Expertise et responsabilité en copropriété : enjeux de sécurité et d’assurance.

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Expertise et responsabilité en copropriété : enjeux de sécurité et d’assurance.

L’Essentiel : Monsieur [I] [Y] et Monsieur [C] [Y] sont propriétaires d’un appartement en copropriété à [Localité 4]. Des fissures et un affaissement du carrelage ont été constatés le 28 mai 2021, coïncidant avec des travaux importants réalisés par la SCI PIERRE JAUNE au niveau inférieur. En réponse, une assemblée générale a voté pour un diagnostic structurel, révélant des urgences dans l’appartement du second étage. Les propriétaires ont assigné la SCI et le syndicat des copropriétaires pour obtenir une expertise. Le tribunal a statué en faveur de la SCI PIERRE JAUNE, rendant les opérations d’expertise opposables à son assureur, la SA GENERALI IARD.

Propriétaires et Constatations Initiales

Monsieur [I] [Y] et Monsieur [C] [Y] sont propriétaires d’un appartement au deuxième étage d’un immeuble en copropriété situé à [Adresse 2] à [Localité 4], destiné à la location. Des lézardes, fissures et un affaissement du carrelage ont été constatés par un huissier de justice le 28 mai 2021, alors que la SCI PIERRE JAUNE, propriétaire du niveau inférieur, réalisait d’importants travaux, y compris la suppression de cloisons.

Diagnostic et Urgences

L’assemblée générale des copropriétaires a voté le 28 août 2022 pour la réalisation de travaux de diagnostic structurel du plancher du premier étage. Le diagnostic effectué par le BET EE2P a révélé des travaux d’urgence absolue dans l’appartement du second étage, incluant la dépose du faux plafond et la vérification de l’état des poutres porteuses, avec une interdiction d’occuper le logement avant une inspection à très court terme.

Assignation et Expertise

Monsieur [C] [Y] et Monsieur [I] [Y] ont assigné la SCI PIERRE JAUNE et le syndicat des copropriétaires à comparaître devant le tribunal judiciaire de Draguignan, demandant la désignation d’un expert et la communication de l’assurance de responsabilité. Par ordonnance de référé du 30 avril 2024, Madame [W] [F] a été désignée comme expert judiciaire.

Procédure contre l’Assureur

La SCI PIERRE JAUNE a ensuite assigné son assureur, la SA GENERALI IARD, en référé pour rendre les opérations d’expertise communes et opposables. L’assureur n’a pas constitué avocat ni présenté ses observations lors de l’assignation.

Décision du Tribunal

Le tribunal a statué sur le fond malgré l’absence de comparution de l’assureur, en se basant sur les articles du code de procédure civile. Il a déclaré que la SCI PIERRE JAUNE avait un motif légitime pour que les opérations expertales soient opposables à la SA GENERALI IARD. La SCI PIERRE JAUNE a conservé la charge des dépens de l’instance.

Conclusion de l’Ordonnance

Le tribunal a déclaré que l’ordonnance de référé du 30 avril 2024, désignant l’expert, était commune et opposable à la SA GENERALI IARD. L’expert devra poursuivre ses opérations de manière contradictoire avec l’assureur, et la mise en cause devra être régulièrement convoquée. Le surplus des demandes a été rejeté.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conséquences de l’absence de comparution du défendeur en référé selon le Code de procédure civile ?

L’article 472 du Code de procédure civile stipule que « lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne faisant droit à la demande que s’il l’estime recevable, régulière et bien fondée. »

Cela signifie que même en l’absence du défendeur, le juge peut rendre une décision sur le fond de l’affaire. Toutefois, il doit s’assurer que la demande est recevable et fondée sur des éléments juridiques solides.

Il est également précisé par l’article 473 que la décision rendue sera réputée contradictoire à l’égard des parties, ce qui implique que le défendeur, même s’il n’est pas présent, est considéré comme ayant eu la possibilité de défendre ses intérêts.

Ainsi, l’absence de comparution ne prive pas le juge de son pouvoir d’apprécier la demande, mais cela ne doit pas conduire à une décision arbitraire.

Quelles sont les conditions pour ordonner des mesures d’instruction avant tout procès selon le Code de procédure civile ?

L’article 145 du Code de procédure civile dispose que « s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé. »

Pour qu’une mesure d’instruction soit ordonnée, il faut donc :

1. **Un motif légitime** : Cela peut inclure la nécessité de préserver des preuves qui pourraient disparaître ou être altérées.

