Contrôle des mesures de soins psychiatriques : évaluation et maintien de l’hospitalisation complète

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Contrôle des mesures de soins psychiatriques : évaluation et maintien de l’hospitalisation complète

L’Essentiel : Le 31 janvier 2025, le tribunal judiciaire de Strasbourg a examiné la situation de M. [W] [N], hospitalisé aux Hôpitaux Universitaires de [Localité 4]. Admis le 25 avril 2023 pour des troubles du comportement, il a alterné entre hospitalisation complète et soins moins restrictifs. Malgré ses doutes sur la nécessité de son hospitalisation, des certificats médicaux récents ont confirmé des comportements préoccupants. Le tribunal a décidé de maintenir l’hospitalisation complète, soulignant l’importance de la continuité des soins. Les dépens seront à la charge du Trésor Public, et la décision est susceptible d’appel dans un délai de 10 jours.

Contexte de l’affaire

Le 31 janvier 2025, le tribunal judiciaire de Strasbourg a examiné la situation de M. [W] [N], né le 24 mai 1978, actuellement hospitalisé aux Hôpitaux Universitaires de [Localité 4]. Cette procédure a été initiée par le directeur de l’établissement, en conformité avec les articles du Code de la Santé Publique relatifs à l’hospitalisation complète et aux soins psychiatriques.

Historique médical

M. [N] a été admis en hospitalisation complète le 25 avril 2023, suite à des troubles du comportement justifiant une prise en charge psychiatrique. Depuis cette admission, il a alterné entre des périodes de soins en hospitalisation complète et des programmes de soins moins restrictifs, avec des certificats médicaux mensuels confirmant la nécessité de soins psychiatriques contraints.

Décisions judiciaires antérieures

Le juge des libertés et de la détention a, par décision du 2 février 2024, autorisé la poursuite des soins sous forme d’hospitalisation complète. Cependant, le 23 janvier 2025, le directeur de l’établissement a décidé de réintégrer M. [N] en hospitalisation complète, en raison d’un certificat médical indiquant que sa condition nécessitait cette mesure.

État de santé et témoignages

Lors de l’audience, M. [N] a exprimé des doutes quant à la justification de son hospitalisation, mentionnant des problèmes de communication avec son psychiatre et son souhait d’être suivi par un autre professionnel. Malgré cela, des avis médicaux récents ont noté des comportements préoccupants, tels que des idées délirantes et un refus de se présenter à ses rendez-vous médicaux.

Conclusion du tribunal

Le tribunal a conclu que l’état de santé de M. [N] nécessitait la poursuite de l’hospitalisation complète pour garantir la continuité des soins adaptés à sa condition. Par conséquent, il a ordonné le maintien de cette mesure, tout en précisant que les dépens seraient à la charge du Trésor Public. La décision est susceptible d’appel dans un délai de 10 jours.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions de maintien de l’hospitalisation complète selon le Code de la Santé Publique ?

L’article L.3211-12-1 I du Code de la Santé Publique précise que l’hospitalisation complète d’un patient ne peut se poursuivre sans que le magistrat du siège du tribunal judiciaire ait statué sur cette mesure.

Cette décision doit intervenir :

1° Avant l’expiration d’un délai de douze jours à compter de l’admission prononcée en application des chapitres II ou III du présent titre ou de l’article L. 3214-3 ;

2° Avant l’expiration d’un délai de douze jours à compter de la décision modifiant la forme de la prise en charge du patient ;

3° Avant l’expiration d’un délai de six mois à compter de toute décision judiciaire prononçant l’hospitalisation.

Ces délais garantissent que le patient bénéficie d’un contrôle judiciaire régulier sur la mesure de soins qui le concerne, assurant ainsi la protection de ses droits.

Comment se déroule la procédure de contrôle des mesures de soins psychiatriques ?

L’article L.3216-1 du Code de la Santé Publique stipule que la régularité des décisions administratives prises en application des chapitres II à IV ne peut être contestée que devant le juge judiciaire.

Le juge connaît des contestations dans le cadre des instances introduites en application des articles L.3211-12 et L.3211-12-1.

Il est important de noter que l’irrégularité affectant une décision administrative n’entraîne la mainlevée de la mesure que si elle a causé une atteinte aux droits de la personne concernée.

Ainsi, la procédure doit être menée conformément à la loi pour garantir la protection des droits du patient.

Quel est le rôle du juge dans l’évaluation de la mesure de soins psychiatriques ?

Le juge qui se prononce sur le maintien de l’hospitalisation complète doit apprécier le bien-fondé de la mesure en se basant sur les certificats médicaux fournis.

Il ne peut substituer sa propre appréciation à celle des médecins concernant l’existence des troubles psychiques ou la justification thérapeutique des traitements.

Cette évaluation est strictement médicale et doit être fondée sur des éléments objectifs fournis par des professionnels de santé.

Quelles sont les conséquences d’une décision de maintien de l’hospitalisation complète ?

La décision de maintien de l’hospitalisation complète, comme celle rendue dans l’affaire de M. [W] [N], a pour effet de prolonger la mesure de soins psychiatriques contraints.

