Type de juridiction : Cour administrative d’appel
Juridiction : CAA de Marseille
Thématique : Développement international de Logiciel : la retenue à la source est due
→ RésuméUne société exerçant en France et versant des sommes à un prestataire en Thaïlande pour la cession de droits de propriété intellectuelle relatifs à un logiciel est soumise à une retenue à la source. En vertu de l’article 182 B du code général des impôts, ces paiements, considérés comme des droits d’auteur, sont passibles d’une retenue de 5 %. La SAS A a demandé la restitution de ces retenues pour les années 2013 à 2015, mais le tribunal administratif a partiellement accordé sa demande, considérant que certaines rémunérations ne constituaient pas des redevances au sens de la convention fiscale entre la France et la Thaïlande.
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Une société qui exerce une activité en France et qui verse à son prestataire basé en Asie (Thaïlande), des sommes portant sur la cession des droits de propriété intellectuelle relatifs à un logiciel informatique, est redevable en France d’une retenue à la source (rémunération de droits d’auteur au sens du b. du I de l’article 182 B du code général des impôts).
Contrat de service informatique
La société par actions simplifiée (SAS) A a conclu le 1er janvier 2010 avec la société de droit thaïlandais A Asia un » contrat de services » portant à la fois sur la cession des droits de propriété intellectuelle relatifs à un logiciel informatique ainsi que sur des prestations de service de conception et de développement du logiciel et sur des services de maintenance, de support utilisateur et de commercialisation de ce même logiciel moyennant le versement par la SAS A de sommes au titre d’une » rémunération « , lesdites sommes ayant été soumises en France à une retenue à la source au taux de 5 %.
La société appelante s’est ainsi acquittée, en application des articles 182 B du code général des impôts et 12 de la convention fiscale conclue entre la France et la Thaïlande le 27 décembre 1974, des sommes de 400 867 euros en 2013, 473 359 euros en 2014 et 106 471 euros en 2015. Puis, considérant que ces sommes n’étaient pas dues, la SAS A en a sollicité le remboursement.
A la suite du rejet de ses réclamations, la SAS A a saisi le tribunal administratif de Nice de deux demandes tendant à la restitution des retenues à la source opérées sur les sommes versées à la société A Asia au titre de ces années 2013 à 2015.
Par le jugement du 27 février 2020, le tribunal administratif a accordé à la SAS A la restitution des prélèvements à la source qu’elle a acquittés en 2013, 2014 et 2015 à hauteur respectivement de 175 733 euros, 176 448 euros et de 43 653 euros en retenant que les rémunérations versées à la société A Asia en contrepartie des prestations de maintenance et de réparation du logiciel, de documentation et d’assistance des utilisateurs, ainsi que de migration vers le nouveau logiciel ne pouvaient être regardées comme des redevances au sens de l’article 12 de la convention fiscale conclue entre la France et la Thaïlande et a rejeté le surplus de ses demandes.
La SAS A relève appel (sans succès) de ce jugement en tant qu’il a rejeté ses demandes tendant à la restitution des retenues à la source assises sur la rémunération versée à la société A Asia en contrepartie de la cession des droits de propriété intellectuelle.
L’article 182 B du code général des impôts
Aux termes du I de l’article 182 B du code général des impôts : » Donnent lieu à l’application d’une retenue à la source lorsqu’ils sont payés par un débiteur qui exerce une activité en France à des personnes ou des sociétés, relevant de l’impôt sur le revenu ou de l’impôt sur les sociétés, qui n’ont pas dans ce pays d’installation professionnelle permanente : / () b. Les produits définis à l’article 92 et perçus par les inventeurs ou au titre de droits d’auteur, () ainsi que tous produits tirés de la propriété industrielle ou commerciale et de droits assimilés ; / c. Les sommes payées en rémunération des prestations de toute nature fournies ou utilisées en France. () « . Il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux préparatoires des articles 6 et 10 de la loi du 29 décembre 1976 modifiant les règles de territorialité et les conditions d’imposition des français de l’étranger ainsi que des autres personnes non domiciliées en France, dont elles sont issues, d’une part, que les produits mentionnés au b au titre des droits d’auteur sont l’ensemble de ceux que les auteurs d’œuvres de l’esprit ou leurs ayants droit tirent des droits patrimoniaux attachés à ces œuvres et, d’autre part, que ne sont au nombre des sommes mentionnées au c que celles qui ne relèvent pas des autres catégories de revenus mentionnés à cet article.