2. **Un lien avec un litige potentiel** : Il doit exister une perspective de procès dont le fondement est suffisamment déterminé.

3. **La demande d’un intéressé** : Toute partie ayant un intérêt à agir peut solliciter ces mesures.

Il est important de noter que l’article 145 ne requiert pas la preuve d’une reconnaissance de responsabilité, mais simplement la démonstration d’une perspective de litige.

Comment se déroule la mise en cause d’un tiers dans une procédure selon le Code de procédure civile ?

L’article 331 du Code de procédure civile précise que « un tiers peut être mis en cause aux fins de condamnation par toute partie qui est en droit d’agir contre lui à titre principal. Il peut également être mis en cause par la partie qui y a intérêt afin de lui rendre commun le jugement. Le tiers doit être appelé en temps utile pour faire valoir sa défense. »

Cela signifie que :

1. **Mise en cause par une partie** : Toute partie ayant un droit d’agir contre un tiers peut le faire, ce qui permet d’assurer que toutes les personnes concernées par le litige soient présentes.

2. **Intérêt à la mise en cause** : Une partie peut également mettre en cause un tiers si cela est nécessaire pour la bonne administration de la justice.

3. **Droit à la défense** : Le tiers mis en cause doit être informé en temps utile pour pouvoir préparer sa défense.

Cette procédure vise à garantir que le jugement soit complet et qu’il prenne en compte tous les éléments pertinents, y compris ceux qui concernent des tiers.

Quelles sont les implications de la charge des dépens dans une procédure de référé ?

La décision indique que la SCI PIERRE JAUNE conservera la charge des dépens de l’instance, ce qui signifie qu’elle est responsable des frais liés à la procédure.

En effet, selon le principe général du droit, la partie qui succombe dans ses prétentions est généralement condamnée aux dépens. Cela est en accord avec l’article 696 du Code de procédure civile, qui stipule que « les dépens comprennent les frais de justice exposés par les parties pour la défense de leurs droits. »

Dans le cas présent, la SCI PIERRE JAUNE a un intérêt direct à la demande, ce qui justifie qu’elle supporte les frais de la procédure.

Il est également précisé qu’il n’est pas possible de réserver les dépens dans l’attente d’une instance au fond, ce qui souligne l’importance de la clarté et de la rapidité dans la résolution des litiges en référé.

T R I B U N A L JUDICIAIRE
D E D R A G U I G N A N
____________

O R D O N N A N C E D E R É F É R É
CONSTRUCTION

RÉFÉRÉ n° : N° RG 24/08827 – N° Portalis DB3D-W-B7I-KO3V

MINUTE n° : 2025/ 64

DATE : 22 Janvier 2025

PRÉSIDENT : Monsieur Frédéric ROASCIO

GREFFIER : M. Alexandre JACQUOT

DEMANDERESSE

S.C.I. PIERRE JAUNE, dont le siège social est sis [Adresse 3]
représentée par Me Florent LADOUCE, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

DEFENDERESSE

S.A. GENERALI IARD, dont le siège social est sis [Adresse 1]
non comparante

DÉBATS : Après avoir entendu à l’audience du 11 Décembre 2024 les parties comparantes ou leurs conseils, l’ordonnance a été rendue ce jour par la mise à disposition de la décision au greffe.

copie exécutoire à
Me Florent LADOUCE

2 copies service des expertises
1 copie dossier

délivrées le :

Envoi par Comci à Me Florent LADOUCE

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Monsieur [I] [Y] et Monsieur [C] [Y] sont propriétaires d’un appartement au deuxième étage constituant le lot 18 d’un immeuble en copropriété situé [Adresse 2] à [Localité 4], ce bien étant destiné à la location selon les consorts [Y].

Des lézardes, fissures et affaissement du carrelage ont été constatés par un constat d’huissier de justice établi le 28 mai 2021 alors que la SCI PIERRE JAUNE, propriétaire du niveau inférieur, effectuait d’importants travaux comportant notamment la suppression de cloisons.

L’assemblée générale des copropriétaires a voté le 28 août 2022 la réalisation de travaux de diagnostic structurel du plancher du premier étage.

Le diagnostic réalisé par le BET EE2P fait notamment état de travaux d’urgence absolue dans l’appartement du second étage comprenant la dépose du faux plafond, la vérification de l’état des poutres porteuses du plancher haut du R+1, la mise en sécurité si nécessaire et l’interdiction d’occuper le logement avant inspection des poutres à très court terme (3 à 6 mois).

