Type de juridiction : Cour administrative d’appel
Juridiction : CAA de Paris
Thématique : Football et affichage publicitaire urbain : la Ville de Paris condamnée
→ RésuméLa Ville de Paris a été condamnée pour avoir autorisé des dispositifs d’affichage publicitaire liés à l’UEFA Euro 2016, en violation du Code de l’environnement. Les juges ont annulé les décisions de la maire, soulignant que ces affichages ne respectaient pas les réglementations en vigueur. La charte signée avec l’UEFA, bien que visant à promouvoir l’événement, manquait de précisions sur les emplacements des dispositifs, rendant leur légalité contestable. Les installations, visibles depuis des voies publiques, constituaient des publicités non conformes, entraînant ainsi la nécessité de leur retrait. Cette décision souligne l’importance du respect des normes environnementales en matière de publicité urbaine.
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L’affichage publicitaire en milieu urbain concernant les évènements culturels ou sportifs bénéficie d’un régime de faveur du Code de l’environnement sous la stricte réserve que les lieux d’implantation des dispositifs soient parfaitement localisés et répondent aux définitions du Code de l’environnement (publicité, enseignes ou pré-enseignes). L’annulation des décisions de la maire de Paris autorisant les affichages publicitaires de l’UEFA a été confirmée en appel. En cause, la charte promotionnelle et commerciale signée avec l’UEFA en infraction avec les dispositions du code de l’environnement et du règlement local de publicité de la Ville de Paris.
La Ville de Paris ne pouvait se prévaloir des dispositions particulières applicables aux manifestations exceptionnelles à caractère culturel ou touristique mais en faveur des seules enseignes et préenseignes qui signalent ces manifestations. Dans ces conditions, les dispositions du code de l’environnement relatives à la publicité et du règlement local de publicité étaient opposables aux décisions de la maire de Paris fixant les emplacements des dispositifs en litige et autorisant leur implantation.
Affichage publicitaire urbain
L’association Société pour la Protection des Paysages et de l’Esthétique de la France a obtenu gain de cause contre la Ville de Paris. Les juges administratifs ont annulé les décisions par lesquelles la maire de Paris a autorisé des dispositifs d’affichage relatifs au championnat d’Europe de football de 2016 sur des éclairages publics et divers lieux du territoire de la commune de Paris y compris la décision par laquelle la maire de Paris a rejeté sa demande tendant au retrait de ces dispositifs.
Charte commerciale et promotionnelle de l’UEFA
La Maire de Paris avait été autorisée à signer avec l’UEFA une charte commerciale et promotionnelle de la ville-hôte, qui prévoyait en son chapitre 11 un « habillage » de la ville en vue, notamment, d’assurer une forte visibilité de la compétition et d’établir une présence forte de la marque « UEFA Euro 2016 », et une charte relative aux zones officielles des supporters. A l’approche de la date de la compétition et pour la durée de celle-ci, ont été installés dans divers sites de Paris des dispositifs d’affichage et une « fan zone » sur le Champ-de-Mars, ainsi que s’y était engagée la Ville de Paris auprès de l’UEFA. L’association Société pour la Protection des Paysages et de l’Esthétique de la France a contesté avec succès l’installation de ces dispositifs publicitaires, en demandant notamment à la maire de Paris de les retirer ou de les faire retirer.
Si la Charte conclue imposait à la Ville de Paris d’identifier et de mettre à disposition des emplacements clés à des fins promotionnelles du championnat d’Europe de football de 2016, elle restait générale et ne déterminait aucun lieu précis d’implantation des bannières, drapeaux et autres éléments de pavoisement, en se bornant à définir des zones et types d’édifices qui devraient accueillir de tels dispositifs, dont les caractéristiques exactes n’étaient au demeurant pas déterminées, la charte promotionnelle et commerciale nécessitant ainsi l’adoption de décisions ultérieures par la maire de Paris.
En outre, lors de la conclusion de la charte, compte tenu de l’imprécision des lieux d’implantation et de la typologie des dispositifs devant être installés suivant ces lieux, les tiers n’avaient aucun moyen d’apprécier la légalité de leurs conditions d’implantation. Dans ces conditions, contrairement à ce que soutenait la Ville de Paris, les décisions de la maire de Paris de fixer les lieux d’implantation des dispositifs en litige et d’autoriser cette implantation, révélées par leur mise en place, ne constituaient pas des actes d’exécution non détachables du contrat et pouvaient faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir par des tiers au contrat.