Convention conclue entre la France et la Thaïlande
En deuxième lieu, aux termes du 1. de l’article 7 de la convention conclue entre la France et la Thaïlande le 27 décembre 1974 : » Les bénéfices d’une entreprise d’un Etat contractant ne sont imposables que dans cet Etat, à moins que l’entreprise n’exerce son activité dans l’autre Etat contractant par l’intermédiaire d’un établissement stable qui y est situé. Si l’entreprise exerce son activité d’une telle façon, les bénéfices de l’entreprise sont imposables dans l’autre Etat mais uniquement dans la mesure où ils sont imputables audit établissement stable « . Aux termes de l’article 12 de la même convention : » 1. Les redevances provenant d’un Etat, contractant et payées à un résident de l’autre Etat contractant sont imposables dans cet autre Etat. / 2. Toutefois, ces redevances peuvent être imposées dans l’Etat contractant d’où elles proviennent, mais l’impôt ainsi établi ne peut excéder : a) – 5 % du montant brut des redevances si elles ont été payées pour l’aliénation, ou pour l’usage ou la concession de l’usage, d’un droit d’auteur sur une œuvre littéraire, artistique ou scientifique ; () / 4. Le terme « redevances » employé dans le présent article désigne les rémunérations de toute nature payées pour l’aliénation, ou pour l’usage ou la concession de l’usage, d’un droit d’auteur sur une œuvre littéraire, artistique ou scientifique, y compris les films cinématographiques, d’un brevet, d’une marque de fabrique ou de commerce, d’un dessin ou d’un modèle, d’un plan, d’une formule ou d’un procédé secrets, ainsi que pour l’usage ou la concession de l’usage d’informations ayant trait à une expérience acquise dans le domaine industriel, commercial ou scientifique () « .
Selon le principe énoncé au 2. de l’article 3 de cette convention : » Pour l’application de la Convention par un Etat contractant, toute expression qui n’est pas autrement définie a le sens qui lui est attribué par la législation dudit Etat régissant les impôts faisant l’objet de la Convention, à moins que le contexte n’exige une interprétation différente « . Selon l’article 23 de la même convention : » Les doubles impositions sont évitées de la manière suivante : / 1. Dans le cas de la France : / a) Les revenus autres que ceux visés à l’alinéa b ci-dessous sont exonérés des impôts français visés à l’article 3 a de l’article 2, lorsque ces revenus sont imposables en Thaïlande en vertu de la convention et de la législation thaïlandaise. () « .
D’une part, les termes d’une convention internationale doivent, sauf stipulations contraires, être entendus dans le sens de la législation nationale de l’Etat qui applique la convention. Aux termes de l’article L. 112-2 du code de la propriété intellectuelle : » Sont considérés notamment comme œuvres de l’esprit au sens du présent code : () / 13° Les logiciels, y compris le matériel de conception préparatoire « . Et aux termes de l’article L. 111-1 du même code : » L’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous « . Il résulte de la combinaison de ces dispositions que les logiciels sont des œuvres de l’esprit, protégées à ce titre par le droit d’auteur au sens de la législation française. Le paragraphe 4 de l’article 12 de la convention fiscale conclue entre la France et la Thaïlande leur est ainsi applicable.
D’autre part, il résulte de l’instruction, que le contrat conclu entre la SAS A et la société A Asia, en particulier les stipulations de l’article 7, prévoyait la cession à la SAS A des droits de propriété intellectuelle relatifs au logiciel informatique développé par la société A Asia pour la société appelante.
Les sommes rémunérant cette cession doivent, par conséquent, être regardées comme des rémunérations payées pour l’aliénation d’un droit d’auteur sur une œuvre littéraire, artistique ou scientifique, alors même que les logiciels ne sont pas expressément visés dans cette convention conclue en 1974. Il suit de là que ces rémunérations constituent des redevances au sens des stipulations précitées de l’article 12 de la convention fiscale.
