Cour administrative d’appel de Paris, 31 octobre 2016, N° 16PA02112
Cour administrative d’appel de Paris, 31 octobre 2016, N° 16PA02112

Type de juridiction : Cour administrative d’appel

Juridiction : CAA de Paris

Résumé

La demande d’indemnisation de TF1, s’élevant à 230 millions d’euros pour le préjudice causé par l’extinction anticipée de la diffusion analogique, a été rejetée par la justice administrative. Les juges ont estimé que TF1 n’avait pas prouvé la réalité de son préjudice, notamment en ce qui concerne les pertes publicitaires. De plus, une autorisation d’émettre sur la télévision numérique terrestre, valable jusqu’en 2022, avait été accordée simultanément. Les méthodes d’évaluation du préjudice proposées par TF1 n’ont pas suffi à établir la véracité de ses revendications.

Refus d’indemnisation

La demande d’indemnisation formée par TF1 (230 millions d’euros) en réparation du préjudice résultant pour elle de l’extinction anticipée de la diffusion analogique des services de télévision terrestre, a été rejetée par la justice administrative.

Responsabilité de l’Etat du fait des lois

La responsabilité de l’Etat du fait des lois est susceptible d’être engagée dans deux hypothèses : i) d’une part, sur le fondement de l’égalité des citoyens devant les charges publiques, pour assurer la réparation de préjudices nés de l’adoption d’une loi, à la condition que cette loi n’ait pas exclu toute indemnisation et que le préjudice dont il est demandé réparation, revêtant un caractère grave et spécial, ne puisse, dès lors, être regardé comme une charge incombant normalement aux intéressés, ii) d’autre part, en raison des obligations qui sont les siennes pour assurer le respect des conventions internationales par les autorités publiques, pour réparer l’ensemble des préjudices qui résultent de l’intervention d’une loi adoptée en méconnaissance des engagements internationaux de la France.

Mécanisme d’indemnisation spécifique

TF1 a recherché la responsabilité de l’Etat sur le fondement de l’égalité des citoyens devant les charges publiques. Les articles 103 et 104 de la loi du 30 septembre 1986 organisaient  un mécanisme spécial de compensation des conséquences de l’interruption anticipée de l’analogique par l’attribution d’un  » canal compensatoire  » et excluaient ainsi tout autre droit à réparation. Même si ces articles ont été abrogés par l’article 30 de la loi du 15 novembre 2013 relative à l’indépendance de l’audiovisuel public, la loi n’exclut pas toute indemnisation des éditeurs nationaux de télévision concernés par cette interruption anticipée.

Absence de preuve du préjudice

Les juges administratifs ont considéré que la société TF1 n’apportait pas la réalité des coûts ou le manque à gagner, notamment dû à la perte de recettes publicitaires, qu’aurait entraîné pour elle, l’abrogation par l’effet de la loi, quelques mois seulement avant la date initialement prévue, de son autorisation d’émettre en mode analogique. Par ailleurs, une autorisation d’émettre sur la télévision numérique terrestre, valable jusqu’en 2022, s’est simultanément substituée à l’autorisation abrogée. Les différentes méthodes d’évaluation du préjudice développées par la société  TF1 fondées, pour la première, sur une comparaison des durées du recouvrement des diffusions par mode analogique et numérique en France et au Royaume-Uni, pour la deuxième sur la valorisation d’un canal TNT, et pour la troisième, sur un basculement progressif de l’analogique vers le numérique n’étaient pas, en tout état de cause, de nature à davantage établir la réalité du préjudice dont elle demandait réparation.

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Questions / Réponses juridiques

Quelle était la demande d’indemnisation de TF1 et quel a été le résultat ?

La demande d’indemnisation formulée par TF1 s’élevait à 230 millions d’euros. Cette demande visait à obtenir réparation pour le préjudice causé par l’extinction anticipée de la diffusion analogique des services de télévision terrestre.

Cependant, cette demande a été rejetée par la justice administrative, qui a estimé que les arguments présentés par TF1 ne justifiaient pas une indemnisation. Ce rejet souligne les difficultés rencontrées par les entreprises de médias dans la recherche de compensations financières liées à des changements réglementaires.

Quelles sont les conditions pour engager la responsabilité de l’État du fait des lois ?

La responsabilité de l’État du fait des lois peut être engagée dans deux situations principales. Premièrement, cela peut se faire sur le fondement de l’égalité des citoyens devant les charges publiques. Pour cela, il faut que le préjudice soit grave et spécial, et que la loi en question n’exclue pas toute indemnisation.

Deuxièmement, la responsabilité peut être engagée en raison des obligations de l’État de respecter les conventions internationales. Cela concerne les préjudices résultant d’une loi adoptée en méconnaissance des engagements internationaux de la France. Ces conditions sont essentielles pour déterminer si une indemnisation est justifiée.

Quel mécanisme d’indemnisation a été mis en place par la loi du 30 septembre 1986 ?

La loi du 30 septembre 1986 a établi un mécanisme spécifique de compensation pour les conséquences de l’interruption anticipée de la diffusion analogique. Ce mécanisme prévoyait l’attribution d’un « canal compensatoire » aux éditeurs de télévision, ce qui excluait tout autre droit à réparation.

Bien que ces articles aient été abrogés par la loi du 15 novembre 2013, la loi ne supprime pas totalement la possibilité d’indemnisation pour les éditeurs nationaux de télévision concernés par l’interruption anticipée. Cela montre que des mécanismes de compensation peuvent encore exister, même après des modifications législatives.

Pourquoi les juges ont-ils rejeté la demande de TF1 concernant le préjudice ?

Les juges administratifs ont rejeté la demande de TF1 en raison de l’absence de preuve tangible du préjudice. TF1 n’a pas réussi à démontrer la réalité des coûts ou le manque à gagner, notamment en ce qui concerne la perte de recettes publicitaires due à l’abrogation de son autorisation d’émettre en mode analogique.

De plus, une autorisation d’émettre sur la télévision numérique terrestre, valable jusqu’en 2022, a été accordée simultanément, ce qui a atténué l’impact de l’abrogation. Les méthodes d’évaluation du préjudice proposées par TF1, basées sur des comparaisons et des valorisations, n’ont pas été jugées suffisantes pour établir la réalité du préjudice.

 


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