Copropriété : enjeux et implications – Questions / Réponses juridiques

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Copropriété : enjeux et implications – Questions / Réponses juridiques

Le litige oppose deux syndicats de copropriétaires concernant des infiltrations d’eau. En 2016, un copropriétaire de la résidence [Adresse 4] a acquis une cave mitoyenne, causant des dommages à l’immeuble [Adresse 2]. Après une expertise contradictoire en 2019 et une expertise judiciaire en 2020, les copropriétaires de l’immeuble [Adresse 2] ont assigné en justice pour obtenir des réparations. Le syndicat de la résidence [Adresse 4] a soulevé des fins de non-recevoir, notamment la prescription de l’action. Cependant, le juge a déclaré l’action recevable, reconnaissant la qualité à agir de la SCI la Vallée Gobelin pour les travaux nécessaires.. Consulter la source documentaire.

1. Sur la prescription de l’action

L’article 2224 du code civil dispose : « Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. »

En l’espèce, les demandeurs ont eu connaissance des faits leur permettant d’agir, c’est-à-dire de la réalité et de l’étendue des désordres, au plus tard au jour du dépôt du rapport de la première expertise amiable, soit au 7 novembre 2016.

Dès lors, le délai de prescription a commencé à courir au plus tard le 7 novembre 2016 pour prendre fin le 7 novembre 2021.

L’article 2239 du code civil dispose : « La prescription est également suspendue lorsque le juge fait droit à une demande de mesure d’instruction présentée avant tout procès.

Le délai de prescription recommence à courir, pour une durée qui ne peut être inférieure à six mois, à compter du jour où la mesure a été exécutée. »

L’article 2241 alinéa 1er du code civil dispose : « La demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion. »

Il résulte de la combinaison des articles 2239 et 2241 du code civil que la demande adressée à un juge de diligenter une expertise interrompt le délai de prescription jusqu’à l’extinction de l’instance et que, lorsque le juge fait droit à cette demande, le même délai est suspendu jusqu’à la remise par l’expert de son rapport au juge.

En l’espèce, les demandeurs ont assigné le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 4] en référé suivant actes d’huissier des 31 août et 1er septembre 2020.

Cette demande en justice a eu pour effet d’interrompre le délai de prescription en vertu des dispositions de l’article 2241 du code civil.

Ce délai a été suspendu pendant toute la durée de la procédure de référé et jusqu’au dépôt par l’expert de son rapport en application des dispositions de l’article 2239 du code civil, de sorte qu’un nouveau délai de prescription a commencé à courir à compter du 22 novembre 2021.

Il ressort de ces éléments que les demandeurs avaient jusqu’au 22 novembre 2026 pour agir, de sorte que leur action introduite suivant assignations des 18 et 22 novembre 2022 n’était pas prescrite.

Il y a lieu de rejeter la fin de non-recevoir tirée de la prescription soulevée par le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 4] et de juger recevable comme non prescrite l’action des demandeurs.

2. Sur la qualité et l’intérêt à agir de la SCI la Vallée Gobelin

L’article 122 du code de procédure civile dispose : « Constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée. »

L’article 31 du code de procédure civile dispose notamment que l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention.

L’article 32 du code de procédure civile dispose également qu’est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d’agir.

Le juge de la mise en état est compétent pour trancher la fin de non-recevoir tirée de la qualité et de l’intérêt à agir.

1- Sur les travaux de maçonnerie

L’article 15 alinéas 1 et 2 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 dispose : « Le syndicat a qualité pour agir en justice, tant en demandant qu’en défendant, même contre certains des copropriétaires; il peut notamment agir, conjointement ou non avec un ou plusieurs de ces derniers, en vue de la sauvegarde des droits afférents à l’immeuble.

Tout copropriétaire peut néanmoins exercer seul les actions concernant la propriété ou la jouissance de son lot, à charge d’en informer le syndic. »

Il est de droit qu’est recevable l’action d’un copropriétaire qui intéresse non seulement les parties communes, mais aussi le lot privatif du propriétaire concerné.

En l’espèce, la SCI la Vallée Gobelin fait valoir que les travaux visés par le devis intéressent les revêtements et la maçonnerie intérieure de ses lots privatifs et non des parties communes de l’immeuble.

Dès lors, en sa qualité de propriétaire, elle est recevable à agir s’agissant de son propre lot.

Il convient donc de rejeter cette fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité et d’intérêt à agir et de déclarer recevable la demande formée par la SCI la Vallée Gobelin au titre des travaux de maçonnerie.

2- Sur les travaux d’électricité

En l’espèce, le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 4] évoque que le montant des travaux d’électricité réclamés porterait sur des équipements professionnels de la cuisine de la crêperie Le Be New et n’incomberait pas au propriétaire des locaux.

Cependant, le simple devis non signé produit en pièce 20 de la demanderesse au fond a été établi au nom du locataire exploitant la crêperie est insuffisant pour démontrer que le propriétaire des locaux n’a pas subi de préjudice ou que les travaux sont à la charge du seul commerçant.

En effet, le devis porte sur l’aménagement électrique “arrière cuisine” suite à un dégât des eaux ; il permet de chiffrer les désordres allégués dans les locaux appartenant à la SCI La Vallée Gobelin.

Il appartiendra au juge du fond le cas échéant de se prononcer sur le bien fondé de la réclamation de la propriétaire qui, à ce stade, a bien qualité et intérêt à agir.

Il convient de rejeter la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité et d’intérêt à agir et de déclarer recevable la demande formée par la SCI la Vallée Gobelin au titre des travaux d’électricité.

3. Sur les autres demandes

A ce stade de la procédure, les dépens seront réservés.

Le sort des frais irrépétibles sera apprécié par le juge du fond.

PAR CES MOTIFS

Le juge de la mise en état, statuant par mise à disposition au greffe, par ordonnance contradictoire et susceptible d’appel dans les conditions prévues par l’article 795 du code de procédure civile,

Déclare recevable comme non prescrite l’action introduite par le syndicat des copropriétaires de l’immeuble situé [Adresse 2] à Tours, la SCI Nat aux droits de laquelle vient la SCI Cadoq, la SARL CBHG, la SCI la Vallée Gobelin et la SARL D&D,

Déclare recevable la demande de la SCI la Vallée Gobelin au titre des travaux de maçonnerie en ce qu’elle a qualité et intérêt à agir à l’encontre du syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 4],

Déclare recevable la demande de la SCI la Vallée Gobelin au titre des travaux d’électricité en ce qu’elle a qualité et intérêt à agir à l’encontre du syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 4],

Dit que les dépens de l’incident suivront le sort de l’instance au fond,

Laisse le sort des frais irrépétibles à l’appréciation du juge du fond.

Rejette le surplus des demandes,

Renvoie l’examen de l’affaire à l’audience de mise en état virtuelle du 20 janvier 2025 et dit que Me [P] devra signifier ses conclusions avant cette date.


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