Il résulte de tout ce qui précède que la SAS A n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté le surplus de ses demandes. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
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Cour administrative d’appel de Marseille, 3ème chambre – formation à 3, 2 mars 2023, 20MA03128 Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société par actions simplifiées (SAS) A a demandé au tribunal administratif de Nice, par deux requêtes distinctes, de prononcer la restitution, ou à défaut, la réduction, des retenues à la source prévues à l’article 182 B du code général des impôts dont elle s’est acquittée au titre des années 2013, 2014 et 2015 sur les rémunérations versées à la société A Asia.
Par un jugement n° 1702624, 1802372 du 27 février 2020, le tribunal administratif de Nice a accordé à la SAS A la restitution des prélèvements à la source qu’elle a acquittés en 2013, 2014 et 2015 à hauteur respectivement de 175 733 euros, 176 448 euros et de 43 653 euros et a rejeté le surplus de ses demandes.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 23 août 2020 et le 3 février 2023, la SAS A, représentée par Me Bailleul-Mirabaud, CMS Bureau Francis Lefebvre, demande à la Cour :
1°) d’annuler ce jugement du 27 février 2020 du tribunal administratif de Nice en tant qu’il a rejeté le surplus de ses demandes ;
2°) de prononcer la restitution des sommes de 225 134 euros, 296 911 euros et 62 818 euros au titre respectivement des années 2013, 2014 et 2015 ;
3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 10 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
– le tribunal administratif a commis une erreur de droit en assimilant les droits de propriété intellectuelle relatifs au logiciel développé par la société A Asia à des droits d’auteur sur une œuvre littéraire, artistique ou scientifique au sens de l’article 12 de la convention fiscale conclue entre la France et la Thaïlande ;
– le jugement est insuffisamment motivé faute pour les premiers juges d’avoir répondu à ses arguments sur ce point ;
– les rémunérations versées à A Asia, afférentes aux droits d’auteur portant sur un logiciel, ne sont pas visées par l’article 12 de la convention fiscale conclue entre la France et la Thaïlande qui n’est relatif qu’aux droits d’auteur sur une œuvre littéraire, artistique ou scientifique ;
– il convient de se référer à la qualification retenue par le droit français selon laquelle le logiciel est une » œuvre de l’esprit » à titre autonome, indépendamment des œuvres littéraires, artistiques ou scientifiques ; les logiciels sont qualifiés de manière autonome en droit français ;
– la doctrine administrative et le code de la propriété industrielle confirment que les droits d’auteur afférents à un logiciel ne sont pas des droits d’auteur sur une œuvre littéraire, artistique ou scientifique et sont donc hors champ d’application de l’article 12 de ladite convention ;
– les rémunérations en litige ne sont pas davantage des rémunérations payées pour l’usage ou la concession de l’usage d’informations ayant trait à une expérience acquise dans le domaine industriel, commercial ou scientifique.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 novembre 2022, le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
– la convention conclue le 27 décembre 1974 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume de Thaïlande tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l’évasion fiscale en matière d’impôts sur les revenus ;
– le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
– le code de la propriété intellectuelle ;
– le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.
Ont été entendus, au cours de l’audience publique :
– le rapport de Mme B,
– les conclusions de M. Ury, rapporteur public,
– et les observations de Me Bailleul pour la SAS A.
Une note en délibéré présentée pour la SAS A a été enregistrée le 9 février 2023.