Cela permet de garantir la protection du patient et d’assurer une évolution favorable de son état de santé.

Il est également précisé que cette décision est susceptible d’appel, conformément aux articles R.3211-18 et suivants du Code de la Santé Publique, permettant ainsi un contrôle judiciaire supplémentaire sur la mesure.

Le délai d’appel est de 10 jours et n’est pas suspensif, sauf si le ministère public en fait la demande.

Tribunal judiciaire
de Strasbourg
————–
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Localité 4]
————–

Tél . [XXXXXXXX01]

PROCÉDURE DE CONTRÔLE SYSTÉMATIQUE
DES MESURES DE SOINS
PSYCHIATRIQUES

Juge des Libertés et de la Détention

ORDONNANCE

RG JLD n°N° RG 25/00132 – N° Portalis DB2E-W-B7J-NKID

Le 31 Janvier 2025

Nous, Gaëlle TAILLE, vice-présidente chargée des fonctions de juge des libertés et de la détention au tribunal judiciaire de STRASBOURG, assistée de Benjamin ELWART, Greffier,

Statuant en premier ressort en qualité de magistrat du siège, après débats en audience publique ;

Vu les dispositions des articles L.3211-12, L.3211-12-1, L.3211-12-2, R.3211-12, R.3211-29 et R.3211-32 du Code de la Santé Publique et le dossier de la procédure ;

Vu la requête en date du 27 Janvier 2025 de M.LE DIRECTEUR DES HOPITAUX UNIVERSITAIRES DE [Localité 4] concernant M. [W] [N], né le 24 Mai 1978 demeurant [Adresse 2] actuellement en hospitalisation complète à Hopitaux Universitaires de [Localité 4] ;

Vu l’ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Strasbourg en date du 2 février 2024 ;

Vu le certificat médical en date du 22 janvier 2024 mettant en place un programme de soins psychiatriques au bénéfice de M. [W] [N] ;

Vu la décision relative à la modification de la forme de prise en charge prise par M.LE DIRECTEUR DES HOPITAUX UNIVERSITAIRES DE [Localité 4] en date du 22 janvier 2025 ;

Vu le certificat médical en date du 23 janvier 2025 sollicitant la réintégration en hospitalisation complète de M. [W] [N] ;

Vu la décision de réintégration en soins psychiatriques sous la forme d’une hospitalisation complète prise par M.LE DIRECTEUR DES HOPITAUX UNIVERSITAIRES DE [Localité 4] en date du 23 janvier 2025 ;

Vu le certificat médical mensuel du 23 décembre 2024 et vu le certificat médical mensuel du 23 janvier 2025 ainsi que l’avis motivé ;

Vu l’avis du procureur de la République aux termes duquel le Ministère public s’en rapporte à l’appréciation du tribunal ;

M. [W] [N] régulièrement convoqué selon convocation avec récépissé, présent, assisté de Me Véronique SCHALCK, avocate de permanence ;

MOTIFS

L’article L. 3211-12-1 I du code de la santé publique dispose que « l’hospitalisation complète d’un patient ne peut se poursuivre sans que le magistrat du siège du tribunal judiciaire, préalablement saisi par le directeur de l’établissement (…), ait statué sur cette mesure :
1° Avant l’expiration d’un délai de douze jours à compter de l’admission prononcée en application des chapitres II ou III du présent titre ou de l’article L. 3214-3 ;
2° Avant l’expiration d’un délai de douze jours à compter de la décision modifiant la forme de la prise en charge du patient et procédant à son hospitalisation complète en application, respectivement, du dernier alinéa de l’article L. 3212-4 ou du III de l’article L. 3213-3 ;
3° Avant l’expiration d’un délai de six mois à compter soit de toute décision judiciaire prononçant l’hospitalisation en application de l’article 706-135 du code de procédure pénale, soit de toute décision prise par le juge des libertés et de la détention en application du présent I ou des articles L. 3211-12, L. 3213-3, L. 3213-8 ou L. 3213-9-1 du présent code, lorsque le patient a été maintenu en hospitalisation complète de manière continue depuis cette décision.

Sur la procédure

L’article L.3216-1 du code de la santé publique dispose que « la régularité des décisions administratives prises en application des chapitres II à IV du présent titre ne peut être contestée que devant le juge judiciaire. Le juge connaît des contestations mentionnées au premier alinéa du présent article dans le cadre des instances introduites en application des articles L.3211-12 et L.3211-12-1. Dans ce cas, l’irrégularité affectant une décision administrative mentionnée au premier alinéa du présent article n’entraîne la mainlevée de la mesure que s’il en est résulté une atteinte aux droits de la personne qui en faisait l’objet ».

En l’espèce, la procédure a été menée conformément à la loi et est régulière en la forme.

Sur le bien fondé de la mesure

Le juge qui se prononce sur le maintien de l’hospitalisation complète doit apprécier le bien fondé de la mesure au regard des certificats médicaux qui lui sont communiqués et ne peut substituer, à l’évaluation des médecins, sa propre appréciation sur l’existence des troubles psychiques, la justification thérapeutique des traitements ou la capacité du patient à consentir aux soins, ces différents éléments relevant d’une appréciation strictement médicale.

