Cour administrative d’appel de marseille, 28 juin 2019
Cour administrative d’appel de marseille, 28 juin 2019

Type de juridiction : Cour administrative d’appel

Juridiction : CAA de Marseille

Thématique : Étiquetage des vins : le droit des marques prime

Résumé

Le décret du 4 mai 2012 encadre l’étiquetage des vins, mais ne peut interdire l’utilisation de marques commerciales enregistrées. Les juges ont annulé les avertissements de la DGCCRF visant des viticulteurs, affirmant que ces marques, telles que « Golfe de Saint-Tropez » et « Le Grimaudin », étaient valides et non contestées. Ainsi, l’inspection ne pouvait priver les sociétés de leur droit d’usage, car l’enregistrement des marques n’avait pas été déclaré nul. Cette décision souligne la primauté du droit des marques sur les réglementations d’étiquetage, tant que les marques respectent les conditions légales d’enregistrement.

Si l’article 5 du décret du 4 mai 2012 a pu légalement encadrer la mention du nom d’une unité géographique portée sur l’étiquetage et la présentation d’un produit vitivinicole, il n’a pu avoir ni pour objet, ni pour effet d’interdire l’utilisation d’une marque commerciale dûment enregistrée en application des dispositions des articles L. 712-1 du code de la propriété intellectuelle, dès lors que l’enregistrement de cette marque n’a pas été déclaré nul.

Avertissements de la DGCCRF annulés

Dans cette affaire, les avertissements de la DGCCRF adressés à des viticulteurs aux fins de voir modifier leur étiquetage viticole (« Les coteaux du Golfe de Saint-Tropez », « Grimaud », « Saint-Tropez », « Port-Grimaud » ou encore « Cogolin »), ont été annulés.

Pour rappel, les pouvoirs dont disposent les inspecteurs de la DGCCRF leur donnent compétence pour rappeler aux personnes soumises aux prescriptions du code de la consommation, la nature de leurs obligations.  Aucune disposition législative ou réglementaire, ni aucun principe ne font obligation à l’ensemble des agents ayant contribué à une enquête de cosigner les actes pris consécutivement à cette enquête. Les avertissements en litige constituaient une mise en demeure de se conformer à la nouvelle réglementation et ne présentaient toutefois pas le caractère d’une sanction.

Légalité du décret du 4 mai 2012

Aux termes de l’article 5 du décret du 4 mai 2012 (transposition du règlement CE n° 479/2008) relatif à l’étiquetage et à la traçabilité des produits vitivinicoles et à certaines pratiques œnologiques, l’étiquetage des vins bénéficiant d’une appellation d’origine protégée ou d’une indication géographique protégée peut mentionner le nom d’une unité géographique plus petite que la zone qui est à la base de l’appellation d’origine protégée ou de l’indication géographique protégée si les conditions suivantes sont remplies : i) Tous les raisins à partir desquels ces vins ont été obtenus proviennent de cette unité plus petite ; ii) Cette possibilité est prévue dans le cahier des charges de l’appellation d’origine protégée ou de l’indication géographique protégée.

Si  le droit de l’Union européenne autorise, sur l’étiquetage et la présentation des produits bénéficiant d’une appellation d’origine ou d’une indication géographique protégée, la mention du nom d’une unité géographique plus petite que la zone qui est la base de cette appellation ou de cette indication, l’article 67 du règlement n° 607/2009 laisse les Etats membres libres d’établir des règles concernant l’utilisation de ces unités géographiques.

Par suite, le décret du 4 mai 2012 n’a méconnu ni le règlement (CE) n° 479/2008, ni le règlement (CE) n° 607/2009, en n’autorisant une telle mention que dans le cas où  » cette possibilité est prévue dans le cahier des charges de l’appellation d’origine protégée ou de l’indication géographique protégée « , sans qu’y fasse obstacle la circonstance que l’article 70 règlement (CE) n° 607/2009 permet également à ces cahiers de charges de prévoir directement une telle limitation.

Primauté du droit des marques

Les juges ont considéré que le décret du 4 mai 2012 ne peut avoir ni pour objet, ni pour effet d’interdire l’utilisation d’une marque commerciale dûment enregistrée en application des dispositions des articles L. 712-1 du code de la propriété intellectuelle, dès lors que l’enregistrement de cette marque n’a pas été déclaré nul.

En l’occurrence, les marques en cause (« Golfe de Saint-Tropez », « Le Grimaudin » et autres) ont été enregistrées auprès de l’INPI. A la date de la décision litigieuse, l’enregistrement de ces marques n’avait pas fait l’objet d’une action en nullité. Par suite, l’inspection de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ne pouvait légalement priver, sur le fondement de l’article 5 du décret du 4 mai 2012, les sociétés de leur droit de faire usage des marques dont elles sont propriétaires.

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