Exemples de dispositifs illégaux
L’installation des dispositifs publicitaires sous la forme de bannières sur des équipements d’éclairage public méconnaissait l’article R. 581-22 du code de l’environnement et l’article P.1.3.1 du règlement local de publicité de la Ville de Paris. Les dispositifs publicitaires sur le quai de l’Hôtel de Ville et le quai de Gesvres étaient des mâts porte-affiches méconnaissant les dispositions relatives à la zone de publicité restreinte C prévue par le règlement local de publicité. Les dispositifs installés sur l’Hôtel de Ville de Paris, le pont d’Iéna et sur la partie des Champs-Elysées comprise entre la place de la Concorde et le Rond-Point des Champs-Elysées méconnaissaient le I de l’article L. 581-4 du code de l’environnement et le titre I du règlement local de publicité et que dispositifs installés en bordure de l’avenue des Champs-Elysées méconnaissaient l’article R. 581-25 du code de l’environnement.
Question des Fan Zones
La Ville de Paris a soutenu sans succès que les dispositifs installés à l’intérieur de la « fan zone » installée sur le Champ-de-Mars, délimitée et fermée par des barrières hautes avec un contrôle des accès, n’étaient pas visibles d’une voie ouverte à la circulation au sens de l’article L. 581-2 du code de l’environnement ( « Par voies ouvertes à la circulation publique au sens de l’article L. 581-2, il faut entendre les voies publiques ou privées qui peuvent être librement empruntées, à titre gratuit ou non, par toute personne circulant à pied ou par un moyen de transport individuel ou collectif »).
Or, les dispositifs publicitaires sur les pourtours et au sein de cette zone étaient visibles de voies publiques ou privées qui peuvent être librement empruntées, à titre gratuit ou non, par toute personne circulant à pied ou par un moyen de transport individuel ou collectif.
Infractions au Code de l’environnement
Pour rappel, aux termes de l’article L. 581-3 du code de l’environnement, constitue une publicité, à l’exclusion des enseignes et des préenseignes, toute inscription, forme ou image, destinée à informer le public ou à attirer son attention, les dispositifs dont le principal objet est de recevoir lesdites inscriptions, formes ou images étant assimilées à des publicités ; Constitue une enseigne toute inscription, forme ou image apposée sur un immeuble et relative à une activité qui s’y exerce ; Constitue une préenseigne toute inscription, forme ou image indiquant la proximité d’un immeuble où s’exerce une activité déterminée.
Les préenseignes sont soumises aux dispositions qui régissent la publicité. Par dérogation, en dehors des lieux qualifiés d’agglomération par les règlements relatifs à la circulation routière, peuvent être signalés de manière harmonisée par des préenseignes, dans des conditions définies par décret en Conseil d’Etat, à titre temporaire, les opérations et manifestations exceptionnelles à caractère culturel ou touristique qui y ont lieu ou y auront lieu.
Sont considérées comme enseignes ou préenseignes temporaires, les enseignes ou préenseignes qui signalent des manifestations exceptionnelles à caractère culturel ou touristique ou des opérations exceptionnelles de moins de trois mois.
Hors des cas où des dispositifs remplissent les conditions pour être qualifiés d’enseignes ou de préenseignes, toute inscription, forme ou image destinée à informer le public ou à attirer son attention, ainsi que les dispositifs dont le principal objet est de recevoir lesdites inscriptions, formes ou images, constituent une publicité, dont la définition volontairement large vise à assurer la protection du cadre de vie, ainsi que le rappellent les dispositions de l’article L. 581-2 du code de l’environnement, selon lesquelles « afin d’assurer la protection du cadre de vie, le présent chapitre fixe les règles applicables à la publicité, aux enseignes et aux préenseignes, visibles de toute voie ouverte à la circulation publique, au sens précisé par décret en Conseil d’Etat. Ses dispositions ne s’appliquent pas à la publicité, aux enseignes et aux préenseignes situées à l’intérieur d’un local, sauf si l’utilisation de celui-ci est principalement celle d’un support de publicité ».
Or, aucun des dispositifs de la Charte ne constitue une inscription, forme ou image apposée sur la façade ou la devanture du lieu même où s’exerce l’activité, ou, se dissociant matériellement du lieu de l’activité, indiquant sa proximité à l’attention du public. A cet égard, la Ville de Paris n’est pas fondée à soutenir que les emplacements des dispositifs ont été décidés en cohérence avec les lieux de manifestations culturelles et touristiques organisées par ailleurs par la collectivité dans le cadre de la compétition, dès lors que ces dispositifs ne sont pas destinés à informer le public ou à attirer son attention sur ces manifestations, ni même d’ailleurs à seulement indiquer le déroulement des matchs au cours de la compétition. Dès lors que les dispositifs précédemment décrits avaient pour objet d’informer le public et d’attirer son attention sur l’ensemble du championnat d’Europe de football « UEFA Euro 2016 » en assurant sa promotion, notamment par le pavoisement de la ville, ainsi que s’y était au demeurant engagée la Ville de Paris, ces dispositifs constituaient des publicités au sens du 1° de l’article L. 581-3 du code de l’environnement. Télécharger la décision
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