Considérant ce qui suit
:
1. La société par actions simplifiée (SAS) A a conclu le 1er janvier 2010 avec la société de droit thaïlandais A Asia un » contrat de services » portant à la fois sur la cession des droits de propriété intellectuelle relatifs à un logiciel informatique ainsi que sur des prestations de service de conception et de développement du logiciel et sur des services de maintenance, de support utilisateur et de commercialisation de ce même logiciel moyennant le versement par la SAS A de sommes au titre d’une » rémunération « , lesdites sommes ayant été soumises en France à une retenue à la source au taux de 5 %. La société appelante s’est ainsi acquittée, en application des articles 182 B du code général des impôts et 12 de la convention fiscale conclue entre la France et la Thaïlande le 27 décembre 1974, des sommes de 400 867 euros en 2013, 473 359 euros en 2014 et 106 471 euros en 2015. Puis, considérant que ces sommes n’étaient pas dues, la SAS A en a sollicité le remboursement. A la suite du rejet de ses réclamations, la SAS A a saisi le tribunal administratif de Nice de deux demandes tendant à la restitution des retenues à la source opérées sur les sommes versées à la société A Asia au titre de ces années 2013 à 2015. Par le jugement du 27 février 2020, le tribunal administratif a accordé à la SAS A la restitution des prélèvements à la source qu’elle a acquittés en 2013, 2014 et 2015 à hauteur respectivement de 175 733 euros, 176 448 euros et de 43 653 euros en retenant que les rémunérations versées à la société A Asia en contrepartie des prestations de maintenance et de réparation du logiciel, de documentation et d’assistance des utilisateurs, ainsi que de migration vers le nouveau logiciel ne pouvaient être regardées comme des redevances au sens de l’article 12 de la convention fiscale conclue entre la France et la Thaïlande et a rejeté le surplus de ses demandes. La SAS A relève appel de ce jugement en tant qu’il a rejeté ses demandes tendant à la restitution des retenues à la source assises sur la rémunération versée à la société A Asia en contrepartie de la cession des droits de propriété intellectuelle.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. D’une part, aux termes de l’article L. 9 du code de justice administrative : » Les jugements sont motivés « . Le tribunal, qui n’était pas tenu de répondre à tous les arguments présentés par la SAS A, a suffisamment exposé, au point 7 du jugement, les raisons pour lesquelles il a considéré que les sommes versées à A Asia constituaient une redevance au sens de l’article 12 de la convention fiscale conclue entre la France et la Thaïlande. Par suite, la SAS A n’est pas fondée à soutenir que le jugement serait insuffisamment motivé.
3. D’autre part, hormis le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s’imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d’une irrégularité, il appartient au juge d’appel non d’apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s’est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis mais de se prononcer directement sur les moyens dont il est saisi dans le cadre de l’effet dévolutif de l’appel. La SAS A ne peut donc utilement se prévaloir, pour demander l’annulation du jugement attaqué, de l’erreur de droit que les premiers juges auraient commise.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
4. En premier lieu, aux termes du I de l’article 182 B du code général des impôts : » Donnent lieu à l’application d’une retenue à la source lorsqu’ils sont payés par un débiteur qui exerce une activité en France à des personnes ou des sociétés, relevant de l’impôt sur le revenu ou de l’impôt sur les sociétés, qui n’ont pas dans ce pays d’installation professionnelle permanente : / () b. Les produits définis à l’article 92 et perçus par les inventeurs ou au titre de droits d’auteur, () ainsi que tous produits tirés de la propriété industrielle ou commerciale et de droits assimilés ; / c. Les sommes payées en rémunération des prestations de toute nature fournies ou utilisées en France. () « . Il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux préparatoires des articles 6 et 10 de la loi du 29 décembre 1976 modifiant les règles de territorialité et les conditions d’imposition des français de l’étranger ainsi que des autres personnes non domiciliées en France, dont elles sont issues, d’une part, que les produits mentionnés au b au titre des droits d’auteur sont l’ensemble de ceux que les auteurs d’œuvres de l’esprit ou leurs ayants droit tirent des droits patrimoniaux attachés à ces œuvres et, d’autre part, que ne sont au nombre des sommes mentionnées au c que celles qui ne relèvent pas des autres catégories de revenus mentionnés à cet article.
5. Ainsi qu’il a été dit au point 1, en application du contrat conclu le 1er janvier 2010, la SAS A, qui exerce une activité en France, a versé à la société A Asia, établie en Thaïlande, des sommes portant sur la cession des droits de propriété intellectuelle relatifs à un logiciel informatique. Ces sommes, versées en rémunération de droits d’auteur au sens du b. du I de l’article 182 B du code général des impôts, étaient, dès lors, passibles de la retenue à la source prévue par ce texte.
