formuler aucun grief.

Par lettre du 19 mai 2023, Me [P] écrit qu’il n’a aucune disponibilité pour constituer avocat devant la cour et s’en remet à l’arrêt à intervenir, étant observé que la nullité du contrat devrait être confirmée ainsi que la compensation.

La cour, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions et moyens des parties, fait expressément référence à la décision entreprise et aux dernières conclusions déposées en application de l’article 455 du code de procédure civile.

Par ordonnance du 25 octobre 2023, le conseiller de la mise en état a clôturé la procédure.

MOTIFS

1 / Sur la nullité du contrat de licence de marque et d’approvisionnement :

L’article L 330-3 du code de commerce dispose :

 » Toute personne qui met à la disposition d’une autre personne un nom commercial, une marque ou une enseigne, en exigeant d’elle un engagement d’exclusivité ou de quasi-exclusivité pour l’exercice de son activité, est tenue, préalablement à la signature de tout contrat conclu dans l’intérêt commun des deux parties, de fournir à l’autre partie un document donnant des informations sincères, qui lui permette de s’engager en connaissance de cause.

Ce document, dont le contenu est fixé par décret, précise notamment, l’ancienneté et l’expérience de l’entreprise, l’état et les perspectives de développement du marché concerné, l’importance du réseau d’exploitants, la durée, les conditions de renouvellement, de résiliation et de cession du contrat ainsi que le champ des exclusivités.

Lorsque le versement d’une somme est exigé préalablement à la signature du contrat mentionné ci-dessus, notamment pour obtenir la réservation d’une zone, les prestations assurées en contrepartie de cette somme sont précisées par écrit, ainsi que les obligations réciproques des parties en cas de dédit.

Le document prévu au premier alinéa ainsi que le projet de contrat sont communiqués vingt jours minimum avant la signature du contrat, ou, le cas échéant, avant le versement de la somme mentionnée à l’alinéa précédent.  »

Il ressort des pièces que la société Océane justifie que la société Distriplus a acquis le fonds de boulangerie avec le contrat de franchise, après une étude de marché de la reprise du fonds de commerce ‘un secret de pains’, un bilan prévisionnel de création d’activité de février 2018 à janvier 2021 et les conseils d’un notaire à l’acte du 3 avril 2018.

La société Océane n’a articulé devant le premier juge aucun grief susceptible d’avoir altéré son consentement et par voie de conséquence, faire annuler le contrat de franchise.

Le jugement n’est pas fondé et sera infirmé.

La SAS Océane succombe Me [P] ès qualités supporte les dépens de première instance et d’appel. L’équité commande qu’il ne soit pas fait application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt réputé contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, et en dernier ressort

Réforme le jugement du 17 mars 2023 en toute ses dispositions et statuant à nouveau

Fixe la créance de la SAS Distriplus au passif de la SAS Océane à la somme de 24 411,84 euros,

Condamne Me [P] en sa qualité de mandataire judiciaire à la liquidation de la SAS Océane aux entiers dépens, d’instance et d’appel,

Dit n’y avoir lieu à l’application au bénéfice de la SAS Distriplus des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par André BEAUCLAIR, président, et par Chrystelle BORIN, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière, Le Président,

 

 


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