En cet état et autorisés à cette fin par ordonnance présidentielle du 17 avril 2024, Monsieur [C] [Y] et Monsieur [I] [Y] ont fait assigner par actes du 18 avril 2024, la SCI PIERRE JAUNE et le syndicat des copropriétaires de l’immeuble situé [Adresse 2] à [Localité 4], pris en la personne de son syndic la société FONCIA, à comparaître devant le président du tribunal judiciaire de Draguignan statuant en référé aux fins principales d’obtenir la désignation d’un expert et la communication de l’assurance de responsabilité de cette dernière sous astreinte.

Par ordonnance de référé du 30 avril 2024 (RG 24/03037, minute n° 2024/238), Madame [W] [F] a été désignée en qualité d’expert judiciaire.

Par acte de commissaire de justice du 25 novembre 2024, auquel il convient de renvoyer pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens, la SCI PIERRE JAUNE a fait assigner son assureur la SA GENERALI IARD, à comparaître en référé devant le président du tribunal judiciaire de Draguignan, afin de lui rendre les opérations d’expertise communes et opposables, outre de voir réserver dépens.

Sur l’assignation remise à domicile, la SA GENERALI IARD, ès-qualités d’assureur de la SCI PIERRE JAUNE, n’a pas constitué avocat ni présenté ses observations.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Aux termes de l’article 472 du code de procédure civile, applicable à la procédure de référé, « lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne faisant droit à la demande que s’il l’estime recevable, régulière et bien fondée. »

La présente décision, rendue en premier ressort, sera réputée contradictoire à l’égard des parties conformément aux dispositions de l’article 473 du code de procédure civile.

Il sera rappelé que les demandes de « déclarer », de « dire et juger », de « constater » et de « prendre acte » ne constituent pas des revendications au sens du code de procédure civile en sorte que le juge n’a pas à statuer sur les demandes formulées en ce sens.

Suivant l’article 145 du code de procédure civile, « s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé. »

L’article 331 du code de procédure civile dispose : « un tiers peut être mis en cause aux fins de condamnation par toute partie qui est en droit d’agir contre lui à titre principal. Il peut également être mis en cause par la partie qui y a intérêt afin de lui rendre commun le jugement. Le tiers doit être appelé en temps utile pour faire valoir sa défense. »

La SCI PIERRE JAUNE verse aux débats une attestation d’assurance établie en date du 19 avril 2024 par la société COURTAGE HAUT VAR, déclarant que : « la SCI PIERRE JAUNE est titulaire, depuis le 25 mars 2021, d’un contrat d’assurance GENERALI PROTECTION IMMEUBLE n°AT130725. […] »

L’article 145 précité n’implique pas de prouver une reconnaissance de responsabilité d’une partie, il suffit pour le demandeur de prouver la seule perspective d’un procès ultérieur dont le fondement paraît suffisamment déterminé et qui ne serait pas manifestement voué à l’échec.

La société requérante justifie en conséquence d’un motif légitime à l’opposabilité des opérations expertales avant tout procès à la SA GENERALI IARD ès-qualités d’assureur de la SCI PIERRE JAUNE.

Dès lors, il sera fait droit à la demande de la SCI PIERRE JAUNE conformément à l’article 331 du code de procédure civile.

La SCI PIERRE JAUNE conservera la charge des dépens de l’instance dans la mesure où elle a intérêt à la demande. Il n’est pas possible de réserver les dépens dans l’attente d’une instance au fond dont le principe n’est pas certain.

PAR CES MOTIFS

Nous, Juge des référés, statuant après débats en audience publique par ordonnance mise à la disposition des parties au greffe, réputée contradictoire, exécutoire de droit et en premier ressort,

DECLARONS communes et opposables à la SA GENERALI IARD ès-qualités d’assureur de la SCI PIERRE JAUNE, l’ordonnance de référé du 30 avril 2024 (RG 24/03037, minute n°2024/238), ayant désigné Madame [W] [F] en qualité d’expert ;

DISONS que l’expert commis devra poursuivre ses opérations contradictoirement à l’égard de la SA GENERALI IARD ès-qualités d’assureur de la SCI PIERRE JAUNE ;

DISONS que la mise en cause devra être régulièrement convoquée par l’expert et que son rapport lui sera opposable ;

DISONS que, dans l’hypothèse où la présente ordonnance est portée à la connaissance de l’expert après dépôt de son rapport, ces dispositions seront caduques ;

DISONS que la SCI PIERRE JAUNE conservera la charge des dépens de la présente instance ;

REJETONS le surplus des demandes.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe au jour, mois et an susdits.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


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