Si SDDE
En l’espèce, il ressort des éléments joints à la saisine et des pièces du dossier que le 25 avril 2023, M. [N] a été admis au bénéfice des soins psychiatriques contraints sous la forme d’une hospitalisation complète aux Hôpitaux Universitaires de [Localité 4] à la demande du directeur d’établissement, suite à un certificat médical constatant des troubles du comportement justifiant une admission en soins psychiatriquesau regard d’un péril imminent (article L. 3212-1 II 2° du code de la santé publique).

Depuis lors, M. [N] a alterné les périodes au cours desquelles il a pu bénéficier d’un programme de soins et celles où il a été réintégré en hospitalisation complète.

Par décision du 2 février 2024, le juge des libertés et de la détention, statuant dans le cadre du contrôle obligatoire des mesures de soins à l’issue d’une période de douze jours, a déclaré que les soins pouvaient se poursuivre sous la forme d’une hospitalisation complète.

Par décision du directeur d’établissement du 23 février 2024, M. [N] a été admis à un programme de soins au vu d’un certificat médical du même jour, duquel il ressortait que la mesure de soins psychiatriques sans consentement était toujours justifiée, mais que l’évolution de l’état de santé du patient permettait sa prise en charge sous une autre forme que l’hospitalisation complète.

Depuis lors, les certificats médicaux mensuels établis des mois mars 2024 à décembre 2024 ont tous conclu à la nécessité de la poursuite des soins psychiatriques contraints, mais pouvant prendre une forme autre que l’hospitalisation complète.

Par décision du directeur d’établissement en date du 23 janvier 2024, a décidé de la réintégration du patienten hospitalisation complète, au vu d’un certificat médical du même jour demandant la modification de la forme de la prise en charge du patient.

A l’audience, M. [N] indique qu’il a effectivement réintégré l’hôpital la veille. Il considère que son hospitalisation n’est pas justifiée. Il explique qu’il était “grippé” et n’a pas pu se rendre au rendez-vous avec le psychiatre mais qu’il avait prévenu l’infirmier par message qu’il ne pourrait pas venir. Il indique par ailleurs qu’il n’a pas de relation de confiance avec son médecin psychiatre le Docteur [G] et qu’il souhaiterait pouvoir être suivi par un autre psychiatre. Il reconnait qu’il souffre de schizophrénie mais il considère qu’il va bien et peut sortir d’hospitalisation. Il fait également part de son inquiétude à l’égard de son chien resté seul à son domicile.

Il résulte de l’avis motivé du 28 janvier 2025 que M. [N] ne se présentait plus à ses rendez-vous médicaux ni à son suivi auprès du CMP. Lors des derniers entetiens, il se montrait revendicateur, se sentait persécuté par son suivi psychiatrique dont il ne percevait pas l’intérêt. Le médecin psychiatre notait lors des derniers entretiens des idées délirantes avec de raisonnements paralogiques et des troubles des cognitions sociales.

Il résulte des pièces du dossier, en particulier du certificat médical sollicitant la modification de la prise en charge et de l’avis motivé visé par l’article L. 3211-12-1 II du code de la santé publique que l’état de santé du patient nécessite une poursuite des soins contraints sous la forme d’une hospitalisation complète.

Il est également établi que les conditions sont réunies pour que les soins psychiatriques sans consentement se poursuivent sous le régime de l’hospitalisation complète, cette mesure étant la seule à même de permettre la poursuite de soins adaptés à l’état du patient, de consolider son adhésion aux soins, de garantir sa protection et d’assurer une évolution suffisamment solide et durable de son état.

PAR CES MOTIFS

Statuant en audience publique, par ordonnance réputée contradictoire et en premier ressort,

ORDONNONS le maintien de l’hospitalisation complète de M. [W] [N]
né le 24 Mai 1978 à ;

DISONS que les dépens seront laissés à la charge du Trésor Public.

RAPPELONS que cette décision est susceptible d’appel devant le Premier Président de la Cour d’appel dans un délai de 10 jours à compter de la présente notification, par déclaration d’appel motivée transmise par tout moyen au Greffe de la Cour d’Appel de Colmar (article R.3211-18 et suivants du Code de la santé publique).

Le délai d’appel et l’appel ne sont pas suspensifs, à l’exception de l’appel formé par le ministère public qui peut être déclaré suspensif par le premier président de la cour d’appel ou son délégué conformément aux dispositions de l’article R.3211-20 du Code de la santé publique.

Le Greffier
Le Président

copie transmise par mail le 31 Janvier 2025 à :
– M. [W] [N], par remise de copie contre récépissé par l’intermédiaire de l’établissement hospitalier,
– Ministère Public,
– Madame/Monsieur le Directeur de/du/des Hopitaux Universitaires de [Localité 4]
– Me Véronique SCHALCK, Conseil de [W] [N]
Le Greffier


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