6. En deuxième lieu, aux termes du 1. de l’article 7 de la convention conclue entre la France et la Thaïlande le 27 décembre 1974 : » Les bénéfices d’une entreprise d’un Etat contractant ne sont imposables que dans cet Etat, à moins que l’entreprise n’exerce son activité dans l’autre Etat contractant par l’intermédiaire d’un établissement stable qui y est situé. Si l’entreprise exerce son activité d’une telle façon, les bénéfices de l’entreprise sont imposables dans l’autre Etat mais uniquement dans la mesure où ils sont imputables audit établissement stable « . Aux termes de l’article 12 de la même convention : » 1. Les redevances provenant d’un Etat, contractant et payées à un résident de l’autre Etat contractant sont imposables dans cet autre Etat. / 2. Toutefois, ces redevances peuvent être imposées dans l’Etat contractant d’où elles proviennent, mais l’impôt ainsi établi ne peut excéder : a) – 5 % du montant brut des redevances si elles ont été payées pour l’aliénation, ou pour l’usage ou la concession de l’usage, d’un droit d’auteur sur une œuvre littéraire, artistique ou scientifique ; () / 4. Le terme « redevances » employé dans le présent article désigne les rémunérations de toute nature payées pour l’aliénation, ou pour l’usage ou la concession de l’usage, d’un droit d’auteur sur une œuvre littéraire, artistique ou scientifique, y compris les films cinématographiques, d’un brevet, d’une marque de fabrique ou de commerce, d’un dessin ou d’un modèle, d’un plan, d’une formule ou d’un procédé secrets, ainsi que pour l’usage ou la concession de l’usage d’informations ayant trait à une expérience acquise dans le domaine industriel, commercial ou scientifique () « . Selon le principe énoncé au 2. de l’article 3 de cette convention : » Pour l’application de la Convention par un Etat contractant, toute expression qui n’est pas autrement définie a le sens qui lui est attribué par la législation dudit Etat régissant les impôts faisant l’objet de la Convention, à moins que le contexte n’exige une interprétation différente « . Selon l’article 23 de la même convention : » Les doubles impositions sont évitées de la manière suivante : / 1. Dans le cas de la France : / a) Les revenus autres que ceux visés à l’alinéa b ci-dessous sont exonérés des impôts français visés à l’article 3 a de l’article 2, lorsque ces revenus sont imposables en Thaïlande en vertu de la convention et de la législation thaïlandaise. () « .
7. D’une part, les termes d’une convention internationale doivent, sauf stipulations contraires, être entendus dans le sens de la législation nationale de l’Etat qui applique la convention. Aux termes de l’article L. 112-2 du code de la propriété intellectuelle : » Sont considérés notamment comme œuvres de l’esprit au sens du présent code : () / 13° Les logiciels, y compris le matériel de conception préparatoire « . Et aux termes de l’article L. 111-1 du même code : » L’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous « . Il résulte de la combinaison de ces dispositions que les logiciels sont des œuvres de l’esprit, protégées à ce titre par le droit d’auteur au sens de la législation française. Le paragraphe 4 de l’article 12 de la convention fiscale conclue entre la France et la Thaïlande leur est ainsi applicable.
8. D’autre part, il résulte de l’instruction, et il n’est pas contesté, que le contrat conclu entre la SAS A et la société A Asia, en particulier les stipulations de l’article 7, prévoyait la cession à la SAS A des droits de propriété intellectuelle relatifs au logiciel informatique développé par la société A Asia pour la société appelante. Les sommes rémunérant cette cession doivent, par conséquent, être regardées comme des rémunérations payées pour l’aliénation d’un droit d’auteur sur une œuvre littéraire, artistique ou scientifique, alors même que les logiciels ne sont pas expressément visés dans cette convention conclue en 1974. Il suit de là que ces rémunérations constituent des redevances au sens des stipulations précitées de l’article 12 de la convention fiscale.
9. Enfin, à supposer que la société requérante ait entendu se prévaloir sur le fondement de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales de la doctrine référencée BOI-INT-CVB-UZB-20 du 12 septembre 2012, cette doctrine est relative à la convention fiscale conclue entre la France et l’Ouzbékistan.
10. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS A n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté le surplus de ses demandes. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la SAS A est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée A et au ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.
Délibéré après l’audience du 9 février 2023, où siégeaient :
– Mme Paix, présidente,
– M. Platillero, président assesseur,
– Mme Carotenuto, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 2 mars 2023.
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